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NOTICE RAISONNE'E SUR DIFFERENTES COUTUMES.

Roi. Il y a bien des Ruiffeaux qui n'ont pas cette largeur, & aufquels même, à moins de quelque raifon particuliere, on ne la donne pas dans les Curemens qui doivent se faire par le miniftere des Officiers d'Eaux & Forêts, dont la régle ordinaire & la plus fage, pour éviter aux Communautés des frais inutiles, doit être de faire curer ce qu'on appelle les terres mortes; c'est-à-dire, ce qui a nature de vaze, sans prendre fur le terrein franc.

pour

Comme pour l'intérêt de la confervation du poiffon, il eft défendu, comme on le voit dans les Coûtumes du Hainault & du Bourbonnois, de faire rouïr chanvre ni lin en Eau publique, la Coûtume de Normandie a fagement ordonné que l'eau qui auroit été tirée les foffes à rouïr, ne pourroit retourner en Riviere; mais auroit fon écoulement d'ailleurs. L'Ordonnance de 1669 eft entrée dans les mêmes vues; & il y a eu nombre de Réglemens faits dans le même efprit & dans le même objet.

A l'égard de la Pêche, felon la Coûtume du Nivernois & celle du Duché de Bourgogne, l'ufage n'en donne point droit s'il n'y a titre ou payement de redevance; parce que la redevance payée & reçue eft une preuve du confentement de celui de qui il dépendoit de s'y oppofer. A quoi fe peut appliquer la maxime générale, volenti non fit injuria.

Selon la même Coûtume du Nivernois, il faut à un Seigneur titre pour tenir Riviere en garenne ou défense; moyennant quoi il ne lui fuffit pas qu'il y ait pêché, s'il n'a preuve qu'il ait empêché d'y pêcher, cette preuve établissant qu'il y a eu une action de droit de laquelle a réfulté, ou un Jugement qui devient titre, ou un désistement volontaire de la Partie contendante.

mes,

Comme les fruits de la Pêche, à la différence de la Chaffe, font partie du Domaine utile, il n'eft permis à perfonne de pêcher fur autrui fans fa permiffion; & il ne faut pas s'étonner fi toutes les Coûtuentr'autres celles du Nivernois, de Vitry, de Troyes, du Maine, d'Anjou, de Bordeaux, de Bretagne, d'Etampes, font uniformes à condamner, dans ces cas-là, les contrevenans à l'amende & reftitution du poiffon, & à la confifcation des engins de Pêche, dans les cas de flagrant-délit ; & fi pour la troifiéme fois, fur tout pour Pêche de nuit, elles s'accordent à punir comme pour vol. L'Ordon

nance

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nance de 1669 a prononcé fur les mêmes principes; mais elle a fait une Loi générale & uniforme, au milieu des difpofitions que nous trouvons varier dans toutes les Coûtumes, fur l'échantillon du Poiffon permis de pêcher, & fur les différentes efpeces de filets prohibés. Sur quoi nous pouvons renvoyer à la réflexion que nous avons faite dans notre Ouvrage, à l'occafion des engins défendus; fur le principe que toute nouvelle invention d'engins, même non dénommés dans l'Ordonnance, eft dans le cas de profcription, dès qu'elle tendra réellement à la deftruction de l'efpece, tant en matière de Chaffe que de Pêche. Le détail dans lequel nous venons d'entrer, fait preuve de ce que nous avons dit au commencement de ce Mémoire, fur la combinaison de l'Ordonnance de 1669 avec les différentes Coûtumes. La fuite fera une confirmation de cette vérité.

BOIS ET FORESTS, COUPES ET DELITS.

Les Bois & Forêts ont bien des objets différens de détails. Les Coûtumes n'ont pas défini ou déterminé uniformement ce qui conftitue futaye. Selon celle de Troyes, arbre portant gland. & paiffon, en lieu où n'a pas été coupé de mémoire d'homme, eft arbre de futaye. Selon celle de Blois, quand il a paffé trente ans fans être coupé; & felon celle du Grand-Perche, quand il a paffé trois coupes ce qui revient à-peu-près au même, en fuppofant la coupe des taillis à dix ans. Sur quoi les anciennes Coûtumes n'étoient pas uniformes, les unes en ayant fixé le terme à cinq ans, d'autres à fept.. Nous ne trouvons point fur cela de définition précise dans nos Órdonnances, dont quelques-unes difent bien que la futaye ne fe coupera qu'à cent vingt ans, mais non quand un arbre commence à devenir arbre de futaye, y ayant une dénomination & un état milieu entre le taillis & la futaye. Il femble qu'un arbre qui a paffé l'âge.or dinaire de l'homme, doit être regardé comme arbre de futaye.

Selon la Coûtume de Normandie, la futaye même vendue, tant qu'elle n'est pas coupée, eft fujette à retrait; c'est-à-dire, qu'elle est regardée comme ayant nature de fond & d'immeuble. La Coûtume de Sens n'y admet pas le droit de retrait...

La Jurifprudence des Eaux & Forêts eft conforme à la Coûtumes
Tome II
PPR

NOTICE RAISON NE'E SUR DIFFERENTES COUTUMES.

de Normandie. C'eft fur ce principe qu'elle ne laisse aucune jouissance perfonnelle de la futaye, à qui n'a que la qualité & les droits d'ufufruitier, tels que les Eccléfiaftiques & les Engagiftes.

Plufieurs Coûtumes ont prononcé fur les terres délaissées aux environ des Forêts. Celles de Bourgogne & de Franche-Comté les adjugent au Haut-Jufticier poffeffeur de la Forêt, s'il n'y a foffé, borne ou renfeignement contraires. C'eft ce principe qui a fondé.beaucoup de réunions faites aux Forêts appartenant au Roi, ainsi que les Coû tume de Sens, Troyes & Chaumont, qui ordonnent que les accrues fuivent la condition du Bois. L'expérience apprend que les bois, foit par racine, foit par chute de graine, gagnent toujours autour d'eux; & c'eft une raifon pour les Riverains des Forêts du Roi, de défirer d'être foffoyés pour éviter l'application des Loix fur les réunions. On voit par cet article, la vérité de ce que nous avons dit dans le cours de notre Ouvrage, que le Roi ne s'étoit appliqué pour fes Forêts que ce que les Coûtumes donnent au Seigneur & au Propriétaire.

Selon la Coûtume de Ponthieu, les tiercemens & doublemens ne font point reçus après la chandelle éteinte. Il y a fur cette partie de formalité d'adjudication, des ufages locaux différens. Dans quelques endroits, c'est à l'extinction de la flamme; dans d'autres, c'est à celle du feu, que les Bois fe vendent & s'adjugent. Cela eft fort égal ce font de ces objets de Police fur lefquels l'uniformité est chose fort indifférente à établir.

La Coûtume du Boulonnois vouloit qu'il fût donné remplage au Marchand, quand il n'avoit pas difertement acheté tant plein que vuide. Cela eft profcrit par nos Loix Foreftieres, & le changement qu'elles ont fait fur cela eft très-sensé, ainsi que nous l'avons obfervé en la Section des Ventes des Bois.

Selon celle d'Amiens, l'abattage devoit finir au premier Mai, & la vuide à la Magdelaine enfuivant. Il y a fur cela des régles différentes pour les Bois du Roi; & dans l'ordre particulier, chacun peut fe régler différemment & relativement à l'intérêt de la conservation de fon Bois. On vendra quelquefois plus avantageusement, en donnant plus de tems au Marchand pour là vuide de fes marchandises; mais on ne laiffera point prolonger l'abattage par-delà le tems du repos de la féve. Selon cette même Coûtume, il y avoit confiscation du

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Bois, & cependant le Marchand étoit tenu au payement du total du prix convenu. Ce qui étoit jufte, puifque fans cela le contrevenant n'auroit pas été puni. La même punition a lieu dans les Bois du Roi.

Les anciennes Coûtumes ont prefque toutes fixé les amendes pour prises & délits de Bois, à des fommes qui feroient modiques aujour d'hui : C'eft pourquoi en ce point, ce font les Ordonnances Foref tieres qui font & doivent faire Loi, ainfi que nous l'avons obfervé dans notre Ouvrage. Et les Particuliers feroient bien mal avifés pour leur propre intérêt, s'ils ne profitoient pas de la liberté que les Or donnances leur donnent de faire prononcer mêmes peines que le Roi

dans fes Bois.

La Coûtume de Bretagne étoit même bien finguliere pour ce qui regardoit le Bois pris, en ne condamnant à des peines que pour le bois fcié, ou pris nuitamment, ou pour arbres fruitiers, ou pour grands arbres fervant à la décoration des maifons. Elle vouloit auffi que l'amende se réglât fur la qualité des perfonnes. C'étoit une façon fort dangereuse d'affurer l'impunité pour les menus délits. Ces condefcendances n'ont plus & ne doivent plus avoir lieu vis-à-vis nos Ordonnances Foreftieres.

La Coûtume de Bordeaux avoit pourvu fort fagement à l'abus des Ouvriers en bois legers, comme les Faifeurs de Paniers, en ordonnant que ceux qui n'avoient Bois à eux, feroient punis par amende & prifon, s'ils ne déclaroient d'où provenoit le bois qu'ils ouvroient. Nous avons, fur ces mêmes objets, des régles correfpondantes, telles que les étiquettes que les Marchands font obligés de donner, & des Réglemens particuliers dirigés fur le même efprit de cette Coûtume. C'est ce qu'on peut voir en notre Commentaire dans la Section de la Police.

Selon la Coûtume du Pays de Labour, la peine contre ceux qui même malicieusement, allumoient feu dans les Bruyeres, n'étoit que d'indemnifer la Paroiffe, & de payer dix livres d'amende au Roi. Le Roi a prononcé, par une Déclaration qu'on trouve dans notre Ouvrage, des peines beaucoup plus féveres, & cette févérité est un effet de fa juftice & de fa bonté.

NOTICE RAISON NE'E SUR DIFFERENTES COUTUMES.

CE QUI, EN MATIERE D'EAUX ET FORESTS, eft Meublé ou non.

Comme les Loix difpofent bien différemment de ce qui tient nature de meuble ou immeuble, elles ont réglé ce qui est susceptible de l'une ou l'autre qualité.

Selon les Coûtumes, Moulin bâti en Maifon, lequel ne fe peut défaire fans défaffembler, eft tenu pour immeuble; mais s'il est en batteau, il est sensé meuble, felon les Coûtumes de Montargis, Orleans, Nivernois, Bourbonnois, parce qu'ils peuvent être tranfportés d'un lieu à autre. La Coûtume de Berry prononce cependant le contraire. Celle de Tours met une exception, par rapport aux Moulins en batteaux; c'eft quand entr'autre il eft banal de droit. Et cela paroît jufte; parce que, bien que de fa nature il foit muable, cependant il eft alors fous la loi d'une fervitude qui empêche son déplacement. Les queftions qui peuvent naître à l'occafion de cet Article, ne pouvant que rarement tomber dans la compétence des Tribunaux d'Eaux & Forêts, nous ne nous y arrêterons pas davantage.

Le Poiffon en Etang, avant la levée de la bonde pour mettre l'Etang en coule, est réputé immeuble, & faire partie d'héritage, selon les Coûtumes de Paris, Melun, Orleans, Calais, Normandie, Chaulny. Mais il eft meuble, & prend nature de fruits, après la bonde levée; parce qu'alors il représente la futaye abattue, qui, ainfi que nous l'avons dit, devient meuble dès qu'elle n'eft plus fur pied. C'est par une fuite du même principe, que lorsqu'il eft en Boutique ou en réservoir, il est meuble, felon les mêmes Coûtumes, & celles de Châlons, de Laon & du Nivernois.

Il y a par rapport aux bois taillis des régles différentes de celles qui regardent la futaye; parce que les taillis fe comptent par feuilles, qui chaque année accroiffent au profit du Propriétaire. "Aussi s'il eft question de partage après diffolution de mariage par mort, les Coûtumes de Laon & Châlons veulent que ce partage fe faffe dans la proportion du tems qu'a duré le mariage. Cela ne met pourtant pas le taillis précisément dans le cas d'être immeuble tant qu'il est fur pied; & les Coûtumes de Laon & Sedan le tiennent ble dès qu'il a atteint l'âge de fa révolution ordinaire; parce que tou

pour meu

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