Page images
PDF
EPUB
[merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][ocr errors][ocr errors][merged small][merged small]

Commune. Sentier. Droit de passage.

[ocr errors]

-

15 Avril 1890.

Classement comme chemin
Possession.

rural. Effet de l'arrêté de reconnaissance. Sol. Trouble. Action en complainte.

L'arrêté administratif qui reconnait comme chemin rural un sentier sur lequel la commune ne réclame qu'un droit de passage pour ses habitants, n'en vaut pas moins, pour la commune, prise de possession du sol et implique virtuellement, de sa part, la prétention de le comprendre dans son domaine public.

En conséquence, l'action en complainte de celui qui se déclare propriétaire et possesseur du sol doit être examinée; le jugement qui l'écarte, en se bornant à constater que la commune était déjà en possession du droit de passage et en concluant que l'arrêté de reconnaissance n'a pas modifié la situation des parties en cause, manque de base légale et viole l'article 5 de la loi du 2 août 1881.

Vve DUCHESNE C. COMMUNE DE BOIS - ARNAULT.

LA COUR: Sur le second moyen du pourvoi tiré de la violation des articles 2229 et 637 C. civ. et des dispositions de la loi du 20 août 1881, en ce que le jugement attaqué admet qu'il n'y a pas trouble à la possession du propriétaire du fonds servant dans le fait de la commune qui, par l'arrêté de classement, deviendrait propriétaire ou possesseur du sol d'un chemin, là où

TONE XVII. - JANVIER 1891.

V. — 1

elle avait auparavant tout au plus un droit de passage sur le terrain d'autrui; Vu l'article 5 de la loi du 20 août 1881;

Attendu que, pour justifier son action en complainte, la veuve Duchesne alléguait notamment qu'étant propriétaire du fonds sur lequel la commune de Bois-Arnault prétendait exercer un droit de passage, l'arrêté par lequel la sente litigieuse avait été reconnue comme chemin rural, constituait une entreprise de la commune sur la propriété du sol dudit fonds, et, par suite, un trouble à la possession qu'elle en avait; que, cependant, le Tribunal d'Évreux a rejeté la demande de la veuve Duchesne, en se bornant à constater les circonstances d'où résulterait, selon lui, la possession qu'aurait la commune du droit, pour ses habitants, de passer à pied sur le fonds de la demanderesse; que, quant au grief ci-dessus précisé, il l'a écarté par le seul motif que l'arrêté administratif qui a déclaré chemin rural la sente litigieuse n'aurait en rien modifié la situation des parties en cause.

Mais, attendu que l'arrêté dont s'agit impliquait virtuellement, de la part de la commune, la prétention de comprendre le sol même du chemin dans le domaine public municipal, et qu'en vertu de l'article 5 de la loi du 20 août 1881 cet arrêté valait prise de possession dudit sol par la commune; qu'un tel acte constituait donc un trouble dont la veuve Duchesne était autorisée à se plaindre, s'il était vrai, comme elle le soutenait, qu'elle eût été jusque-là en possession du sol servant d'assiette au passage des habitants.

D'où il suit que l'examen des prétentions de la demanderesse étant resté incomplet, le jugement attaqué manque de base légale, et, par suite, a violė l'article de loi ci-dessus visé.

Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens du pourvoi;

Casse le jugement du Tribunal civil d'Évreux du 30 décembre 1887, et renvoie devant le Tribunal civil de Louviers.

MM. Merville, président; Faure-Biguet, rapporteur; Desjardins, avocat général; Mes Mayer et Gosset, avocats.

Note. Avant la loi du 20 août 1881, les états de chemins ruraux, homologués par les préfets, n'étaient que des documents d'ordre administratif, sans valeur pour les tribunaux. Ces chemins étaient prescriptibles; la propriété et la possession en pouvaient donc toujours être contestées. La loi de 1881 a eu pour but d'écarter des communes ce danger constant de dépossession, en étendant à une partie du domaine communal, que sa destination rattachait, en fait, au domaine public, la protection que des lois antérieures assuraient déjà aux chemins vicinaux. Elle n'a statué, toutefois, que pour l'avenir; les droits acquis ont été respectés.

Aujourd'hui, les arrêtés de reconnaissance de chemins ruraux, pris, après enquête, par les commissions départementales, rendent ces chemins imprescriptibles, en ce sens qu'ils ne peuvent plus être l'objet d'une possession utile pour en prescrire la propriété contre les communes; mais la notification régulière de ces arrêtés aux riverains dans les formes prescrites par la loi n'a que la valeur d'un acte de possession, qui ne peut être détruit par des actes contraires postérieurs à · cette notification, mais qui n'infirme pas les actes antérieurs.

La possession de la commune, affirmée par l'arrêté de reconnaissance, peut donc être contestée pendant l'année de la notification de cet arrêté, comme le porte expressément l'article 5 de la loi de 1881.

La propriété du sol du chemin peut, d'ailleurs, être revendiquée, tant que la possession de la commune n'a pas assez duré pour lui permettre de se prévaloir, à défaut de titre, de la prescription trentenaire.

N° 2.

COUR DE CASSATION (Ch. req.). 5 Novembre 1890.

[ocr errors]

Signification de jugement. Copie de l'exploit. -Date incomplète. Omission du jour. Nullité.

Est nul et de nul effet pour faire courir le délai d'appel l'exploit de signification d'un jugement, quand la copie ne porte comme date que le mois et l'année, sans indiquer le jour, et que rien dans les autres énonciations de l'acte ne permet de suppléer à cette omission.

GIGAULT DE MARCONNAY C. DAME DU VERGER.

LA COUR: Sur le moyen unique du pourvoi tiré de la violation, par fausse application de l'art. 61, ainsi que de l'art. 443 C. pr. civ. et violation de l'art. 1030, du même Code:

Attendu que, pour produire des effets légaux, toute signification par ministère d'huissier doit être régulière; que, notamment, elle doit indiquer la date à laquelle elle a lieu; que, si cette date peut résulter des énonciations directes contenues dans ledit acte, sans qu'il soit rigoureusement nécessaire que tous les éléments se trouvent assemblés sur un même point, il n'en est pas moins indispensable que ces énonciations soient de nature à constituer une date complète, c'est-à-dire faisant connaître, en réparant au besoin les erreurs et comblant les omissions, le jour, le mois et l'année où l'acte a été fait;

Attendu que l'exploit de signification d'un jugement qui, par sa nature même, est destiné à faire courir les délais des recours, des déchéances et forclusions et des exécutions, à défaut de date ou lorsqu'il ne porte qu'une date incomplète et par suite incertaine, ne remplit pas les conditions essentielles pour sa validité et doit par suite de cette irrégularité être annulé ;

Attendu que l'arrêt attaqué constate que la copie de l'exploit de signification du jugement obtenu par de Marconnay et destinée à la dame du Verger, porte comme date l'an 1888 et le ... février; qu'elle ne contient pas l'indication du jour; que cet arrêt reconnaît bien qu'en droit cette insuffisance de date pouvait être suppléée par toute autre énonciation; mais qu'il constate que rien dans ces énonciations en fait ne permettait de suppléer à l'omission signalée; que, dans ces circonstances, en considérant cette signification comme irrégulière, nulle et de nul effet pour faire courir le délai d'appel, l'arrêt attaqué n'a violé ni faussement appliqué les articles de la loi susvisés ;

Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt de la Cour d'Angers, du 4 février 1890.

MM. Bédarrides, président; Féraud-Giraud, rapporteur; Chevrier, avocat général; Me Sabatier, avocat.

Note. Aux termes de l'art. 61 du Code de procédure civile, tout exploit d'ajournement doit contenir la date des jour, mois et an, à peine de nullité. L'article 456 du même Code exige, également à peine de nullité, que les actes d'appel contiennent assignation dans les délais de la loi. De ces dispositions combinées, il résulte qu'un acte d'appel est nul, s'il n'indique pas le jour, lors même que le mois serait compris tout entier dans le délai d'appel. Les causes de nullité de la copie ne peuvent pas d'ailleurs être couvertes par la régularité de l'original ; car la copie tient lieu d'original à la partie qui l'a reçue. Ces principes sont consacrés par une jurisprudence constante.

N° 3.

COUR DE CASSATION (Ch. req.). 17 Novembre 1890.

Biens curiaux.

-

Bail. Contestation. Application du décret de concession. Texte clair et précis. — Compétence judiciaire.

S'il est interdit aux tribunaux civils d'interpréter les actes administratifs dans ce qu'ils ont d'ambigu et d'obscur, cette défense ne va pas jusqu'à mettre obstacle à l'application pure et simple desdits actes, quand le texte est clair et précis et ne donne lieu à aucun débat sérieux.

LINARES C. CAMBEFORT.

Le desservant de la cure de la commune de Mouïnan, département d'Alger, avait affermé au sieur Linarès divers biens provenant d'une concession faite à la commune par décret du 3 novembre 1869, pour lesdits biens être affectés au presbytère, à titre de dotation.

La destination assignée à ces biens par le décret de concession leur imprimait incontestablement le caractère de biens curiaux, c'est-à-dire de biens dont le titulaire de la cure est usufruitier, aux termes de l'art. 6 du décret du 6 novembre 1813.

Cependant, actionné devant les tribunaux en paiement de trois annuités, Linarès a soutenu que le bail était nul pour différents motifs et notamment parce qu'il s'agissait, non pas de hiens curiaux, mais de biens communaux que le desservant n'avait pas qualité pour amodier.

N'ayant obtenu gain de cause ni en première instance, ni en appel, il s'est pourvu en cassation contre l'arrêt qui le condamnait à payer les sommes dues au desservant.

Deux des moyens produits à l'appui du pourvoi étaient formulés comme il suit:

« PreviousContinue »