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Ire ANNÉE.

N° 12.

15 OCTOBRE 1855.

JOURNAL DES TRIBUNAUX

ET DE JURISPRUDENCE,

PARAISSANT LE 1er ET LE 15 DE CHAQUE MOIS.

Prix de l'abonnement: dix francs par an. - On s'abonne à Lausanne, chez J. S. Blanchard aîné, rue Petit S' Jean, 3. Lettres et argent franco.

Droit fédéral.

Le tracé du chemin de fer aux abords de la ville de Lausanne traverse une campagne et des vignes au moyen d'une tranchée, qui aura environ 80 pieds de profondeur et 120 pieds d'ouverture, pour des talus.

Les propriétaires de ces terrains avaient demandé au Conseil fédéral qu'au lieu de talus il fût construit des murs de soutènement, comme cela se pratique dans le vignoble, ou bien qu'au lieu d'ouvrir une tranchée il fût percé un tunnel.

Dans ce but ils s'étaient adressés au Conseil fédéral, qui leur a répondu que le conseil d'état du canton de Vaud était seul compétent pour approuver les plans.

En présence de cette solution, qui rend irrévocable l'approbation des plans faits par le conseil d'état avant qu'ils soient portés à la connaissance du public, on peut se demander quelle sera l'application de l'art. 12 § 1°* et de l'art. 25 ** de la loi fédérale, et dans quel cas il pourra y avoir recours au conseil fédéral.

* Art. 12. Pendant le même délai (30 jours):

1o Ceux qui se croient fondés à contester l'obligation qu'ils auraient de céder ou de concéder des droits, conformément au plan et par suite de sa mise à exécution, devront faire valoir leurs moyens d'opposition dans une pièce écrite adressée au conseil fédéral.

** Art. 25. Le conseil fédéral statue sur les contestations relatives au droit d'expropriation.

Berne, le 1er août 1855.

Voici le texte de la décision:

LA CHANCELLERIE DE LA CONFÉDÉRATION SUISSE

à Monsieur le docteur Lambert-Francillon, à Lausanne.

Monsieur,

En réponse à la pétition que vous avez adressée le 12 juillet dernier au Conseil fédéral, conjointement avec plusieurs autres intéressés, pour qu'il décide, en vertu de l'art. 25 de la loi fédérale du 1er mai 1850 sur l'expropriation pour cause d'utilité publique, la question de savoir si les signataires de la pétition précitée sont tenus de céder à la compagnie de l'ouest, outre les terrains nécessaires pour la construction du chemin de fer Morges-Lausanne-Yverdon, ceux qui sont indispensables à l'établissement des talus, la chancellerie soussignée a été chargée de vous annoncer que le conseil fédéral,

considérant :

1° Que la compagnie du chemin de fer Morges-LausanneYverdon est tenue, d'après l'art. 13* de la concession du 8 juin 1852, approuvée par l'assemblée fédérale, de construire la voie ferrée d'après les plans approuvés par le haut état de Vaud, et que suivant l'art. 16 de la même concession, aucun changement quelconque ne peut être apporté dans l'exécution des projets (plans) sans l'autorisation du conseil d'état;

2o Que les réclamants n'ont pas montré qu'il ait été dévié en manière quelconque de ces plans ou projets;

* Art. 13. L'avant-projet, dressé par M. l'ingénieur Fraisse en septembre 1844, pour établir, au moyen d'un chemin de fer, une communication entre les lacs Léman et d'Yverdon, servira de base à la présente concession pour ce qui concerne le chemin dès Yverdon à Morges, sans cependant fixer irrévocablement la direction du chemin à construire.

L'embranchement sur Lausanne devra être établi de manière à se rapprocher, autant que possible, de cette ville.

La compagnie, avant de mettre la main à l'œuvre, devra présenter un projet complet et définitif de tous les travaux qu'elle se propose d'exécuter pour la construction d'un chemin de fer dès Yverdon à Morges et à Lausanne.

Un double de ce projet sera déposé dans les archives de l'état.

a écarté

la demande qui fait l'objet de la réclamation du 12 juillet 1853, comme n'étant pas fondée.

En vous priant de communiquer cette décision aux autres signataires de la pétition dont il s'agit, nous avons l'honneur de vous renvoyer le plan qui y était annexé, et nous saisissons cette occasion de vous assurer, monsieur, de notre parfaite considération.

Le chancelier de la Confédération,

Schiess.

(Communiqué.)

Question de droit commercial.

TRIBUNAL CIVIL DU DISTRICT DE LAUSANNE.

Séance du 21 avril 1855.

Le tribunal est assemblé à 9 heures du matin pour les débats de la cause Gédet contre la Banque.

Ensuite d'assignations à ce jour comparaissent d'une part Ami Freymond, commis du procureur-juré Dubrit, à Lausanne, mandataire de Jean-Samuel Gédet, à Vallamand, demandeur; il est assisté de l'avocat De Miéville.

D'autre part, le procureur-juré Dufour-Hermenjat, à Lausanne, mandataire de la Banque cantonale vaudoise à Lausanne, défenderesse; il est assisté de l'avocat Rogivue.

Le demandeur veut prouver:

1° Que le billet du 11 octobre 1852 a été envoyé par l'agent de la Banque à l'administration pour savoir si elle l'admettait, et qu'aucune valeur n'avait encore été livrée.

2° Que la réponse de la Banque est arrivée le jour même de la mort de l'agent M. le notaire Bornand, que défense a été faite de délivrer aucune valeur pour le compte de la Banque.

3o Que Gédet s'est vainement adressé depuis lors soit au bureau de l'ancien agent, soit chez son successeur, pour toucher la valeur de ce billet, soit en espèces métalliques, soit de toute autre manière.

4° Qu'il a vainement adressé la même réclamation à la Ban

que, demandant qu'on lui restituất soit l'un soit l'autre de ces billets, soit la valeur du premier.

Il fera cette preuve:

a) Par titre. A cet effet il produit une lettre de la Banque du 1er novembre 1852 et il cense produite la lettre qu'il a adressée le 28 octobre 1852 à la Banque, qui est entre les mains de celle-ci et qu'il invite à déposer;

b) Par témoins. Il indique comme tels M* Fornallaz, notaire, Fornallaz, préfet, Jonas-Henri Perret, les trois à Avenches, et Jean-Samuel Moret, actuellement chez Mr Gottofrey, agent de la Banque, à Echallens.

Enfin il invite la Banque à déposer soit l'original, soit la copie du premier billet dû par Gédet. Il prie en outre Mr le président de vouloir bien se procurer si possible le registre de copie de lettres de Mr Bornand pour ce qui a trait à cette affaire.

Le mandataire de la Banque produit une lettre signée Samuel Moret, pour l'agent de la Banque, en date du 12 octobre 1852.

La Banque procédant sur la demande à preuve du demandeur, déclare s'opposer à la preuve requise dans toute la partie de cette preuve qui devrait être faite par témoins.

Elle fonde son opposition sur l'article 974 * du code civil et sur l'article 196, 4° alinéa ** du code de procédure civile.

La Banque étant au bénéfice d'un titre valable ne peut admettre qu'il soit fait de preuves par témoins contre la teneur de ce titre.

Le demandeur Gédet persiste dans sa demande à preuve et conclut à ce que l'opposition à la preuve soit mise de côté et ce avec dépens.

* 974. Lorsque la preuve littérale résulte d'un acte valable, il n'est point permis d'employer la preuve testimoniale, ou celle par le serment d'une des parties, contre la teneur de l'acte.

** Art. 196. La partie adverse peut s'opposer au genre de preuves dans les cas prévus aux articles 974, 975 et 995 à 1002 inclusivement du code civil, ainsi que dans les autres cas prévus par la loi civile.

La Banque conclut à libération avec dépens des conclusions incidentes de la partie adverse.

Le programme des faits a été arrêté dans la teneur suivante : Faits reconnus constants:

1o Le 11 octobre 1852 un billet à ordre a été créé par JeanSamuel Gédet en faveur de la Banque, billet qui est censé figurer au programme dans tout son contenu.

2o La demande à preuve de Gédet et l'opposition de la Banque font partie du programme.

Le procès-verbal est lu et approuvé en séance publique.

Le tribunal qui a toujours été au complet entre immédiatement en délibération à huis clos, et attendu que le billet souscrit par Jean-Samuel Gédet le 8 octobre 1852 en faveur de la Banque porte pour valeur reçue.

Que le dit Gédet veut prouver qu'aucune valeur n'a été payée en contre échange du billet.

Que dès lors cette preuve tend à détruire le contenu même du billet du 11 octobre 1852.

Vu l'article 974 du code civil et le 196 4e alinéa du code de procédure civile.

Le tribunal à la majorité légale maintient l'opposition à preuve entreprise par Gédet.

Les frais de cet incident suivront le sort de la cause au fond. Au rapport de la sentence, le demandeur a déclaré vouloir recourir en cassation.

Le demandeur a requis la production du registre de copie de lettres de la Banque pour ce qui a trait au billet Gédet du 11 octobre 1852.

La Banque prend l'engagement de produire ce copie de lettres pour la prochaine séance.

De son côté la Banque demande à

prouver :

1° Qu'à la date du billet l'agent Bornand avait non seulement un crédit à la Banque, mais encore des fonds entre les mains appartenant à cette administration.

2° Que l'agent Bornand a été crédité par la Banque du montant du billet.

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