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la souveraineté de laquelle ils étaient vassaux, que c'est à ce titre que les Seigneurs de Gingins Barons de La Sarraz ont pu disposer, en 1550, du cours du torrent du Nozon et le détourner pour un usage privé ;

Que par suite des faits des communiers d'Orny, qui tendaient à recueillir les eaux détournées en dessous du moulin de Bornuz, il est intervenu un jugement arbitral, rendu en 1551, qui a réglé la position des Seigneurs de La Sarraz vis-à-vis de la commune d'Orny;

Que cet acte reconnaît aux communiers le droit de reprendre l'eau en dessous du moulin, moyennant un prix et une cense annuelle, tout en faisant une réserve au profit du Seigneur, pour le cas où il disposerait ultérieurement des eaux du Nozon; que les parties en cause, alors, ont accepté ce jugement arbitral, lequel a eu son effet, comme acte disposant des eaux en faveur des communiers d'Orny; qu'ainsi, le détournement des caux du Nozon, opéré par le Seigneur de La Sarraz, en vertu de son droit féodal, a même été admis par la commune à cette époque, puisqu'elle a acheté de lui, conformément à l'arbitrage, le droit de recueillir les eaux en dessous du moulin.

Mais considérant, d'un autre côté, qu'en concédant ce droit aux communiers d'Orny, contre un prix, le Seigneur de La Sarraz avait réservé en sa faveur une condition pour le cas où il userait de son droit féodal en faisant des établissements ultérieurs ou des concessions sur le cours du Nozon;

Que cette condition avait pour effet de limiter à une quantité déterminée l'eau que pourrait recueillir la commune d'Orny.

Que la restriction résultant de cette condition n'a jamais été effectuée, en ce qu'il est reconnu comme constant au procès, que les tuyaux mentionnés dans la réserve de l'arbitrage de 1551 n'ont jamais été posés.

Considérant que, par suite de l'abolition du régime féodal, l'arbitrage de 1551 ne peut plus avoir d'effet en ce qui concerne la réserve susmentionnée, qui n'est autre que la réserve de l'exercice d'un droit féodal et au bénéfice de laquelle ni les héritiers des seigneurs de cette époque ni des ayant-droit par concession ne peuvent se mettre actuellement ;

Que les droits féodaux ont passé!à l'Etat auquel seul il appartient, comme administrateur des choses du domaine public, de disposer de l'usage des eaux faisant partie de ce domaine.

Qu'ainsi, les demandeurs Morel et consorts, qui sont au bénéfice d'actes de concessions à eux faites par les Seigneurs de La Sarraz, ne peuvent se mettre en lieu et place de ceux-ci pour prétendre à user actuellement, vis-à-vis d'Orny, d'une réserve féodale qui n'a reçu aucune exécution depuis 1551;

Qu'ils n'ont droit qu'à la quantité d'eau qui leur a été concédée par les actes au bénéfice desquels ils se trouvent;

Que, sous ce rapport, il n'est pas établi au procès si la quan tité d'eau qui leur a été concédée se trouve diminuée pour eux et s'il y a eu augmentation en faveur de la commune d'Orny.

Attendu, dès lors, que le tribunal a donné à l'acte de 1551 une portée autre que celle qu'il peut avoir en présence des dispositions sur l'abolition du droit féodal en général et spécialement de l'article 342 du code civil.

Considérant, quant au moyen tiré de la prescription de l'arbitrage de 1551, que ce moyen n'a pas de portée en ce qui concerne la réserve de faire placer des tuyaux pour l'eau recueillie par la commune d'Oray, puisque cette réserve, qui n'a reçu aucune exécution, est tombée avec le droit féodal, et qu'en ce qui concerne la vente de l'eau à cette commune, l'acte a été exécuté dès lors jusqu'à présent comme concession valable et régulière, d'où il suit qu'aucune prescription ne peut être invoquée.

S'occupant ensuite des autres moyens du recours et considérant que par suite de ce qui est dit ci-dessus sur le deuxième moyen et qui décide de la valeur de l'acte de 1551, sous le rapport de la répartition des eaux telle que les demandeurs y ont conclu, ces moyens subséquents n'ont plus de portée.

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En conséquence la cour de cassation civile admet le deuxième moyen du recours, réforme le jugement du tribunal civil et, vu les conclusions des parties ci-dessus transcrites, déboute les demandeurs de leurs conclusions, accorde à la commune d'Orny ses conclusions libératoires, lui refuse d'ailleurs ses conclusions réconventionnelles, refuse de même ses conclu

sions subsidiaires en réduction du canal du Nozon, vu qu'elles n'étaient présentées que pour le cas où les conclusions libératoires ne seraient pas accordées; et quant aux dépens de la cause, attendu que la commune d'Orny a abusivement prolongé le procès, la cour décide que cette commune supportera la moitié de ses frais, et met à la charge des demandeurs l'autre moitié outre les leurs propres, met aussi à leur charge les dépens de cassation et déclare exécutoire le présent arrêt.

Droit commercial.

COUR DE CASSATION CIVILE.

7 décembre 1855.

Jean Reguin, à Yverdon, recourt contre la sentence du juge de paix du cercle d'Orbe, rendue le 24 septembre 1853 dans sa cause contre Emanuel Marindaz.

L'audience est publique.

Il est fait lecture de la sentence et de l'acte de recours.

Le tribunal décide successivement deux moyens, il statue que le juge peut prendre son temps pour rédiger son jugement, et qu'il n'est pas tenu de rapporter le jugement incontinent aux parties.

Puis passant à l'examen des moyens de réforme, et délibérant d'abord sur celui qui consiste à dire que la prescription quinquennale n'est pas admissible, attendu que le titre dont on réclame le paiement n'est pas un billet à ordre:

Considérant que la loi de 1829 sur les lettres de change et les billets à ordre énonce à son art. 2 les qualités que la lettre de change doit revêtir, savoir: qu'elle soit datée et signée, qu'elle énonce le lieu du paiement, la somme à payer indiquée en toutes lettres, le nom de celui qui doit payer, l'époque et le lieu où le paiement doit s'effectuer, la valeur pour laquelle elle est tirée, fournie en espèces, marchandises ou de toute autre manière.

Considérant que les billets souscrits le 25 août 1840 remplissant toutes les qualités requises par l'art. 2 susmentionné, sont de véritables billets à ordre, régis par conséquent par la loi du 4 juin 1829, et dès lors prescriptibles par 5 ans, conformément à l'art. 92 de la dite loi.

La cour rejette ce moyen.

Sur le 2 moyen, considérant que le fait que les frères Marindaz auraient souscrit solidairement les billets, ne saurait détruire le caractère de ces titres comme billets à ordre;

Que le fait d'être restés en mains du créancier sans avoir été mis en circulation, ne saurait non plus avoir ce résultat, vu qu'il dépendrait du créancier de détruire par son fait le caractère du billet à ordre.

Considérant que le fait de n'avoir pas fait protester les billets à leur échéance ne saurait rien changer à la position respective du créancier et du débiteur.

Considérant enfin que rien ne démontre dans les pièces produites et les débats que la prescription ait été interrompue;

Que l'intervention de 1852 n'aurait jamais eu pour effet que d'interrompre la prescription décennale, tandis que la prescription quinquennale est applicable par les motifs exprimés plus haut.

Considérant qu'à l'époque de l'intervention la prescription quinquennale était déjà acquise, et que dès lors cette intervention n'a pu constituer une interruption de la prescription; que d'un autre côté Emanuel Marindaz n'a participé à aucun acte qui impliquât de sa part renonciation à la prescription acquise.

La cour rejette aussi les divers points de vue de ce moyen de recours.

En conséquence, la cour de cassation civile rejette le recours, maintient la sentence et condamne le recourant aux dépens de cassation.

Question de droit de mutation.

V. a saisi les immeubles de C., le 22 mars 1852, et, le 19 mars 1853, il a cédé sa révestiture aux enfants de son débiteur C.

Y a-t-il un droit de mutation sur ce transport d'immeubles? Le receveur a réclamé ce droit sur la révestiture, attendu qu'il n'y avait pas eu de réemption dans le terme voulu.

Les enfants C. ont réclamé en se fondant sur l'exception mentionnée à l'art. 6 de la loi du 25 mai 1824, qui porte en résumé qu'il n'y a pas de droit de mutation sur les cessions de révestiture en faveur des enfants du débiteur.

Le receveur a prétendu que cette exception voulait dire tout simplement qu'il n'y avait pas un second droit de mutation. lorsqu'il s'agissait d'une cession de révestiture en faveur des enfants, mais que le droit de mutation sur la révestiture non réemptionnée dans le temps voulu subsistait toujours.

Les enfants C. ont recouru au Conseil d'état, par un mémoire longuement motivé, et le Conseil d'état vient de décider qu'il n'y avait pas lieu à réclamer un droit de mutation dans le cas dont il s'agissait.

La demande en prise à partie contre les autorités judiciaires d'un des districts des bords du lac Léman a été écartée. (Voir la fin du No 16 du Journal des tribunaux.) L'arrêt est fort explicite et ne présente, nous semble-t-il, aucun intérêt scientifique ou d'une utilité pratique.

LAUSANNE.

Le rédacteur, L. PELLIS, avocat.

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IMP. DE J. S. BLANCHARD AINÉ.

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