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l'autre les actes fédéraux. les volumes de 1852.

On annonce pour incessamment

Les volumes vaudois diffèrent peu de l'édition officielle; il semble qu'on a réussi chez nous à mettre un peu plus d'ordre et à élaguer encore quelques inutilités.

Ainsi il n'y a point de lacune dans la série des volumes concernant le droit fédéral.

Deux jugements

interprétant l'article 1071 du code civil.

Art. 1071. Lorsque le mari est en état de faillite, lorsqu'il a été condamné à une peine emportant mort civile, lorsqu'il est interdit, il perd l'administration et la jouissance des biens de sa femme.

Les juges, les notaires et les avocats étaient depuis longtemps divisés sur le sens de ces mots EN ÉTAT DE FAILLITE; les uns estimant qu'ils sont synonymes de discussion juridique des biens et les autres pensant qu'ils sont équivalent de la déconfiture constatée.

Voici le programme, le jugement de première instance, le recours et l'arrêt.

TRIBUNAL CIVIL DU DISTRICT DE LAUSANNE.

Séance du 21 septembre 1852.

Présidence de Mr Guisan.

Présents: MM. les juges De la Harpe, Milliquet, Bardet et Vallotton, juge suppléant remplaçant M' Dériaz. - Le greffier. Huissiers.

Le tribunal est assemblé à dix heures du matin pour prononcer sur la demande en séparation de biens formée par Mme B. née R.

Comparaît Sophie B. née R., domiciliée à Lausanne, assistée de son conseil judiciaire, Mr Benjamin Kraütler aussi à Lausanne. Elle procède sous l'assistance de l'avocat Louis Pellis.

La séance est publique. L'onglet des pièces est déposé sur le bureau.

L'officier du ministère public, qui a été avisé du jour où le tribunal prononcerait sur la demande en séparation de biens de dame B., a dit ne pas vouloir intervenir.

Par transaction du 28 août 1852, François B., mari de la comparante, a consenti à la séparation demandée.

Mr l'avocat Pellis a été entendu dans son plaidoyer. Il a repris avec dépens les conclusions de sa demande.

Mr Pellis produit l'autorisation qui a été accordée le 18 septembre courant par la justice de paix de Lausanne, à l'effet de valider la transaction du 28 août 1852, et le numéro de la feuille officielle dans lequel l'avis aux intéressés a été inséré.

Les intéressés, à la demande de dame B., assignés pour neuf heures du matin, ont été proclamés à onze heures et personne ne s'est présenté.

Le programme des faits de la cause a été arrêté de la manière suivante:

Questions de fait à résoudre.

1o Est-il constant que le 18 septembre 1829 il y a eu mariage entre François B. et Sophie R. ?

2o Est-il constant qu'il est né de ce mariage 4 enfants, savoir Henri, Emile, François et Louis?

3o Est-il constant que les époux ont fait mauvais ménage et ont plaidé précédemment en divorce?

4° Est-il constant que François B. a été poursuivi par de nombreux créanciers?

5o Est-il constant qu'il y a eu contre lui plusieurs actes de défaut de biens ensuite de poursuites?

6o Est-il constant qu'il a été détenu à l'Evêché pour dettes, ensuite de contrainte par corps?

7° Est-il constant qu'il est débiteur de sa femme pour plusieurs listes de frais adjugées et réglées ?

8° Est-il constant que dans ce moment les revenus de la fortune de Mme B. sont saisis par trois créanciers pour être payés d'une somme totale d'environ 1700 francs?

9° Est-il constant qu'il existait devant le tribunal de Lausanne plusieurs procès contre les époux B., et que B. n'a payé ni les listes, ni les coupons?

10° Est-il constant que le 28 août 1852, il y a eu transaction entre les époux B. ayant passé expédient de toutes les conclusions prises par lui, tout en adhérant à la séparation de biens demandée par sa femme?

11° Est-il constant que Mme B. a assigné tous les tiers intéressés à l'audience d'aujourd'hui et cela par la feuille officielle du 3 septembre 1852 ?

12o Est-il constant que les intéressés ont été proclamés et que personne ne s'est présenté?

13° Est-il constant que le mobilier de Ma B. a été saisi pour le paiement du loyer?

14° Est-il constant que François B. n'est plus à la tête de son établissement de menuisier, sa maison ayant été saisie? Le procès verbal a été lu et approuvé en séance publique. Le président, C. Guisan. Le greffier, S. Delisle.

Le tribunal qui a toujours été au complet entre immédiatement en délibération à huis clos.

Toutes les questions ont été résolues affirmativement à l'unanimité des voix.

Il est fait lecture des conclusions de la demande. Elles tendent à ce que par jugement avec dépens la séparation des biens de Sophie B. née R. d'avec ceux de son mari, soit prononcée.

Puis délibérant et attendu que les seuls cas dans lesquels la femme puisse demander la séparation de ses biens, sont: a) Lorsque le mari est en état de faillite.

b) Lorsqu'il a été condamné à une peine emportant mort civile.

c) Lorsqu'il est interdit.

Que la demande en séparation de la Dame B. est fondée sur l'état d'insolvabilité ou de déconfiture de son mari.

Considérant que le mot de faillite a chez nous la signification de cession juridique de biens soit discussion.

Qu'il résulte de nombreuses dispositions de nos lois et notamment des articles 884, 1144, 1397, 1510 et 1575 du code civil, que le mot faillite ne peut être considéré comme synonyme d'insolvabilité soit de déconfiture.

Que François B. ne se trouve dans aucun des cas qui d'après l'article 1071 du code civil peuvent autoriser une demande en séparation de biens.

Que la séparation de biens entre époux étant une question d'ordre public, il ne peut être dérogé par des conventions particulières aux dispositions légales qui s'y rattachent.

Qu'ainsi le consentement donné par le mari B. à l'article 3 de la transaction du 28 août 1852, ne peut déployer aucun effet juridique.

Par ces motifs le tribunal, à la majorité légale, déboute Sophie B. née R. des conclusions de sa demande et la condamne aux dépens.

Le tribunal a toujours été au complet pour rendre ce jugement, qui a été lu et approuvé à huis clos puis rapporté en séance publique le dit jour 21 septembre 1852.

Le président, C. Guisan.

Le greffier, S. Delisle.

L'effet de ce jugement serait que tous les revenus des biens de la femme serviraient à payer les dettes du mari, sans qu'il reste à l'épouse et aux enfants un seul centime.

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RECOURS POUR M SOPHIE B. Née r.

contre le jugement rendu le 21 septembre 1852 par le tribunal du district de Lausanne, sur conclusions par elle prises en séparation de biens.

La dame recourante demande la réforme du dit jugement pour fausse appréciation des faits et pour fausse application de la loi; en effet tous les faits admis constatent l'état de faillite et d'insolvabilité de M. François B., et quant au droit il y a fausse interprétation des articles 884, 1144, 1397, 1510, 1575 et 1071 du code civil.

Elle demande la réforme du dit jugement pour fausse appréciation des titres de la cause et du consentement du mari. La.

dame instante se fonde encore sur ce que le dit jugement renverse toutes les idées de famille et de droit à l'existence pour la mère et pour les enfants.

En conséquence, Mme B. née R. demande la réforme du jugement rendu contre elle le 21 septembre 1852 par le tribunal du district de Lausanne; elle reprend ses conclusions prises en demande tendantes à la séparation de biens; vu la position du mari et les faits constatés, elle conclut de plus aux dépens.

L' Pellis, Dr.

Sophie B. née R.

Kraütler, cons. jud.

COUR DE CASSATION CIVILE.

Séance du 24 novembre 1852.

Présidence de M. H. Jan.

Sophie B. née R. recourt en cassation contre le jugement du tribunal du district de Lausanne du 21 septembre 1852, rendu en faveur de François B., menuisier à Lausanne. Sophie B. se présente assistée de l'avocat Pellis. - Personne ne se présente pour François B.

L'audience

Le procureur général avisé n'intervient pas. est publique. Il est fait lecture de la sentence attaquée et de l'acte de recours.

Ouï l'avocat de la recourante, la cour délibérant a vu que Sophié B. a intenté à son mari François B. une action en séparation de biens, fondée sur ce que, après avoir dissipé tout ce qu'il avait, non seulement il ne possède plus rien, mais encore il est obéré. Que de nombreuses saisies ont été dirigées infructueusement contre lui et ont été suivies de plusieurs actes de défaut. Qu'enfin il est encore sous le poids d'une contrainte par corps obtenue et non exécutée. Que le tribunal de Lausanne, par jugement du 21 septembre 1852, a débouté la de-manderesse de ses conclusions, en se fondant, sur ce qu'il résulte de nombreuses dispositions de nos lois et notamment des articles 884, 1144, 1897, 1510 et 1575 du code civil, que le mot faillite ne peut être considéré comme synonyme d'insolvabilité soit de déconfiture. Que François B. ne se trouve

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