Page images
PDF
EPUB

tions et des exceptions, celles des preuves, de l'autorité de la chose jugée, et de la prescription extinctive. »

Pour rendre plus sensible le plan que nous venons d'esquisser, nous avons pris soin d'en faire, autant que possible, cadrer les principales divisions avec la distribution des matières dans les six volumes dont se compose cette troisième édition. Ainsi, le premier volume renferme, 1o l'introduction, 2o l'état et la capacité juridique ; le deuxième, les droits réels; le troisième, les droits personnels proprement dits; le quatrième, les droits de puissance et de famille, le cinquième, 1o la théorie générale du patrimoine, 2o les successions ab intestat, 3o le commencement des successions testamentaires, des legs et des donations; le sixième, 1o la suite et la fin de cette théorie, 2o le Droit civil pratique.

Ce plan, au demeurant, n'est pas particulier à Zachariæ; c'est celui qui est adopté, sauf quelques variantes de peu d'importance, dans la plupart des Manuels et des Cours de Droit romain les plus accrédités en Allemagne, où l'on divise assez généralement les matières du Droit civil de la manière suivante : jus status, jus rerum, jus obligationum, jus potestatis et familiæ, jus hereditarium, jus actionum. Nous maintenons cette division, qui nous paraît parfaitement rationnelle, et qu'on a trouvée telle dans un pays où l'on se connaît en méthodes, parce que nous pensons avec Pascal, autorité qui vaut bien celle de certains critiques de nos jours, que ce qui est, au point de vue scientifique, rationnel au delà du Rhin, ne saurait être irrationnel en deçà.

Loin de nous la pensée de blâmer ici le plan adopté par les rédacteurs du Code Napoléon. Le législateur n'est point un docteur; il commande et n'enseigne pas. Nous n'avons pas même la moindre velléité de critiquer les auteurs qui ont cru devoir suivre ce plan dans leurs ouvrages, en adoptant soit la forme franche et décidée du commentaire, soit le mode mixte et plus vague du traité.

Mais ce n'est point un livre de ce genre que nous avons voulu écrire, c'est un cours dans le véritable sens du mot, c'est-à-dire un ouvrage qui, dans un cadre scientifique, com

prit toutes les matières de Droit civil formant l'objet du Code Napoléon ou de lois particulières, qui, partant de la notion de ce Droit, et procédant, autant que le comporte la jurisprudence, du connu à l'inconnu, poursuivit méthodiquement le développement de cette notion primitive dans ses différentes branches et jusque dans ses dernières ramifications. Nous avons pensé qu'un pareil ouvrage pouvait encore être de quelque utilité après les excellents commentaires et les savants traités qui ont été publiés sur le Code Napoléon, commentaires et traités dont nous sommes les premiers à reconnaître hautement toute la valeur, mais que notre intention n'a été ni d'imiter ni de refaire. La science n'a-t-elle pas à gagner à la diversité des méthodes?

Comme dernière observation nous ajouterons que l'idée de démolir Le Droit civil français de Zachariæ, pour le rétablir suivant l'ordre du Code Napoléon, ne s'est jamais présentée à notre pensée, et nous concevons difficilement qu'elle ait pu séduire des esprits droits et logiques. Comment des admirateurs de la puissante et lucide synthèse, qui forme le principal mérite de la composition de Zachariæ, sont-ils arrivés à se persuader qu'ils restaient fidèles à la méthode de leur auteur, en fractionnant et en déplaçant les diverses parties de son œuvre, en brisant tous les anneaux de la chaine qui les relie les unes aux autres ?

INTRODUCTION.

DU DROIT EN GÉNÉRAL.

BIBLIOGRAPHIE. Instructions du chancelier d'Aguesseau à son fils, dans le vol. XV de ses œuvres éditées par Pardessus; Paris 1819. Discours préliminaire du projet de Code civil, par Portalis (Locré, Lég., t. I, p. 244 et suiv.). Introduction à l'étude philosophique du Droit, par Lherbette; Paris 1819, 1 vol. in-8°. Introduction à l'étude du Droit français et du Droit naturel, par Boulage; Paris 1821, 1 vol. in-8°. Introduction générale à l'histoire du Droit, par Lherminier; Paris 1829, 1 vol. in-8°. Cours d'introduction générale à l'étude du Droit, traduit de l'allemand de Falck par Pellat; Paris 1841, 1 vol. in-8°. Cours de Droit naturel ou de philosophie du Droit, par Ahrens; Bruxelles 1844, 1 vol. in-8°. Premiers essais de philosophie du Droit, par Oudot; Paris 1846, 1 vol. in-8°. Cours d'introduction générale à l'étude du Droit, par Eschbach, 2e édit.; Paris 1846, 1 vol. in-12. Philosophie du Droit ou Cours d'introduction à la science du Droit, par Belime, Paris 1844 et 1848, 2 vol. in-8°. Essai sur l'histoire générale du Droit, par Pouhaër; Paris 1849, 1 vol. in-8°.

§ 1.

Le Droit est l'ensemble des préceptes ou règles de conduite à l'observation desquels il est permis d'astreindre l'homme par une coercition extérieure ou physique.

Les préceptes qui ne se rapportent qu'à des actes purement intérieurs échappant, en vertu de leur nature, à une pareille coercition, restent par cela même en dehors de la sphère du Droit.

Les préceptes relatifs à des actes extérieurs peuvent légitimement devenir l'objet d'une coercition physique, toutes les fois qu'il s'agit d'actes dont l'accomplissement ou l'omission est de nature à froisser le sens moral d'un peuple à une époque donnée et à provoquer ainsi une réprobation formelle de la conscience publique 1.

'Le jugement que l'homme, comme être doué de raison, est appelé à porter sur des actes extérieurs de libre volonté, peut se formuler de trois manières : ou bien l'acte se présente comme indifférent, en ce sens que son accomplissement ou son omission ne provoque ni approbation ni désapprobation morale; ou bien encore l'acte paraît de nature à faire encourir à celui qui le commet ou l'omet

Le Droit n'obtient une complète garantie d'efficacité que par l'existence d'une force capable de vaincre les résistances individuelles, et cette force elle-même ne peut s'établir qu'au moyen d'une association où chacun se trouve contenu dans ses devoirs par la puissance de tous.

Une pareille association constitue ce qu'on appelle une société civile ou un État.

$ 2.

L'objet du Droit étant de régler la vie sociale, et la réalisation complète de ce but supposant l'existence de sociétés civiles régulièrement organisées, il en résulte que l'organisation de l'État et le règlement de ses rapports avec les individus rentrent essentiellement dans la sphère du Droit.

Le Droit prend le nom de Droit civil, de Droit constitutionnel, ou de Droit administratif, suivant qu'il a pour objet de régler les relations privées des particuliers entre eux, d'organiser l'État et de

un blâme formel, sans qu'à l'inverse celui qui s'en abstient ou qui l'accomplit semble mériter une louange particulière; ou bien enfin l'acte revêt un caractère tel que son accomplissement ou son omission excite l'admiration, et qu'une façon d'agir contraire n'entraînerait pas avec elle une désapprobation positive. Quelques exemples feront mieux comprendre les deux dernières distinctions. On ne regarde pas comme méritant une louange particulière celui qui paie ses dettes, celui qui élève convenablement ses enfants, et on désapprouve formellement tous ceux qui en agissent autrement. De même, on ne considère pas comme digne d'un éloge spécial celui qui, sans dangers pour ses jours et sans sacrifices personnels, sauve la vie à autrui, et on blâmerait celui qui, se trouvant dans des circonstances analogues, ne l'aurait pas fait. Au contraire, le fait de l'homme qui se dévoue pour sauver au péril de sa vie celle de son semblable excite l'admiration, et nul ne songerait à blâmer l'abstention d'un pareil acte. Ces distinctions posées, nous disons que les actes indifférents au point de vue moral ne doivent pas en principe, et à moins que des motifs particuliers d'utilité sociale ne conseillent de les ordonner ou de les défendre, devenir l'objet d'une prescription juridique. Quant aux actes de dévouement, la loi ne saurait les commander, parce que, faite pour la généralité des hommes, elle doit les prendre avec leurs dispositions et leurs facultés ordinaires. Ces actes appartiennent donc exclusivement au domaine de la morale. Au contraire, la loi peut légitimement ordonner ou défendre, en y attachant une coercition extérieure, les actes dont l'omission ou la commission est de nature à provoquer une désapprobation formelle de la conscience publique. C'est d'après cette idée que diverses législations modernes ont édicté des peines contre ceux qui, le pouvant sans danger pour eux-mêmes, ont négligé de sauver la vie à un de leurs semblables, et contre ceux qui, sans nécessité, exercent de mauvais traitements envers les animaux. Voy. Loi des 13 mars, 13 juin et 2 juillet 1850. Voy. aussi Code pénal, art. 474, no 12.

constituer les pouvoirs publics nécessaires à son action, ou de fixer les rapports des citoyens avec l'État1.

L'ensemble des préceptes ou règles de conduite légitimement susceptibles de devenir d'après la nature même des actes auxquels ils s'appliquent, l'objet d'une coercition extérieure, constitue ce qu'on nomme le Droit naturel 2.

On appelle Droit positif l'ensemble des préceptes qui de fait ont été reconnus ou déclarés susceptibles d'une pareille coercition par la coutume (Droit coutumier ou non écrit) ou par la loi (Droit écrit).

Le Droit coutumier est celui qui, révélé par une intuition immédiate à la conscience collective du peuple, a passé dans les mœurs et s'est manifesté par la pratique.

Le Droit écrit est celui qui a été décrété et promulgué par l'autorité publique.

Le Droit coutumier ne peut, en principe, être contraire au Droit naturel tel que nous le comprenons. Il en est autrement du Droit écrit, dont la force obligatoire est toutefois indépendante de sa conformité avec le Droit naturel.

Le Droit positif est plus spécialement appelé Droit national (jus civile hoc sensu), quand il s'agit de désigner le Droit en vigueur chez tel peuple à telle époque donnée.

§ 3.

Le Droit ne s'applique pas seulement aux relations des membres d'une même association politique ou d'un même État, mais encore à celles des divers États entre eux et de leurs sujets respectifs. A ce dernier point de vue il prend le nom de Droit international ou des gens (jus inter gentes) 1.

'Ordinairement et à l'exemple des jurisconsultes romains (§ 4, Inst. de just. et jur., 1, 1), on divise le Droit en public et privé. Cette division n'est pas rigoureusement exacte: il existe, à la vérité, des lois qui concernent plus particulièrement les intérêts privés, et d'autres qui sont plus spécialement relatives à l'intérêt public. Mais la plupart des lois touchent également à ces deux ordres d'intérêts.

Le critérium d'après lequel se déterminent les préceptes légitimement susceptibles de devenir l'objet d'une coercition extérieure, résidant dans la conscience collective de chaque peuple, et le sens moral d'une nation se modifiant suivant le degré de sa civilisation, il en résulte que, d'après notre manière de voir, le Droit naturel ne constitue pas un corps de préceptes absolus et immuables.

[ocr errors]

« Quod quisque populus ipse sibi jus constituit, id ipsius civitatis proprium ⚫est, vocaturque jus civile, quasi jus proprium ipsius civitatis.» § 1, Inst. de jur. nat. gent. et civ. (1, 2).

'Il ne faut pas confondre le jus inter gentes avec le jus gentium dont il est parl

« PreviousContinue »