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des instructions de leurs gouvernements, ayant déterminé la nouvelle frontière entre les deux états, croient devoir appeler l'attention de leurs cabinets respectifs sur la nécessité de régler, conformément aux précédents et aux termes exprès du Traité de Berlin, les questions dont la présente modification territoriale réclame la solution.

«Ils ont, en conséquence, l'honneur de soumettre les points suivants à l'appréciation des puissances:

1.

Proposé par l'ambassadeur d'Italie de concert avec l'ambassadeur de France:

<< Il est entendu que dans les nouveaux territoires destinés à faire partie du royaume hellénique, la distinction des croyances religieuses et des confessions ne pourra être opposée à personne comme un motif d'exclusion ou d'exception en ce qui concerne la jouissance des droits civils et politiques, l'admission aux emplois publics, fonctions et honneurs, ou l'exercice des différentes professions et industries dans quelque localité que ce soit.

<«<La liberté et la pratique extérieure de tous les cultes seront assurées à tous les habitants, nationaux et étrangers, de ces territoires, et aucune entrave ne pourra être apportée soit à l'organisation hiérarchique des différentes communions, soit à leurs rapports avec leurs chefs spirituels. »

2.-Proposé par l'ambassadeur de la Grande-Bretagne :

« Le gouvernement grec devra assurer à ses futurs sujets, musulmans et autres, le respect de leurs droits, la sécurité de leurs propriétés, l'entière liberté des cultes et la participation égale de tous, sans distinction, aux droits civils et politiques de la Grèce. »

3.-Proposé par l'ambassadeur de France:

<< Les musulmans qui possèdent des propriétés dans les territoires annexés à la Grèce et qui voudraient fixer leur résidence hors du royaume, pourront y conserver leurs immeubles en les affermant ou en les faisant administrer par des tiers.

« Il y aura lieu de régler également toutes les affaires relatives au mode d'aliénation, d'exploitation ou d'usage, pour le compte de la S. Porte, des propriétés de l'État et des fondations pieuses, vakoufs, ainsi que les questions relatives aux intérêts des particuliers qui pourraient s'y trouver engagés. »

4.-Proposé par l'ambassadeur de France:

« La Grèce devra supporter une partie de la dette publique ottomane proportionnelle à l'étendue des nouveaux territoires qui lui sont attribués par la présente médiation. Cette question devra être réglée sur une base équitable par un accord entre les parties intéressées aussitôt après la remise des territoires.»> 5.-Proposé par l'ambassadeur de la Grande-Bretagne et l'ambassadeur de France :

Ils proposent de recommander aux gouvernements de s'entendre sur les réserves à faire pour assurer à l'avenir aux bâtiments de guerre et de commerce de toutes les nations la libre navigation du canal de Ccrfou.

6.

Proposé par l'ambassadeur d'Autriche-Hongrie : «L'ambassadeur d'Autriche-Hongrie appelle l'attention de la Conférence sur l'opportunité qu'il y aurait à son avis à tranquilliser les propriétaires musulmans des contrées assignées par le nouveau tracé à la Grèce, en donnant l'assurance que les droits qu'ils ont acquis sous l'ancien régime continueront à être respectés sous la nouvelle domination. »

7. Proposé par l'ambassadeur d'Autriche-Hongrie :

« L'ambassadeur d'Autriche-Hongrie demande s'il n'y a pas lieu de prononcer dès à présent que, dans l'application du nouveau tracé de frontière entre la Grèce et la Turquie, il sera tenu compte autant que possible des droits de pacage et de pâturage que l'usage a consacrés dans ce pays.»>

8.

Proposé par l'ambassadeur de Russie :

<< Il demande que l'attention des cabinets soit attirée sur l'opportunité d'inviter la Grèce et la Turquie à appliquer à l'Olympe le régime en vigueur sur leur frontière actuelle pour la répression et la poursuite du brigandage. »>

La Conférence tient une sixième séance le 29 juin, à l'effet de prendre connaissance du projet de note préparé par l'ambassadeur de France. Ce projet, après diverses modifications, est accepté dans son ensemble, et les plénipotentiaires conviennent de le transmettre par télégraphe à leurs gouvernements pour avoir leurs instructions.

Cependant, ledit projet de note n'est venu qu'en second lieu à l'ordre du jour, l'ambassadeur d'Italie ayant demandé que les pétitions adressées à la Conférence ne soient pas seulement mises à la disposition des plénipotentiaires, mais se trouvent mentionnées au Protocole.

Le président, après lui avoir fait observer que ces pétitions sont rédigées par des individualités dont rien n'atteste le mandat et dont les signatures n'offrent aucune preuve d'authenticité, croit devoir déférer au vou de l'ambassadeur d'Italie et donne lecture des listes et des sommaires qui, depuis l'ouverture de la Conférence, ont été distribués aux plénipotentiaires. Elles se trouvent annexées au Protocole; nous nous bornons à les compter. Il y en a dix-sept, dont :

Trois, demandant au nom de la ville et du district de Janina l'annexion à la Grèce ;

Une, priant la Conférence de prendre en considération les droits des Valaques établis dans le sud de la Turquie d'Europe; Douze, venant de divers comités ou délégués albanais et protestant contre l'annexion de leur patrie à la Grèce;

Et une, émanant du comité des détenteurs des fonds grecs dans les Pays-Bas.

La septième et dernière séance de la Conférence a lieu le 1 juillet; sur la demande de leur président, les plénipotentiaires s'informent mutuellement que leurs gouvernements respectifs sont d'avis que l'Acte final de la Conférence soit consigné dans une note collective unique.

En conséquence de ces instructions, les plénipotentiaires fixent la teneur définitive de la note collective qui contiendra l'Acte final.

Nos lecteurs possèdent ce document à la page 343 du Portefeuille.

Voici le texte de la dernière note collective au sujet de la question du Monténégro :

« 3 Août 1880.

« Les soussignés, ambassadeurs d'Allemagne, de France, de Grande-Bretagne, d'Italie, de Russie et chargé d'affaires d'Autriche-Hongrie, se sont empressés de transmettre à leurs gouvernements respectifs la note que la S. Porte a bien voulu leur adresser le 15 juillet dernier, en réponse à leur communication identique du 26 juin.

«Ils ont le regret de faire savoir à S. E. Abeddine Pacha que leurs gouvernements ne peuvent accepter comme satisfaisantes les propositions formulées dans cette note.

« Les gouvernements représentés par les soussignés ont appris que la Porte a envoyé des renforts de troupes et de munitions sur la frontière du Monténégro, et ils veulent bien admettre que ces mesures ont été prises par elle dans l'intention d'exécuter fidèlement ses engagements.

«Ils ne sauraient toutefois se prêter plus longtemps à la continuation du système d'atermoiements qu'elle a suivi jusqu'à présent, et qui a conduit à la situation actuelle, et ils se voient dans la nécessité d'inviter le gouvernement ottoman à y mettre fin.

« Les soussignés croient qu'il serait plus conforme aux intérêts de la Porte de donner immédiatement suite à la proposition contenue dans leur note du 26 juin dernier, relative à la cession du district comprenant Dulcigno et la partie de la rive droite de la Boyana qui s'étend jusqu'à l'embouchure de ce fleuve.

<< Ils recommandent fortement à la Porte d'exécuter cette combinaison qui serait la plus avantageuse pour toutes les parties.

«Dans le cas, cependant, où la S. Porte préférerait s'en tenir aux engagements qu'elle a contractés par la Convention du 18 avril, les soussignés doivent la prévenir que si, à l'expiration d'un délai de trois semaines, à partir de la présente notification, pleine exécution n'a pu être donnée par elle à cette Convention, leurs gouvernements comptent qu'elle se joindra

aux puissances signataires du Traité de Berlin pour aider le prince de Monténégro à prendre possession par la force du district de Dulcigno, à l'effet de donner suite à l'autre proposition formulée dans la note du 26 juin.

« Les soussignés profitent de cette occasion pour renouveler, etc. >>

(Suivent les signatures.)

Une semaine environ après la remise à la Porte de cette espèce d'ultimatum, Lord Granville, répondant à Lord Stanley, a dit qu'aucune démonstration de sentiments amicaux envers la Turquie ne serait plus malavisée que celle qui consisterait à prononcer la moindre parole encourageant le sultan à s'opposer aux réclamations des gouvernements européens relatives à l'accomplissement des obligations imposées à la Turquie par le Traité de Berlin.

Castiga te ipsum, diront à Lord Granville les lecteurs qui, lisant cette note collective du 3 août, se rappellent que c'est lui qui dirige les mouvements diplomatiques de l'Europe dans la phase où son initiative a placé la question d'Orient.

Castiga te ipsum, car cette note, après avoir sommé le gouvernement turc d'exécuter, soit la Convention du 18 avril, soit la suggestion du 26 juin, ne mentionne le Traité de Berlin que pour inviter la S. Porte à se joindre aux autres signataires pour accomplir, non pas l'article 28 de ce Traité, mais la suggestion qui en usurpe la place. Est-ce ainsi qu'on prétend apprendre au sultan le respect de ses obligations?

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