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dans des circonstances données, rendre des services du premier ordre; car, ce qui constitue la faiblesse de cette frontière, c'est le grand éloignement où elle se trouve de Paris et même des Alpes. Mais il faudrait pour s'engager dans cette dépense qu'elle fût effectivement aussi médiocre qu'on la présente, et que le fort puisse appuyer la division qui, dans le cas de la défensive, serait chargée de défendre ce débouché, et puisse même permettre de la diminuer considérable

ment.

( N° 12. )

Au même.

Rambouillet, le 23 août 1806.

Monsieur Déjean, je désirerais que le premier inspecteur du génie me remît sous les yeux les plans de Brest, Toulon, Lorient, Cherbourg, avec les devis, et en me faisant connaître le temps nécessaire pour les exécuter; car il est convenable, dans le moment de paix et de prospérité où nous nous trouvons, de penser à l'avenir et à améliorer notre système défensif. Une ligue de plusieurs puissances est toujours formée par l'Angleterre. Elle exige de notre part un grand déploiement de forces sur le continent, et expose nos côtes aux entreprises de nos ennemis. Il faut calculer notre système de manière que dans un mois ou six semaines qui suivraient un débarquement, il ne pût

rien être entrepris qui nous produise un tort irréparable. De toutes les opérations qui peuvent avoir pour but un débarquement, la prise de nos ports et de nos chantiers est la plus attrayante pour les Anglais et celle qui nous causerait le plus de dommages. Nos chantiers et arsenaux les plus importants sont, Anvers, Rochefort, Brest, Toulon, Cherbourg, Lorient. Je vous ai déja donné des ordres pour les deux premiers; et je suis bien aise d'avoir des plans et des mémoires raisonnés sur les quatre derniers. Je désire également d'avoir sur le Havre, Nantes, Marseille et Bordeaux des mémoires qui me fassent connaître les fortifications intermédiaires et directes de ces quatre points. Je crois que, depuis la révolution, leur défense a été dérangée et culbutée. Il est convenable aussi de s'occuper des îles Marcouf, d'Anissant, de l'île d'Aix, de l'île d'Ieu, des îles d'Hyères : ce sont des points importants. Je désire connaître les fortifications actuelles de ces îles et les projets du génie. Je désire aussi que le premier inspecteur appelle mon attention sur les îles et les points destinés à notre cabotage, et les mouillages, soit sur l'Océan, soit sur la Méditerranée. Mettez-moi sous les yeux les projets de défense de la rade de Vado et du golfe de la Spezzia, où des escadres peuvent d'un moment à l'autre chercher un refuge contre des forces supérieures. Quand le premier inspecteur m'aura soumis ses plans, je désirerais qu'il s'occupât de dresser un plan et de rédiger un mémoire sur la frontière du Bas-Rhin, depuis la Moselle jusqu'à la Hollande, sur les places qui défendent la Belgique,

et sur lesquelles je désire également des plans et des mémoires, et sur les places de la Hollande du côté de l'Allemagne, afin de pouvoir conseiller le roi de Hollande dans une guerre suscitée par une nouvelle coalition, ou de l'aider des moyens des places fortes pour la conjurer. Je lirai aussi avec plaisir tout ce que le premier inspecteur aura à me proposer sur la frontière du Haut-Rhin, soit sur celle de la Suisse; mon intention étant de profiter de la situation prospère de mes finances, et des moments de paix que je pourrai avoir pour employer les moyens de l'art à m'assurer de nouvelles chances de succès dans les circonstances à venir. Comme tout ce que je demande par la présente lettre est un ouvrage de très-longue haleine, je désire que vous me remettiez chaque travail à mesure qu'il sera rédigé, place par place, frontière par frontière, à peu près comme il a été fait jusqu'à cette heure pour les nouveaux travaux.

(N° 13.)

Extrait des minutes de la secrétairerie d'état.

En notre camp impérial de Berlin, le 21 novembre 1806.

Napoléon, empereur des Français et roi d'Italie, considérant,

I

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Que l'Angleterre n'admet point le droit des gens suivi universellement par tous les peuples po

licés ;

2o Qu'elle répute ennemi tout individu appartenant à l'état ennemi, et fait en conséquence prisonniers de guerre, non-seulement les équipages des vaisseaux armés en guerre, mais encore les équipages des vaisseaux de commerce et des navires marchands, et même les facteurs de commerce et les négociants qui voyagent pour les affaires de leur négoce;

3o Qu'elle étend aux bâtiments et marchandises du commerce et aux propriétés des particuliers le droit de conquête, qui ne peut s'appliquer qu'à ce qui appartient à l'état ennemi;

4° Qu'elle étend aux villes et ports de commerce non fortifiés, aux havres et aux embouchures de rivières, le droit de blocus, qui, d'après la raison et l'usage de tous les peuples policés, n'est applicable qu'aux places fortes;

5° Qu'elle déclare bloquées des places devant lesquelles elle n'a pas même un seul bâtiment de guerre, quoiqu'une place ne soit bloquée que quand elle est tellement investie qu'on ne puisse tenter de s'en approcher sans un danger imminent;

6° Qu'elle déclare même en état de blocus des lieux que toutes ses forces réunies seraient incapables de bloquer, des côtes entières et tout un empire;

7° Que cet abus monstrueux du droit de blocus n'a d'autre but que d'empêcher les communications entre les peuples, et d'élever le commerce et l'industrie de l'Angleterre sur la ruine et l'industrie du commerce du continent;

8° Que tel étant le but évident de l'Angleterre, quiconque fait sur le continent le commerce de marchandises anglaises, favorise par là ses desseins et s'en rend le complice;

9° Que cette conduite de l'Angleterre, digne en tout des premiers âges de la barbarie, a profité à cette puissance au détriment de toutes les autres;

10° Qu'il est de droit naturel d'opposer à l'ennemi les armes dont il se sert, et de le combattre de la manière qu'il combat, lorsqu'il méconnaît toutes les idées de justice et de tous sentiments libéraux, résultat de la civilisation parmi les hommes ;

Nous avons résolu d'appliquer à l'Angleterre les usages qu'elle a consacrés dans sa législation maritime. Les dispositions du présent décret seront constamment considérées comme principe fondamental de l'empire, jusqu'à ce que l'Angleterre ait reconnu que le droit de la guerre est un, et le même sur terre que sur mer ; qu'il ne peut s'étendre ni aux propriétés privées, quelles qu'elles soient, ni à la personne des individus étrangers à la profession des armes, et que le droit de blocus doit être restreint aux places fortes réellement investies par des forces suffisantes.

Nous avons en conséquence décrété et décrétons ce qui suit :

er

ART. 1. Les îles britanniques sont déclarées en état de blocus.

2. Tout commerce et toute correspondance avec les îles britanniques sont interdits. En conséquence

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