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Nicéphore, porteur de lettres qui lui mandent plusieurs fails intéressant l'Eglise générale: les uns heureux, comme le retour des confesseurs; les autres déplorables, tels que les nouvelles manœuvres des agitateurs de l'Eglise, Novatien et Novat (10). Entre autres faits fâcheux, le Pape Corneille mande à saint Cyprien qu'un diacre nommé Nicostrate est dépossédé de sa charge pour avoir soustrait sacrilégement les deniers de l'Eglise et s'être approprié le bien de la veuve et de l'orphelin, dont il était dépositaire. (Saint CYPRIEN, lettre 53.)

L'évêque n'en était pas moins le père de la famille chrétienne, le refuge de tous les misérables; celui de qui les secours émanaient; il était regardé par les pauvres comme leur providence visible; il en était chéri autant qu'il les chérissait. Les pre

tres étaient continuellement au lit des malades qu'ils consolaient, pendant que les diacres subvenaient à tous leurs besoins. La charité est pour l'évêque et pour le pasteur, disait saint Ambroise, le chemin de l'amour de leur troupeau.

La centralisation des secours, dans la juridiction épiscopale, n'était pas exclusive; l'exemple de saint Paul qui universalisait les secours entre tous les chrétiens d'Ephèse, de Corinthe, de Macédoine à Jérusalem, cet exemple se retrouve vivant dans la personne d'Eusèbe, évêque de Verceil, vivant à la fin du IV siècle. L'Eglise, depuis qu'elle était née, avait prouvé que sa mission embrassait toute la famille humaine.

VII. Les pouvoirs civils réglementent l'administration charitable. La gestion des hôpitaux étant confiée aux diacres, aux clercs ou aux prêtres, le clergé étant dépositaire des biens et des revenus des pauvres, des biens et des revenus des hôpitaux, il était du devoir des pouvoirs civils de stipuler des garanties contre le désordre, contre les abus qui se glissent dans toutes les institutions, quelle que soit leur origine ou quel que soit leur objet, puisque les institutions les plus divines sont remises à des mains d'hommes. Justinien décrète que les administrateurs des hôpitaux, membres du clergé séculier ou régulier, n'auront pas la libre disposition des biens qu'ils auraient acquis depuis leur entrée en charge. Ainsi, la qualité de dépositaire et de gérant du bien des pauvres ôtait le droit d'acquérir pour soimême! Les biens qui advenaient aux administrateurs des hôpitaux étaient acquis aux hôpitaux eux-mêmes. S'ils échéaient à ces fonctionnaires par donation entre vifs ou par testament, ils étaient réputés attribués aux pauvres par leur entremise. L'interdiction du droit d'acquérir s'étendait aux évêques, directeurs suprêmes de la charité. Les biers qui leur étaient dévolus appartenaient aux pauvres de plein droit.

(10) Novat fut excommunié avec quatre autres faciens par le concile d'Afrique, de l'an 251, ce

Toucant au droit civil par le côté des garanties qu'elle consacrait, cette ioi adhérait aux institutions religieuses par le principe de la communauté des biens, établi fondamentalement dans la monasticité. Les administrateurs des hôpitaux et des établissements charitables, qu'ils appartinssent au clergé séculier ou aux ordres religieux, s'incorporaient pour ainsi dire à ces établissements. L'esprit de l'Eglise, comme celui de la loi de Justinien, était qu'ils ne passédassent rien en propre. Il est évident que c'était le droit religieux qui avait inspiré le droit civil. Mais cet état de choses, deux fois légal, n'en a pas moins vu naître ces grands abus, si désastreux et si mémorables dans l'histoire de la charité: l'empiétement du clergé sur le revenu des institunaire par l'Etat des biens du clergé; et, dans tions charitables et la confiscation réactionnos temps modernes, la confiscation simultanée des biens monastiques, des biens de de l'Eglise et du bien des pauvres. Nous n'en sommes point à traiter ce sujet, mais il fallait marquer son origine, le montrer à son apparition dans les faits sociaux.

VIII. Là où il n'existe pas d'hôpital, c'est à l'évêque que la loi attribue qualité pour l'acceptation des legs faits aux hôpitaux, à lui qu'elle donne mission de le distribuer aux pauvres du lieu. L'évêque est constitué également l'exécuteur testamentaire du donateur qui a légué des biens destinés au rachat des captifs. La loi déclare l'intervention de l'évêque en cette partie, nécessaire et de droit, nonobstant toute disposition contraire, obligeant le prélat à veiller à son exécution avec une vigilance épiscopate, ainsi que d'une négligence commise envers comme devant en rendre compte à Dieu , lui-même.

La série des lois charitables émanées des empereurs en contient une concernant la discipline de la charité, loi de prudence. dans la distribution des secours. Les dispensateurs des secours, dit la loi, ne doivent pas se laisser capter par des intrigants et des solliciteurs; ils doivent bien se garder de détourner, au profit de personnes dont les besoins sont contestables, les aumônes et les libéralités de l'Eglise, et de priver ainsi de ressources les vrais indigents. Que les économes présents et à venir sachent donc, ajoute l'empereur chrétien, que s'ils contreviennent à cette loi ils seront punis par la justice divine, sans préjudice de l'indemnité qu'ils seront condamnés à payer sur leurs biens terrestres par les tribunaux civils.

IX. L'accord des pouvoirs civils et du clergé dans l'intérêt de l'administration publique est de tous les temps dans l'Eglise. Les Pères du concile de Carthage en 404 députent deux prélats, membres du concile,

qui donne une date aux faits que nous rappor

lons.

à l'empereur Honorius, pour lui demander des lois sur plusieurs points de la discipline ecclésiastique qui avaient besoin de son autorité. (S. AUGUST., epist. 13, no 17, id. 185, ch. 7.) Léon I", s'adressant à l'impératrice Pulchérie, à laquelle l'empereur accordait une large part dans l'exercice du pouvoir, lui représente que l'Etat temporel ne sera prospère et tranquille qu'autant que le pouvoir royal et le pouvoir sacerdotal vivront unis. (S. LÉON, ep. 29, ad Pulcheriam Augusliam).

Deux décrétales de Gelase I" appuient celte doctrine. Par la première, adressée à deux évêques, il les avertit que les lois des princes méritent la même estime que les règles et les sentiments des Pères; par la seconde, il représente à Théodoric qu'il ne doit pas moins faire exécuter les lois qui concernent la religion que celles des empereurs touchant les affaires civiles.

L'administration des hôpitaux au VI siècle était exclusivement une fonction ecclésiastique. On ne l'attribuait qu'à des prêtres ou à des diacres qui ne rendaient compte qu'à l'évêque. Cependant certains hôpitaux sont gouvernés par des religieux ou des religieuses, avec l'exemption de la juridiction de l'évêque.

X. En France, les évêques réunis en concile remplissent, à l'égard des hôpitaux, les attributions exercées à d'autres époques par Je Souverain Pontife, Sous la seconde et sous la troisième race, les décrets d'institution des établissements hospitaliers émanent du Saint-Siége, tandis que, sous le règne de Childebert I, nous voyons le quatrième concile d'Orléans signer l'ordre de l'établis sement et de l'administration de l'hôpital fondé à Lyon par Childebert et par Ultrogothe, sa femme. I statue que les évêques de Lyon ne pourront distraire aucune partie du revenu de l'hôpital; qu'ils veilleront à ce que les administrateurs de l'hôpital soient des hommes de probité et craignant Dieu. Ordonne le concile que le même nombre de malades sera toujours admis et soigné dans l'hôpital; que les pauvres pèlerins et les voyageurs y seront toujours bien traités, conformément aux statuts de la fondation. Les spoliateurs des biens de l'hôpital sont frappés d'excommunication et d'un anathème irrévocable comme homicides et meurtriers des pauvres. (Voir HÔPITAUX.) L'administration des hospices de Lyon, contrairement aux habitudes administratives de ces temps, est confiée à des laïques du vi au x siècle. Ce n'est qu'à partir de l'année 1182 que des religieux de l'ordre de Citeaux prirent la direction de ces établissements. Des religieux de Haute-Combe, ayant à leur tête leur abbé, remplacèrent les pre

miers.

Le deuxième concile (ou synoae) de Tours (570) réglemente les secours à domicile. Il ordonne: que chaque ville nourrira ses pauvres, et qu'il en sera de même des curés et des habitants des villages, afin d'empêcher

que la nécessité ne porte les indigents de ces villes et villages à errer et vagabonder dans les autres localités. Voici le texte : Unaquæque civitas pauperes et egenos incolas alimenis cougruentibus pascat secundum vires; ut tam vicini presbyteri quam cives omnes suum pauperem pascant; quo fiet ut ipsi pauperes per alienas civitates non fatigentur. Ainsi les communes rurales sont soumises à la même obligation que les municipalités urbaines. Le canon du deuxième concile de Tours va plus loin que nos conciles modernes; car, au XIX siècle, les secours sont institués de telle sorte que les quatre cinquièmes des communes manquent d'une organisation de secours quelconque. Le même concile prononce l'excommunication contre les spoliateurs des biens des pauvres et la même peine contre les oppresseurs de leurs personnes, si, après les avertissements qu'ils en auront reçus de leurs évêques, ils ne cessent pas lours vexations et leurs violences. (Canons 5 et 26.)

Le quatrième concile d'Arles, au Ix siècle, modifie les termes du deuxième concile de Tours: il prescrit que chaque ville nourrisse ses pauvres et veille sur eux en temps de famine ou d'autre fléau. (Canon 14.)

La même année, le troisième concile de Tours ordonne que chaque évêque visitera, une fois l'an, tout son diocèse, dans le but notamment de protéger et de défendre les peuples, et de soulager les pauvres; c'est, dit le concile, une des obligations de leur charge. Lorsqu'ils verront des juges ou des personnes puissantes opprimer les pauvres, ils les doivent reprendre d'abord avec une charité pastorale; mais si elles ne se corrigent pas, ils doivent informer le roi de leurs violences, pour obtenir de l'autorité royale la répression de leur insolence et de leurs injustices. (Canon 17.)

XI. Les comtes du palais, devenus les maires du palais, remplaçèrent les préfets de la domination romaine. Les comtes sont les premiers magistrats de la justice ordinaire des principales villes du royaume. lis réunissent, dans leurs attributions, le soin à donner aux pauvres, aux veuves et aux orphelins. Une ordonnancé de Dagobert II, de l'an 630, porte expressément que les comtes, dans les audiences qu'ils tiendront chaque semaine, veilleront principalement à ce que les pauvres soient protégés, à ce qu'ils ne souffrent aucune violence. Ils tiendront la main à ce que ces mêmes pauvres vivent selon les lois; à ce qu'ils ne s'abandonnent pas au libertinage. Capitular, reg. Franc., t. I col. 67, r. 105.) Subvention aux vrais pauvres, répression de la paresse et du vagabondage, de la charité publique, deux conditions inséparables de la police des Etats.

Une ordonnance de Charlemagne de 801, enjoint de rechef aux comtes de protéger l'Eglise, les veuves, les orphelins et les pauvres. Suit également la rescription de

sant partie de la donation d'Archambault, comte de Paris. Ceux-ci sont alors investis de la possession de la totalité de l'HôtelDieu et de ses dépendances.

poursuivre et de punir les voleurs et les malfaiteurs, et de ne pas souffrir qu'ils demeurent en sûreté dans l'étendue de leur juridiction. (Ibid., col. 350 et seqq.) Lés gens sans aveux sont regardés comme ne faisant qu'un avec les voleurs et les malfaiteurs, tant on les estime de même race et d'un même danger pour l'ordre et la sûreté publique.

Une autre ordonnance de Charlemagne, de 802, renouvelle l'injonction aux comtes, et ordonne aux centeniers, chacun dans leur juridiction, de protéger les pauvres et sans transition leur prescrit de punir les larrons, les homicides, les adultères. (Capitular., coll. 370.) Traduisant en loi la vérité proverbiale que l'oisiveté est la mère de tous les vices. (Dic mihi cur ... factus est adulter. In promptu causa est: desidiosus erat. [OVID., 1. i De Tem.].)

En 823, Louis le Débonnaire recommande encore une fois aux comtes une protection particulière envers les veuves, les orphelins et les pauvres, el sans transition, enjoint de punir les vols et autres fautes qui troublent la tranquillité publique. (Capit., col. 634 et 636, col. 737 ou 757.) Ce prince, par une autre ordonnance de 829, montre pour les pauvres une prédilection digne du nom qu'il porte, pris dans le bon sens. Il exhorte les comtes et les commissaires qu'il envoie dans les provinces, à apporter un grand soin à ce que les pauvres ne souffrent aucun préjudice; à ce qu'il p'en reçoive aucune plainte. Ils doivent agir ainsi s'ils veulent mériter ses bonnes graces. (Ibid., col. 1218. addit. 4.)

Dans les paroisses où il n'y avait pas de diacres, la distribution des aumônes était entre les mains des marguilliers, sous la direction du curé; c'étaient eux qui tenaient les rôles ou registres d'inscription des pauvres adinis à l'aumône, et ceux de comptabilité de la caisse des pauvres. Plus tard, leurs attributions ont été restreintes à l'administration des biens des Eglises; mais dans beaucoup de paroisses ils continuèrent de participer, et cela, jusqu'en 1789, à l'admi nistration des secours à domicile.

En 829, l'évêque Inchade assigne à l'Hôtel-Dieu de Paris, les dimes des biens, dont il gratifie son chapitre, conformément à la décision du concile d'Aix-la-Chapelle. On voit, par les lettres de fondation, que les chapoines, à certaines époques, doivent laver les pieds des pauvres de l'Hôtel-Dieu.

siè

Les chanoines de Paris, sous la surveillance de l'évêque, ont l'administration de l'Hôtel-Dieu de cette ville; à cette époque leurs droits ont même tous les caractères de la propriété. D'abord ils n'en possèdent que la moitié, puis Renaud, évêque de Paris, à la fin du x ole (1002), leur cède l'autre moitié. Cette donation est confirmée par une bulle de Jean XVIII, en 1007, à la fin du xr siècle. Guillaume de Montfort, autre évêque de Paris, abandonne aux chanoines de NotreDame, la chapelle de Saint-Christophe, fai

L'évêque de Paris avait conservé la haute surveillance de cet hôpital, qu'il ne ponvaitaliéner, mais il avait abandonné le reste aux chanoines, administration et possession.

(Voir plus loin: administration de l'HôtelDieu de Paris, du XIIe au XIX' siècle et HoPITAUX ET HOSPICES.)

Un concile de l'an 816 statue qu'un chanoine sera choisi pour gouverner les hôpitaux, même au temporel. (Voyez LÉGISIATION CHARITABLE. )

Au x siècle (1053), le gouvernement gé. Le gouverneur doit jurer, sur les de l'hôpital d'Arbois, est confié au clersaints Evangiles, qu'il ne distraira rien à son profit des choses de la maison. Il n'a droit qu'à sa prébende. Il est alloué aux clercs trois deniers. Il est interdit aux paudredi pour quérir leurs aumônes, ce qui vres de venir à Arbois le lundi et le venimplique l'autorisation pour eux de s'y rendre les autres jours à cette fin. Mais il leur est fait défense de se montrer sur les marchés et de fréquenter les tavernes. Les pauvres doivent se rendre le matin, à leur faire leur oraison. Celui qui y manque perd arrivée, au moutier; là, sonner la cloche et sa prébende. « La perd aussi qui fait un larcin. »Il est fait un don aux pauvres pour les marier. Les garçons et donzelles qui se présentent à la maladrerie pour y loger, n'y hébergeut plus d'un soir.

XII. Saint Bernard reproduit au x siècle siècles. Une personne engagée dans le serles préceptes des docteurs des premiers vice de Dieu ne doit point, dit-il, s'embarrasser dans les affaires séculières. (Traité de la considération, liv. 1", chap. 6.) Apprenez, repète-t-il au clergé, que vous êtes élevés au-dessus des autres, non pas tant pour exercer la domination sur eux, que pour exécuter ce qu'il faut dans le temps. Sachez que

vous avez plus besoin d'un hoyau que d'un sceptre; que vous n'êtes pas élevé pour régner, mais pour arracher les mauvaises herbes; à plus forte raison, devez vous prendre garde qu'on ne vous trouve pas dans les délices ni dans les pompes du siècle. Cette vue générale que vous devez avoir sur tout le monde vous engage bien plus au travail qu'au repos. (Liv. 11, ch. 6.)

L'administration des hospices et des aumônes, dans les coutumes de Senlis, appartient aux évêques et aux ecclésiastiques. De hospitalariis domibus et de iis quæ in eleemosynam duntur, dispositio ad episcopum vel ecclesiasticam personam pertinet. Lettres de Philippe-Auguste de 1200. (Ordonnances du Louvre, t. XI, p. 283, art. 13, 14.)

On peut donner en aumônes des objets meubles et immeubles: Eleemosyna tam de mobilibus quam immobilibus possunt fieri. L'usage général des hospices est de rece

voir les passants durant vingt-quatre heures seulement; c'est la coutume de la Touraine, de l'Anjou, de la Normandie et de la Picardie. Quelques fois l'hospitalité se prolongeait jusqu'au troisième et quatrième jour. (Antiquités de Paris, par DUBREUIL, liv. III, chap. 1: Fondation de l'Eglise et hôpital Saint Jacques aux Pèlerins de la rue SaintDenis.) Le quatrième jour, on me fit-mauYais visage; le cinquième, j'en sortis, fait dire Alexis Monteil, au pèlerin reçu à l'Hôpital de Paris qu'il met en scène, Un confesseur avait condamné son pénitent à loger un pèlerin pendant. un mois. Je demeurai chez lui tout le temps de sa pénitence qu'il trouva fort long, fait dire Monteil au même pèlerin.

L'Hôpital de la Madeleine, fondé à Paris en 1216, recevait pendant une nuit les mendiantes qui traversaient Paris. Le lendemain matin on les congédiait en leur donmant un pain et un denier.

L'administration est au moins demi-séculière dans l'Artois au x siècle. Il s'est introduit quelques abus à l'Hôpital du Grand-Val d'Arras; les majeur et échevin fixent le nombre des pauvres qui doit y être admis et règlent, le 4 juillet 1293, qu'à l'aYenir, nul ne pourra être reçu sans leur permission donnée par écrit. (Compte rendu aur chambres du conseil d'Artois, 2 juillet 1704.) Ils réduisent le nombre des pitances à huit hommes et quatre femmes. C'est à eux que les comptes sont rendus par ceux qu'ils onl commis à la recette des biens de la maisou. Les comptes sont clos en présence du procureur de la ville.

En 1211, l'Hôpital Saint-Jean de Bruxelles est desservi par trois frères et dix sœurs. (Foy. CHARITÉ A L'ÉTRANGER, chap. Hôpitaux.)

Une ordonnance de saint Louis que nous mentionnons aux mots CAPITAL ET REVENUS, et portant la date de 1260 (Voir ordonnances du Louvre), charge les frères de l'HôtelDieu de la garde de cette ordonnance. Il n'est pas encore question des sours. On verra, quand nous parlerons plus loin de l'HôtelDieu, que par ce mot de frères il ne faut pas entendre des religieux, de même que lo aot de sœurs s'appliquait souvent à des femmes ou filles laïques attachées à la desserte des hôpitaux.

En 1308 Pierre de Savoie, archevêque de Lyon, confirme les religieux de Haute-Combe dans la direction de l'hôpital. Ces religieux cédent la direction de l'Hôtel-Dieu aux religieux de Chassagne au prix de 1200 livres; ces derniers gouvernent l'Hôtel-Dieu pendant plus d'un siècle. En 1478, des plaintes s'élèvent parmi le peuple contre la gestion de l'hôpital, et alors les religieux en abandonnent l'administration aux conseils de la ville moyennant un prix de cession de 1050 livres tournois, se réservant toutefois quel ques propriétés en dépendant. De 1478 à 1585 administration demeure aux mains

des consuls de la cité jusqu'en 1585; à cette époque les échevins élisent des directeurs ou administrateurs au nombre de douze, et plus tard de quatorze, qui gèrent l'hôpital; mais ils conservent néanmoins la haute direction et la surveillance de cet établissement. Les administrateurs, directeurs ou recteurs de l'Hôtel-Dieu administrent en même temps l'hôpital général. Cet état de choses dure jusqu'en 1789. (Voy. Lettres patentes du 23 août 1783. Archiv. du minist. de l'intérieur.)

XIII. Les lettres patentes concernant l'Hôtel-Dieu sont écrites en latin jusqu'en 1328. Philippe de Valois statue encore dans cette langue au sujet de l'Hôtel-Dieu en janvier 1328 mais les lettres patentes de 1339 sont en français; cependant on veut revenir à la langue latine en 1467 sous le règne de Louis XI. Les employés ou préposés porten! le nom de ministri, les servants celui de servitores, les frères et sœurs sont dénommés fratres et sorores, le directeur porte le nom de magister. Le titre de maître a duré jusqu'en 1789.

(1311 et 1312.) Le xiv siècle s'ouvre par une décision du concile de Vienne, souvent citée; elle porte que ceux de qui dépend la fondation, les fondateurs ou leurs ayant-cause, et à leur défaut les ordinaires, les évêques, veilleront à ce que les directeurs des maisons de charité ne détournent pas à leur profit les revenus destinés aux pauvres. Le concile décrète : qu'aucun hôpital ne sera désormais donné comme bénéfice à des clercs séculiers, sous peine de nullité, à moins qu'il n'en soit ainsi ordonné par le titre de fondation. Le concile statue, en outre, et c'est là ce qui mérite surtout attention, que, hors le cas dont il vient d'être parlé, le soin des hôpitaux sera remis entre les mains de personnes sages, intelligentes; sensibles aux misères des pauvres et capables de se comporter etr vrais tuteurs, obligées, au reste, à prêter serment, à faire leur inventaire et à rendre des comptes annuels, aux ordinaires. C'est le point de départ des administrations faiques. Le principe de la comptabilité est civil. de droit canonique avant d'être de droit

(1320.) Une bulle du Pape Jean XXII institue à Paris l'hôpital et chapelle SaintJacques aux pèlerins, en 1320 rue SaintDenis). Les lettres d'institution du Souverain Pontife sont bullées de vraye bulle, avec un fil de chanvre, non trouées, lacérées ny biffées, y corrompues en aucune partie. ains exemptes de tout doute et suspicion. Telle est la formule. Jean, évesque de Beauvais, et Geoffroy Du Plessis, notaire de la Ste Eglise Romaine, chargés de procéder à une enquête préalable, cum debita maturitate, font comparaître, à cet effet, par devant eux: premièrement, les procureurs ou économe (iconomos), les administrateurs des confrères pèlerius de l'hôpital Saint-Jacques; se

condement, les représentants du chapitre de Saint-Germain-l'Auxerrois; troisièmement, le curé de Saint-Eustache de Paris. Les procureurs et économes sont : Robert dit Lapie, Simon dit Beaudehors, Corral dit Roussac, et Girard dit Hazard, quaire bourgeois de Paris. Les administrateurs laïques de l'hôpital sont donc au nombre de quatre membres. Grégoire de Rome et Nicolas de Hautefagne, prêtres et chanoines de Saint-Germain l'Auxerrois, discrètes personnes, représentent le chapitre: le doyen est absent. La paroisse, ou l'église paroissiale, écrit la vieille traduction, est représentée par son curé, ou recteur, discret homme, maitre Bernard. On donne lecture aux comparants des lettres apostoliques en vertu desquelles procède l'évêque de Beauvais, et on leur demande de faire apparoir du dot qu'ils entendent assigner à l'hôpital : De dote quam et hospitali assignare volebant. C'est exactement ainsi que procède le conseil d'Etat lorsqu'il s'agit d'autoriser aujourd'hui un établissement semblable Point de fondation sans autorisation.

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Les administrateurs, le chapitre et le curé exhibent des lettres scellées du sceau du Châtelet de Paris, rapportant la preuve la plus authentique que magnifique seigneur Charles, comte de Valois et d'Anjou, et quelques autres, tant ciercs que laïcs, nobles et ignobles (ancienne traductionj, nobi. les et ignobiles, -enflammés de dévotion et exposés aux œuvres de charité, operibus expositos charitatis, — avaient donné et eslargi audit hôpital, en pure et perpétuelle aumosne, diverses rentes, possession et terres, situées en divers endroits, en la cité et faux bourgs de Paris et lieux circonvoisins, lesquelles rentes, non remboursables, montaient à 170 livres parisis. Guillaume Pierre, Jean de Cormeilles, Conrald Touffat, Guillaume Capet et André la Guette, bourgeois de Paris, engageant eux et leurs héritiers au payement sur leurs biens, meubles et immeubles, présents et à venir, au cas qu'elles fussent insuffisamment garanties.

L'évêque de Beauvais et le notaire apostolique ont pris conseil de gens doctes et savants, lesquels ont estimé qu'au moyen des rentes de 170 livres, au moyen des offrandes oblationes - aumosne et largesses qui étaient journellement offertes à l'hopital, par dévotion, il était pourvu de dot sullisante pour supporter ses char

ges.

Les représentants du Saint-Siége avaient eu ensuite à s'interposer pour mettre d'accord les procureurs et économes de l'hôpital, le chapitre et le curé, et ils y étaient parvenus. Dieu permettant, après plusieurs traités, le chapitre, le curé, les procureurs et économes sont parvenus à cette conciliation. Nobis mediantibus ad hanc pacis concordiam devenerunt.

Le curé et le chapitre, émus, conformant leurs affections aux volontés apostoliques

avaient expressément consenti à ce que les confrères et pèlerins construisissent l'hôpital au lieu où il était déjà commencé, en la grande rue proche la porte Saint-Denis. L'emplacement s'étendait depuis la maison appelée l'Ardoise, jusqu'à la rue Mauconseil, et du haut de cette dernière rue, jusqu'à la maison de Laurent Prevost, auxquelles elle était attenante par en bas. Les jurés de Paris avaient planté des bornes pour déterminer ses limites selon les conventions intervenues. D'après çes conventions, ne devaient pas être comprises dans l'enceinte du terrain assigné à l'hôpital, la maison de Jean Roussac, celle de Jeau La Nasse, celle de Roger, huissier, celle qui fut à Jean de Lusarches, celle de Matthieu de Beauvais, ni celle de Guillaume de Fouchenay, ni celle de Jacques Cocques, ni celle d'Estienne Barroillier, ni celle eufin de Pierre Mouleur. Les administrateurs devaient faire construire une chapelle dans l'hôpital, et établir un cimetière pour ensevelir les pèlerins, les pauvres, les malades et les serviteurs de l'hôpital; ils devaient se pourvoir d'une clochie de la pesanteur de deux cents livres. quod pondus quoad hoc competens arbitramur. Pour balancer ces charges, ils auraient le droit de recevoir et de s'appliquer toutes les offrandes et aumônes accordées à l'hôpital et à la chapelle, par les fidèles, y compris celles qui avaient pour objet la sépulture, sans que le chapitre, le doyen et le curé pussent, à l'avenir, en exiger aucune portion, à titre de droits parochiaux, chapelle ou de cimetière. Toutefois, si quelque paroissien de Saint-Eustache, mort à l'hôpital, demandait à y être inhumé, le droit d'inhumation appartiendrait au curé de cette paroisse, comme cela avait lieu pour la paroisse des Innocents.

de

Les administrateurs, de leur côté, consentaient, pour indemniser le chapitre t l'église paroissiale, à attribuer au chapitre 400 livres, et au curé, pour lui et son église, 160 livres parisis, convertissables en rentes, dont ils payeraient aux procureurs des confrères et pèlerins les frais d'amortissement.

Ces conventions arrêtées, l'évêque de Beauvais et le notaire de l'Eglise roinaine, toujours en conformité du mandement du Saint-Père, ordonnent que les frères de l'hôpital présenteront à l'évêque de Paris, ordinaire du lieu, ou à son grand-vicaire, une personne capable, qui sera élue en la charge de trésorier.

Ainsi, jusqu'à présent quatre administrateurs, procureurs ou économes, un trésorier, et des serviteurs, dont il était parlé tout à l'heure, à propos du cimetière de l'hôpital, composent le personnel de la maison hospitalière. Le service religieux est formé de trois prêtres et de quatre clercs, institués également par l'ordinaire. Dès qu'ils sont nommés, ils sont présentés au trésorier, qui est chargé de leur installation. Les fonctions des quatre cleres sont, au surplus, civiles et

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