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peu près le milieu des casernes sur nos têtes; à cet endroit la voûte s'abaissait jusqu'au niveau de l'eau, et il n'était plus possible d'avancer davantage : cependant la galerie ne s'arrêtait pas à ce point, car le plafond ne

(Vue de Bonifacio.)

s'abaissait que graduellement, et non pas brusquement, comme pour une clôture, et l'eau, c'est-à-dire la galerie elle-mème, conservait encore sept à huit pieds de profondeur. Il se peut qu'au-delà de ce barrage le plafond se relève de nouveau, mais il est bien certain que la grotte, à son autre extrémité, n'aboutit pas jusque dans la mer; car elle déboucherait nécessairement sous l'eau, et par conséquent l'eau qu'elle renferme serait de même niveau et de même salure que celle de la Méditerranée.

Il y a encore une autre grotte à l'entrée du port, peu profonde, mais étonnante par l'énormité de son ouverture, qui a plus de cent pieds de hauteur: elle est surmontée par les ruines d'un vieux couvent, et par les murs et les batteries de la citadelle.

La grotte la plus remarquable s'ouvre sur la mer, à l'entrée du détroit, par une grande arcade, percée dans une falaise blanche et unie comme un mur. L'eau y est profonde, et les vagues s'y promènent librement. On rencontre d'abord un grand corridor, qui, peu à peu, s'enfonce dans les ténèbres, et qui enfin se termine brusquement contre la paroi du rocher. Mais, à la gauche, il reste un embranchement à la porte duquel on prend d'abord peu d'attention, à cause de la nuit qu'il fait, et du mouvement des eaux. C'est par cet embranchement qu'il faut se diriger, car c'est là le chemin qui mène à la grande salle. Ce passage est le plus difficile dans les instans où la mer n'est pas très calme. Lorsque nous y pénétrâmes, il y avait un peu de houle en mer, et son influence se faisait très bien sentir jusque dans le souterrain; l'eau, avec sa périodicité tranquille, frappait de chaque côté la muraille du corridor, et retombait ensuite du haut de la voûte, avec un fracas d'échos retentissans et confus. C'était un curieux specta cle que de voir et de sentir notre balancelle qui bondissait légèrement sous un couvert semblable à celui de ces

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grands cloîtres des couvens de l'Italie. Le patron n'avait pas voulu abattre le mât, et la banderole frisait la voûte; enfin, vers le milieu, soit que le plafond füt plus bas, ou la vague qui nous portait plus haute, nous heurtâmes subitement: le mât touchait; et comme nous ne pouvions plus continuer à monter sur l'eau, ce fut l'eau qui continua à monter sur nous, et elle commençait à nous rendre dans notre bateau une fort incom mode visite, quand, à notre grande satisfaction, la malencontreuse mâture, qui jusque là tenait ferme, se rompit enfin ; c'était heureux, car la barque aurait sombré là en un fort mauvais lieu pour se faire repêcher; et quant à nos propres personnes, elles auraient eu assurément quelque peine à sortir de ce trou, et surtout, une fois en mer, à faire venir à elles quelque bateau pour les ramener en ville; quelques coups d'aviron vigoureusement appliqués nous mirent hors d'affaire, et nous entrâmes avec un tranquille et léger sillage dans la plus belle salle, je crois, que la nature ait jamais faite : une étendue comme celle d'un étang, occupée par une eau bleue comme le ciel, et transparente comme l'air, jetant de bas en haut, et de tous côtés, ses reflets azurés contre chaque saillie d'une voûte immense, tout hérissée de pointes et de dentelures, et prenant le soleil à plus de cent pieds de haut dans la campagne au milieu des myrtes et des lauriers en fleurs. Les Grecs auraient fait de cette retraite mystérieuse et profonde le palais d'Amphitrite ou de Neptune, et auraient placé au péristyle et sous les corridors le cortège sacré des tritons et des nymphes. Nos pécheurs ne se font plus des imaginations si éloignées de la réalité des choses. Il faut dire cependant qu'ils sont tous frappés d'un res pect involontaire, en présence de cette splendeur et de cette magnificence; cette architecture est celle d'un temple, et un temple parle toujours, lors même qu'il est privé de ses divinités. Quelques phoques, que les navigateurs antiques n'auraient point manqué de nommer hardiment des syrènes, ont choisi cet asile peu visité pour leur demeure; ils se promènent souvent devant l'entrée, comme des vigies à leur poste, et se couchent dans l'intérieur, sur quelques pierres éboulées, qui forment çà et là des tables au-dessus de l'eau; l'influence de la maison qu'ils ont choisie les protège; quoique rivaux en matière de pêche, les marins les voient avec plaisir, admirent leurs jeux, et ne cherchent jamais à leur faire aucun mal.

Je termine ici cet article, un peu long peut-être pour le lecteur, comme tous les récits de voyageurs, mais trop court, cependant, pour donner une idée complète du pittoresque et de la variété de ces lieux, peu connus des habitans du continent, et des Corses eux-mêmes, qui visitent bien rarement cette pointe méridionale de leur pays, et qui ont coutume de dire que si la mer venait à couper le passage entre Bonifacio et le reste de l'île, il faudrait bien long-temps pour qu'on s'aperçut de ce changement à Bonifacio et dans l'île. Les environs de Bonifacio sont aussi très particulièrement intéressans sous le rapport de la géologie et de l'histoire naturelle; mais ces choses ne sauraient trouver place dans cette notice, uniquement consacrée à la description du paysage.

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LE JUPITER OLYMPIEN.

Le Jupiter d'Olympie fut non seulement le chefd'oeuvre de Phidias, mais encore celui de la sculp ture antique. Phidias était très âgé quand il exécuta cette statue: vers la 85 Olympiade, obligé de s'enfuir d'Athènes, par suite de l'accusation de sacrilége et de vol intentée contre lui, il se réfugia en Elide, à l'époque où les travaux du temple d'Olympie étaient en très grande activité; et les Éléens s'empressèrent de con

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pays, était couvert de dalles de marbre taillées en forme de tuiles. C'était dans le fond du temple que se trouvaient placés le trône et la statue de Jupiter. Phidias conçut l'un et l'autre dans les proportions les plus colossales, et il eut à sa disposition les plus riches matériaux.

Le dieu, fait d'or et d'ivoire, se voyait assis sur son trône; sa tète portait une couronne imitant la branche d'olivier. Dans sa main droite il avait une victoire faite aussi d'or et d'ivoire, tenant une bandelette, ayant sur sa tête une couronne. Dans la main gauche de Jupiter était un sceptre brillant de toutes sortes de métaux; au sommet du sceptre était posé un aigle; le dieu avait une chaussure d'or; son manteau était également d'or, on y avait peint des figures et des fleurs.

La structure élémentaire du trône consistait en un bâtis de charpentes, et était de forme carrée; trois sortes de figures entraient dans les décorations; des bas-reliefs, des rondes-bosses, puis des ornemens peints; ces figures avaient été travaillées séparément, placées, rapportées et incrustées sur le bois. Ce trône était un assemblage diversifié d'or, de pierres précieuses, d'ivoire et d'ébène. A chacun des quatre pieds, on voyait quatre victoires, et encore deux autres en avant de la partie inférieure de chaque pied. Sur chacun des quatre pieds étaient représentés de jeunes Thébains enlevés par des sphynx. Au-dessous des sphynx, Apollon et Diane perçaient de leurs flèches les enfans de Niobé. Dans le milieu des pieds du trône, s'étendaient quatre traverses carrées, qui allaient d'un pied à l'autre. Sur la traverse qui s'apercevait du côté de l'entrée du temple, il y avait huit figures qui représentaient des combats athlétiques. On voyait un jeune homme se ceignant la tête d'une bandelette, qui passait pour avoir été fait d'après Pantarcès, jeune Éléen, favori de Phidias. Sur les autres traverses, était représentée la troupe des compagnons d'Hercule, prête à combattre contre celle des Amazones. Le nombre des personnages des deux troupes était de vingtneuf. Le trône ne portait pas uniquement sur quatre pieds; il s'élevait encore dans le milieu de leur intervalle deux colonnes égales aux pieds. Sur les sommités du trône et au-dessus de la tête de la statue du dieu, Phidias avait sculpté d'un côté, les Grâces, de l'autre, les Heures, les unes et les autres au nombre de trois. Le marche-pied de Jupiter avait des lions d'or, et sur ses faces on voyait le coinbat de Thésée contre les Amazones. Sur le soubassement qui portait le trône étaient placés beaucoup d'autres objets d'ornement. Les sujets représentés en or étaient le soleil montant dans son char; ensuite Jupiter et Junon : tout auprès une Grâce; celle-ci donnait la main à Mercure, qui la donnait à Vesta. Après Vesta, c'était l'Amour recevant Vénus qui sort de la mer, et que Pitho couronne; suivaient Apollon et Diane, Mercure et Hercule. A l'extrémité du soubassement étaient Neptune et Amphitrite, et la Lune montée sur un cheval.

La tradition grecque racontait que l'habileté de Phidias avait reçu un témoignage éclatant de la satisfaction de Jupiter lui-même. L'ouvrage terminé, le grand artiste pria le dieu de lui faire connaître s'il en était content; aussitôt le pavé du temple fut frappé de la foudre.

Le pavé en face de la statue était fait en marbre noir, entouré circulairement de marbre de Paros, destiné à arrêter l'huile qu'on versait sur le pavé. Cette huile servait à préserver l'ivoire de l'humidité de l'Altis, sur le terrain duquel avait été construit le temple d'Olympie.

dépouilles remportées sur les Pisans et leurs alliés après la destruction de Pise.

La statue et le trône de Jupiter étaient éclairés par une ouverture pratiquée dans la toiture du temple; un voile de pourpre tombant en avant pouvait garantir la statue de l'influence de l'air extérieur.

Le Jupiter assis avait, sans le marche-pied, jusqu'au sommet de la tête, 30 pieds. Le marche-pied avait 3 pieds; le trône, sans le soubassement, avait 40 pieds de hauteur et 24 de largeur; le soubassement 12 pieds de hauteur.

C'est avec les bas-reliefs et médailles de l'antiquité qui ont conservé un grand nombre des figures du Jupiter de Phidias, et avec les récits des anciens écrivains, et surtout de Pausanias, qu'il a été possible de se représenter cette merveille de la sculpture antique.

Nous devons à M. Quatremère de Quincy un magnifique ouvrage sur le Jupiter Olympien, dans lequel il est parvenu, à recomposer la statue, le trône et les ornemens; c'est dans ce beau travail que nous avons puisé les détails de cet article.

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CANAUX DU BASSIN DE LA LOIRE.

Le bassin de la Loire communique avec celui de la Seine par le canal de Briare, le plus ancien canal à point de partage, selon M. de Humboldt. Commencé en 1503 par Sully, qui y fit travailler l'armée, il fut livré à la navigation en 1642. S'ouvrant d'un côté dans la Loire à Briare, de l'autre à Montargis dans le canal de Loing qui reçoit aussi le canal d'Orléans, et qui débouche dans la Seine à Saint-Mamert près de Moret, il sert à conduire à Paris les denrées du Berry et de tous les pays que fertilise la Loire.

Le canal du Nivernais, commencé en 1784, prend son origine à Decize sur la Loire, et aboutira, quand il sera terminé, à Auxerre, dans l'Yonne. Il est destiné à conduire les fers, les bois et les autres marchandises de la Nièvre dans le bassin de la Seine et dans celui de la Loire.

Le canal du centre ou du Charolais, commençant à Digoin sur la Loire, se termine à Châlons sur la Saône; il sert de communication entre les bassins des deux rivières qu'il joint, et par suite avec le Rhône, auquel il porte les denrées de la France centrale, pour en recevoir celles de la France méridionale, et même des pays du Levant, par Marseille, Arles et Tarascon. Ce même canal, par le moyen de celui du Rhône au Rhin ou du Doubs, qui se jette dans la Saône à Saint-Jean de Losne, joint le bassin de la Loire avec celui du Rhin.

Le canal latéral à la Loire se divise en deux parties: la première, qui comprend la distance de Digoin à la rivière d'Allier, sera à point de partage, et alimenté par les affluens de gauche de la Loire. Elle rentrera dans ce fleuve vis-à-vis Gimouille au-dessus de l'embouchure de l'Allier, et la navigation aura lieu dans la Loire, sur une longueur de 2055 mètres jusqu'à l'origine de la deuxième partie, qui commencera vis-àvis Cuffy, et qui continuera jusqu'à Briare.

Cette deuxième partie recevra près de Saint-Germain (Cher) une branche du canal du Berry, partant du Rhiméré, près de Saint-Amand Montrond, où elle se Une inscription placée sous les pieds de Jupiter por-joint à celle qui vient de Montluçon en remontant le Cher. tait: Phidias, fils de Charmides, Athénien, m'a fait. Ce dernier canal, qui aboutira jusqu'à Tours, aura Les Éléens élevèrent le temple et la statue avec les quatre-vingts lieues de longueur, sur une pente totale

de 246 mètres avec 110 écluses. Les dépenses faites de- 4 Septembre 476. Abdication de Romulus Aupuis 1810, année de l'ouverture des travaux jusqu'à gustule, fils d'Oreste, Patrice de Rome, et fin de l'emla fin de 1832, s'élèvent à 12 millions, et les dépenses pire romain. à faire se monteront encore à 5,611,649 francs. Outre 4 Septembre 1784. les avantages que ce canal procurera au Berry en trans-géographe, qui leva le plan topographique de la France Mort de Cassini de Thury, portant ses produits et ceux d'une partie du Bourbon- entière, et détermina par ce moyen la distance de tous nais, il pourrait prendre une in mense importance s'il les lieux à la méridienne de Paris et à la perpendicuétait prolongé jusqu'aux sources du Cher. Là, avec les laire de cette méridienne. eaux du Chavancoux, qui se jette dans la Dordogne audessous de Bort, on continuerait un canal, qui, par le moyen de cette dernière rivière, mettrait le bassin de mique, auteur du Joueur, du Distrait, du Légataire 5 Septembre 1709. Mort de Regnard, poète cola Garonne en communication directe avec celui de la universel, des Folies amoureuses, etc. Loire, et par conséquent avec celui de la Seine. Ce canal serait d'autant plus utile qu'il fournirait à bon turaliste, né le 20 août 1762, à Chamelet en Beaujo5 Septembre 1797Mort de Riche, voyageur namarché à la France centrale les denrées du Langue-lais. Ce jeune savant, ami de Fabricius, de Vicq-d'Azyr doc et de la Guyenne, qu'il vivifierait une contrée peu peuplée en y répandant l'abondance, et qu'il completerait le système de communication du bassin de la Loire avec tous les autres bassins de notre belle France.

LA SEMAINE.
CALENDRIER HISTORIQUE.

31 Août 1218. Mort de Melik-el-Adhel, sultan d'Egypte et de Damas, et frère de Saladin. Madame Cottin a faussé le caractère de ce guerrier des croisades, qui se distingua d'ailleurs par son courage et son habileté politique.

31 Août 1615.-Mort d'Étienne Pasquier, jurisconsulte et antiquaire, auteur des Recherches sur l'histoire de France.

31 Août 1811.-Mort de Bougainville, navigateur. Son voyage autour du monde a popularisé son nom. Il avait été comte de l'empire et sénateur.

1er Septembre 1575. -Mort de Cardan, médecin, magicien, astrologue, physicien, métaphysicien. Ce savant, dont la crédulité et le cynisme sont déplorables, avait annoncé le jour précis de sa mort, et l'on prétend que, ce jour étant arrivé, il se tua lui-même pour ne pas être convaincu d'erreur.

1er Septembre 1715. Mort de Louis XIV.

er

1 Septembre 1715. Mort de François Girardon, sculpteur français, rival de Puget. Parmi ses plus célèbres ouvrages sont le mausolée du cardinal de Richelieu placé dans la Sorbonne, et les Bains d'Apollon à Versailles.

1er Septembre 1830. · Commencement de la révolution belge. Entrée du prince d'Orange à Bruxelles.

2 Septembre 1715. Le parlement casse le testament de Louis XIV, qui, en nommant le duc d'Orléans chef d'un conseil de régence, donnait cependant la plus grande part de l'autorité au duc du Maine. Sur les conclusions de Joly de Fleury, avocat-général, le duc d'Orléans fut déclaré régent de France. 2 Septembre 1813. Mort du général Moreau, blessé par les Français, le 28 août précédent, près de Dresde. Il était né, en 1763, à Morlaix; il avait été reçu avocat à Rennes.

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recherche de La Peyrouse le 28 septembre 1791. Au
et de Cuvier, fit partie de l'expédition qui partit à la
fert, les Hollandais s'emparèrent, le 18 octobre 1793,
retour de l'expédition, où Riche avait beaucoup souf-
de ses papiers et de ses collections scientifiques; il en
mourut, dit-on, de douleur, à trente-cinq ans.
5 Septembre 1798. Loi qui établit une conscrip-
tion militaire en France.

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connu par ses Commentaires critiques et littéraires, et
6 Septembre 1658. Mort de Claude de Saumaise,
par une Apologie de Charles 1o, roi d'Angleterre, qui
fut réfutée par Milton.
Histoire de France, d'un Précis de l'histoire universelle,
6 Septembre 1808. Mort d'Anquetil, auteur d'une
la Cour et le Régent.
et d'un traité intitulé : l'Esprit de la Ligue, Louis XIV,

CHASSE AUX BÊTES SAUVAGES DANS L'ORIENT.

CHASSE AU TIGRE.

CHASSE AU LION. AVENTURE D'UN CHASSEUR.

Au penchant d'un petit coteau, à travers les sentiers de quelques arpens de bois, des hommes à cheval poursuivant tout un jour, un cerf, un sanglier, un renard ou un loup, avec des fanfares, des cris de piqueurs, et des jappemens de chiens, voilà ce que la chasse offre de plus solennel et de plus tragique dans notre Europe civilisée. En vérité, de pareilles scènes ne paraissent que de jolies miniatures en comparaison de ces grandes chasses de l'Inde, combats souvent formidables, où le chasseur a pour coursier l'éléphant, et pour proie le tigre ou le lion.

Le capitaine Mundy, auteur d'un ouvrage intitulé Esquisses de l'Inde à la plume et au pinceau, raconte des chasses au tigre et au lion.

« Un jour, dit-il, à quatre heures après midi, nous partîmes au nombre de dix, emmenant avec nous, outre nos montures, une vingtaine d'éléphans pour la battue. Arrivés vers un marais qu'on nous avait indiqué, nous étendîmes notre ligne et nous avançâmes avec précaution : il y avait en cet endroit peu d'arbres, mais un taillis épais et beaucoup de joncs. Je descendis un instant pour tirer un florican, espèce d'outarde: je tuai l'oiseau, et je remontai. Presque aussitôt, mon éléphant dressa sa trompe, et en souffla bruyamment à plusieurs reprises. « Bien, dit mon mahout (conducteur d'éléphant), il y a un tigre entre le vent et Votre Seigneurie. Notre zèle se ranima; notre ligne se tourna vers le nord, et nos trente éléphans avancèrent! plus rapides, en continuant toujours à battre à pieds lourds le terrain.

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» Nous avions fait quatre cents pas environ, et nous étions engagés dans le marécage, lorsque enfin nos oreilles furent réjouies du tallyho tant désiré. Un coup de feu du colonel R.... fut suivi d'un effroyable rugissement, et un tigre s'élança contre nous. Alors survint la scène,

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la plus ridicule et la plus maussade du monde. Vingt-sur le tigre, qui recommença l'attaque, et nous fit face neuf éléphans prirent la fuite en désordre: celui de valeureusement, jusqu'à ce que, tout son sang coulant lord Combernere resta seul immobile comme un roc : par ses blessures, il tomba mort. On le hissa sur un le tigre, après avoir déchiré un pied de derrière à dos d'éléphant, et l'on reforma la ligne. l'un des fuyards, se retourna furieux vers lord Combernere. Dans cet instant une balle lui traversa les reins, il perdit courage, et recula dans les joncs. Mon éléphant fut l'un des premiers à revenir au champ de bataille: je me plaçai près du brave animal que montait lord Combernere : nous tirames ensemble plusieurs volées

Après une nouvelle battue d'une demi-heure, j'entrevis l'herbe se mouvoir légèrement à deux cents pas devant moi, et je criai le tallyho. Cette fois, deux tigres levèrent la tête, et, sans montrer ni colère ni frayeur, prirent tranquillement leur course du côté opposé au nôtre. On tira quelques coups; le plus fort

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moins de trois heures! De semblables bonnes fortunes deviennent de plus en plus rares, depuis que tout le monde se mêle de la chasse, et que la culture envahit le terrain. >>

des deux tigres fut probablement atteint, car il se re- | par suite des blessures que nous-mêmes lui fimes sans tourna en rugissant, agita sa queue, et se jeta au-de-le vouloir, mourut quelques jours après. vant de nous en bondissant d'une manière terrible : » La chasse avait été heureuse : trois tigres tués en mais tout-à-coup il s'arrêta, comme effrayé du nombre, et s'enfuit : nous le poursuivîmes de toute notre vitesse. Heureux alors ceux dont les éléphans étaient le plus agiles! C'était réellement une magnifique course. Le tigre attaquait et fuyait tour à tour: au moment où il menaçait en désespéré l'éléphant du capitaine Z..., il eut la mâchoire fracassée; il se recula pour s'élancer de nouveau, fit quelques efforts, mais ses genoux fléchirent, et on descendit l'achever. C'était un tigre par venu à toute sa croissance, et vigoureusement taillé; près de la place d'où nous l'avions chassé, nous trouvâmes les restes d'un buffle à demi dévoré.

» Un des chasseurs n'avait point perdu de vue l'autre tigre, et il nous dirigea vers l'endroit où il s'était réfugié. D'abord la recherche fut vaine; on enfonçait dans la vase, et comme le jour baissait, quelques uns d'entre nous ouvraient l'avis de clore la chasse, quand nous vîmes l'éléphant de lord D... se rejeter en arrière avec un cri plaintif. Le tigre était suspendu à sa queue, près de l'échine, et le déchirait cruellement. Lord D... était dans une position difficile, car le mahout, effrayé, s'était couvert du howdah, et laissait pendre ses pieds à un pouce ou deux du tigre en faisant feu on risquait de le tuer. Toutefois il fallut prendre un parti, car l'éléphant tournait et se balançait avec des cris affreux; nous vinmes à l'aide de lord D... : plus de huit balles entrèrent dans le corps du tigre avant qu'il se décidât à lâcher prise. Sa mort suivit de près sa chute; l'éléphant, soit par suite des morsures de la bête, soit aussi

Les chasses au lion offrent encore plus d'intérêt; l'attaque est plus prompte, plus certaine. Le lion ne refuse presque jamais le combat, peut-être parce qu'aux endroits où il se tient ordinairement il n'a pas, comme le tigre, des marais et des broussailles pour favoriser sa retraite.

Un jeune chasseur avait blessé un lion, et s'apprêtait à tirer un second coup pour l'achever, lorsqu'un mouvement de son éléphant le précipita par terre. Le lion, quoiqu'il fût déjà affaibli, saisit entre ses griffes le malheureux chasseur, qui semblait n'avoir plus aucune chance de salut; mais l'éléphant, d'abord effrayé, excité par ses conducteurs, roula sa trompe autour d'un jeune arbre, et ayant étreint le lion entre le tronc et la terre, il lui rompit les reins. On retira le chasseur à demi mort; son bras gauche était fracturé en deux endroits; sa poitrine et ses reins étaient horriblement meurtris; il fut sauvé pourtant, et son salut est depuis raconté à tous les chasseurs comme un évènement miraculeux.

Les BUREAUX D'ABONNEMENT ET DE VENTE

sont rue du Colombier, n° 30, près de la rue des Petits-Angustins. IMPRIMERIE DE LACHEVARDIERE, RUE DU COLOMBINA, No 30.

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