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gue échéance, comme c'était l'habitude sous l'ancienne administration. Ces évaluations à long terme des ressources et de leur emploi, sont contraires à la logique et au droit même des populations.

Les budgets sont annuels et non pas décennaux, afin que les années puissent, l'une après l'autre, apporter leur contingent de réformes et d'efforts.

Nos vues, pour être plus courtes, n'en seront pas moins sûres; on voit mieux ce qu'on voit de plus près; il est, en tout cas, plus sage de ne disposer que de ce qu'on a dans la main.

La période ancienne, celle qui a pris fin au 4 septembre 1870, nous a légué, en fait de dettes exigibles, d'abord des bons à payer, ensuite des dettes à acquitter pour compte de la Caisse des Travaux et envers la Caisse de la Boulangerie, et enfin un règlement difficile à terminer avec la Société du Crédit foncier.

Elle nous a bien légué, en outre, des comptes d'entrepreneurs à liquider; mais comme une partie de la liquidation en a déjà été faite au moyen des ressources créées depuis, nous sommes obligés de les comprendre provisoirement dans la période qui commence au 4 septembre, sauf à établir, aussitôt que les documents auront été reconstitués, le partage que la justice distributive nous commande de faire.

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Cette première période, nous ne la chargerons donc provisoirement que de ces deux liquidations; la liquidation des opérations entreprises avec le Crédit foncier et la liquidation des Caisses des Travaux et de la Boulangerie.

Je n'ai point à rappeler au Conseil le système des bons de délégation qui a permis à l'ancienne Administration municipale de dépenser sans contrôle plus d'un milliard dans la transformation de Paris. Les bons de délégation étaient des lettres de change tirées sur la Ville, acceptées par elle, mises en circulation par les entrepreneurs, et finalement escomptées par des capitalistes.

Leur échéance s'étendait sur une durée de 5 à 10 ans et renfermait leur amortissement dans une série d'années qui n'allait pas au-delà de 1877. Ces effets ont été successivement escomptés ou réescomptés par le Crédit foncier auquel ils ont été négociés par des entrepreneurs ou par des tiers porteurs, moyennant un escompte dont le taux a été, depuis lors, l'occasion de discussions solennelles au sein du Corps législatif et du Sénat.

Toujours est-il qu'au commencement de l'année 1869, le Crédit foncier était porteur de ces bons pour une valeur de 398 millions de francs. Il pouvait, dans un espace de temps relativement court, en demander le

remboursement à la Ville et la mettre ainsi dans un embarras qui n'avait point été suffisamment prévu. Ce fut alors qu'un traité intervint entre le Crédier foncier et la Ville de Paris, pour annuler ces bons de délégation et les remplacer par un emprunt à long terme dont les intérêts devaient être payés à 3 fr. 16 0/0 et le capital remboursé en 40 ans.

On crut devoir ajouter au capital de 398 millions, dont le Crédit foncier était détenteur, une autre dette de 67 millions dont la Viile était débitrice vis à vis d'un certain nombre de tiers, sous forme de bons de délégation ou sous forme de reconnaissance d'acquisitions d'immeubles. Le Crédit foncier s'engageait à rembourser ces 67 millions aux échéances respectives, et la Ville se constituait définitivement débitrice, vis-à-vis du Crédit foncier, de 465 millions de francs remboursables par annuités en 40 ans.

Ce traité assurait à la Ville de Paris la possibilité d'une conversion constante, c'est-à-dire l'autorisait à rembourser en tout ou partie le Crédit foncier et à s'exonérer d'un intérêt de 5. 16 0/0, amortissement non compris, toutes les fois qu'elle y aurait avantage, c'est-à-dire toutes les fois qu'elle trouverait de l'argent à un taux moins élevé.

Lors de la discussion de ce traité devant le Corps législatif, dans la session de 1869, on reconnut avec raison, eu égard au taux de l'intérêt à cette époque, qu'il y avait avantage pour la Ville à faire la conversion, et un article spécial de la loi autorisa l'émission d'un emprunt public dont l'emploi devait être consacré au remboursement du Crédit foncier. La Ville de Paris usa, jusqu'à concurrence de 250 millions de francs, de cette autorisation. L'emprunt fut fait en obligations, émises au taux de 345 fr., remboursables à 400 fr., portant un intérêt de 12 fr. par titre et jouissant de lots considérables.

Au fur et à mesure que les versements devaient être faits par le public, et le dernier versement ne devait être opéré qu'en novembre 1870, le montant intégral devait en être versé dans les caisses du Crédit foncier, ou affecté à payer, pour le compte de cet établissement, celles des créances dont il aurait dû faire l'acquisition, conformément à son traité. Les choses se passèrent d'abord régulièrement, 100 et quelques millions furent versés par le public dans les caisses de la Ville, et reversés par la Ville dans celles du Crédit foncier.

en

Mais on était au commencement de l'année 1870; de grandes opérations étaient projetées, de grands besoins d'argent se faisaient sentir, et les versements subséquents, au lieu d'être remis au Crédit foncier, extinction de la dette, furent employés à couvrir d'autres natures de dépenses.

C'est alors qu'un grand projet de liquidation fut soumis au Corps législatif. Ce projet, plusieurs fois remanié, aboutit enfin à une proposition d'emprunt de 660 millions de francs. Au moyen de ces 660 millions, on

rétablissait les versements détournés de leur emploi vis-à-vis du Crédit foncier; on se procurait même les 215 millions qui, ajoutés aux 250 millions de l'emprunt de 1869, permettaient de rembourser définitivement les 465 millions; on liquidait la Caisse des Travaux de Paris, et on liquidait toutes les dettes du service d'architecture; on dotait enfin, d'un fonds qu'on croyait suffisant, la plupart des grands projets de percement mis à l'étude par l'ancienne Administration.

Le Conseil sait que ce projet de loi n'a pu être discuté. Les événements politiques ne l'ont pas permis; mais au dernier moment, à la veille même de nos premiers désastres, le 23 juillet 1870, une loi fut votée, qui autorisait la Ville de Paris à conserver, pour ses dépenses, 78 millions à provenir de versements sur l'emprunt de 250 millions de l'année précédente. En d'autres termes, on abandonnait l'idée de rembourser les 245 derniers millions dus au Crédit foncier, et on réduisait de 250 à 172 millions le remboursement auquel on avait dû faire face, au moyen de l'emprunt de 1869. Cette loi, d'ailleurs, n'a pas plus été exécutée que la précédente. Si elle l'avait été, le Crédit foncier aurait eu à recevoir 172 millions: il n'a reçu effectivement, au jour où ce mémoire vous est présenté, que 152,452,874 fr. 41: la différence, soit 19,547,128 fr. 59, constitue une sorte de dette légale à propos de laquelle il faut aujourd'hui prendre un parti.

J'ai l'honneur de vous proposer de demander à l'Assemblée nationale de désaffecter ces 19 millions, c'est-à-dire de porter de 78 à 97,547,128 fr. 59 c. la somme que la Ville de Paris est autorisée à ne pas consacrer au remboursement de sa dette à long terme vis-à-vis du Crédit foncier, dette qui se trouverait ainsi arrêtée, en capital, à 313,322,324 fr. 50 c., et donnerait lieu, au taux de 5.16 0/0, non compris l'amortissement, au payement d'une annuité de 19,385,697 fr. 53 c. pendant quarante ans.

La conversion est facultative pour la Ville de Paris, et le Crédit foncier ne fait pas d'objections contre cette manière de procéder; l'Assemblée nationale seule est en droit de réclamer une justification; cette justification se trouve d'abord dans la nécessité de restreindre, autant que possible, les appels au crédit; car si l'on devait rembourser 19 millions au Crédit foncier, il faudrait demander 19 millions de plus à l'emprunt; elle se trouve également dans la situation de la place, la ville de Paris n'ayant d'intérêt à faire une nouvelle dette, pour en rembourser une ancienne, que si le taux de la négociation nouvelle pouvait être notablement inférieur au taux de l'ancienne négociation. Or, on se rappelle que le taux de l'opération faite avec le Crédit foncier est de 5.16 010 d'intérêt, non compris l'amortissement.

C'est de cette façon que je propose au Conseil municipal de liquider la situation de la Ville vis-à-vis du Crédit foncier, en faisant toutes les ré

serves nécessaires sur le droit que conserve la Ville de reprendre la conversion, en tout ou partie, le jour où elle trouvera de son intérêt de le faire.

La liquidation de la Caisse des Travaux de Paris se compose de la liquidation des bons émis, à différentes époques, par cette Caisse, et de la liquidation de certains comptes, tant en dépenses qu'en ressources. Lors de la présentation du projet de loi, qui n'a pas abouti, pendant la session de 1870, il y avait en circulation, à des échéances assez éloignées, des bons pour une valeur de 100 millions de francs, dont 51 millions échéant en 1870, 1871, 1872, et 49 millions échéant de 1873 à 1876.

Quant aux comptes à régler en dehors des bons, ils présentaient un solde passif de 13 millions de francs. Depuis cette époque jusqu'au 23 mai 1871, il a été remboursé des bons jusqu'à concurrence de 16 millions, et il a été liquidé des comptes divers pour 4 millions. Il y a donc 35 millions de bons échus ou échéant en 1871 et 1872, 49 millions échéant à partir de 1873, et une balance à liquider d'environ 9 millions. Les comptes à liquider représentent certains cautionnements et certains versements de garantie, dont la restitution devait être opérée à la fin d'opérations aujourd'hui terminées; leur montant s'est élevé à près de 14 millions de francs; mais il y a, par contre, à recouvrer divers prix de vente et à reprendre divers soldes pour environ 5 millions de francs. C'est la balance, soit 9 millions, dont nous voulons parler, et dont le montant doit être ajouté aux 35 millions demandés pour le payement des bons échéant en 1871 et 1872.

La Caisse de la Boulangerie est dans une situation très-différente de la Caisse des Travaux de Paris. Elle avait reçu d'abord, par des prélèvements sur d'anciens fonds d'emprunt ou de budget, affectés, à une certaine époque, à une première Caisse de la Boulangerie, une dotation, sorte de capital de garantie des émissions de bons qu'elle était autorisée à faire pour ses opérations d'avances.

A la suite des modifications apportées dans l'organisation de la boulangerie et dans le fonctionnement de la Caisse par les décrets des 22 juin et 31 août 1863, le capital de cette dotation fut réparti entre la Ville et les communes du département, et, par arrêtés des 7 et 29 février 1868, la part revenant à la Ville, soit 18,657,000 fr., lui a été effectivement remboursée. Quant à la part attribuée aux communes par les arrêtés de répartition, elle a été conservée par la Caisse de la Boulangerie, dont la dette, de ce chef, s'élevait, en capital, au 1er janvier 1870, à la somme de 1,655,188 fr. 89 c.

Mais le décret du 31 août 1863 avait établi, au profit de la Caisse, un droit d'octroi sur le blé, les farines et le pain, au moyen duquel celle-ci a pu reformer un capital de prévoyance qui s'élevait, au 4 septembre 1870, à 19,500,000 fr. environ.

Cette provision était destinée à arrêter l'élévation du prix du pain en chargeant la Caisse de la Boulangerie de verser aux boulangers l'excédant d'un prix maximum fixé à 0,50 par kilog., et le prix net résultant des mercuriales. C'est ce qui a été fait en 1867 et 1868, et a donné lieu à une dépense, pour la Caisse, de 3,300,000 fr.

Un décret du 17 décembre 1870 ayant aboli le droit d'octroi perçu sur les farines au profit de la Caisse de la Boulangerie, il y aura lieu de reprendre à nouveau la question de l'intervention de la Ville dans le prix du pain; mais la Caisse actuelle, dans sa forme présente, est de fait en liquidation.

Toujours est-il que le capital de prévoyance, constitué à la Caisse au moyen du droit d'octroi, a été versé par elle à la Caisse municipale, et absorbé par la Ville de Paris jusqu'à concurrence de 18,000,000, et qu'il importe d'opérer une restitution, ne fût-ce que pour légaliser une opération faite en dehors de toutes autorisations légales; c'est, du reste, ce qu'avait décidé la loi du 26 juillet 1870, qui a porté le remboursement de cette somme dans l'emprunt qu'elle autorisait la Ville de Paris à effectuer,

J'ai rappelé plus haut que cet emprunt n'avait pas eu lieu.

Je ne vous propose pas de comprendre la restitution totale de la somme de 18,000,000 de fr. dans l'emprunt actuel, la Caisse de la Boulangerie n'ayant pas à faire emploi de la totalité de ses fonds, et le bénéfice de sa liquidation, si la liquidation se fait, appartenant naturellement à la Ville de Paris.

Néanmoins, par suite d'arrêtés en date du 20 septembre 1870 et 25 février 1871, la Caisse de la Boulangerie a été chargée de faire certaines opérations concernant la distribution des farines, ainsi que le rationnement du pain et le ravitaillement. Il résulte de ces opérations une situation que la perte des dossiers n'a pas encore permis de chiffrer exactement, mais dont le résultat se traduira nécessairement par une perte pour une partie, et par une dépense pour une autre partie.

Au moment de la signature de l'armistice, l'ignorance où l'on était à Paris de la situation des marchés de province et des possibilités d'obtenir des moyens de transport, a fait considérer qu'il était du devoir des autorités de faire des approvisionnements de denrées. Le Ministère du Commerce d'un côté, et la Ville de Paris de l'autre, out fait à ce point de vue des opérations qu'un avenir très-prochain devait condamner comme ayant été inutiles et dispendieuses.

Les marchés passés par la Ville de Paris ont eu une valeur totale d'environ 7,300,000 fr.; ils se rapportent, à l'exception d'un marché peu. considérable, à des achats da farine; et la plus grosse partie de ces achats, 6,700,000 fr., a été faite à commission, par un honorable commissionnaire en farines, M. Way.

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