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fer, par voitures publiques, par bateaux à vapeur et autres consacrés au public;

2o Sur le prix des transports de bagages et messageries à grande vitesse par les mêmes voies.

Dans l'application de la taxe, il ne sera pas tenu compte de tout prix ou fraction de prix sur lesquels la taxe serait inférieure à 5 centimes.

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Étalon monétaire.

Unification

de la monnaie allemande. Liberté des banques. Moyen de prévenir les grèves. - Durée des fondations pieuses et philanthropiques.

Les économistes exercent une assez grande influence en Allemagne. Plusieurs d'entre eux siégent dans les conseils du gouvernement ou dans les Chambres, d'autres agissent sur l'opinion publique, soit comme professeurs, soit comme publicistes; ils font d'ailleurs une propagande active et réussissent ainsi très-souvent à faire prévaloir leurs opinions. Plusieurs réformes importantes leur sont dues. Il n'est donc pas sans intérêt de connaître les questions discutées au Congrès des économistes qui vient de siéger pendant une semaine à Lubeck, jadis le chef-lieu de la ligue hanséatique.

La première question à l'ordre du jour se rapporte aux douanes, ou plus exactement, aux traités de commerce. Le point à déterminer était celui-ci les traités de commerce rendent-ils des services, faut-il les recommander, ou vaut-il mieux que l'État garde son indépendance et marche ainsi sans entrave dans la voie des réductions douanières ?

Des économistes distingués se sont prononcés en faveur de l'affirmative, c'est-à-dire contre les traités, mais seulement relativement aux États qui ont des tendances libérales; ceux-là arriveront ainsi plus vite au libre-échange. Les traités ne sont utiles que pour les États protectionnistes. Toutefois, ajoute un membre, ces États, en rédigeant des traités de commerce, s'exposent aux illusions de la réciprocité.

Voilà, certes, une expression qui a besoin d'être expliquée. On sait que les traités consistent en un échange de concessions: donnant, donnant. Généralement, on considère les concessions qu'on obtient comme un avantage plus grand que les concessions qu'on accorde; or, certaines personnes soutiennent, au contraire, que les réductions de droit d'entrée profitent surtout au pays qui les accorde, parce qu'elles lui permettent d'acheter à bas prix. Ces personnes-là ne demandent pas de réciprocité. Quoique cette opinion extrême n'ait pas prévalu, les propositions vo

tées ont été suffisamment radicales. Les voici telles qu'elles ont été formulées par M. J. Faucher.

1o Il y a lieu de supprimer successivement tous les droits de douane qui gênent la division internationale du travail, sans s'arrêter à l'objection, peu fondée d'ailleurs, que des inconvénients pourraient en résulter pour les industries existantes;

2. Pour atteindre ce but, il convient de conclure ou de renouveler les traités commerciaux qui tendent à la réduction des tarifs douaniers.

Une partie de l'assemblée, dont M. Eras, d'Elberfeld, s'était fait l'organe, demandait qu'on eût un peu d'égard pour les industries menacées par des mesures trop radicales; mais on a répondu que la concurrence étrangère était le meilleur stimulant au progrès.

La deuxième question discutée par le Congrès est celle des monnaies. On s'est beaucoup occupé en France de la question monétaire; il s'agissait, d'une part, de provoquer la création d'une monnaie internationale, et de l'autre d'établir un rapport plus vrai entre la valeur de l'or et celle de l'argent. La loi française avait prescrit de considérer le gramme d'or comme l'équivalent de 15 grammes 1/2 d'argent, ce qui voulait dire que le débiteur pouvait se libérer envers le créancier en payant à son choix avec de l'or ou de l'argent, pourvu qu'il se conformat aux proportions légales. C'est ce qu'on appelle le système du double étalon. Mais comme, en réalité, le rapport entre l'or et l'argent n'est pas fixe, il en est résulté des inconvénients qu'une nouvelle loi a dû faire disparaître. Nous faisons allusion à la loi qui a réduit le titre des monnaies d'argent (2 francs et au-dessous); cette mesure a permis d'ajourner la solution complète de la difficulté, en tant qu'elle concerne la France.

Il n'en est pas de même en Allemagne. La question y est d'ailleurs bien plus compliquée et doit même, pour plus de clarté, être décomposée en trois questions distinctes.

L'une est relative à la monnaie internationale, dont on reconnaît parfaitement l'importance en Allemagne, tout en en ajournant la solution. Ne nous y arrêtons pas. Pour le moment, il est une autre question qu'il est plus urgent de résoudre : c'est celle de l'étalon monétaire. En effet, l'Allemagne a l'étalon d'argent, tandis que tous les grands pays commerciaux ou à peu près ont l'étalon d'or. L'Allemagne ne peut rester dans cette situation, elle ne peut pas non plus passer d'emblée des payements en argent aux payements en or.

Après une longue discussion, le Congrès reconnaît que le système monétaire à étalon unique d'or est le seul logique, le seul désirable pour l'Allemagne, et se prononce pour le maintien transitoire de l'étalon d'argent à côté de l'étalon d'or. Tous les efforts de la nation devront, d'ailleurs, tendre à établir l'or comme unique monnaie libératoire.

Restait à résoudre la troisième question, à la fois la plus difficile et la plus urgente, comme on va le voir.

On sait qu'on compte, en Allemagne, ici en thalers et là en florins rhénans ou en florins autrichiens, et que toutes ces monnaies ont cours légal en vertu de conventions spéciales. En voilà déjà assez pour produire une véritable confusion monétaire; mais le mal est encore trèssensiblement aggravé par la grande variété des subdivisions et des monnaies de billon, qui n'ont pas le bénéfice du cours légal. Si, en Allemagne, vous allez du nord au midi, ou de l'est à l'ouest, et vice versa, vous êtes sûr de perdre plusieurs fois au change.

Le remède est dans l'unification de la monnaie allemande, tout le monde en convient; mais quel type choisir? C'est ce choix qui constitue la difficulté. Plusieurs voix autorisées se sont prononcées en faveur du franc, et l'un des arguments qu'on a fait valoir avec le plus de force, c'est que cette monnaie existe en France et dans quelques autres pays. Toutefois, le franc a été trouvé d'une valeur trop faible pour servir de monnaie de compte, et l'on pense que son adoption rendrait plus difficile l'entente monétaire avec les États-Unis. La majorité paraît préférer une pièce de 2 fr. 50, équivalant: 1° à la moitié de la pièce de 5 fr.; 2o au florin autrichien; 30 à 2 shellings anglais; 4. à deux tiers de thaler prussien. Cette pièce serait divisée en 100 kreutzers (2 centimes) comme le florin autrichien. C'est, en fait, ce florin qu'on voudrait introduire, avec ses subdivisions décimales, et son multiple en or, la pièce de 25 fr.

La discussion s'est ensuite portée sur les Banques. Autant que nous pouvons en juger par les analyses que nous avons sous les yeux, les débats ont été très-confus sur cette matière; du reste, la réunion a senti elle-même que la question avait encore besoin d'être étudiée, car elle a décidé qu'il n'y aurait pas vote.

Il avait été entendu, tout le long des débats, qu'on porterait haut le drapeau de la liberté économique, » ou, comme nous disons, du laissezfaire; cela n'a pas empêché l'assemblée de distinguer entre la liberté des banques et la liberté de l'émission, revendiquant la première et voulant restreindre la seconde. Demander la liberté des banques qui n'émettent pas, c'est enfoncer une porte ouverte, c'est décréter qu'il fasse chaud en été et froid en hiver. Cette liberté va sans dire, elle existe partout. Quant à la liberté d'émission, c'est autre chose, aussi les uns voulaient réserver le droit d'émission à l'État, tandis que d'autres voulaient simplement lui imposer des conditions générales. Il y avait aussi à Lubeck des ennemis absolus de tout billet de banque, mais ils ne semblent pas avoir trouvé d'écho.

On a abordé ensuite une autre question, qui a abouti au vote d'une proposition formulée ainsi : « Pour prévenir les grèves, le Congrès des

économistes recommande aux intéressés la création de comités arbitraux. » Tant pis pour le Congrès. Ou il n'a dit qu'une vérité à La Palisse, par exemple pour faire de la conciliation, il faut établir un comité de conciliation, ou il a dit une absurdité. N'est-il pas, en effet, absurde de soutenir que des prud'hommes (la proposition primitive de M. de Kusserow parlait de tribunaux arbitraux) empêcheraient les grèves. Comment peut-on recommander ce qui est contraire aux faits de tous les jours.

Passons à un autre sujet, la durée des fondations pieuses ou bienfaisantes.

Cette question présente un haut intérêt, abstraction faite du point de vue sous lequel elle est généralement envisagée en France. En effet, les fondations n'offrent pas seulement l'inconvénient de faire constituer la mainmorte, elles empêchent aussi bien des institutions de marcher avec les siècles.

En France, avec notre tendance de mettre l'esprit au-dessus de la lettre, nous interprétons habilement les intentions du fondateur; en Angleterre, où les interprétations sont plus littérales, les abus ont été si graves qu'il a fallu une sorte de petit coup d'État légal pour réformer les fondations relatives à l'enseignement; en Allemagne, où l'on est prévoyant, on demande une loi d'après laquelle les fondations seraient toutes faites à terme; ce terme écoulé, l'État déciderait de l'emploi des fonds. Cette disposition serait rétroactive.

Cette proposition a été adoptée, mais non sans tiraillement. Il y a eu des réserves de toutes natures : les uns voulaient réserver tel genre de fondations, les autres pensaient devoir limiter les pouvoirs de l'État, d'autres encore demandaient un vote catégorique contre toute fondation de bienfaisance.

C'est là, ce nous semble, une de ces questions qui ont besoin d'ètre encore sérieusement travaillées; mais ce qui paraît certain, c'est qu'il y a quelque chose à faire, et cela dans le sens libéral. (Temps, 10 septembre 1871.)

NECESSITÉ DE L'ENSEIGNEMENT DE L'ÉCONOMIE POLITIQUE DANS LES LYCÉES, LES ÉCOLES D'ARTS ET MÉTIERS.

Les terribles secousses que la France a subies sont bien de nature à jeter le trouble dans les meilleurs esprits, et il est urgent de rappeler sans cesse la cause du mal qui vient de mettre le pays à deux doigts de sa perte. Qu'on ne s'y trompe pas, surtout! Il n'est pas de ceux qui se guérissent par les saignées ou l'ablation d'un membre, il est attaché au corps social lui-même : les moyens violents peuvent bien le comprimer

un instant; mais si on n'applique pas le remède topique, il va reprendre son travail latent de désorganisation, et dans dix ans peut-être, à la première occasion favorable, nous assisterons à une nouvelle explosion qui sera plus terrible encore que la dernière.

C'est donc un devoir pour tous de l'étudier, cette maladie sociale, de la comprendre et de la combattre par des moyens efficaces.

Le remède existe un remède efficace, souverain, sur lequel je voudrais encore appeler toute votre attention et celle de vos lecteurs.

La cause du mal qui menace de bouleverser notre société n'est pas dans l'Internationale, dans les grèves violentes et multipliées qui n'en sont que des manifestations. Elle est tout entière dans les idées socialistes qui envahissent de plus en plus nos classes ouvrières. Ces fausses doctrines, filles de celles qui ont vu le jour en 1850, se résument toutes en un mot « le communisme. » Les personnes qui ne suivent pas la marche de ce mouvement ne peuvent se douter du degré d'absurdité des formules que quelques ignorants ou quelques déclassés présentent à l'ouvrier comme l'instrument de la rénovation sociale qui doit nous conduire au bonheur universel. L'unique danger de ces doctrines est dans l'ignorance des masses. Il existe cependant une science, l'économie politique, qui a découvert et constaté d'une manière précise et simple les lois qui régissent le corps social, lois aussi certaines, aussi immuables que celles qui font vivre le corps humain.

Mais le danger de notre situation, c'est que cette science est complétement ignorée, même de la plupart des gens très-instruits; que sur cent hommes du monde pris au hasard, qui tous sentent comme d'instinct l'absurdité des doctrines communistes, il s'en trouve rarement un seul qui soit en état de les combattre. Tous à peu près sont convaincus que le meilleur système de défense pour la société consiste à interdire ce genre de discussions. Combien en pourrions-uous compter qui jugent que l'ordre établi ne règne que par hasard, par une sorte de convention tacite entre les intéressés, dont le premier article est de le soustraire à des discussions qui lui seraient mortelles! Le moyen serait sans doute parfait si les masses populaires voulaient bien s'y soumettre. Mais, de nos jours, il n'est pas une institution qu'on puisse dérober à l'esprit d'analyse et de libre examen; celles qui ne supportent pas l'épreuve sont sûrement condamnées à périr.

C'est donc un effroyable danger que cette universelle ignorance sur des questions qui, depuis trente ans, s'affirment avec une énergie croissante, nos ouvriers ne recevant d'autres leçons que celles de quelques rêveurs aussi ignorants qu'eux, qui empoisonnent leur esprit de grossières erreurs, tandis que les classes éclairées savent à peine par quels arguments décisifs on peut combattre ces erreurs. Voilà la véritable source de tous nos maux. C'est le point vers lequel il faut concentre 3 SERIE, t. XXIV. 15 octobre 1871.

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