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mieux intentionnés aimaient à se faire illusion, parce que cette illusion leur était commode. Impatients d'atteindre leur but présent, ils arrangeaient l'avenir de leur victime de manière à tranquilliser leur délicatesse, se préparant, si cet avenir était autre, à regretter de s'être trompés: mais il était bien clair qu'ils ne pourraient protéger contre l'Europe celui qu'ils désarmaient; et bien que Bonaparte dût prévoir sa situation future mieux que personne, ne la lui exposer qu'incomplétement était une sorte de mauvaise foi dont je ne voulais pas me rendre coupable.

Il ne tarda pas à me soulager de cette perplexité douloureuse. En répondant à mes premières paroles sur le désastre de Waterloo,« il ne s'agit pas à présent de moi, me dit-il, il s'agit de la France. On veut que j'abdique! A-t-on calculé les suites inévitables de cette abdication? C'est autour de moi, autour de mon nom, que se groupe l'armée : m'enlever à elle, c'est la dissoudre. Si j'abdique aujourd'hui, vous n'aurez plus d'armée dans deux jours..... Cette armée n'entend pas toutes vos subtilités. Croit-on que des axiomes métaphysiques, des déclarations de droits, des discours de tribune, arrêteront une débandade?... Me repousser quand je débarquais à Cannes, je l'aurais conçu: m'abandonner aujourd'hui, je ne le conçois pas..... Ce n'est pas quand les ennemis sont à 25 lieues qu'on renverse un gouvernement avec impunité. Pense-t-on que les phrases donneront le change aux étrangers? Si on m'eût renversé il y a quinze jours, c'eût été du courage... mais je fais partie maintenant de ce que l'étranger attaque, je fais done partie de ce que la France doit défendre..... En me livrant, elle se livre elle-même, elle avoue sa faiblesse, elle se reconnait vaincue, elle encourage l'audace du vainqueur..... Ce n'est pas la liberté qui me dépose, c'est Waterloo, c'est la peur, une peur dont vos ennemis profiteront.

« Et quel est donc le titre de la chambre pour me demander mon abdication? Elle sort de sa sphère légale, elle n'a plus de mission. Mon droit, mon devoir, c'est de la dissoudre. »

Alors il parcourut rapidement les conséquences possibles de cette mesure. Séparé des chambres, il n'était plus qu'un chef militaire; toute la population paisible et industrieuse ne voyait plus en lui un pouvoir constitutionnel : mais l'armée lui restait, l'armée que l'aspect de l'étendard étranger rallie toujours autour de quiconque veut l'abattre. En supposant même que cette armée éparse se divisât, la portion qui lui demeurerait fidèle pouvait se grossir de cette classe véhémente et nombreuse, facile à soulever parce qu'elle est sans propriété, et facile à conduire parce qu'elle est sans lumières. Il n'y avait point là de moyens d'organisation, mais il y avait beaucoup de moyens de résistance.

« Comme si le hasard eût voulu fortifier Napoléon dans le sentiment des ressources que lui promettait cette résolution désespérée, au moment où il comparait ses forces avec celles de ses adversaires, l'avenue de Marigny retentit des cris de vive l'empereur! Une foule d'hommes, pour la plupart de la classe indigente et laborieuse, se pressait dans cette avenue, saisie d'un enthousiasme en quelque sorte sauvage, et tentant d'escalader les murs de l'Élysée pour offrir à Napoléon de l'entourer et de le défendre. Ces cris, poussés jadis au milieu des fêtes, au sein des triomphes, et se mêlant tout à coup à notre entretien sur l'abdication, formaient un contraste qui me pénétra d'une émotion profonde. Bonaparte promena quelque temps ses regards sur cette multitude passionnée. « Vous le voyez, me dit-il, ce ne sont pas là ceux que j'ai comblés d'honneurs et de trésors. Que me doivent ceux-ci? Je les ai trouvés, je les ai laissés pauvres. L'instinct de la nécessité les éclaire, la voix du pays parle par leur bouche; et si je le veux, si je le permets, la chambre rebelle, dans une heure elle n'existera plus..... Mais la vie d'un homme ne vaut pas ce prix. Je ne suis pas revenu de l'ile d'Elbe pour que Paris fût inondé de sang. »

Le lendemain de cette conférence, Napoléon signa son abdication, et le 25 juin, sur l'invitation de la commission du gouvernement, il quitta l'Elysée pour prendre la voiture qui l'emmenait à la Malmaison; celle du général Bertrand sortit par la porte des Champs-Elysées, tandis que sa voiture d'apparat, où était monté le général Gourgaud, sortait avec éclat par la porte principale du palais.

L'Empereur de Russie, Alexandre, occupa ce palais en 1814 et en 1815. Sous la Restauration, il reçut de nouveau le nom d'Elysée Bourbon. Le duc et la duchesse de Berry l'habitèrent en 1816; mais à la mort du prince, en 1820, il fut abandonné

par sa veuve. Plus tard, ce palais fut habité par le duc de Bordeaux. A partir de 1830, il fit partie des palais dépendants de la liste civile.

« Le palais de l'Élysée, dit M. Girault de Saint-Fargeau, a joué, avec raison, d'une sorte de réputation parmi les édifices construits à Paris pendant la première moitié du XVIe siècle. Le plan en est singulièrement heureux; les distributions intétieures en étaient faites avec intelligence et ajoutaient beancoup à l'agrément de cette habitation, qui doit à sa situation tant d'avantages précieux. Le style de l'architecture était généralement d'un bon goût : la décoration du principal corps de logis, tant sur la cour que sur le jardin, était d'une belle proportion et d'une exécution soignée. Ce palais a eu une destinée singulière et peut-être unique. Ayant appartenu à un grand nombre de personnes différentes, tous les travaux qui y ont été faits successivement, loin de le déformer, n'ont servi, au contraire, qu'à l'embellir. Le jardin, dont on aperçoit des ChampsÉlysées la vaste étendue, est magnifique. » Ces éloges sont plus que jamais mérités depuis les travaux accomplis par les ordres de Napoléon III, sous la direction de M. Lacroix.

Le jour de sa nomination à la présidence de la République, 20 décembre 1849, après avoir, sur l'invitation du président, lu le programme politique qu'il se proposait de suivre, le prince quitta le palais de l'Assemblée et se rendit à l'Élysée, accompagné des trois questeurs: MM. Le Breton, Degousée et Bureaux de Puzy.

Le coup d'Etat du 2 décembre 1851 fut combiné à l'Elysée. Dans la soirée du 1er décembre, le président tint à l'Elysée sa réception ordinaire des lundis; la foule y fut immense, et LouisNapoléon y manifesta une bonne humeur assez marquée. Le préfet de police, le ministre de la guerre, le général Magnan et M. de Persigny ne quittèrent pas les salons. M. de Morny était à l'Opéra-Comique, et dans la loge presque contigué à celle où se trouvait le général Cavaignac. On jouait une pièce nouvelle de M. de Saint-George, dont le frère, directeur de l'imprimerie nationale, allait bientôt distribuer à ses compositeurs le manuscrit d'un drame bien autrement émouvant que celui qu'applaudissaient ensemble les ministres qui n'étaient déjà plus et les ministres qui allaient être. On raconte que, pendant un entr'acte, une dame qui n'avait pas vu M. de Morny depuis quelque temps, s'étant plaint que les travaux parlementaires absorbassent les hommes du monde, et ayant ajouté en riant: «Heureusement, on va vous balayer tous; » le futur ministre répondit gaiement : « Madame, je ne sais si on nous balaiera, mais, en tous cas, je tâcherai de me mettre du côté du manche. »

A l'Elysée, la foule affluait, au point qu'il fallut ouvrir les salles de danse du rez-de-chaussée. Nul pourtant ne soupçonnait encore. Vers dix heures, Louis-Napoléon s'étant adossé à une cheminée, appela d'un signe le colonel Vieyra, nommé la veille chef d'état-major de la garde nationale.

«Colonel, lui dit-il en souriant, êtes-vous assez maître de votre visage pour n'y rien laisser paraitre d'une grande émotion?

- Je le crois, mon prince, répondit M. Viey ra.

- Fort bien alors. » Et avec un sourire plus épanoui :

« C'est pour cette nuit, dit-il à demi voix. Vous n'avez pas bougé; c'est bien, vous êtes fort. Pouvez-vous me répondre que demain le rappel ne sera battu nulle part, et qu'aucune convocation de garde nationale n'aura lieu?

- Très-facilement, pourvu que j'aie assez d'ordonnances à ma disposition.

Voyez pour cela le ministre de la guerre. Partez maintenant; mais, pas de suite, on croirait que je vous ai donné un ordre. »

Et, prenant le bras de l'ambassadeur d'Espagne qui s'avançait, le prince quitta la cheminée pendant que M. Vieyra, pour dérouter tout soupçon, s'en allait échanger quelques banalités dans un groupe de dames.

Lorsque la réception fut finie, Louis-Napoléon tint conseil avec MM. de Persigny, Magnan, Leroy de Saint-Arnaud, de Maupas et de Morny. A deux heures du matin ils se séparèrent; mais à dix heures et demie Louis-Napoléon sortit de l'Elysée, accompagné du prince Jérôme et des généraux Magnan, WastVimeux, Flahaut, Le Pays de Bourjolly, etc., etc. Il suivit la rue du Faubourg-Saint-Honoré, arriva à la place de la Concorde où il passa plusieurs régiments en revue. Traversant le jardin des Tuileries, il alla visiter l'état-major de l'armée de

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Un grand nombre de beaux hotels ont, comme l'Élysée, une façade du côté de la rue du faubourg Saint-Honoré et des jardins donnant sur les Champs-Élysées. On peut citer l'hotel Péreire, construit dans le style du temps de Louis XIV, par M. Armand, architecte du grand hotel du Louvre; les artistes qui l'ont décoré de peintures allégoriques sont presque tous des élèves de Paul Delaroche, comme Jalabert, Cabanel, Barrías et Picou.

Dans l'hotel de M. Louis Fould, M. Labrouste, employant simultanément la brique et la pierre, a conservé la noble simplicité du style Louis XIII. A l'intérieur, une galerie splendide contient une collection précieuse de monnaies antiques, d'émaux et de camées.

L'hotel Furtado, construit sur les dessins de MM. Conwens et Noleau, n'a pas de style bien arrêté; mais il est élégant et coquet; le plafond du salon, peint par Faustin Besson, représente la cour de Flore, et les quatre saisons sont personnifiées dans les dessus de portes qui rappellent un peu la manière de Nattier. La salle à manger est tendue de belles tapisseries du temps de Louis XIV, et décorée d'un plafond qui plafonne, ce qui est assez rare. Faustin Besson a mis en perspective un balcon du haut duquel des dames font de la musique aux invités. M. Lévy, grand prix de Rome, a peint, pour le grand escalier, Vénus entrant dans l'Olympe, et pour le salon de famille, les Arts et les Sciences.

L'hôtel Pontalba, suivant l'expression d'un de nos meilleurs critiques d'art, est le type palais.

Dès qu'on a passé le seuil de la grande antichambre, on comprend que, dans ce palais, on s'est encore moins préoccupé du riche que du beau.

L'or ruisselle partout; mais après le vertige qu'il nous cause, plus on s'attache à regarder de près le travail artiel qu'on a prodigué partout, plus on est émerveillé. L'hotel Pontalba est surtout imprégné du charme indicible d'un pur sanctuaire de l'art. L'art vit, se montre, palpite, déborde dans la peinture des plafonds et des trumeaux, dans le tissu des étoffes de soie qui revêtent les meubles et les croisées, dans la richesse des tapis, dans les bronzes reproduits de Versailles, dans l'encadrement des glaces de Saint-Gobain et de Venise, dans la ciselure des lustres et les riches bizeaux de cristal de roche dont se composent leurs prestigieuses girandoles, dans la sculpture des meubles, dans la ciselure des écussons, des frises, dans le relief des chambranles qui ne déshonore point le carton-pâte des ornementations de la sculpture moderne.

Le rez-de-chaussée de l'hotel Pontalba se divise en quatorze pièces :

Deux antichambres, deux salles à manger; la principale, dont les dimensions sont très-vastes, est de marbre de diverses couleurs; elle est la réduction exacte de la salle à manger du palais de Versailles, avec ses piliers de marbre d'Égypte; la table de gala, qui est au centre de cette salle, est en bois d'ébene; elle est de soixante couverts.

La décoration de la principale chambre à coucher, du cabinet de toilette, du boudoir, du parloir ou salon de conversation, est d'or et de nuance vert pomme. C'est d'une délicatesse, d'une fraicheur de teinte à défier les plus délicieuses fantaisies du pinceau de Watteau.

Les meubles du premier salon sont en damas de soie verte brodée de fleurs. Le dessin du tapis correspond à celui de l'ameublement, et se retrouve également dans les ornements du plafond. Cette harmonie règne dans tout le palais.

Le second salon, plus riche encore que le premier, se distingue par des groupes d'enfants en bronze aux quatre angles et au centre. Ce dernier groupe est entouré d'un de ces meubles circulaires vulgairement appelés patés. Les plafonds ont été

peints par Picot. La pendule, dont l'or étincelle sur le manteau de la cheminée, a été prise à Versailles, et porte la fameuse devise: Nec pluribus impar. L'ameublement de ce salon est en damas de soie jaune brodée.

Le troisième salon, tout en laque de Chine, est chamarré d'arabesques d'or sur les murs, aux plafonds, sur le bois des croisées. C'est une des merveilles sauvées de l'hôtel d'Avaray, presque dans l'intégrité de sa richesse originelle qui date de Louis XIV. Ici l'hotel Pontalba renchérit sur Versailles. Les membles sont de soie cramoisic. La tradition nous apprend que ce salon a primitivement coûté 600,000 fr. au grand roi.

La galerie de bal vient après le salon en laque. Elle est éclairée par douze demi-lustres et un lustre central qui portent des cristaux de roche de plus de vingt-cinq centimètres de diamètre.

Cette vaste pièce, où des quadrilles de plus de deux cents personnes peuvent facilement s'organiser, est contigue à un petit salon réservé aux artistes dont les noms figurent, aux jours de grande réception, sur le programme des concerts. Elle est accessible par une porte particulière.

Les quatre salons, y compris la galerie des bals, ont vue sur le jardin, c'est-à-dire sur un espace de plus de 160 pieds de large sur 500 de profondeur, dont la perspective se perd sous le dome des grands arbres des Champs-Élysées.

Les édifices religieux du quartier sont loin de répondre à la magnificence des habitations particulières. Quoique mentionné dans quelques actes du XII siècle, le Roule n'acquit d'importance que lorsqu'il eut été érigé en faubourg, le 12 février

1722.

Ce ne fut qu'en 1769 que sa modeste église fut embellie par les soins de Chalgrin. Dans le tympan du fronton, Duret, père de l'auteur du Danseur napolitain, exécuta une belle figure de la Religion. A l'intérieur, M. Claudius Jacquand a couvert de fresques la chapelle de Notre-Dame-de-Toutes-Grâces. Cette chapelle voutée, de 26 mètres de longueur intérieur sur 12 mètres de largeur, a été érigée sous la direction de M. Victor Baltard, architecte de la ville de Paris. Elle est destinée au catéchisme et à l'instruction des enfants, et a été inaugurée le 8 février 1860, par le cardinal archevêque de Paris. L'artiste, déjà connu par plusieurs compositions de ce genre, a voulu prouver qu'il savait aborder les sujets religieux en ce qu'ils avaient de plus élevé. Il a passé deux ans et demi à perfectionner son œuvre, afin de ne rien omettre des particularités qu'il avait à rendre. Les jours de fête, où il lui fallait s'arracher à son travail, il lui semblait qu'on l'enlevât du ciel pour le rejeter sur la terre; il était possédé par son idée, aspirant au lendemain comme un amant aspire au premier rendez-vous. On comprend cette impression, on la partage, ou ne peut s'en aller. L'idéal vous envahit. On voit la sainte Immaculée, on partage ses joies, ses douleurs, on souffre avec elle, on sourit de son sourire, on répète, malgré soi, les sublimes litanies :

« Porte du ciel.

« Rose mystérieuse. « Maison d'or.

«Etoile du matin. »

On s'agenouille devant l'Ange du repentir, l'Ange de l'espérance; on tend les bras vers le Miroir de justice. Que de mères iront prier la Mère de toutes les grâces, que de cœurs brisés iront chercher l'Ange des consolations! que de douces larmes couleront devant cette Arche d'alliance qui réconcilie Dieu avec les pécheurs!

En même temps que Saint-Philippe-du-Roule était englobée dans Paris, ainsi que l'église de la Ville-L'évèque, bourgade où les archevêques de Paris avaient une maison de plaisance, des granges et des dimes, l'église de la Madeleine avait eu le bonheur d'être protégée par la marquise de Pompadour, et dès le 6 février 1763, Louis XV avait adressé à ses amis et féaux conseillers, à son parlement et à sa chambre des comptes, des lettres tendant à autoriser l'édification d'une nouvelle église à l'extrémité de la rue Royale, sous la conduite du sieur Coutant d'Ivry, membre de l'Académie d'architecture. Le roi posa la première pierre de la nouvelle basilique, le 3 avril 1764, et les travaux avancèrent avec assez de rapidité. L'architecte, qui mourut au mois de janvier 1777, fut remplacé par Couture le jeune, qui détruisit les premières constructions, et un portail de douze colonnes corinthiennes avec une galerie en retour. Son œuvre n'était pas achevée au moment où la révolution de 1789 dé

tourna les esprits des monuments religieux. L'église projetée n'était, en 1793, qu'un monceau de ruines anticipées, et les offices se faisaient toujours dans la petite chapelle de la Madeleine, dont le cimetière acquit une triste célébrité. On y enterra un grand nombre de victimes exécutées sur la place de la Révolution. Pour le supplice comme pour l'inhumation, Louis XVI fut le premier. Le 20 janvier 1793, le pouvoir exécutif manda le curé de la Madeleine, nommé Picavez, pour le charger des obsèques de Louis XVI; mais cet ecclésiastique, ne se sentant pas le courage de remplir une mission aussi pénible et aussi douloureuse, prétexta une maladie, et substitua sa place à son premier vicaire, François-Silvain Renard. Celuici, dans une déclaration ultérieure, a consigné les détails de ce fait historique. « Ma réponse, déclare le premier vicaire, fut d'abord un refus positif, fondé sur ce que personne n'avait peut-être aimé Louis XVI plus que moi; mais, sur l'observation juste que M. Picavez me fit que ce double refus pourrait avoir des suites fâcheuses et incalculables pour nous deux, j'acceptai.

«En conséquence, le lendemain 21, après m'être assuré que les ordres prescrits par le pouvoir exécutif, et relatifs à la quantité de chaux ordonnée, et à la profondeur de la fosse qui, autant que je puis me le rappeler, devait être de dix à douze pieds, avaient été ponctuellement exécutés, j'attendis à la porte de l'église, accompagné de la croix, avec M. l'abbé Damoreau, que l'on nous remit le corps de Sa Majesté.

« Sur la demande que j'en fis, les membres du département et de la commune me répondirent que les ordres qu'ils avaient reçus leur prescrivaient de ne pas perdre de vue un seul instant le corps de Sa Majesté. Nous fùmes donc obligés, M. Damoreau et moi, de les accompagner au cimetière, situé rue d'Anjou.

« Arrivé au cimetière, je fis faire le plus grand silence. L'on nous présenta le corps de Sa Majesté. Elle était vêtue d'un gilet de piqué blanc, d'une culotte de soie grise et les bas pareils... >>

Remarquons incidemment que ce costume diffère par quelques nuances de celui qu'indiquent les autres historiens; mais la déclaration que nous citons étant de 1814, il est possible que la mémoire de l'abbé Renard l'ait mal servi.

« Nous psalmodiâmes les vêpres et récitàmes toutes les prières usitées pour le service des morts, et, je dois dire la vérité, cette même populace, qui naguère faisait retentir l'air de ses vociférations, entendit les prières faites pour le repos de l'âme de Sa Majesté avec le silence le plus religieux.

Avant de descendre dans la fosse le corps de Sa Majesté, mis à découvert dans la bière, il fut jeté au fond de ladite fosse, distante à dix pieds environ du mur, d'après les ordres du pouvoir exécutif, dans un lit de chaux vive. Le corps fut ensuite couvert d'un lit de chaux vive, d'un lit de terre, et le tout fortement battu et à plusieurs reprises.

«Nous nous retirames ensuite en silence après cette trop pénible cérémonie, et il fut, autant que je puis me le rappeler, dressé par M. le juge de paix un procès-verbal qui fut signé de deux membres du département et de deux de la commune. Je dressai aussi un acte mortuaire en rentrant à l'église, mais sur un simple registre, lequel fut enlevé par les membres du comité révolutionnaire lors de la clôture de cette église.»

Le 20 janvier 1815, sur les indications de M. Desclozeaux, propriétaire du cimetière de la Madeleine, des fouilles y furent faites en présence de M. Dambray, grand chancelier de France; du comte de Blacas, ministre de la maison du roi; de M. de La Tour, évêque de Nancy; du comte de Brézé, grand maître des cérémonies; du bailli de Crussol et du service de paix. On transporta à Saint-Denis, le 21 janvier, des débris informes des ossements rongés par la chaux; mais, comme l'a dit l'archiviste Peuchet dans ses Mémoires : « Sa Majesté Louis XVIII n'était rien moins que certaine que ce fussent bien les restes de Louis XVI, de Marie-Antoinette et de Madame Élisabeth qui avaient été retrouvés et transportés à Saint-Denis. Plusieurs fois on lui avait insinué qu'elle avait été trompée, et que la fausseté de ces reliques résultait de preuves anatomiques incontestables. Elle craignait que sa piété filiale ne l'eût rendue le jouet de quelques mystifications; et plusieurs rapports faits soit à la police du château, soit à la police générale, l'entretenaient dans cette crainte. >>

Toutefois, on éleva rue d'Anjou une chapelle expiatoire, achevée en 1826 par Fontaine et Percier, et Bosio exécuta en

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Cependant, l'église de la Madeleine s'était relevée de ses ruines. Ce monument délaissé rappelait les temples mutilés par le temps dont les colonnes se détachent sur le ciel bleu de Pestum. Qu'en devait-on faire? L'Assomption et Saint-Louisd'Antin suffisaient alors aux besoins du quartier.

Du camp impérial de Posen partit, le 2 décembre 1806, un décret ainsi conçu :

« 1° Il sera établi, sur l'emplacement de la Madeleine de notre bonne ville de Paris, aux frais du trésor de notre couronne, un monument dédié à la grande armée, portant sur le fronton: L'Empereur Napoléon aux Soldats de la Grande Armée!

« 2o Dans l'intérieur du monument seront inscrits, sur des tables de marbre, les noms de tous les hommes, par corps d'armée et par régiment, qui ont assisté aux batailles d'Ulm, d'Austerlitz et d'léna, et sur des tables d'or massif les noms de tous ceux qui sont morts sur les champs de bataille; sur des tables d'argent sera gravée la récapitulation, par département, des soldats que chaque département à fournis à la grande armée.

3o Autour de la salle seront sculptés des bas-reliefs où seront représentés les colonels de chacun des régiments de la grande armée, avec leurs noms; ces bas-reliefs seront faits de manière que les colonels soient groupés autour de leurs géné raux de division et de brigade, par corps d'armée. Les statues. en marbre, des maréchaux qui ont commandé des corps ou qui ont fait partie de la grande armée seront placées dans l'inté rieur de la salle.

«4° Les armures, statues, monuments de toute espèce, enlevés par la grande armée dans ces deux campagnes, les drapeaux, étendards et tymbales conquis par la grande armée, avec les noms des régiments ennemis auxquels ils appartenaient, seront déposés dans l'intérieur du monument.

50 Tous les ans, aux anniversaires des batailles d'Austerlitz et d'léna, le monument sera illuminé, et il sera donné un concert précédé d'un discours sur les vertus nécessaires au soldat, et d'un éloge de ceux qui périrent sur le champ de bataille dans cet journées mémorables. Un mois avant, un concours sera ouvert pour recevoir la meilleure pièce de musique analogue aux circonstances. Une médaille d'or, de 150 doubles napoléons, sera donnée aux auteurs de chacune de ces pièces qui auront remporté le prix. Dans les discours et odes, il est expressément défendu de faire aucune mention de l'Empereur.

60 Notre ministre de l'intérieur ouvrira, sans délai, un concours d'architecture pour choisir le meilleur projet pour l'exécution de ce monument. Une des conditions du prospectus sera de conserver la partie du bâtiment de la Madeleine qui existe aujourd'hui, et que la dépense ne dépasse pas trois millions. Une commission de la classe des beaux-arts de notre Institut sera chargée de faire un rapport à notre ministre de l'intérieur, avant le mois de mars 1807, sur les projets soumis au concours. Les travaux commenceront le 1er mai et devront être achevés avant l'an 1809. Notre ministre de l'intérieur sera chargé de tous les détails relatifs à la construction du monument, et le directeur de nos musées de tous les détails des basreliefs, statues et tableaux.

«7° Il sera acheté 100,000 fr. de rente en inscriptions sur le grand-livre pour servir à la dotation du monument et à son entretien annuel.

8° Une fois le monument construit, le grand conseil de la Légion d'honneur sera spécialement chargé de sa garde, de sa conservation et de tout ce qui est relatif au concours annuel.

«9° Notre ministre de l'intérieur et l'intendant des biens de notre couronne seront chargés de l'exécution du présent dé

cret. »

Cent vingt-sept plans furent soumis à la classe des beaux

I

arts, qui adjugea le prix à M. de Beaumont; mais Napoléon ne ratifia pas ce jugement. Il écrivit au ministre de l'intérieur :

Au quartier impérial de Finkenstein, le 30 mai 1807. Monsieur de Champagny, après avoir examiné attentivement les différents plans du monument dédié à la grande armée, je n'ai pas été un moment en doute, celui de M. Vignon est le seul qui remplisse mes intentions: c'est un temple que j'avais demandé, et non une église. Que pouvait-on faire dans le genre des églises qui fût dans le cas de lutter avec SainteGeneviève, même avec Notre-Dame, et surtout avec SaintPierre de Rome? Le projet de M. Vignon réunit à beaucoup d'avantages celui de s'accorder mieux avec le palais Législatif, et de ne pas écraser les Tuileries.

Lorsque j'ai fixé la dépense à trois millions, j'ai entendu que ce temple ne devait pas coûter plus que ceux d'Athènes, dont la construction ne s'élevait pas à la moitié de cette somme.

Il m'a paru que l'entrée de la cour devait avoir lieu par l'escalier vis-à-vis le trône, de manière qu'il n'y eût qu'à descendre et à traverser la salle pour se rendre au trône. Il faut que dans les projets définitifs M. Vignon s'arrange pour qu'on descende à couvert; il faut aussi que l'appartement soit le plus beau possible: M. Vignon pourrait peut-être le faire double, puisque la salle est déjà trop longue. Il sera également facile d'ajouter quelques tribunes.

Les spectateurs doivent être placés sur des gradins de marbre formant les amphithéâtres destinés au public, et les personnes nécessaires à la cérémonie seront sur des bancs, de manière que la distinction de ces deux sortes de spectateurs soit très-sensible. Les amphithéâtres garnis de femmes feront un contraste avec le costume grave et sévère des personnes nécessaires à la cérémonie. La tribune de l'orateur doit être fixe et d'un beau travail. Rien dans ce temple ne doit être mobile et changeant; tout, au contraire, doit y être fixe, à sa place. S'il était possible de placer à l'entrée du temple le Nil et le Tibre, qui ont été rapportés de Rome, cela serait d'un très-bon effet: il faut que M. Vignon tâche de les faire entrer dans son projet définitif, ainsi que les statues équestres qu'on placerait au dehors, puisque réellement elles seraient mal dans l'intérieur. Il faut aussi désigner le lieu où l'on placera l'armure de François Ier, prise à Vienne, et le quadrige de Berlin.

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«Il ne faut pas de bois dans la construction de ce temple. Pourquoi n'emploierait-on pas pour la voùte, qui a fait un objet de discussion, du fer ou même des pots de terre? Ees matières ne seraient-elles pas préférables à du bois ? Dans un temple qui est destiné à durer plusieurs milliers d'années, il faut chercher la plus grande solidité possible, éviter toute construction qui pourrait être mise en problème par les gens de l'art, et porter la plus grande attention au choix des matériaux: du granit et du fer, tels devraient être ceux de ce monument. On objectera que les colonnes actuelles ne sont pas de granit; mais cette objection ne serait pas bonne, puisque avec le temps on peut renouveler ces colonnes sans nuire au monument. Cependant, si l'on prouvait que le granit entraînât dans une trop grande dépense et dans de longs délais, il faudrait y renoncer; car la condition principale du programme, c'est qu'il soit exécuté en trois ou quatre ans, et au plus en cinq ans. Ce monument tient en quelque chose à la politique : il est dès lors du nombre de ceux qui doivent se faire vite. Il convient néanmoins de s'occuper à chercher du granit pour d'autres monuments que j'ordonnerai, et qui, par leur nature, peuvent permettre de donner trente, quarante ou cinquante ans à leur construction.

« Je suppose que toutes les sculptures intérieures seront en marbre; et qu'on ne me propose pas des sculptures propres aux salons et aux salles à manger des femmes de banquiers de Paris. Tout ce qui est futile n'est pas simple et noble; tout ce qui n'est pas de longue durée ne doit pas être employé dans ce monument. Il n'y faut aucune espèce de meubles, pas même de rideaux.

« Quant au projet qui a obtenu le prix, il n'atteint pas mon but, c'est le premier que j'ai écarté. Il est vrai que j'ai donné pour base de conserver la partie du bâtiment de la Madeleine qui existe aujourd'hui; mais cette expression est une ellipse: il était sous-entendu que l'on conserverait de ce bâtiment le plus possible; autrement il n'y aurait pas cu besoin de programme, il n'y avait qu'à se borner à suivre le plan primitif.

127

Mon intention était de n'avoir pas une église, mais un temple; et je ne voulais ni qu'on rasât tout ni qu'on conservât tout. Si les deux propositions étaient incompatibles, savoir: celle d'avoir un temple et celle de conserver les constructions actuelles de la Madeleine, il était simple de s'attacher à la définition d'un temple; par exemple, j'ai entendu un monument tel qu'il y en avait à Athènes, et qu'il n'y en a pas à Paris. Il y a beaucoup d'églises à Paris, il y en a dans tous les villages; je n'aurais assurément pas trouvé mauvais que les architectes eussent observé qu'il y avait une contradiction entre l'idée d'avoir un temple et l'intention de conserver les constructions bâties pour une église. La première était l'idée principale, la seconde l'idée accessoire. M. Vignon a donc deviné ce que je voulais.

« Quant à la dépense fixée à trois millions, je n'en fais pas une condition absolue. J'ai entendu qu'il ne fallait pas faire un autre Panthéon; celui de Sainte-Geneviève a déjà coûté plus de quinze millions. Mais en disant trois millions, je n'ai pas entendu qu'un ou deux millions de plus ou de moins entrassent en concurrence avec la convenance d'avoir un monument plus ou moins beau. Je pourrai autoriser une dépense de cinq ou six millions si elle est nécessaire, et c'est ce que le devis définitif me prouvera.

« Vous ne manquerez pas de dire à la quatrième classe de l'Institut que c'est dans son rapport même que j'ai trouvé les motifs qui m'ont déterminé. Sur ce, je prie Dieu qu'il vous ait en sa sainte garde.

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Signe NAPOLEON. >>

Rebâti pour la troisième fois, le monument redevint l'église de la Madeleine en vertu d'une ordonnance royale du 14 février 1816.

Les lois du 27 mai 1827 et du 23 mars 1842 firent concession de l'église de la Madeleine à la ville de Paris, à titre de propriété, pour être affectée au service de la paroisse principale du premier arrondissement.

L'église de la Madeleine a quelque rapport avec la Maison carrée de Nimes, et c'est moins une basilique qu'un temple paien. Le bas-relief de Lemaire n'a point de caractère; dans cette gigantesque sculpture qui occupe un tympan de plus de 38 mètres de longueur, et de plus de sept mètres de hauteur à angle obtus, la Madeleine remplit auprès de Jésus-Christ un role d'intervention suprême qu'aucun texte ne justifie. Les figures ont l'air d'académies; les accessoires sont empruntés aux usages funéraires des peuples anciens, et l'iconographie chrétienne n'a jamais connu les allégories de l'Innocence, des Vices, de l'Ange des miséricordes et des vengeances, telles que les a comprises le sculpteur. Chapitaux corinthiens, frontons, colonnades, escaliers, soubassements, tout est grec dans cette église, si peu faite pour sa destination que, lorsqu'elle fut terminée, on s'aperçut qu'on y avait oublié les cloches!

Sous les portiques ont été ménagés des niches qui ont reçu des statues de saints.

Au sud : saint Philippe et saint Louis, par Nanteuil ;

Au nord les quatre évangélistes, par Ramey, Desprez et Lemaire;

A l'est l'ange Gabriel, par Duret; saint Bernard, par Husson; sainte Thérèse, par Feuchère; saint Hilaire, par Huguenin; sainte Cécile, par Dumont; saint Irénée, par Gourdel; sainte Adélaïde, par Bosio neveu; saint François de Sales, par Molcheneht; sainte Hélène, par Mercier; saint Martin de Tours, par Grevenich; sainte Agathe, par Dantan jeune; saint Grégoire, par Thérasse; sainte Agnès, par Du Seigneur; l'archange Raphaël, par Dantan aîné;

A l'ouest l'archange Michel, par Raggi; saint Denis, par Debay fils; sainte Anne, par Desboeufs; saint Charles Borromée, par Jouffroy; sainte Elisabeth, par Caillouette; saint Ferdinand, par Jaley; sainte Christine, par Valcher; saint Jérôme, par Lanno; sainte Jeanne de Valois, par A. Guillot; saint Grégoire de Valois, par Maindron; sainte Geneviève, par Debay père; saint Jean Chrysostome, par Gochter; sainte Marguerite d'Écosse, par Caunois; et l'Ange-Gardien, par Bra.

L'intérieur de la Madeleine est voûté de marbre et d'or. Au-dessus du grand autel, dans une demi-coupole, ClaudeLouis Ziegler, élève d'Ingres, exécuta, de 1835 à 1838, une composition où se groupent les rois qui ont favorisé le développement du christianisme et principalement du catholicisme. Schnetz, Bouchot, Léon Coignet, Signol, Couder, Abel de

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Pujol, ont décoré la Madeleine de tableaux dont les principaux représentent des épisodes de la vie de la sainte pénitente.

Cà et là sont des groupes en marbre, la plupart mal éclairés, ce qui empêche de juger de leurs qualités, comme le Baptême de Jésus-Christ, par Rude; le Mariage de la Vierge, par Pradier; des créations par Antonin Moine; sainte Amélie, par Bra; une Vierge, par Émile Faure; sainte Clotilde, par Bruges; saint Augustin, par Antoine Etex; un Christ, par Francisque Duret; saint Vincent de Paul, par Raggi.

Le VIII arrondissement possède encore, place de Laborde, une petite église dédiée à saint Augustin, et dont l'établissement a été autorisé par un décret du 2 septembre 1851.

La partie septentrionale de cet arrondissement s'est singulièrement vivifiée et embellie depuis un demi-siècle. A gauche de la rue du Rocher s'étendait un quartier vulgairement qualifié de Petite Pologne, du nom d'une guinguette très-fréquentée. Au XVIe siècle, la place de Laborde, qui s'appelait en ce temps-là place des Grésillons, était à peine pavée, entouréc de masures, et plongée dans les ténèbres pendant la nuit. Les environs étaient un repaire de mendiants, de chiffonniers, de vagabonds, de gens sans aveu. Entre la rue du Rocher et la rue de Clichy, étaient des champs, les uns cultivés en pommes de terre ou en céréales, les autres en friche.

En 1826, une compagnie, dont les principaux actionnaires furent MM. Jonas Hagermann, Sylvain Mignon et Riant, traça sur le papier le plan d'un quartier dont la place la plus importante se nommait place de l'Europe, et dont les rues avaient des noms de capitales: rues Hambourg, Madrid, Lisbonne, Amsterdam, Stockholm, Londres, Constantinople, Vienne, Saint-Pétersbourg; peu à peu elles se bordèrent de maisons. En 1832, sous la direction de l'architecte Armand et de l'ingénieur Flachat, la gare du chemin de fer de Saint-Germain s'éleva sur la place de l'Europe; elle fut reportée rue Saint-La

zare, après la concession du chemin de fer de Versailles. L'ouverture successive des chemins de Paris au Havre, à Cherbourg, à Dieppe, des tronçons de chemins de fer qui desservent le bois de Boulogne, Auteuil et Passy, Argenteuil, nécessita des agrandissements considérables. Il est question, pour faciliter le service de ces voies, de jeter des ponts en tôle sur la place de l'Europe, en détruisant le jardin planté au centre, et qu'une délibération du conseil municipal, en date du 30 mai 1845, a reconnu propriété particulière des héritiers Hagermann et Mignon, à la charge d'en maintenir la destination à perpétuité.

Qu'est-ce qu'il y a de perpétuel?

On nivelle le sol du boulevard Malesherbes, qui partira de la Madeleine pour aboutir à la Seine. Un autre boulevard partira de l'ancienne barrière de Monceaux, traversera la plaine du nord-est au sud-ouest, et gagnera le parc de Neuilly.

Le parc de Monceaux doit être prochainement livré au public, et bien des Parisiens qui le visiteront pour la première fois s'étonneront d'avoir si longtemps ignoré cette fraîche oasis. Ce fut Louis-Philippe d'Orléans, duc de Chartres, qui la fit planter en 1778, sur les dessins de Carmontelle; il y prodigua les kiosques, les grottes, les rochers, les cascades, les berceaux, les ruines grecques ou gothiques. Au lieu de conserver à ce parc le nom du petit hameau dont il dépendait, les critiques le désignaient sous celui des Folies de Chartres. En 1794, la Convention décréta qu'il serait entretenu pour être affecté à divers établissements. Napoléon, devenu empereur, le donna à l'archichancelier Cambacérès. Celui-ci en trouva l'entretien si dispendieux qu'il le rendit quatre ou cinq ans après à l'empereur. En 1814, Louis XVIII le restitua à la famille d'Orléans; enfin, en 1848, l'état-major des ateliers nationaux y fut installé. La décision qui le livre au public le fait échapper à une destruction certaine et lui assure une permanente destination.

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