Page images
PDF
EPUB

LE TEMPLE.

[blocks in formation]

Le Temple n'est en définitive qu'un marché au vieux linge, un réceptacle de vêtements ràpés, une sorte de Montfaucon de la toilette.

Le Conservatoire des arts et métiers, monument intéressant et en harmonie avec les progrès contemporains, eût été peut-être plus digne d'imposer son nom au troisième arrondissement de Paris, car la création de cet établissement est une de celles qui ont le plus contribué au développement de Findustrie et de la mécanique. Elle est due à Vaucanson qui avait rassemblé diverses machines à l'hôtel de Mortagne, rue de Charonne. Il légua au roi son cabinet qui fut placé sous le patronage de l'Académie des sciences et sous la direction de Vandermonde. D'autres modèles importants pour les manufactures et pour l'exploitation du sol avaient été réunis à l'hôtel d'Aiguillon, rue de l'Université. La Convention nationale, sur le rapport de Grégoire, rendit, le 19 vendémiaire an ш (10 octobre 1794, un décret qui instituait sous le nom de Conservatoire des arts et métiers un dépôt public de machines, modèles, outils, dessins, descriptions et livres de tous les genres d'arts et métiers, dont la construction et l'emploi seraient expliqués par trois démonstrateurs attachés à l'établissement. Un dessinateur leur était adjoint. Le comité d'agriculture et des arts était chargé de se concerter avec celui des finances pour le choix du local où devait être placé le Conservatoire des arts et métiers. On chercha longtemps un emplacement: le garde-meuble fut un moment adopté, puis on y renonça. Le Directoire, le 29 fruc tidor an ry, présenta au Conseil des cinq-cents un projet tendant à établir le Conservatoire des arts et métiers dans les vastes batiments du prieuré royal de Saint-Martin des Champs. Des raisons d'économie firent repousser la loi; mais ceux qui en comprenaient l'importance insistèrent, et après deux ans d'elforts la firent admettre, le 22 prairial an vi.

Le monastère célèbre qui allait enfin recevoir une si utile destination remontait aux premiers àges de notre histoire. Après avoir été détruit par les Normands, il avait été reconstruit en 1060 et entouré de fortifications étendues, dont quelques traces subsistent encore. Les religieux appartenaient à l'ordre des Bénédictins de Cluny, et un prieur conventuel était à la tête de la maison. Le premier connu, nommé Ursion, entra en fonctions l'an 1079, Jusqu'alors l'église de Saint-Martin des Champs avait été desservie par treize chanoines réguliers. Les religieux de Saint-Martin étaient seigneurs hauts justiciers dans leur enclos qui n'avait pas moins de quatorze arpents et où se trouvait un pré qu'on choisissait habituellement pour le théâtre des duels judiciaires. L'église, commencée dans le style roman et terminée au XIVe siècle, était d'une élégance remarquable, bien qu'elle n'eût ni voûtes ni bas côtés. Le réfectoire, construit par Pierre de Montereau, avait une voûte sillonnée par de gracieuses nervures et soutenue par de légères colonnes.

Au XVIe siècle on comptait à Saint-Martin des Champs quarante-cinq religieux, et de la maison dépendaient soixante-dix cures et vingt-cinq prieurés. Simples, les bons moines consacrèrent une partie de leurs revenus à enrichir leur église de tableaux : ils commandèrent à Jean Jouvenet, pour être placés dans la nef, Jésus-Christ chassant les vendeurs du temple, la Resurrection de Lazare, la Péche miraculeuse et le Repas chez Simon le Pharisien. De ces vastes compositions, deux furent données en 1811 au Musée de Lyon, et il en existe une reproduction au Musée du Louvre, La Pêche miraculeuse et la Resurrection de Lazare ont été transportés dans le même Musée.

Jouvenet eut un procès avec les religieux de Saint-Martin

qui refusaient de recevoir les tableaux qu'ils lui avaient commandés, sous prétexte que ce peintre ne traitait pas assez la vie de saint Benoit. Jouvenet répondit à ces religieux, en présence des juges : « Que vouliez-vous que je fisse, dans une grande composition, de trente sacs de charbon tels que ceux que vous portez?» Les juges sourirent, et Jouvenet gagna la cause.

De 1706 à 1739, la maison claustrale fut refaite sur les plus vastes proportions, par les architectes Le Tellier et de La Tour; ce fut ce dernier qui dessina le majestueux escalier qui excite encore aujourd'hui notre admiration. Derrière leur jardin, les Bénédictins ouvrirent, en 1765, un marché pour le poisson, les légumes et les herbages, avec deux fontaines et un corps de garde à l'usage du guet de Paris. Du même côté se dessinait une façade imposante de 62 toises de long; le pavillon qui formait avant-corps était surmonté d'un fronton au milieu duquel on avait sculpté les armes royales. Du côté de la rue SaintMartin, les moines économes bâtirent des maisons qu'ils louérent avantageusement.

Au moment où la défense de la patrie, que menaçait une coalition toute-puissante, exigeait d'héroïques efforts, le prieuré de Saint-Martin des Champs fut transformé en manufacture d'armes, qui était encore en activité lorsque l'abbé Grégoire, Conté, Molard et Montgolfier commencèrent à organiser la nouvelle institution du Conservatoire des arts et métiers. Elle se développa rapidement, et M. de Champagny, ministre de l'intérieur, y adjoignit une école dont les élèves étaient recrutés dans tout l'empire, et où l'on enseignait l'arithmétique, la géométrie élémentaire, le système des nouveaux poids et mesures, la statiq .e, la géométrie descriptive et ses applications à la coupe des pierres, a la charpente, à la menuiserie; la perspective, la mécanique et ses applications aux arts et métiers; Thydrodynamique, la description des instruments et machines de tous genres; le dessin linéaire, figure, ornements, machines et architecture; le lavis, le dessin pour étoffes brochées et façonnées, et enfin la bibliographie des machines.

« De 1810 à 1811, dit M. Paul Huguet, un des historiens du Conservatoire, cette école a compté jusqu'à trois cents élèves; elle a fourni des sous-officiers aux sapeurs du génie; des employés au bureau des fortifications, des élèves à l'école de SaintCyr (artillerie), et un grand nombre de conducteurs de travaux, de chefs d'ateliers et de manufactures. Plusieurs de nos grands industriels, entre autres MM. Sellière, filateur à Senones; Emile Dolfus, membre de nos dernières assemblées législatives, et M. Schneider, ancien ministre, aujourd'hui viceprésident du Corps législatif, sont sortis de cette école. Ce dernier, pendant son passage au ministère du commerce, dans les attributions duquel était alors placé le Conservatoire des arts et métiers, n'a laissé échapper aucune occasion de témoigaer le vif intérêt qu'il prenait à la prospérité d'un établissement où il se glorifiait d'avoir reçu sa première éducation industrielle.

[ocr errors]

Le jardin avait alors une vaste étendue, et servait à des essais agricoles; mais l'Etat céda une partie des terrain à la ville de Paris, et l'abandon complet du monument était même projeté, quand, le 14 mai 1813, Napoléon 1er envoya de Dresde un décret ordonnant que le Conservatoire fût maintenu dans le local qu'il occupait.

Sous la Restauration, le premier directeur du Conservatoire, M. Molard, prit sa retraite et fut remplacé par M. Christian, assisté d'un sous-directeur et d'un conseil de perfectionnenient; plusieurs chaires furent créées successivement, et elles sont aujourd'hui au nombre de quinze géométrie appliquée aux arts; chimie appliquée aux arts; chimie industrielle; géométrie descriptive; physique appliquée aux arts; législation industrielle; mécanique appliquée aux arts; agriculture; chimie agricole; arts céramiques; filature et tissage; teinture, impression et apprêt des tissus; zoologie appliquée à l'agriculture et à l'industrie; constructions civiles; administration et statistique industrielles.

Les professeurs, qui tous jouissent comme savants d'une haute considération, sont MM. Charles Dupin, le général Morin, Richard, Péligot, Becquerel, Tresca, Payen, de La Gournerie, Wolowski, Moll, Boussingault, Alcan, Persoz, Baudement, Trélat, Duval. Les cours de ces doctes professeurs ont pour principaux auditeurs des jeunes gens qui, n'ayant pas assez de ressources pour étudier dans les lycées, s'efforcent du moins d'acquérir les connaissances à l'aide desquelles ils peuvent s'élever au premier rang dans leurs spécialités respectives.

[graphic][subsumed][merged small]

En vertu du décret du 10 décembre 1853, le Conservatoire des arts et métiers est régi par un directeur. La place de sousdirecteur, un moment supprimée, a été rétablie quelques mois plus tard.

Le conseil de perfectionnement, dont les fonctions sont gratuites, se compose du directeur, des professeurs de haut enseignement et de membres adjoints choisis dans les corps savants et dans l'industrie, dont le nombre cependant ne pourrait jamais dépasser celui des professeurs. Le président et le viceprésident de ce conseil sont à la nomination du ministre.

[merged small][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small]

Même pour les curieux qui ne sont pas initiés aux secrets de la science et de l'industrie, une promenade dans les salles du Conservatoire est pleine d'intérêt. On y apprend de visu l'histoire du génie humain, qui dompte la matière et qui utilise pour l'avantage commun toutes les forces naturelles. Là sont tous les moteurs connus, moulins: roues hydrauliques, turbines, machines à vapeur, et on peut lire dans les archives la lettre autographe par laquelle Fulton proposait au gouvernement français de lui livrer ses procédés. Plus loin ce sont des modèles d'engrenages, de compas, de sondes, d'outils servant à la métallurgie. Puis viennent les machines à calculer, dont une porte cette inscription:

"Esto probati instrumenti symbolum hoc: Blasius Pascal Arvernus inventor, 20 mai 1632.

"Que ceci (la signature placée au-dessous) soit le signe d'un instrument éprouvé : "Blaise PASCAL, d'Auvergne, inventeur, "

Les galeries d'arpentage et d'astronomie renferment des boussoles, des niveaux, des alidades, des graphomètres, des sphères sextons, lunettes, télescopes, plans en relief, calendriers. Au premier étage sont réunis des chefs-d'œuvre d'horlogerie, des appareils de chauffage et d'éclairage, des instruments d'optique, de physique, des modèles à l'usage des charpentiers, menuisiers et tailleurs de pierre, des dynamomètres, et les types génériques des tentatives impuissantes faites pour obtenir le mouvement perpétuel dans l'intérêt de l'humanité. N'oublions pas des modèles de lits mécaniques en bois et en fer à l'usage des hôpitaux; de bains de vapeur; d'un appareil de fumigation sulfureuse; de table pour les opérations chirurgicales; de fauteuil roulant pour les malades; de brancard pour transporter les blessés.

Une galerie est consacrée à la céramique, cet art antique que cultivaient simultanément les Étrusques, les Gaulois, les Celtes, pendant que les Chinois et les Japonais, possesseurs du kaolin et du pétunse, le portaient jusqu'à la perfection. La collection du Conservatoire des arts et métiers ne saurait être aussi riche que celle de Sèvres, mais on y remarque de beaux échantillons des faïenceries indigènes ou étrangères, des poteries en grès, en porcelaine dure, en pâte tendre, en porcelaine phosphatique, entre autres la Coupe du Travail, en biscuit de porcelaine, offerte par la manufacture de Sèvres, et ornée, par M. Diéterle, de peintures qui représentent divers métiers. A côté d'échantillons de kaolin, d'argile plastique, de marne argileuse, on remarque des pièces de gobeletterie en verre et en cristaux colorés, des coupes taillées à facettes, des cristaux fili

[subsumed][merged small][graphic][ocr errors][merged small][merged small][merged small]

granés et rubanés, des verres de Bohême, des disques en flintglass, etc.

Les trésors de cette collection, qui ne sauraient être énumérés en détail, sont classés avec un ordre admirable, et des travaux ont été accomplis pour rendre le monument digne de sa destination. La porte d'entrée porte au centre du fronton qui la décore un buste sculpté avec ces mots : Science, Industrie. Sur la plinthe inférieure, on lit: Conservatoire des arts et méliers. Devant l'édifice est un square dont le tracé se rapproche un peu du genre symétrique des jardins français.

Lorsqu'en pénétrant dans la cour du Conservatoire, les visiteurs jettent un coup d'oeil en arrière, ils voient à l'intérieur de la porte d'entrée ces trois mots: Agriculture, Commerce, Industrie, et ces inscriptions commémoratives:

L'an 1060, fondation et dotation de l'abbaye royale de SaintMartin des Champs par Henri Ier, roi de France. >>

«L'an m (1793), institution du Conservatoire des arts et métiers par décret de la Convention nationale du 19 vendémiaire (10 octobre). »

«L'an 1798, installation du Conservatoire dans le bâtiment de l'ancien prieuré royal de Saint-Martin des Champs. >>

Dans une galerie, dite du Portefeuille, les ingénieurs, les constructeurs et tous les industriels peuvent aller étudier des dessins cotés à l'échelle, représentant les machines les plus nouvelles et les plus parfaites que l'industrie ait récemment produites.

Les murs de l'escalier qui y conduit sont décorés de basreliefs, et les noms suivant y sont inscrits:

Léonard Limousin, 1519 à 1568;

Les frères Keller, 1635 à 1702;

J.-Marie Jacquart, 1752 à 1834;
Ch.-Philippe Oberkampf, 1738 à 1815;

J.-B. Joseph-Delambre, 1749 à 1822;
F.-André Méchain, 1744 à 1805;
A.-Auguste Parmentier, 1737 à 1813.

Tous ces hommes ont rendu d'éminents services à diverses branches des connaissances humaines. Léonard fut le premier directeur de la manufacture d'émaux fondée à Limoges; c'était un peintre distingué, dont les débuts attestaient une grande originalité, mais qui, saisi d'admiration pour les grands maitres italiens, eut le tort de les imiter trop servilement. Il excella dans le portrait sur émail; il reproduisit les traits de François Ier, de Henri II, de Charles IX, de Catherine de Médicis, d'Antoine de Bourbon, du duc de Guise, du connétable de Montmorency, de l'amiral Chabot. Son procédé consistait à couvrir le métal de deux couches d'émail, l'une noire, l'autre blanche. Il se servait de la pointe pour dessiner les contours, en mettant à découvert certaines portions de l'émail noir, et il peignait ensuite avec des couleurs vitrifiables.

Jean-Jacques Keller, et Jean-Balthasar, son frère, qui vinrent de Zurich à Paris sous le règne de Louis XIV, ont fondu la plupart des bronzes de Versailles et des Tuileries.

Jacquart a attaché son nom an métier à l'aide duquel on tisse les étoffes façonnées, et dont le type primitif est dû à Falcon et à Vaucanson.

Falcon, chef d'atelier de tissage à Lyon, en 1748, avait perfectionné le métier à la tire. Jacquart, pendant un voyage qu'il fit à Paris, conçut l'idée d'adapter les cartons à nappes pendantes de Falcon au tambour à chariot de Vaucanson, tambour qu'il suffisait en quelque sorte d'équarrir, ou de remplacer par un prisme rectangulaire accomplissant un quart entier au lieu d'une petite fraction de révolution, à chaque duite ou recul du chariot. «Employés séparément, disait M. Bardet, rapporteur de la Société d'encouragement, ces deux moyens concouraient au

même but, mais ils ne l'atteignaient pas; réunis avec intelligence et avec des perfectionnements par M. Jacquart, ils offrent un succès complet. Le métier où l'auteur a puisé l'idée de cette réunion est celui de Vaucanson, déposé dans la salle du Conservatoire de Paris depuis longtemps, en vue des artistes et des fabricants. Le génie de M. Jacquart a saisi le point utile et a su l'employer avec avantage; ce qui est une preuve évidente qu'une machine abandonnée peut faire naitre des idées neuves, lorsque les regards d'un véritable artiste savent découvrir ce qui est bon et le mettre à profit. M. Jacquart a imaginé un moyen aussi simple qu'ingénieux pour la composition de ses cartons. Ses connaissances dans l'art de l'imprimerie l'ont mis à portée de composer en caractères mobiles des planches à l'aide desquelles il imprime ces cartons, et les dispose à recevoir les dessins. Par ce moyen, l'ouvrier d'une intelligence ordinaire peut lire toute sorte de dessins avec facilité et promptitude. »

M. Oberkampf, fils d'un teinturier suisse, vint, à l'âge de vingt et un ans, s'établir dans la vallée de Jouy. Il dessina, grava, imprima, teignit les toiles, et malgré l'insuffisance de ses ressources, il parvint, à force d'énergie, à fonder une grande manufacture de toiles peintes. Cet industriel, auquel Louis XVI donna des lettres de noblesse, et que Napoléon 1e voulut faire sénateur, établit à Essonne la première filature de coton qu'on a vue en France.

Delambre et Méchain sont deux astronomes. Parmentier, qui fit des recherches sur les substances alimentaires, la mouture et la boulangerie, est surtout connu par le zèle avec lequel il propagea la culture de la pomme de terre, tubercule apportée du Chili par l'amiral Drake, dès le xvIe siècle, mais qui n'était utilisée que pour nourrir les animaux domestiques.

Le réfectoire où l'on a placé la bibliothèque est une des plus belles salles gothiques que l'on connaisse; il a été restauré avec goût; les colonnes sveltes et gracieuses qui le divisent ont été peintes comme elles l'étaient au xme siècle. Sur les murs, M. Gérome a représenté la Peinture, le Dessin, la Chimie et la Physique, qui, bien qu'elle ait la désinvolture d'une femme du moyen âge, tient à la main la bouteille inventée à Leyde par Cuneus, en 1746.

C'est aux dépens du jardin des moines qu'a été établi le marché Saint-Martin; celui qu'ils avaient fondé en 1765 n'existe plus. Un décret du 30 janvier 1811 le supprima comme insuffisant et l'architecte Peyre éleva sur un autre emplacement deux bâtiments de 62 mètres de longueur chacun, perçés d'arcades, et divisés en trois nefs dont chacune a 7 mètres de large. Au centre de la cour qui sépare ces deux halles est une fontaine dont la vasque est supportée par un groupe en bronze qui représente de jeunes pêcheurs occupés à jeter leurs filets. On peut considérer l'école qu'avait instituée M. de Champagny comme avantageusement remplacée par l'École centrale des arts et des manufactures, fondée en 1829, rue de Thorigny; elle ne recoit que des élèves externes qui doivent avoir dixsept ans révolus au 1er janvier de l'année dans laquelle ils se présentent; ils sont admis au concours, après avoir subi un examen sur l'arithmétique, l'algèbre, la géométrie, le dessin au trait et le lavis. Quelques-uns sont entretenus aux frais du gouvernement et des administrations départementales. Déclarée établissement de l'Etat par la loi du 19 juin 1857, l'École centrale forme des ingénieurs, des directeurs d'usines et de manufactures, des professeurs de sciences appliquées.

Les professeurs de l'Ecole centrale sont MM. Dumas, directeur, membre de l'Académie des sciences (chimie générale ; Bélanger, ingénieur des ponts et chaussées (mécanique industrielle Ferry (métallurgie); Perdonnet, ingénieur en chef du chemin de fer de l'Est (chemins de fer); Payen (chimie industrielle); Peligot (chimie analytique; Thomas (physique industrielle, machines à vapeur) ; Collin (construction des machines); Mary et Beaulieu (travaux publics,; Burat (exploitation des mines); Masson (physique générale; Martelet (géométrie descriptive); Depuis (histoire naturelle,; Cahons (chimie générale), Sennet (analyse géométrique, mécanique générale); Faure (transformation du mouvement;; Saluchet (céramique et peinture); Delacroix (législation industrielle). Sous la présidence de M. Dumas, MM. Bélanger, Ferry, Perdonnet, Payen, Peligot, Thomas, Collin, constituent un comité qui a pour secrétaires MM. Mary et Amédée Burat.

Dans les salles de l'Ecole centrale se font pour les ouvriers les cours gratuits de l'Association polytechnique. Créée en 1830 par d'anciens élèves de l'Ecole polytechnique, elle s'établit suc

cessivement à l'Hôtel de Ville, à l'ancien Tribunal de commerce, rue Saint-Merry, au faubourg Saint-Antoine (hospice des Quinze-Vingts), à l'école de la rue de Ponthieu, dans la rue des Vinaigriers, à l'école de la rue Sainte-Elisabeth, à la mairie des Petits-Pères, à la Sorbonne et à la Vieille-Estrapade. Mais il était devenu extrêmement difficile de trouver des professeurs qui consentissent à se transporter sur ces différents points, et plus difficile encore de s'y maintenir dans des locaux convenables. La dépense d'ailleurs dépassait les ressources. Ce fut ce qui conduisit l'Association à concentrer son enseignement dans un local unique, placé au centre de Paris, la Halle aux draps, puis, le bâtiment de la Halle aux draps ayant été incendié, à réunir les cours dans un autre local, rue Jean-Lantier, et enfin à l'Ecole centrale.

[merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small]

Les Archives impériales ne sont pas moins dignes d'attention que le Conservatoire des arts et métiers. Elles occupent plusieurs hotels construits à différentes époques. La partie la plus ancienne, qui donne sur la rue du Chaume, fut occupée par l'illustre famille de Clisson, par le comte de Penthièvre, et par la famille Babou de la Bourdaisière. Le duc de Guise et le cardinal Charles de Lorraine achetèrent, en 1556, ce vieil hotel qu'ils firent réparer. On prétend que Paul Stuard de Caussade, comte de Saint-Mégrin, fut surpris par le duc de Guise dans la chambre de la duchesse, et que le mari jaloux le précipita du haut d'une fenètre du second étage, située en face de la fontaine des Haudriettes. La tradition a conservé le souvenir de cette tragique aventure; mais s'il est vrai que Saint-Mégrin fit cette chute dangereuse, elle ne lui coûta pas la vie. Il est constant qu'il fut assassiné le 21 juillet 1578, rue Saint-Honoré, près du Louvre, par une trentaine d'hommes armés d'épées, de coutelas et de pistolets.

François de Rohan, prince de Soubise, acheta l'hôtel des princes lorrains, n'en laissa subsister qu'une partie, et chargea Le Maire, architecte favori de Mae de Pompadour, de lui batir un palais somptueux; le portail, d'une belle ordonnance, s'arrondissait en demi-cercle, et il est encore imposant, quoique dépouillé de ses sculptures héraldiques.

On a restauré les majestueuses colonnades de la cour d'honneur, sous lesquelles le prince de Soubise passait la revue des gendarmes dont il était capitaine-lieutenant. On a gratté la façade et reblanchi les statues sculptées par Robert le Lorrain, statuaire parisien; mais les magnificences intérieures de cette somptueuse habitation ont presque entièrement disparu. Gaeton Brunetti, artiste lombard, y avait figuré dans l'escalier des colonnades, des statues, des mascarons, de profondes perspectives. Restout avait peint pour les appartements la dispute de Phœbus et de Borée, Neptune et Pallas, le Secret s'alliant à la Prudence, Neptune et Amphytrite. Les dessus de porte étaient de François Boucher, de Carle Vanloo et de Trémollière. Natoire avait représenté, dans les pendentifs d'un grand salon ovale, l'histoire mystique de Psyché. Le Moyne avait placé, au centre d'une grisaille, Louis XV arrêtant d'une main la Victoire, et de l'autre, offrant une branche d'olivier à l'Europe étourdie, tandis que la France tranquille gourmandait Bellone, aux applaudissements de la Religion, de la Justice et de la Prudence. Les frères Adam avaient sculpté sur les corniches des figures en stuc, telles que la Peinture, la Poésie, la Musique, la Justice, l'Histoire, la Renommée.

A l'autre extrémité de Paris, dans un quartier transfiguré par l'ouverture de la rue de Castiglione, trois couvents étaient côte à côte rue St-Honoré. Le premier devait son nom à l'abbaye de Feuillants, située dans le diocèse de Rieux et appartenant à l'ordre de Citeaux. Soixante-deux religieux de cet ordre, sous la conduite de leur réformateur, l'abbé Donjean de La Barrière, étaient entrés, le 7 septembre 1587, dans un couvent dont la façade avait été refaite par Monsard, et correspondait au centre de la place Vendôme. Sur la même ligne était un monastère, fondé en 1575 par Pierre Deschamps, religieux

LE TEMPLE.

de l'ordre de Saint-François, et le premier qui adopta en France la réforme de Matthieu de Baschi, réforme dont le signe extérieur était un capuchon pointu. Plus loin était le couvent des Filles de l'Assomption, dont l'église avait été bénie le 14 août 1676 par Poncet, archevêque de Bourges.

L'Assemblée nationale constituante avait, par décret du 14 août 1789, institué des archives qui la suivirent à Paris après les journées des 5 et 6 octobre; elle eut domicile au manége des Tuileries, sur la terrasse dite des Feuillants, et chercha dans les environs un local pour y serrer les papiers qu'avait déjà recueillis le représentant Camus. On désigna le couvent des Capucins, où les Archives furent organisées par un décret du 7 septembre 1790. Après le 10 août 1792, elles furent déposées aux Tuileries; et comme les documents y affluaient de toutes parts, la Convention nationale en réglementa la classification par un décret du 7 messidor an II.

Le 28 mai 1800, un arrêté consulaire affecta aux Archives un local distinct; mais ce ne fut qu'en vertu d'un décret du 6 juin 1808 qu'on les plaça à l'hôtel Soubise. On avait commencé pour elles, aux termes d'un autre décret du 21 mars 1812, entre T'esplanade des Invalides et le Champ de Mars, un palais qui demeura inachevé; et il est probable qu'elles resteront dans leur demeure actuelle, car leur translation ne serait pas moins difficile que celle de la Bibliothèque impériale. On a calculé que les cartons et portefeuilles qu'elle renferme, rangés les uns à côté des autres, s'étendraient sur une longueur de 23 kilomètres.

En 1847, l'extension des Archives nécessita l'acquisition de l'hotel d'Arsy où demeure le directeur.

De nouveaux corps de logis ont été construits le long de la rue des Quatre-Fils, pour ce dépôt gigantesque dont l'organisation a été remaniée par les décrets des 22 décembre 1855, 22 mars et 1er août 1856, et par règlement du ministre d'Etat en date du 12 novembre 1856.

La restauration de la façade de l'hôtel des Archives impériales, qui se profile sur la rue du Chaume, est aujourd'hui terminée. Cette vieille muraille, qui fit autrefois partie de l'hôtel des Guises, aurait été plus avantageusement remplacée par une grille d'un caractère monumental qui aurait permis d'apercevoir l'architecture de ce magnifique hôtel, ainsi que le parterre qui verdoie dans la cour. On a restauré également la fontaine construite par le prince de Soubise, à l'angle de l'hôtel. Elle se compose d'un avant-corps qui forme une partic de cercle ou saillie. Toute sa décoration est formée par deux pilastres simples qui règnent dans la hauteur de l'étage, et une niche où l'on a pratiqué une porte.

Les Archives de l'Empire sont dans les attributions du ministre d'Etat. On y dépose tous les documents d'intérêt public dont la conservation est jugée utile, et qui ne sont plus nécessaires au service des départements ministériels ou administrations qui en dépendent. Le dépôt ne peut en être fait qu'en vertu d'un décret rendu sur la proposition du ministre au département duquel les documents appartiennent; et ce dépôt est toujours accompagné d'un inventaire.

Un arrêté du ministre d'État autorise le dépôt aux Archives de l'Empire des documents donnés à l'État.

Les documents déposés aux Archives de l'Empire ne peuvent être aliénés qu'en vertu d'une loi.

Ils ne peuvent en être retirés, pour être placés dans un autre dépôt, qu'en vertu d'un décret rendu sur le rapport du ministre d'Etat.

Les ministres transmettent au ministre d'État, pour être déposé aux Archives de l'Empire, l'inventaire des documents que renferment les dépôts placés dans leurs attributions respectives, et appartenant à l'Etat, aux départements et aux communes; ils lui font connaitre, tous les cinq ans, les modifications que cet inventaire a pu subir.

L'administration des Archives de l'Empire est confiée à un directeur général placé sous l'autorité du ministre d'État. Le directeur général est nommé et révoqué sur la proposition du ministre d'Etat.

Son traitement est de 15,000 fr.

Le directeur général est tenu de résider au palais des Archives; il ne peut s'absenter sans autorisation préalable.

Le service des Archives de l'Empire se divise en quatre sec

tions:

1o Section du secrétariat;

20 Section historique;

[blocks in formation]

D'un agent comptable;

D'un commis d'ordre.

Ces fonctionnaires et employés sont de première, deuxième ou de troisième classe. A chacune de ces classes est affecté un traitement différent.

Le traitement des fonctionnaires et employés des Archives de l'Empire est fixé par un décret.

Ces fonctionnaires et employés sont nommés, promus et révoqués par le ministre d'État, sur la proposition du directeur général.

La nomination et la révocation des gagistes appartiennent au directeur général.

Dans les sections autres que celles du secrétariat :

Les chefs de section sont choisis parmi les membres de l'Institut; les sous-chefs de section, parmi les archivistes et les hommes connus par leurs travaux en histoire, archéologie et paléographie.

Toutefois, sur deux vacances, les sous-chefs et archivistes ont droit à une nomination.

Les sous-chefs sont choisis parmi les archivistes, et les archivistes parmi les surnuméraires auxiliaires, les élèves de l'École des chartes pourvus d'un diplòme d'archiviste paléographe et les archivistes départementaux et communaux ayant au moins trois ans d'exercice.

Les fonctionnaires et employés de tout grade, lors de leur nomination, prennent rang dans la dernière classe. Nul n'est promu à une classe supérieure s'il ne compte au moins deux ans de service dans celle à laquelle il appartient.

Un règlement arrêté par le ministre d'État détermine les conditions auxquelles sont délivrées les expéditions des documents déposés aux Archives de l'Empire, et le mode des communications à faire, soit sur place, soit au dehors, aux administrations et aux particuliers.

Ce règlement détermine aussi les attributions et les travaux de chaque section.

Un décret fixe le tarif des droits de recherches et d'expéditions; le montant de ces droits est versé chaque année au Trésor.

Tout fonctionnaire ou employé aux Archives, quel que soit son grade, qui publierait ou contribuerait à publier, soit des documents conservés au dépôt central, soit d'autres documents qui lui auraient été confiés par suite de ses fonctions, soit un travail quelconque sur ces documents, sans en avoir obtenu l'autorisation spéciale, sera révoqué, sans préjudice des autres peines portées par la loi.

Cette autorisation est accordée par le ministre d'État, après avis du directeur général.

En cas d'absence ou d'empêchement quelconque du directeur général, ses fonctions sont provisoirement remplies par un chef de section désigné, sur sa proposition, par le ministre d'Etat.

En cas de décès, le chef de la section du secrétariat est de droit chargé du service, et en demeure responsable jusqu'à la nomination d'un nouveau directeur général ou d'un intérimaire.

Les Archives se divisent en quatre sections. Dans la première, celle du secrétariat, est comprise la conservation des documents provenant de l'ancienne secrétairerie d'Etat, du cabinet de Napoléon I et de l'ancienne armoire de fer. Cette armoire, qu'il ne faut pas confondre avec celle qu'avait fabriquée pour Louis XVI le serrurier Gamain, a été commandée par l'Assemblée constituante, et recèle aujourd'hni environ 4,000 pièces d'un intérêt plus ou moins contestable. On y trouve des traités de paix, des bulles d'or, les clefs que les magistrats de la ville de Namur apportèrent à Louis XIV et les clefs de la Bastille; les pièces du procès de Louis XVI, son testament et celui de Marie-Antoinette; les étalons du mètre et du kilogramme; la matrice de la médaille qui consacra le souvenir du serment du Jeu-de-Paume. La première section a dans ses attributions le classement et la conservation des do

« PreviousContinue »