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France sur navires français, avec certificats de provenance, sont reçus aux droits de faveur réservés aux produits de l'Inde. Les sucres, cafés et autres denrées coloniales sont reçus aux droits spéciaux accordés aux produits de la Réunion, à la condition d'être accompagnés de certificats constatant qu'ils sont du crû de ces fles. Les dernières statistiques ne donnent encore, pour les trois établissements, pendant l'année 1853, qu'un mouvement commercial (entrées et sorties réunies) d'une valeur totale de 1,000,000 de francs.

§ IH. Tentatives de colonisation à Madagascar. En 1642, Madagascar attira l'attention de la France. Elle reçut successivement les noms d'ile Saint-Laurent, d'ile Dauphine, de France orientale, et enfin de Madagascar. Les Français entrevirent dans son occupation de grands avantages maritimes et commerciaux; ils y fondèrent de beaux établissements le long des côtes, parmi lesquels se placent en première ligne le fort Dauphin, Magafia ou Sainte-Luce, Tanatave, Foulpointe, l'île Sainte-Marie, la Pointe à Larrée ou Tintingue, Louisbourg et quelques autres comptoirs dans la baie d'Antongil. (Notices statistiques sur les colonies françaises, 1840.)

Depuis 1642, époque de la fondation du fort Dauphin, jusqu'en 1786, ces divers établissements furent tour à tour occupés, abandonnés et occupés de nouveau, selon que l'exigèrent nos vues, nos convenances ou des circonstances locales. De 1667 à 1670, le fort Dauphin fut le chef-lieu des possessions orientales de la compagnie des Indes, la résidence d'un gouverneur général et le siége d'un conseil souverain; mais à la fin de 1671, presque tous les blancs y ayant été massacrés par les naturels, les Français ces sèrent d'y résider d'une manière permanente.

Après l'abandon des établissements formés dans la baie d'Antongil, par le célèbre baron de Beniouski, vers 1786, la France n'eut plus à Madagascar qu'un commerce d'escale, et n'y conserva, sous la direction d'un agent commercial et sous la protection d'un petit nombre de soldats fournis par la garnison de l'ile de France, que quelques postes de traite indispensables pour assurer l'approvisionnement de cette dernière île et de celle de Bourbon, en riz, bœufs et salaisons. (Précis sur les établissements formés à Madagascar, imprimé par ordre de l'amiral Duperré, 1836.) Pendant les guerres de l'empire tous ces postes se réduisirent à deux seulement, Tanatave et Foulpointe. En 1811, ils tombèrent au pouvoir des Anglais. M. Sylvain Roux, agent commercial français à Tanatave, les leur abandonna par suite d'une capitulation avec le commandant de la division anglaise. Les Anglais détruisirent les forts et se retirèrent, abandonnant le pays aux indigènes. Le traité de Paris du 30 mai 1814 rendit à la France ses anciens droits sur Madagascar. L'article 8 stipule la restitution des établissements de tout genre que

nous possédions hors de l'Europe avant 179 à l'exception de certaines possessions, nombre desquelles ne figure point Madag car. Mais comme cet article portait en me temps cession à la Grande-Bretagne de propriété de l'tle de France et de ses dépdances, sir Robert Farquhar, gouvern de cette colonie devenue anglaise, préten que les établissements de Madagascar trouvaient implicitement compris dans cession, comme ayant été rangés au nom. des dépendances de l'Ile de France antérie rement à 1792. Cette interprétation error du traité de Paris donna lieu, entre cours de France et d'Angleterre, à une gociation à la suite de laquelle, le gouse nement anglais reconnut que la préten élevée par sir Robert Farquhar n'était : lement fondée, et adressa à ce gouverne sous la date du 18 octobre 1816, l'ordre remettre immédiatement à l'administr de Bourbon les anciens établissements fre çais à Madagascar. (Ibid.) Par une dépê ministérielle du 4 mars 1817, les admi trateurs de l'île Bourbon furent chargés : M. le vicomte Dubouchage, alors minist de la marine et des colonies, de faire pro der à la reprise de possession de ces étab sements, et d'envoyer provisoirement s les lieux un agent commercial, avec le no bre d'hommes nécessaire pour y faire t pecter le pavillon français. Dans les ani 1818 et 1819, les Français rentrèrent sol nellement dans leurs droits sur Sale Marie, Tintingue, le fort Dauphin et San Luce. Ces établissements furent placés s l'autorité du gouvernement à Bourbon.

Marie, l'un de nos anciens comptoirs les La reprise de possession de l'île de Sain importants et le seul que nous'ayons aujou d'hui dans le voisinage de Madagascar, lieu le 15 octobre 1818. La propriété cette ile, injustement contestée à la Fra par l'Angleterre, soit dans les premières des événements qui se sont succédé dep nées de la restauration, soit pendant le co authentique faite à la compagnie des Ind cette époque, repose sur un acte de cess file, le 30 juillet 1750. par Béti, tille de Ratzimilaho, souverain

Les traités de 1814 et 1815, en ramena la paix en Europe, dévoilèrent à la Fran la triste situation de ses colonies. L'lie France passait dans les mains de l'Ang terre; nos possessions des Antilles étaie ruinées par une longue guerre et par la lousie de nos rivaux; Saint-Domingue p clamait son indépendance, Bourbon e dépourvu de port et la Guyane n'offrait à métropole aucun avenir: les miasmes pest lentiels attribués à ses côtes, repoussaier de l'esprit des commerçants français, tout idée de colonisation. Les temps étaient don venus d'examiner si les côtes de Madagas car n'auraient pas un havre, un port qu pût nous dédommager de ce que now avions perdu dans la mer des Indes, et s' ne conviendrait pas d'y former quelques

établissements avantageux à notre commerce et à notre marine.

Les ministres de la marine, dans les premières années de la Restauration, encouragèrent les explorations nécessaires. Dès 1817, M. le conseiller d'Etat Forestier fut chargé, par M. le vicomte Dubouchage, d'examiner le parti que la France pouvait tirer de ses anciennes possessions de Madagascar. M. Forestier consulta tous les documents existants dans les archives de la marine, s'entoura d'hommes qui avaient longtemps vécu dans le pays, et le 20 mai de la même année, il remit à M. le ministre un plan de colonisation sur la côte orientale de Madagascar qui, s'il réussissait, devait ouvrir de nouveaux débouchés aux produits de l'agriculture et de l'industrie françaises, et fournir des moyens d'existence à l'excédant de la population du royaume. La côte orientale, la seule où la France eût autrefois possédé de pareils établissements, lui semblait, par sa position rapprochée de Bourbon (140 lieues), le point le plus favorable à des projets de colonisation. La petite île de Sainte-Marie, qui en était trèsvoisine, offrait une réunion d'avantages propres à fixer d'abord le choix du gouvernement. Le canal qui la séparait de la côte orientale de Madagascar, formait une rade belle, sûre, et d'un abord facile en tout temps; et vis-à-vis se trouvait le port de Tintingue, susceptible de devenir un grand arsenal maritime. M. Forestier proposait de composer la première expédition d'un administrateur en chef, de quatorze officiers vils, de cent treize officiers, sous-officiers soldats, et de cent vingt colons, en tout ax cent quarante-huit personnes, et d'afLecter aux frais de cette expédition une mme de 1,200,000. (Ibid.)

Cette dépense n'était pas extraordinaire, et cependant elle le parut au ministre. On Toulut réduire le chiffre à 300,000 francs. Qu'est-ce que 300,000 francs pour une telle entreprise? Cependant cette somme fut enore trouvée trop forte et le ministre se vit ans l'obligation d'ajourner l'expédition jusqu'en 1819, avec l'espoir qu'à cette époque a situation des finances permettrait probaHement d'en faire le sacrifice et de chercher à rendre à nos colonies de l'Inde l'im[rtance qu'elles avaient autrefois. En attendant l'époque favorable à l'expédition, le inistre nomma une commission, pour exSorer les lieux et reconnaître le point où il viendrait de former un établissement nicole et commercial. Cette exploration, à quelle concourut M. le baron de MaLau, eut lieu pendant les quatre derniers Los de 1818. (Ibid.)

Son rapport, loin d'atténuer l'opinion exmée dans celui de M. Forestier, vint au ntraire la renforcer. On y désignait l'ile Sunte-Marie et Tintingue comme les points es plus avantageux et les mieux situés ur la formation détablissements colo

aux.

Un reconnut en outre que le pays n'était DICTIONN. D'ECONOMIE CHARITABLE.

pas aussi insalubre qu'on l'avait prétendu ; on n'eut à regretter qu'un seul homme, sur un personnel de cent cinquante individus. Le souvenir que les Français avaient laissé parmi les insulaires, et la confiance qu'ils surent leur inspirer dès leur arrivée, furent si grandes, que Jean René et Tsifania remirent à M. le baron de Mackau, l'un son neveu et son fils adoptif, et l'autre son petit-fils, avec prière de faire élever ces deux enfants dans un collége de France. A son retour en France, au mois de juillet 1819, M. Sylvain Roux était porteur d'une lettre de Jean René à Louis XVIII, dans laquelle ce chef implorait la bienveillance du roi en faveur de son fils, protestant de sa soumission au monarque français, annoncant qu'il avait appris avec la plus grande joie l'intention où la France était de former de grands établissements à Madagascar; il suppliait enfin Sa Majesté de lui envoyer des savants et des professeurs pour instruire les peuples qu'il gouvernait. Les deux jeunes princes madécasses furent placés dans un établissement public pour y être élevés conformément aux désirs de leurs parents.

Après beaucoup d'hésitation et l'étude de plusieurs plans comparés, les chambres accordèrent un crédit de 700,000 fr., répartis de la manière suivante : 480,000 fr. sur l'exercice 1820, pour frais d'expédition et de premier établissement; 93,000 fr. pour chacune des années 1821 et 1822, et 94,000 fr. pour 1823. En 1820 une somme de 80,000 fr. fut de nouveau allouée pour service ordinaire à Madagascar.

L'expédition partit de Brest le 7 juin 1821; six années s'étaient écoulées en projets, en informations, en mémoires et rapports!

Elle arriva à Sainte-Marie sur la fin du mois d'octobre 1821. Les premières installations se firent sans aucune opposition de la part des indigènes. On s'occupa de s'y fortifier convenablement, de construire des cases pour les colons, et de chercher les meilleures terres pour les mettre immédiatement en culture. La gabare la Normande servit d'hôpital pour les malades, jusqu'à ce qu'on pút les transporter à terre, dans des bâtiments qui leur étaient destinés. Les six années passées en France à délibérer, avaient été employées par les Anglais à nous susciter des ennemis parmi les chefs madécasses.

A peine la colonie française était installée à Sainte-Marie, qu'un bâtiment de guerre anglais y parut pour demander, au nom des autorités anglaises du cap de Bonne-Espérance et de Maurice, à quel titre les Français étaient venus à Sainte-Marie, et quels étaient leurs projets futurs sur Madagascar? M. Sylvain Roux répondit avec dignité qu'il agissait en vertu des ordres du roi de France; qu'il avait informé de sa mission le gouverneur du cap de BonneEspérance, lors de sa relâche dans cette colonie; que, du reste, il ne se croyait point obligé de faire connaitre les lieux de la

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côte où il pourrait lui convenir d'établir ses postes; que tout le littoral oriental appartenait à la France, et qu'il protestait d'avance contre toute atteinte qui serait portée à son droit de propriété. Cette réponse ferme et précise donna lieu à des explications très-vives entre le gouvernement de Bourbon et le gouverneur de Maurice. Ce dernier déclara premièrement, qu'il ne considérait Madagascar que comme une puissance indépendante, actuellement unie avec le roi d'Angleterre par les traités d'alliance et d'amitié, et sur le territoire de laquelle aucune nation n'avait de droits de propriété, hors ceux que cette puissance serait disposée à admettre; secondement, qu'il avait été notifié par cette même puissance, au gouvernement de Maurice et au commandant des forces navales britanniques dans ces mers, qu'elle ne reconnaissait de droits de propriété sur le territoire de Madagascar à aucune nation européenne.

M. Sylvain Roux instruisit le gouvernement de Bourbon de cet incident, et le gouverneur ne put lui envoyer que quelques petits bâtiments armés pour veiller à la sûreté de l'établissement de Sainte-Marie, et coopérer à sa défense en cas d'agression.

En 1823, M. Sylvain Roux fut révoqué de ses fonctions. M. Freycinet, chargé de la direction de la colonisation de Madagascar, nomma M. Blevec, capitaine de génie, commandant de Sainte-Marie. Cet officier s'empressa autant que le faible détachement de troupes placé sous son commandement pouvait le lui permettre, de faire les dispositions nécessaires pour la défense de la colonie. Au mois de juillet, Radama se présenta à Foulpointe; ses troupes incendièrent les villages de Fondaraze et de Tintingue, se livrèrent au pillage et enlevèrent un troupeau de boeufs que l'administration de Sainte-Marie avait laissé en dépôt à la Pointe-à-Larrée. (Ibid.) M. Blevec, profondément indigné de tant de vexations, de tant d'insultes faites à la France, protesta solennellement, le 15 août 1823, 1° contre le prétendu titre de roi de Madagascar, illégitimement pris par le roi des Ovas; 2° contre toute occupation faite ou à faire des points de la côte orientale dépendant de l'autorité du roi de France; 3° et contre toutes les concessions qu'on pourrait ou qu'on aurait pu extorquer aux divers chefs malgaches qui s'étaient reconnus vassaux de la France. Cette protestation fut portée à Radama, qui eut avec le souverain malgache plusieurs entrevues dans lesquelles Jean René servit d'interprète. (Ibid.) La réponse de Radama, fut: qu'il reconnaissait comme appartenant en toute propriété à la France, 'ile de Sainte-Marie, vendue autrefois à cette puissance par les naturels; mais qu'il ne reconnaissait ni à la France, ni à aucune autre puissance étrangère, des droits à la possession d'aucune partie de la grande ile de Madagascar; qu'il permettait seulement aux étrangers de toute nation de venir s'y établir, en se soumettant aux lois de son

royaume; et qu'à l'égard du titre de roi di Madagascar, il le prenait parce qu'il était seul dans l'île qui fût capable de le soutenir (Lettre de M. Thoreau de Molitard, co mandant de la Bacchante à M. Blevet, 23 août 1828.)

Radama quitta la côte après y avoir laiss quelques troupes et se dirigea vers le nor de l'ile avec environ quinze mille hommes sous prétexte, disait-il, d'aller châtier 1 naturels qui avaient levé l'étendard de révolte contre son autorité. Cette expéditic avait plutôt pour but de les intimider et les éloigner de toute alliance avec les Fr çais. Aussitôt après son départ, le gouve neur de Sainte-Marie fit continuer les tra vaux de défense de la colonie, et les colo se livrèrent avec empressement à la cultur du sol. Le personnel attaché au service l'établissement se composait, au commen ment de 1824, de 73 blancs et de 182 dont un certain nombre, organisés milita ment par M. Blevec, lors de l'irruption Radama sur la côte, étaient alternativem occupés aux travaux publics et à ceux d culture. On comptait dans l'île cinq balt tions importantes. Dans celle du gouver ment on cultivait 30,000 pieds de cafiers quelques cotoniers, et l'on y avait pla en manioc une étendue considérable terrain. Dans celle de MM. Afbrand et rayon, les plantations se composaient 40,000 pieds de cafiers et de 60,000 pieds pépinière, de 30,000 pieds de giroflierset verger réunissant tous les arbres fruit des colonies. Sainte-Marie était dever sous la bonne administration du com dant et par l'activité et la persévérance colons, un entrepôt pour le commerce France et de Bourbon avec les naturels la grande fle; elle allait bientôt se trou pourvue d'un quai de carénage qui évite à nos navires d'avoir recours pour leurs parations aux chantiers de l'ile Maurice. considérations engagèrent le départem de la marine à maintenir la colonie Sainte-Marie, et d'aider à sa prospérité. sulté à cette époque, le conseil de l'a rauté fut du même avis.

Cependant les Anglais ne cessaient d' triguer contre nous auprès de Radama, nous créer des difficultés. Le fort Dauph situé à l'extrémité sud de Madagascar. assiégé dans le mois de février 1825 par corps de troupes ovas d'environ quatre hommes. Le fort n'était défendu que par officier et cinq soldats français. Au mě, d'une convention entre le chef ovas et Français, dans laquelle il était dit qu'au acte d'hostilité n'aurait lieu pendant d mois, afin de laisser à l'officier français temps de recevoir des ordres du gouv. nement de Bourbon, les Ovas se portée le 14 mars 1825, sur le fort et y entrer de vive force. Le pavillon français fut ar ché et remplacé par celui de Radama. ficier et les cinq soldats furent faits pris niers; mais on les remit presque auss en liberté, en leur rendant tout ce qui

appartenait. C'étaient les fruits des perfides conseils donnés à un chef barbare par le représentant d'une nation civilisée, le résident anglais.

L'influence anglaise se manifesta davantage deux mois après. Le 18 juin 1825, la gazette de Maurice publiait un décret officiel, par lequel Radama permettait l'entrée de tous les navires anglais dans les ports de Madagascar, et autorisait les Anglais à résider dans l'ile, à y commercer, construire des navires, bâtir des maisons et cultiver des terres. Il était donc clairement démontré que les Anglais ne tendaient à rien moins qu'à disposer en maîtres des ports de Madagascar, et à s'opposer à ce que les Français pussent y former des établissements. Le système de temporisation suivi par le gouvernement de l'île de la Réunion, avait produit dans l'esprit des tribus madécasses, amies des Français, une impression fâcheuse; il était temps de chercher à l'effacer. Une réparation éclatante était nécessaire; on ne pouvait la différer plus longtemps. En 1826, M. le comte de Cheffontaines fit connaître cet état de choses au ministre de la marine. Le gouvernement s'occupa de préparer une expédition qui devait reconquérir notre influence et rétablir notre autorité sur un pied respectable, lorsque, le 24 juillet 1828, Radama mourut, et fut remplacé par Ranavalona-Manjava,l'une de ses femmes. L'expédition partit de Bourbon le 15 juin 1829, sous le commandement de M. le capitaine de vaisseau de Gourbeyre, et mouilla le 9, dans l'après-midi, sur la rade de Tanatave. Il avait été arrêté à Bourbon, dans un Conseil privé tenu pour délibérer sur la marche qu'il convenait d'imprimer aux opéations de l'expédition, et auquel avait été appelé M. de Gourbeyre: 1° que l'expédition se présenterait sur la côte de Madagascar d'une manière amicale; 2° qu'elle ne enterait rien avant qu'il n'eût été répondu à une notification qui serait faite à la reine des Ovas par une députation qui se rendrait immédiatement auprès d'elle et lui offrirait des présents ainsi qu'à ses principaux officiers; 3° que la notification porterait que l'intention du roi de France était de faire occuper de nouveau par ses troupes le port Tintingue, d'exiger la reconnaissance de ses droits sur le fort Dauphin et la partie de la côte orientale entre la rivière d'Yvondrou et la baie d'Antongil inclusivement, et autres points anciennement soumis à la domination française; de rétablir, sous sa prolection et sa domination, les anciens chefs malates et betjiminsaracs; et enfin de lier avec les peuples de Madagascar des relations d'amitié et de commerce, qui ne pourraient contribuer qu'à la paix intérieure et la prospérité du pays; 4 que le chef de la députation demanderait une réponse prompe et précise, et que s'il ne l'obtenait pas dans le délai de huit jours, il se retirerait immé diatement près du commandant de l'expédilion, qui se mettrait alors en devoir d'assurer par la force l'exécution des ordres du roi.

Le lendemain de l'arrivée de l'expédition, M. de Gourbeyre descendit à la GrandeTerre, fit une visite au gouverneur de la province, nommé André Soa, et lui annonça qu'il était porteur de cadeaux pour la reine Ranavalona.

Dès que les Ovas eurent appris l'arrivée des Français à Tanatave, ils firent des préparatifs de défense. La garnison y fut augmentée, et des boulets lui furent expédiés d'Emirne; les Ovas organisèrent avec orgueil une résistance formidable. Ces insulaires n'avaient jamais eu avec les Français que des rapports commerciaux; peut-être pensaient-ils les intimider en se montrant disposés à les combattre. Voyant leurs dispositions hostiles, M. de Gourbeyre ne fit point d'envoi à la reine, et se contenta de lui écrire, le 14 juillet 1829, pour lui notifier clairement nos prétentions. Il fixa pour sa réponse un délai de vingt jours, passé lequel le silence de la reine devait être considéré comme un refus de reconnaître nos droits. «En attendant sa réponse, les Français se rendirent à Tintingue et en reprirent possession le 2 août. Ils s'occupèrent immédiatement des travaux de fortification nécessaires à la défense de cette place. Des fossés larges et profonds furent creusés autour de l'enceinte qu'on avait choisie; huit canons mis en batterie en défendirent l'approche, et le 19 septembre 1829, le fort se trouva assez avancé pour qu'on pûty arborer le drapeau français.» (Lettre de M. de Gourbeyre au ministre de la marine, du 18 juillet 1829.)

Après s'être préparé au combat, le commandant français fit demander au prince Coroller, commandant en chef de la côte orientale de Madagascar, s'il avait reçu de la reine Ravanalona les pouvoirs nécessaires pour traiter. Sur sa réponse négative, un officier de la frégate lui remit, avec une déclaration de guerre, une lettre qui lui annonçait que les hostilités allaient immédiatement com

mencer.

Elles commencèrent en effet immé liatement. Peu d'instants suffirent pour détruire le fort; et quelques obus bien dirigés ayant causé l'explosion du magasin à poudre, les Ovas, épouvantés, abandonnèrent leurs retranchements. L'impression que ce succès produisit sur l'esprit des Betjiminsaracs fut telle, qu'ils offrirent de se soulever contre les Ovas, et ne demandèrent que quelques jours pour mettre sur pied six à huit mille hommes et exterminer leurs ennemis; mais il aurait fallu leur laisser un bâtiment avec un détachement de soldats français, et l'hivernage approchait; cette double circonstance ne permit pas de profiter de leurs bonnes dispositions. (Lettre du 15 octobre 1829.) Après le poste de Tanatave, le plus important de ceux que les Ovas occupaient sur la côtte, était sans contredit Foulpointe. M. de Gourbeyre crut devoir s'y porter pour continuer les hostilités. Nos armes ne furent pas heureuses comme elles venaient de l'étre à Tanatave. Le 27, le canon des bâtiments était parvenu à déloger les ennemis des bat

teries qu'ils avaient établies pour la défense du rivage, et nos troupes, mises à terre, s'étaient avancées en bon ordre contre une redoute d'où partait une très-vive fusillade, lorsque leur ardeur à se porter en avant vint mettre la confusion dans leurs rangs. Une décharge de sept à huit coups de canons, chargés à mitraille, ébranla le courage de nos soldats. Quelques-uns prirent la fuite, et le plus grand nombre les suivit bientôt. (Lettre du 29 octobre 1829.)

Dans l'espoir de remplacer cette journée, M. de Gourbeyre conduisit, le 3 novembre, sa division à Pointe-à-Larrée, où les Ovas avaient établi un poste militaire qui menaçait à la fois nos établissements de Tintin gue et de Sainte-Marie. La victoire ici fut complète. La plupart des canonniers ennemis périrent sur leurs pièces; les Ovas, qui avaient fait jusque-là une courageuse résistance, ayant vu succomber les plus intrépides d'entre eux, abandonnèrent des bastions qui ne les défendaient plus contre les obus et la mitraille, et ne songèrent qu'à la fuite. Poursuivis par nos tirailleurs, ils perdirent encore beaucoup de monde. A midi, le pavillon français flottait sur le fort des Ovas.

à

Le bruit de nos succès étant parvenu jusqu'à Emirne, il y répandit une terreur panique. Des propositions de paix furent faites par le gouvernement ova. Le 20 novembre, deux envoyés de ce gouvernement, le prince Coroller et le général Ratsitouhaine firent. demander à M. de Gourbeyre un sauf-conduit pour se rendre auprès de lui, afin de lui remettre deux lettres de la reine et de traiter de la paix. M. de Gourbeyre consentit les recevoir à la Pointe-à-Larrée. Les envoyés déclarèrent à M. de Gourbeyre que la reine était disposée à accorder toutes les réparations démandées pour les griefs dont la France avait à se plaindre. Pour preuve de son désir de voir la bonne harmonie rétablie entre les Français et les Ovas, le prince Coroller, avant de quitter la Pointe-à-Larrée, remit au commandant de Gourbeyre une invitation à tous les habitants français de rentrer à Tanatave et dans les autres lieux occupés par les Ovas, et une lettre portant que les navires du commerce français seraient admis, comme par le passé, dans tous les ports sous la domination de Ranavalona. (Lettre du 10 décembre 1829.)

M. de Gourbeyre, confiant dans l'heureuse issue que devaien avoir les négociations entamées avec la reine des Ovas, se rendit à Bourbon pour se concerter avec le gouverneur sur les opérations ultérieures. Peu de temps après, il apprit par les réponses de la reine que la ratification du traité avait été rejetée. Il n'était pas douteux que ce refus n'eût été suggéré par les missionnaires et les agents anglais.

La continuation de la guerre fut résolue. M. Duval-Dailly venait de succéder à M. de Cheffontaines dans la place de gouverneur de Bourbon. Pénétré des instructions du ministre, ce gouverneur crut devoir envoyer à la reine des Ovas deux commissai

res chargés de l'éclairer sur les dangers ci l'exposerait la continuation de la guerre de s'assurer da véritable état des esprits la cour d'Emirne, et de chercher à conclu un traité sur des bases également avant geuses aux deux parties.

Des difficultés, suscitées par les partisa des Anglais, empêchèrent M. Toure. l'un des commissaires, d'arriver à destination. M. Rontaunay, plus heurer parvint à Tananariva, sur la fin de 183) mais il lui fut impossible de voir la rei Cependant ses efforts, quoique tentés; une voie indirecte, ne furent pas s succès. Après son départ, le parti favora à la paix triompha, à la suite d'une éme dans laquelle Andriamihiaja fut assassi On attribua la mort de ce général au mé tentement produit par son opposition à transaction avec la France. On trouve da ses papiers toutes les lettres adressées M. de Gourbeyre au gouvernement ova prince Coroller assura plus tard qu'e n'avaient jamais été communiquées à reine ni aux autres ministres. (Lettre M. Duval-Dailly, du 8 novembre 1830.)

La révolution de juillet s'accompliss Préoccupé de la sensation que cet évén ment avait produite en Europe, le minis de la marine ne jugea pas à propos de ci tinuer les hostilités contre Madagascar désapprouva les plans du gouverneur Bourbon et ceux de M. de Gourbeyre, etc sidéra les dépenses de cette guerre com beaucoup trop élevées. Ainsi nos dro nos possessions à Madagascar, l'avenir d colonie, les dépenses déjà faites, l'influe qu'une nouvelle campagne nous aurat quise, les avantages que notre commer notre industrie auraient trouvés dans cep soit par des échanges réguliers, soit une concentration d'opérations dans établissements placés sous la protection médiate du pavillon français, tout fut sa fié par le lieutenant général comte Sébas ni, alors chargé du portefeuille de la man Le départ des troupes destinées pour dagascar fut contremandé.

Le conseil d'amirauté, tout en adme l'importance d'un pareil établissement, prima l'opinion qu'il serait presque im sible de nous maintenir à Tintingue temps de guerre, attendu que l'imme supériorité de la puissance anglaise l'Inde la mettait en position de diriger les colonies étrangères qui se trouvent d le voisinage de ses possessions, des for auxquelles ces colonies seraient incapa de résister. Il fit observer, en outre, q établissement maritime, quelque insul qu'il fût, nécessiterait des dépenses consid bles, et que, dans les circonstances où l'o trouvait, on ne pourrait obtenir des chan les crédits nécessaires pour y subvenir.

Le ministre de la marine s'empressa dopter cet avis, et sur sa proposition le décida, le 27 octobre 1830: 1° que l'on pellerait immédiatement en France les q ire bâtiments de guerre affectés à l'e

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