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tachant au récit que les évangélistes nous font de sa passion, allons avec lui jusqu'à la croix (p. 166). »

4...

En apprenant la mort de Jésus, il y eut sans doute des Israélites qui le plaignirent comme un enthousiaste infortuné, et le blâmèrent de n'avoir pas prêché au monde une morale plus facile et des vertus plus honorées. Ceux qui, satisfaits des clartés de leur propre raison, avaient fermé les yeux à la lumière du Christ, durent penser ainsi ; et ceux que la jalousie avait animés contre le Messie, durent croire qu'ils avaient pour toujours étouffé ce qu'ils appelaient une secte naissante. Cependant les ennemis du Fils de Dieu n'avaient fait qu'accomplir les prédictions de sa bouche; ils n'avaient exécuté que ce qu'il avait permis qu'ils exerçassent contre lui-même; et ils avaient été à leur insu les instrumens employés de Dieu pour amener le triomphe du Christ. Déjà sa majesté avait éclaté au milieu de ses ignominies, sa miséricorde s'était manifestée dans ses douleurs, Pabaissement auquel on l'avait réduit avait contribué à faire ressortir sa grandeur cachée, et sa divinité avait été révélée par chacune des paroles qu'il avait prononcées pendant les heures de sa crucifixion. Une puissance invisible s'était déjà montrée agissante autour de la croix; elle avait dompté le cœur du brigand qui se convertit; elle avait forcé le capitaine, commis à la garde du Calvaire, à reconnaître Jésus pour le Fils de Dieu; elle avait exercé un tel entraînement sur les témoins de la mort du Sauveur, qu'on les avait vus s'en retourner à Jérusalem en se frappant la poitrine, et en donnant gloire à Dieu; elle donna encore à des hommes, long-temps disciples cachés du Christ, le courage d'aller demander à Pilate le corps de leur Maître, pour l'ensevelir avec honneur. Après qu'on se fut assuré que Jésus avait cessé de vivre, après que la lance d'un soldat, en frappant son côté, en eût fait sortir de l'eau, Nicodème et Joseph obtinrent l'objet de leur demande; et tandis qu'on achevait les malfaiteurs et qu'on brisait leurs os, pour les ensevelir avant la Pâque, les deux amis du Sauveur s'approchèrent de l'agneau dont aucun os ne devait être brisé, et ils le placèrent dans un sépulcre neuf qui appartenait à l'un d'eux (Jean xix, 31-42; Matth. XXVII, 57-66; Luc xxIII, 50-56; Marc xv, 42-47. Comment ne pas se souvenir ici d'Esaïe LIII, 8-12?) (p. 230).»

«... Devant la croix, les vérités que l'homme a le plus de peine à reconnaître et à recevoir, se gravèrent profondément dans l'âme des Apôtres; comment douteraient-ils, en présence de Jésus crucifié, que la terre soit un monde rebelle et les hommes une race perdue

loin de Dieu et de la vrafe paix! Comment ne verraient-ils pas les enfans d'Adam naître dans la corruption, être entraînés dans une carrière de vaine gloire et de vains plaisirs, ne compter que sur la vie présente, ne chercher à la vertu de soutien que dans l'amourpropre, et méconnaître dans leur aveuglement le Dieu à qui ils doivent tout, le Dieu qui les appelle à la justice et à la sainteté ! Une lumière nouvelle éclairant le cœur des disciples, ils durent connaître mieux leur propre incrédulité et leur incapacité naturelle à prodairedes fruits d'amour de Dieu et de sincère charité. Et comme l'Éternel venait de leur déclarer puissamment l'inviolabilité de sa justice et sa profonde horreur pour le mal, comme il venait de leur manifester de la manière la plus sensible l'impossibilité d'une alliance entre le pur et l'impur, entre la sainteté et le péché, ils durent se connaître mieux qu'ils ne l'avaient fait encore comme étant par leur nature des enfans de colère, morts dans leurs fautes, insolvables envers Dieu et inhabiles à échapper par leurs efforts à la condamnation, à la mort et à la misère. (Luc xix, 10; 1. Jean v, 19; 1. Pierre 1 18, 19; Ephes. 11, 3-12; Rom. ш, 9-19; Gal.

III, 22.)

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Mais en même temps les Apôtres apprirent au pied de la croix à connaître l'étendue des compassions divines, et à croire à l'amour de Dieu comme à une chose aussi réelle, aussi certaine et aussi infinie que sont infinis et certains les droits de sa justice (p. 238).

Les traditions historiques, aujourd'hui recueillies, s'accordent à dire, comme la Genèse, que l'état primitif de l'homme n'a été ni la barbarie, ni la corruption, mais un état d'innocence et de simplicité. Elles s'accordent à reconnaître que l'homme, appelé à choisir entre le bien et le mal, entre la liberté de l'enfant de Dieu et une indépendance indéfinie, a choisi de faire sa propre volonté; il a choisi une liberté coupable. M. de Humboldt a vu ce choix de l'homme retracé sur les osselets qui formaient les annales des anciens peuples de l'Amérique; la peinture y avait représenté l'arbre d'Eden, et le serpent auprès du premier homme et de la première femme. Les livres sacrés de la Perse et de l'Inde renferment le même récit; et tous les peuples de l'Asie, comme ceux de la Grèce, ont long-temps tourné leurs regards vers l'âge d'or d'une simplicité perdue et d'un état où l'homme était pur devant Dieu. Je trouve dans ce fait de la rébellion de l'homme la clef de mon cœur et celle de l'histoire; j'y vois le rayon de lumière qui éclaire un abîme. L'homme s'est fait à lui-même le principe et le but de son être à

l'heure où il a renoncé à tenir de Dieu toutes choses, et à les lui rapporter par la reconnaissance et la soumission; à cette heure il a perdu l'innocence et le repos.

Ce fut le fruit d'une faute, mais d'une faute qui détermina la pente de son cœur, et déplaça toute son existence. Il était sujet, il voulut être roi, il voulut être Dieu; et dès ce moment l'amour cessa d'être sa vie, le Très-Haut d'être son seul appui; dans ses veines circulèrent l'ambition et la convoitise, et la vie des sens et celle de l'orgueil l'emportèrent en lui sur la vie de l'adoration et de la confiance (p. 261). »

Cette dernière citation est tirée de notes aussi intéressantes qu'instructives placées à la fin du volume.

Nous nous étions proposé de terminer par quelques remarques critiques; mais au moment de les rédiger nous les trouvons si minutieuses et de si peu d'importance que nous y renonçons. Nous nous bornerons à faire remarquer que la note 3o, page 258, où l'auteur parle des démoniaques, pourrait laisser croire, et a en effet laissé croire à plusieurs personnes, qu'il partage une opinion qu'il ne fait cependant que rapporter, savoir que les possessions étaient des maladies, attribuées à tort aux démons, tandis que nous savons d'une manière positive qu'il se soumet sur ce point,comme sur tous les autres, à l'autorité de la Parole de Dieu, qui distingue avec soin les démoniaques des malades (Matth. iv, 24; Marc, 1, 34, 1, 15; Luc, iv, 40, 41, vi, 17, 18. vii, 21. vIII, 2. Ix, 1. Act. xIx. 12), et qu'il ne partage pas l'opinion, à notre avis insoutenable, de ceux qui, niant l'existence même de Satan, contre les déclarations positives du Seigneur (Matth. xxv, 41; 2. Pier. 11, 4; Apoc. XII, etc.), font parler des maladies (Matth. vIII. 29, 31), et leur font demander à Jésus de leur permettre d'entrer dans un troupeau de pourceaux (Luc, vIII, 27-35). Que le lecteur non convaincu médite en particulier cette histoire du démon Légion, qu'il essaie de l'expliquer par une maladie, et il verra à quel tissu d'absurdités cette supposition le conduira.

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Nous ne terminerons pas sans recommander encore le livre de M. Vulliemin; nous l'avons lu avec un vif intérêt, et nous savons qu'il a déjà produit, avec la bénédiction de Dieu, de bons fruits chez plusieurs.

MÉLANGES RELIGIEUX ET MORAUX

DU SAINT MINISTÈRE.

De nos jours il n'est pas sans convenance de traiter la très importante question du saint ministère, et si, dès les temps mêmes où l'Église était si riche des grâces du Seigneur et où les pasteurs brillaient autant par la pureté de leur doctrine que par leur zèle, leur dévouement et la sainteté de leur vie ; si dans ces beaux jours saint Paul a cru devoir tracer avec force et rappeler à un évêque aussi éminent que Timothée toute l'étendue des devoirs de sa charge, sera-t-il inutile d'appeler nos réflexions sur ce grave sujet, aujourd'hui où généralement nous sommes encore plus éloignés de la primitive Église, , quant à la pureté de la foi et à la sainteté des mœurs, que nous n'en sommes reculés par la distance des siècles?

Nous allons donc essayer, avec la bénédiction de Dieu, de traiter avec quelque étendue cette matière qui, dans les Épitres à Timothée, est exposée à grands traits et renfermée quelquefois dans un seul passage. (Voyez 1. Tim. iv, 12; vi, 11, 12.) Quel sujet, si ce n'est point celui-ci, sera digne de fixer l'attention la plus sérieuse de ceux-là mêmes qui sont revêtus du caractère de ministres de Jésus-Christ, ou qui aspirent à l'être? Le Seigneur nous fasse donc la grâce de traiter cette matière d'une manière édifiante pour tous ét utile à tous !

Il n'est pas besoin d'insister sur la grandeur et l'importance du ministère évangélique considéré en lui-même. Cette parole est certaine, dit saint Paul, que si quelqu'un désire d'être évêque il désire une charge excellente (1.Tim.111,1); car il désire une charge établie par Dieu lui-même (Éphes. iv, 12; 1. Cor. xn, 28), une charge qui l'appelle à administrer les sacremens que le Seigneur a institués pour être les signes extérieurs et comme les canaux de ses grâces spirituelles, et à s'occuper habituellement et exclusivement de la seule chose nécessaire; une charge

dans l'exercice de laquelle il est ambassadeur pour Christ, tellement que c'est comme si Dieu exhortait par son ministère (2. Cor. v, 20); une charge enfin qui a pour but le salut éternel des âmes.

O saint et sublime ministère, établi de Dieu lui-même, administrant au nom de Jésus-Christ des sacremens augustes, signes glorieux de cette alliance de grâce que Dieu a traitée avec les hommes par Jésus-Christ! Saint et sublime ministère, chargé de porter et de répandre la lumière céleste, la vérité éternelle; chargé de ramener l'homme à son Dieu, de le réconcilier avec lui; chargé de le recevoir à l'entrée de la vie, de l'aider, de le soutenir dans les sentiers difficiles de ce monde, de le conduire aux bords de l'éternité, de lui ouvrir les portes du ciel! Saint et sublime ministère où le ministre est appelé à l'honneur inexprimable de parler au nom et avec l'autorité de Dieu !

Mais si le ministère est si saint et si élevé, combien grave et redoutable est la responsabilité qu'il fait peser sur celui qui en est revêtu! Quelques réflexions sur cette responsabilité feront le sujet de notre premier article.

!

SI. RESPONSABILITÉ DU SAINT MINISTÈRE.

«Qui est suffisant pour ces choses?» 2. Cor. 11. 16.

Telle était l'exclamation du grand Apôtre en envisageant la nature du ministère évangélique et l'importance de ses fonctions. Quand on pense que ces humbles paroles sortaient de la bouche d'un Apôtre dont la vie, depuis sa conversion, a été si dévouée et si entièrement fidèle dans le service de Dieu quel contraste ne font-elles pas avec la légèreté avec laquelle tant d'autres vont au-devant d'une charge si auguste et en remplissent les diverses fonctions! Se peut-il qu'on rencontre un seul lévite qui ne sente pas toute la responsabilité attachée à un si saint ministère ! Le serviteur d'un roi ne sait-il pas qu'il relève de son prince, qu'il lui est comptable de sa conduite dans toute son administration, et ne se tient-il pas sur ses gardes? Que dis-je ? le moindre berger, chargé de paître un troupeau de cent brebis, ne doit-il pas compte à son maître de ce troupeau?

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