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dit le ministre, « je suis très fâché de vous avoir causé de semblables inquiétudes; je n'en avais certainement pas l'intention; mais puisque vous voilà si troublé, je vous conseille d'aller voir M. Jones. >>

Folie de la sagesse de ce monde. - M. le professeur Schultess, de Zurich, vient de publier sur les sectes religieuses un livre qui est une nouvelle confirmation de la vérité des paroles de saint Paul que nous avons placées en tête de cette note. M. Schultess cherche à établir le droit, le devoir même et la nécessité pour les gouvernemens de se faire juges des doctrines, c'est-à-dire de persécuter tous ceux dont la conscience répugne aux doctrines légales. Aussi cet illustre ami des lumières du siècle prend-il la défense des persécutions du canton de Vaud et de l'inquisition de Berne; il est conséquent avec ses principes. Il est curieux du reste de voir un des néologues du jour, un des hommes qui ont soutenu avec le plus de persévérance la souveraine liberté et le souverain empire de la raison humaine, un des hommes qui s'indigneraient le plus vivement si on leur contestait le droit de saper par leur fondement les vérités du salut et l'Évangile où elles sont révélées, refuser à ceux qui veulent les maintenir le droit de suivre leur conscience et leurs lumières ; c'est du libéralisme à la mode. Nous sommes d'accord avec M. Schultess sur un seul point; il voudrait qu'on établit entre les chrétiens et les néologues des discussions publiques, pareilles à celles qui aidèrent si puissamment, il y a trois siècles, aux triomphes de la réforme, Nous appelons ces discussions de tous nos vœux ; les chrétiens dissidens de Vaud et de Genève les ont ouvertement demandées, mais on s'est gardé de se rendre à leur désir. La vérité n'a rien à craindre de pareilles discussions; l'erreur a seule à les redouter. Nous devons ajouter que nous n'avons pas lu nousmêmes l'ouvrage de M. Schultess, et que ce que nous venons d'en dire est fondé sur le compte qui en a été rendu dans la Gazette de Lausanne, qui en partage les principes et en admet les conséquences.

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ont bâti avec le ciment de l'Ecriture sainte et les principes incontestables d'une solide dialectique. Plutôt que d'appeler sectaires, enthousiastes et d'autres noms encore plus injurieux, ceux qui reçoivent pour orthodoxes les doctrines contenues dans notre confession de foi et les livres de nos réformateurs, prenez ces doctrines corps à corps, faites-leur la guerre avec loyauté; nous serons témoins du combat, toutes nos églises pourront juger de quel côté est la Parole de Dieu et quelle doctrine elles doivent recevoir Rien de plus sage que les conseils que le savant professeur Vinet donne à ses concitoyens, dans sa première brochure sur les affaires religieuses du canton de Vaud: « Qu'une secte, leur dit-il (comme vous l'appelez), ait des principes contraires à la rai« son, c'est-à-dire à votre raison, donnez-vous la peine de le « prouver; l'effort ne sera pas si grand, si les principes sont « aussi absurdes que vous le dites; opposez chaire à chaire,

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autel à autel; devenez enthousiastes contre les enthousias«tes ; prenez quelque chose de leur feu pour les combattre. Certes, il y aura bien du malheur, si, ayant la vérité de votre côté, vous n'obtenez bientôt le dessus. » Vous me direz peut-être que les doctrines professées par Calvin, Bèze, Dumoulin, Dubosc, Jurieu, Claude, Drelincourt et tous les auteurs réformés des XVI et XVIIe siècles sur les points que vous n'admettez pas, ont été détruites par le temps; que les progrès des lumières les ont fait considérer comme des préjugés, et que l'émancipation de la raison nous a dégagés des lisières d'une vaine orthodoxie. Doucement, messieurs les néologues, yous traitez beaucoup trop légèrement les matières les plus sérieuses; un peu plus de respect pour les cheveux blancs des pères de la réformation, auprès de qui vous n'êtes encore que de biens petits écoliers en fait de science. Si leur style et leurs raisonnemens ne sont pas aussi polis ni aussi brillans que les vôtres, ils sont peut-être plus solides et plus scripturaires. Si les pieux auteurs dont nous parlons s'étaient prêchés eux-mêmes, oui sans doute, leurs enseignemens auraient été détruits par le temps; mais leurs ouvrages sont-là pour attester qu'ils ont annoncé les doctrines de l'Evangile

eternel. Vous voulez détruire les ouvrages des anciens parce qu'ils sont trop gothiques; où prétendez-vous nous loger? Si vous nous enlevez les dogmes les plus consolans et les espérances les plus chères, qu'allez-vous nous donner en échange? Hélas! vous ne savez que détruire; vos plus grands principes sont négatifs! Vous ne voulez pas que Dieu se soit manifesté en chair pour venir se faire malédiction pour les hommes; vous prétendez que nous pouvons gagner le royaume des cieux par nous-mêmes et comparaître devant le saint des saints revêtus de notre propre justice! Mais ne voyez-vous pas qu'une telle doctrine ne produira jamais que le désespoir dans toute ame qui sent sa misère et qui gémit sous le poids de ses péchés? Dieu en soit mille et mille fois béni, ce n'est pas là la religion de sa sainte Parole ; ce ne sont pas là les principes que nous ont enseignés nos réformateurs!

2. Nous accusons le néologisme d'hypocrisie dans l'enseignement de sa doctrine. Arius, Pélage, les deux Socin, sont les auteurs favoris de nos dogmatiseurs négatifs; ils en conviennent ingénument dans le particulier. Ils haussent les épaules avec dédain ou avec un sourire de pitié lorsqu'on leur parle de la confession de foi et de la discipline ecclésiastique de nos Eglises. Tous nos pieux et célèbres auteurs ne sont à leurs yeux que des hommes à préjugés ou des enthousiastes. La Bible, pour laquelle ils disent qu'ils ont du respect, n'est pas pour eux une arche sainte à laquelle ils n'osent pas porter une main audacieuse. Plus sages et plus savans qu'Esdras, ils veulent corriger l'ancien canon juif en révoquant en doute l'authenticité et la divinité de plusieurs livres de l'ancien Testament ; ils retranchent plusieurs épîtres du nouveau; et, non contens d'avoir ainsi mutilé le livre de la Parole de Dieu, ils veulent encore affaiblir la force de ce qui reste par des distinctions subtiles et perfides. Ils soutiennent que la Bible n'est pas inspirée dans les mots, mais seulement dans les idées ; et comme les mots sont les signes représentatifs des idées, ils se réservent le pouvoir de changer selon leurs désirs le sens des idées en choisissant adroitement leurs synonymes. Ces messieurs ne croient pas un mot de tout ce

que notre confession de foi dit des dogmes que nous avons cités plus haut. Ils rejettent tout ce qu'ils appellent mystère. Enfin ils sont entièrement en-dehors, par leurs sentimens et leurs aveux particuliers, de l'ancienne croyance de nos églises. Je n'avance rien ici contre le néologisme que je ne puisse prouver. S'il était nécessaire, j'indiquerois les sources d'où j'ai tiré toutes mes allégations; mais personne ne m'accusera de calomnie. Cependant ils persistent à vouloir se dire membres de ces Eglises dont ils ont renié la foi. Bien plus! tous les jours ils font confession publique d'une doctrine que leur conscience réprouve; tous les jours, du haut de la chaire, dans nos temples, ils n'ont pas honte de dire à Dieu, au nom de toute l'assemblée: « Seigneur Dieu père éternel et tout puissant, nous reconnais<< sons et nous confessons devant ta sainte majesté, que nous << sommes de pauvres pécheurs, nés dans la corruption, en« clins au mal, incapables par nous-mêmes de faire le bien, « et qui transgressons tous les jours et en plusieurs manières << tes saints commandemens ; ce qui fait que nous attirons sur << nous, par ton juste jugement, la condamnation et la mort. » Tous les jours ils ne craignent pas de commencer la liturgie du baptême par ces mots : « Notre Seigneur nous enseigne « que nous devons naître de nouveau si nous voulons entrer « dans le royaume de Dieu », et de dire ensuite à Dieu dans la prière : « et comme toute la postérité d'Adam est dans un « état de corruption et de misère, qu'il te plaise de te déclarer « le Dieu et le Sauveur de cet enfant et de le sanctifier par « ton esprit, etc. » Messieurs les néologues ont deux religions, l'une pour le particulier, l'autre pour le public; l'une pour eux et leurs amis, et l'autre pour le peuple! N'est-ce pas là de la plus odieuse hypocrisie? « Pourquoi, disais-je un jour à un de ces ministres néologues, ne portez-vous pas en chaire tout ce que vous croyez sur la divinité de nos saintes Écritures et les articles de foi enseignés dans tous nos livres symboliques?»>«< Oh! » me répondit-il, « je ne pense pas que je sois obligé de tout dire...... » « Eh bien! voilà la différence qu'il y a entre Lui et moi,» s'écria un pasteur évangélique à qui je fis part de cette réponse, « lui ne porte en chaire qu'une partie de ce qu'il

croit, et moi je dis au contraire tout ce que je crois, sans aucune arrière-pensée. » Un ministre de Jésus-Christ doit en effet annoncer le mystère de piété tout entier et en toute vérité, comme étant en la présence de Celui qui est parfait en science, qui sonde les cœurs et qui lui demandera compte de la manière dont il aura rempli son apostolat. J'ai cru, c'est pourquoi j'ai parlé, disait David. Il n'y a que les enfans du père de mensonge qui veuillent enseigner avec des réserves mentales. Puisque vous croyez vos principes vrais et bons pour vous, ils doivent aussi être bons et vrais pour le peuple, et vous avez très fortement tort de ne pas les annoncer du haut de la chaire. Oui, Messieurs, mettez au grand jour tout ce que vous pensez de la Bible, tout ce que vous croyez de la doctrine de nos ancêtres, tout ce dont sont convaincus vos esprits relativement à la divinité du Seigneur Jésus et à l'efficacité de son sacrifice; déchirez la confession de foi qui se trouve à la fin de tous nos livres de psaumes, et publiez hautement qu'elle n'est pas l'expression de votre croyance. Pourquoi vous servez-vous encore de nos prières liturgiques, puisque vous ne croyez pas à la majeure partie de ce qu'elles vous font dire? Ne voyez-vous pas que ces anciens formulaires vous font tomber en contradiction avec vous-mêmes dans le même quart d'heure? L'année passée, dans une grande ville, j'ai entendu de mes propres oreilles un proposant lire ces mots en chaire dans la confession des péchés : « Nous sommes de «< pauvres pécheurs, conçus et nés dans le péché, enclins au « mal, incapables par nous-mêmes de faire le bien » ; et un moment après dire au Seigneur dans la prière avant le sermon: « Nous ne t'alléguerons pas, ô notre Dieu, le vain prétexte « de notre corruption originelle; nous savons que nous nais« sons bons, etc.... » Dans le premier cas, il reconnaissait la corruption de l'homme pour se conformer à l'ancien usage, et dans le second cas, il la niait en l'appelant un vain prétexte, pour se conformer aux savantes leçons de ses maîtres. O néologues! voilà votre conduite et la conduite de vos élèves', dans la chaire de vérité, en présence du Seigneur éternel! Voilà les effets de vos enseignemens! Que voulez-vous que

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