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Le budget de 1813 est réglé en recettes à la sonime d'un milliard 150 millions, et les dépenses à pareille somme. Saus les circonstances imprévues, le budget de cet exercice aurait pu être le même que celui de 1812.

C'est pour faire face à ces augmentations dans les dépenses, que l'article 5 applique la somme de 149 millions au besoin de cet exercice.

Par l'article 13, le gouvernement présente à votre approbation les tarifs actuels des droits réunis.

Déterminés ainsi par des décrets impériaux insérés au bulletin, et consacrés par vos suffrages, ces tarifs ne peuvent être variables dans leur application au gré de la régie où de ses employés.

Votre commission regrette que la gravité des circonstances et les besoins de l'étal n'aient pas permis d'invoquer des modifications utiles et des adoucissemens désirés dans l'assiette de ces droits; mais bien sûr des intentions du gouvernement, elle exprime le vœu que, par l'effet d'une surveillance active sur la perception, le contribuable soumis à la rigueur des tarifs, soit préservé du fléau de l'arbitraire.

Les plaintes à ce sujet seroient moins fréquentes peut-être, si la publicité des instructions de la régie était plus effective et plus étendue, et si les employés n'en étaient pas à peu près les seuls dépositaires.

L'article 14 du projet de loi offre une nouvelle preuve de cette persévérance que met le gouvernement dans l'exécution des desseins qu'il a conçus. Les plans les plus vastes ou pour lesquels le tems n'est pas toujours la moindre dépense, sont adoptés et suivis comme les projets les plus faciles et les plus simples. Nous n'entendons parler ici, Messieurs, ni de cette antique demeure de nos rois menacée depuis deux siècles de rester imparfaite et que nous verrons enfin terminer, ni de tous ces édifices où le génie imprime sa grandeur. Ces travaux sont admirables sans doute, surtout si l'on considère dans quel concours d'événemens ils s'achèvent; toutefois ils sont trop étrangers à la discussion qui nous occupe, pour que nous nous y arrêtions. Mais hors de nos cités, au milieu des campagnes qui les nouris sent, se poursuit sans relâche une entreprise digne de tout votre intérêt. Ce n'est pas un de ces monumens élevés par les arts, et qui attestent le luxe et la magnificence d'un grand monarque: c'est mieux encore, puisque cet ouvrage, immense par son étendue, effrayant par ses difficultés, n'a pour objet que d'établir cette juste proportion des charges publiques vers laquelle tout bon gouvernement doit tendre sans cesse, et qui n'est autre chose que la justice distributive appliquée à l'impôt. Vous voyez, Messieurs, que nous voulons vous parler de cette grande mesure dont le résultat sera de ne faire tomber sur chaque par celle d'héritage que la portion d'impôt qu'elle doit payer ca raison de ses produits.

Nous ne vous retracerons pas les obstacles que présentait un pareil travail, et ce qu'il fallait d'ensemble, d'ordre et de méthode, pour que les innombrables collaborateurs qui agissent séparément, ne s'écartassent pas des bases qui devaient les diriger. Il nous suffira de vous dire que quelle que soit la nature des terres, l'on a adopté pour fondement de tous les calculs, le produit net, et c'est en partant de cette donnée, de cette fin de tout labeur, qu'on parviendra à établir une juste proportion entre les départemens les plus éloignés comme les plus dissemblables par les productions de leurs territoires.

Il faut en convenir, Messieurs, les difficultés que présentait le travail en lui-même, n'étaient pas les seules que l'on eût à vaincre; il est une résistance morale qui ne se rencontre que trop souvent, quand on fait la guerre aux abus, et qui n'a pas manqué de se montrer dans cette circonstance, avec toutes les armes dont se sert l'intérêt personnel. L'inégalité de la répar tition était si grande qu'en prenant les deux extrêmes, l'on peut dire que tel contribuable payait tout, tandis que tel autre ne payait rien. Ceux qui jouissaient en silence de cette criante disproportion avaient trop à perdre, pour ne pas censurer un ́. travail qui devait enfin les faire participer aux charges de l'impôt foncier, et des esprits détians ou crédules avaient, comme il arrive, adopté les préventions qu'on s'était efforcé de leur inspirer. Un rapport prononcé en 1808, que nous aimerions à consulter souvent pour rendre le nôtre meilleur, a fait justice à cette tribune, de toutes les observations que l'on élevait contre le cadastre, et c'est à l'effet qu'il a produit qu'on a l'obli gation de ne les entendre plus répéter.

Et puis, à mesure que l'entreprise s'étend, et que la répartition sur les bases nouvelles s'établit, les erreurs qu'on découvre sont si multipliées, qu'il faut enfin que les préventions se taisent; jamais encore on ne s'est avisé de combattre l'évidence.

Tout ce que les orateurs du gouvernement vous ont dit sur cet objet, Messieurs, est d'une justesse extrême. Assurément on ne prétend pas que le travail du cadastre soit parfait aucun ouvrage des hommes n'est susceptible de l'être; mais la fixité dans les degrés de répartition; mais l'affranchissement de l'arbitraire sont des résulats assurés, et ces deux bienfaits se feront sentir non-seulement dans le cours ordinaire de la vie, mais encore dans les transactions, dans les partages, dans les ventes où le vague de l'impôt apportait sans cesse des difficultés et de fatigantes incertitudes.

L'article 14 du projet de loi vous propose la répartition de la masse des contingens actuels des cantons au prorata de leur allivrement cadastral réuni, à partir de 1814; cette disposition est conforme à la justice et aux règles qui ont été adoptées.

Nous sommes arrivés au terme de notre discussion, et notre opinion sur le projet de loi est celle de MM. les orateurs du

conseil d'état. Nos motifs n'ont pas été toujours les mèmes, non plus que notre langage; mais cette difference tient, n'en doutous pas, à la différence de notre situation; elle ne saurait du moins venir de nos sentimeus; nous nous faisons un devoir de le repeter: le corps législatif peut rivaliser de zèle avec tous les corps, avec toutes les autorités; et ce que l'empereur disait, lors de l'ouverture de cette session, de l'énergie de ses peuples, de leur attachement à l'intégrité de l'empire, de l'amour qu'ils lui ont montré, il le pouvait dire plus particulièrement de nous

tous.

A Dieu ne plaise cependant que nous voulions nous attribuer une trop grande part daus cet éloge! Peuple généreux et fidèle," nous aimons, au contraire, à te le reporter tout entier, en nous `mêlant avec toi. Loin de nous encore la pensée d'y rien ajouter ce serait l'affoiblir; d'exalter tes sacrifices, ils te sout tous comptés; de parler de ton dévouement, et qui peut ignorer que tu n'y mets pas de bornes!

Déjà tes nombreux enfans accourent de toutes parts se ranger sous des aigles qu'ils savent si bien défendre; déjà nos armees se disposent à reprendre la seule attitude qui sied à leur valeur.

Laissons nos ennemis se réjouir de nos pertes dernières : l'inclémence des saisons a, cette fois, renversé les combinaisons du génie; mais du moins ils n'ont pas le droit de s'enorgueillir de nos desastres, mais nous ne craignons pas qu'ils élèvent des trophées à leur courage. Le triomphe n'est du qu'à la victoire, et leur joie, leur joie même aura bientôt un terme. Arminius n'eut pas à se feliciter long-tems d'avoir vu les vaisseaux des Romains brisés par les tempêtes, et les exploits de Germanicus, après ces naufrages inattendus, ne sont pas la moindre partie de sa gloire.

Pour vous, Messieurs, au moment où vous allez remplir l'objet essentiel de votre mission, vous êtes, comme nous, frappés de la grandeur des intérêts confiés à votre amour pour le prince et pour la patrie. La loi qui fixe le tribut que le peuple français doit à la gloire du trône et à la prospérité de cet empire, est soumise à notre acceptation; mais que les défenseurs. du gouvernement monarchique, et nous le sommes tous, n'en conçoivent pas d'inquiétude: cette part qui nous est donnée. dans la sanction des lois, repose en des mains sûres et fidèles; et loin d'affaiblir le pouvoir du souverain, c'est un lien qui l'unit plus étroitement avec le peuple, et qui ôte à Fobéissance tout ce qu'elle a de pénible. Heureux effets d'un gouvernement, modéré, qui rendez, la soumission volontaire, combien vous êtes plus puissant que le gouvernement le plus absolu! Les princes qui sont revêtus d'un pouvoir sans limites, fout tout féchir au gré de leurs caprices; mais ils sont condamnés à ne jamais connaître le zèle et l'amour de leurs peuples. Hélas!

ils ne peuvent aspirer qu'à se faire craindre; ils n'inspirent autour d'eux ni affection ni dévouemeut: ces sentimens sont éteints dans tous les cœurs. Les vôtres, Messieurs, se man festeront en adoptant la loi qui vous est présentée. Nous avons combattu toutes les considérations qui pouvaient vous faire hésiter; et s'il en était qui eussent échappé à notre discussion, que seraient-elles auprès des motifs qui doivent déterminer vos suffrages! Voyez autour de vous toutes les nations du continent, et cette autre nation, l'éternelle rivale de la France, attentives à ce qui se passe au sein de nos séances, avides de mesurer l'esprit qui nous anime d'après l'adhésion que nous allons donner au budget de l'état; que nos ennemis se troublent; que nos amis se rassurent, en reconnaissant que pour nous la patrie est inséparable du monarque, et que toutes les volontés sont confondues dans la sienne.

Déterminée par les motifs (qui vous ont été exposés, votre commission des finances, Messieurs, vous propose d'adopter le projet de loi, qu'elle a elle-même voté à l'unanimité.

24 Mars 1813.

Paris, le 23 Mars.

Aujourd'hui, Mardi, 23 Mars, S. M. l'empereur et roi étant sur son trône, entouré des princes grands dignitaires, des ministres, etc. etc.

S. Exc, M. le comte de Montesquiou, président du corps législatif, a présenté à S. M. l'adresse suivante:

« Sire,

"Vos fidèles sujets, les députés des départemens au corps législatif, nous ont chargé de déposer au pied du trône le nouvel hommage de leur reconnaissance et de leur fidélité.

"Tandis que de grands intérêts politiques retenaient V. M. si loin de ses états, elle était toujours présente à leur pensée, ils s'associaient par leurs vœux à ses nobles travaux dont leurs enfans partageaient l'honneur et les périls. Aujourd'hui, comme alors, tous nos cœurs répondent au vôtre, et l'on dirait que nos triomphes n'ont été suspendus que pour mieux faire connaître l'énergie de votre caractère, l'étendue de nos ressources et notre confiance dans V. M.

"Oui, Sire, les divers peuples de ce vaste empire, naguères divisés de mœurs et d'intérêts, réunis par l'honneur et la fidélité, ne rivalisent plus que de zèle et de dévouement pour V. M. Repoussant jusqu'à l'idée d'une paix qui pourrait fétrir l'honneur national, aucuns sacrifices ne leur coûteront pour maintenir l'intégrité de leur territoire, celui de vos alliés, la prépondérance que vous leur avez acquise, et pour conquérir une paix glorieuse, la seule digne des Français et de V. M.

TOME V.

C c

1

"Le corps législatif est heureux et fier d'être l'interprète d'une nation généreuse qui vous prêtera toujours une assistance sans bornes, parcequ'il n'en est point à la reconnaissauce que lui inspire tout ce que V. M. conçoit et exécute pour sa prospérité.

"En effet, ces grands progrès de l'agriculture et des arts, ces immenses travaux qui ouvrent de nouvelles routes au commerce et embellissent nos villes de magnifiques monumeus, la création d'une marine instruite et nombreuse, le maintien de ce systême des finances, sans exemple jusqu'à nos jours, et digne de servir de modèle aux siècles à venir, sont autant de bienfaits de V. M. envers ses peuples. Nous retracerons à nos provinces toutes ces merveilles opérées au milieu des plus grandes occupations de la guerre; nous leur dirons que les besoins du trésor et de l'armée sont assurés sans qu'aucune charge nouvelle leur soit imposée. Tranquilles sur le présent, nous ne redoutons plus pour l'avenir ces minorités turbulentes, où le partage de l'autorité et l'incertitude de ses droits ramenaient, comme à des époques déterminées, la crainte des troubles civils. L'ordre de la régence est fixé comme celui de la succession, et le cœur d'une mère sera la garde fidèle de son enfant et de cette grande famille dont la monarchie est toujours l'emblême.

"Ainsi se rétablit et s'améliore ce gouvernement tutélaire si cher à nos ayeux, et avec lui les sentimens généreux qui en ont fait la splendeur. Ainsi se préparent les jours de la paix dans les travaux qui peuvent le mieux en assurer les jouissances, et dans les efforts qui doivent la commander. Puisse cet heureux accord du prince et des sujets se perpétuer à jamais, devenir la force la plus imposante de cet empire, le lien le plus heureux de l'autorité et de l'obéissance, et le corps légis latif obtenir la gloire d'en donner le plus mémorable exemple!" S. M. a répondu :

"Monsieur le président et Messieurs les députés :

"Le corps législatif m'a donné pendant eette courte, mais importante session, des preuves de sa fidélité et de son amour. J'y suis sensible.

"Les Français ont justifié entièrement l'opinion que j'ai toujours eue d'eux.

"Appelé par la Providence et la volonté de la nation à constituer cet empire, ma marche a été graduelle, uniforme, analogue à l'esprit des événemens et à l'intérêt de mes peuples. Dans peu d'années ce grand œuvre sera terminé, et tout ce qui existe complettement consolidé.

"Tout mes desseius, toutes mes entreprises n'ont qu'un but: La prosperité de l'empire, que je veux soustraire à jamais aux lois de l'Angleterre.

"L'histoire qui juge les nations comme elle juge les hommes, remarquera avec quel calme, quelle simplicité et quelle prompti

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