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homme d'espérance. Le général Gros, de la garde, s'est jeté le premier dans le fossé d'une redoute où des sapeurs ennemis travaillaient déjà à couper les palissades: il est blessé d'un coup de bayonnette.

La nuit devint obscure et le feu cessa, l'ennemi ayant échoué dans son attaque et laissé plus de 2000 prisonniers sur le champ de bataille, couvert de blessés et de morts.

Le 27, le tems était affreux; la pluie tombait par torrens. Le soldat avait passé la nuit dans la boue et dans l'eau. A neuf heures du matin, l'on vit distinctement l'ennemi prolonger sa gauche et couvrir les collines qui étaient séparées de son le vallon de Plauen.

centre par

Le roi de Naples partit avec le corps du duc de Bellune et les divisions de cuirassiers, et déboucha sur la route de Freyberg pour attaquer cette gauche. Il le fit avec le plus grand succès. Les six divisions qui composaient cette aile furent culbutées et éparpillées. La moitié, avec les drapeaux et les canons, fut faite prisonnière, et dans le nombre se trouvent plusieurs généraux.

Au centre, une vive canonnade soutenait l'attention de l'ennemi, et des colonnes se montraient prêtes à l'attaquer sur la gauche.

Le duc de Trévise, avec le général Nansouty, manœuvrait dans la plaine, la gauche à la rivière et la droite aux collines. Le maréchal Saint-Cyr liajt notre gauche au centre, qui était formé par le corps du duc de Raguse.

Sur les deux heures après midi, l'ennemi se décida à la rel traite; il avait perdu sa grande communication de Bohême par sa gauche et par sa droite.

Les résultats de cette journée sont 25 à 30 mille prisonniers, 40 drapeaux et 60 pièces de canon.

On peut compter que l'ennemi a 60,000 hommes de moins. Notre perte se monte en blessés, tués ou pris, à 4000 hommes.

La cavalerie s'est couverte de gloire. L'état-major de la cavalerie fera connaître les détails de ceux qui se sont distingués.

La jeune garde a mérité les éloges de toute l'armée. La vieille garde a eu deux bataillons engagés; ses autres bataillons étaient dans la ville disponibles en réserve. Les deux bataillons qui ont donné ont tout culbuté à l'arme blanche.

La ville de Dresde a été épouvantée et a couru de grands dangers.

La conduite des habitans a été ce qu'on devait attendre d'un peuple allié. Le roi de Saxe et sa famille sont restés à Dresde, et ont donné l'exemple de la confiance.

S. M. l'impératrice-reine et régente a reçu les nouvelles sui vantes sur la situation de l'armée, en date du 30 Août.

Le 28, le 29 et le 30, nous avons poursuivi nos succès. Les généraux Castex, Doumerc et d'Audenarde, du corps du général Latour-Maubourg, ont pris plus de mille caissons ou yoitures de munitions, et ramassé beaucoup de prisonniers. Les villages sont pleins de blessés ennemis; on en compte plus de 10 mille.

L'ennemi a perdu, suivant les rapports des prisonniers, huit généraux tués ou blessés.

Le duc de Raguse a eu plusieurs affaires d'avant garde qui attestent l'intrépidité de ses troupes.

Le général Vandamme, commandant le 1er corps a débouché le 25 par Konigstein, et s'est emparé, le 26, du camp de Pirna, de la ville et de Hohendorf. Il a intercepté la grande commu¬ nication de Prague à Dresde. Le duc de Wurtemberg, avec 15,000 Russes, avait été chargé d'observer ce débouché. Le 28, le général Vandamme l'a attaqué, battu, lui a fait 2,000 prisonniers, lui a pris 6 pièces de canon, et l'a poussé en Bohême. Le prince de Reuss, général de brigade, officier de mé rite, a été tué.

Dans la journée du 29, le général Vandamme s'est placé sur les hauteurs de la Bohême, et s'y est établi. Il fait battre le pays par des coureurs et des partis pour avoir des nouvelles de l'ennemi, l'inquiéter et s'emparer de ses magasins.

Le prince d'Eckmühl était le 25 à Schwerin. Il n'avait encore eu aucune affaire majeure. Les danois s'étaient distingués dans plusieurs petites affaires.

Ce début de la campagne est des plus brillans, et fait conce voir de grandes espérances. La qualité de notre infanterie est de beaucoup supérieure à celle de l'ennemi.

8 Septembre, 1813.

Paris, le 7 Septembre.

S. M. l'impératrice-reine et régente a reçu les nouvelles suivantes de l'armée, au 1er Septembṛe.

Le 28 Août, le roi de Naples a couché à Freyberg avec le duc de Bellune, le 29 à Lichtenberg, le 30 à Zethau, le 31 à Sayda, Le duc de Raguse, avec le 6e corps, a couché le 28 à Dippol. diswalda, où l'ennemi a abaudonné 1200 blessés; le 29 à Falkenhain, le 30 à Altenberg, et le 31 à Zinnwald.

Le 14e corps, sous les ordres du maréchal Saint-Cyr, était le 28 à Maxen, le 29 à Reinhards-Grimma, le 30 à Dittersdorf, et le 31 à Libenau,

Le ler corps sous les ordres du général Vandamme, était le 28 à Hollendorf, et le 29 à Peterswalde, occu, aut les montagnes. Le duc de Trévise était en position le 28 et le 29 à Pirna.

Le général Pajol, commandant la cavalerie du 14e corps, a fait des prisonniers.

L'ennemi se retira dans la position de Dippoldiswalda et Altenberg. Sa gauche suivit la route de Plauen, et se replia par Tharandt sur Dippoldiswalda, ne pouvant faire sa retraite par la route de Freyberg. Sa droite ne pouvant se retirer par la chaussée de Pirna, ni par celle de Dohna, se retira sur Maxen, et de-là sur Dippoldiswalda. Tout ce qui était en partisans et détaché sur Meissen, se trouva coupé. Les bagages russes, prussiens, autrichiens, s'étaient entassés sur la chaussée de Freyberg; on y prit plusieurs milliers de voitures. Arrivé à Altenberg, où le chemin de Toeplitz à Dippoldiswalda devient impraticable, l'ennemi prit le parti de laisser plus de mille voitures de munitions et de bagages. Cette grande armée rentra en Bohême après avoir perdu partie de son artillerie et de ses bagages.

Le 29, le général Vandamme passa, avec 8 on 10 bataillons, le col de la grande chaîne, et se porta sur Kulm. Il y rencontra l'ennemi, fort de 8 à 10 mille hommes; il s'engagea: ne se trouvant plus assez fort, il fit descendre tout son corps d'armée, il eut bientôt culbuté l'ennemi. Au lieu de rentrer et de se replacer sur la hauteur, il resta et prit position à Kulm, sans garder la montagne; cette montagne commande la seule chaussée; elle est haute. Ce n'était que le 30 au soir que le maréchal Saint-Cyr et le duc de Raguse arrivaient au débouché de Toeplitz. Le général Vandamme ne pensa qu'au résultat de barrer le chemin de l'ennemi, et de tout prendre. A une armée qui fuit il faut faire un pont d'or, ou opposer une barrière d'acier: il n'était pas assez fort pour former cette barrière d'acier.

Cependant l'ennemi voyant que ce corps d'armée de 18 mille hommes était seul en Bohême, séparé par de hautes montagnes, et que tout le reste était encore au pied en-deça des monts, se vit perdu s'il ne le culbutait. Il conçut l'espoir de l'attaquer avec succès, sa position étant mauvaise. Les gardes russes étaient eu tête de l'armée qui battait en retraite; on y joignit deux divisions autrichiennes fraîches; le reste de l'armée ennemie s'y réunit à mesure qu'elle débouchait, suivie par les 2e, 6e et 14e corps. Ces troupes débordèrent le 1er corps. Le général Vandamme fit bonne contenance, repoussa toutes les attaques, enfonça tout ce qui se présentait, et couvrit de morts le champ de bataille. Le désordre gagua l'armée ennemie, et l'on voyait avec admiration ce que peut un petit nombre de braves contre une multitude dont le moral est affaibli.

A deux heures après midi, la colonne prussienne du général Kleist, coupée dans sa retraite, déboucha par Peterswalde pour tâcher de pénétrer en Bohême; elle ne rencontra aucun ennemi, arriva sur le haut de la montagne sans résistance, s'y plaça, et là vit l'affaire qui était engagée. L'effet de cette colonne sur les derrières de l'armée, décida l'affaire.

Le général Vandamme se porta sur-le-champ contre cette colonne, qu'il repoussa: il fut obligé d'affaiblir sa ligne dans ce moment délicat. La chance tourna. Il réussit cependant à culbuter la colonne du général Kleist, qui fut tué; les soldats prussiens jetaient leurs armes et se précipitaient dans les fossés et les bois. Daus cette bagarre, le général Vandamme a disparu; on le croit frappé à mort.

Les généraux Corbineau, Dumonceau et Philippon se déterminèrent à profiter du moment et à se retirer partie par la grande route, et partie par des chemius de traverse, avec leur division, en abandonnant tout le matériel qui consistait en 30 pièces de canon et 300 voitures de toute espèce, mais en ramenant tous les attelages. Dana la position où étaient les affaires, ils ne pouvaient pas prendre un meilleur parti. Les tués, blessés et prisonniers doivent porter notre perte dans cette affaire à 6000 hommes. L'on croit que la perte de l'ennemi ne peut être moindre que de 4 à 5000 hommes.

Le ler corps se rallia, à une lieue du champ de bataille, aut 14e corps. On dresse l'état des pertes éprouvées dans cette, catastrophe, due à une ardeur guerrière mal calculée.

Le général Vandamme mérite des regrets: il était d'une rare intrépidité. Il est mort sur le champ d'honneur, mort digne d'envie pour tout brave.

S. M. l'impératrice-reine et régente a reçu les nouvelles suivantes de l'armée au 2 Septembre.

Le 21 Août, l'armée russe, prussienne et autrichienne, commandée par l'empereur Alexandre et le roi de Prusse était entrée en Saxe, et s'était portée le 22 sur Dresde, forte de 180 à 200,000 hommes, ayant un matériel immense, et pleine de l'espérance non-seulement de nous chasser de la rive droite de l'Elbe, mais encore de se porter sur le Rhin, et de nourrir la guerre entre le Rhin et l'Elbe. En cinq jours de tems elle a vu ses espérances, confondues: 30,000 prisonniers, 10,000 blessés tombés en notre pouvoir, ce qui fait 40,000; 20,000 tués ou blesssés et autant de malades par l'effet de la fatigue et du défaut de vivres (elle a été cinq à six jours sans pain), l'ont affaiblie de près de 80,000 hommes.

Elle ne compte pas aujourd'hui 100,000 hommes sous les armes; elle a perdu plus de 100 pièces de canon, des parcs entiers, 1500 charrettes à munitions d'artillerie qu'elle a fait sauter ou qui sont tombés en notre pouvoir; plus de 3000 voitures de bagages qu'elle a brûlées ou que nous avons prises. On avait 40 drapeaux ou éteudarts. Parmi les prisonniers, il y a 4000 Russes. L'ardeur de l'armée française et le courage de l'infan terie fixent l'attention.

Le premier coup de canon tiré des batteries de la garde im

périale dans la journée du 27, á blessé mortellement le général Moreau, qui était revenu d'Amérique pour prendre du service en Russie.

Nous avons publié, dans le Moniteur du 4 de ce mois, le sénatus-cousulte relatif à la levée de trente mille hommes dans vingt-quatre départemens, qui a été adopté dans la séance du 24 Août, présidé par S. A. S. le prince archi-chancelier de l'empire.

Nous mettons aujourd'hui sous les yeux du lecteur:

1o. Le rapport que M. le ministre de la guerre a lu au sẽnať dans la séance du 23 Août.

2o. Les motifs développés par M. le comte Regnaud de SaintJean-d'Angely, l'un des orateurs chargés de présenter lé projeť de sénatus-consulte.

3°. Le rapport fait au sénat dans la séance du 24 Août, par M. le sénateur comte Beurnonville, au nom de la commission chargée d'examiner le projet de sénatus-consulte.

Rapport du ministre de la guerre à S. M. l'empereur et roi, du 9 Août, 1813.

Sire,

Votre Majesté, instruite des événemens qui ont eu lieu dans le nord de l'Espagne, depuis le mois de Juin dernier, s'est déterminée à conférer le commandement de ses armées dans la Péninsule à S. Ex. le maréchal duc de Dalmatie. Dès qu'il fût à leur tête, les affaires militaires sur les Pyrénées s'améliorèrent sensiblement. L'audace de l'ennemi fut arrêtée, et ses projets contrariés. Forcés de lever momentanément le siége de Pampelune, les Anglais perdirent beaucoup de monde dans les attaques qu'ils ont soutenues, et furent témoins de la destruction des1 ouvrages et des magasins qu'ils avaient établis autour de cette place. Peu de tems après, l'ennemi rembarque son artillerie de siége, suspend pendant quelque tems le siége de Saint-Sébas tien, et laisse au pied des remparts de cette ville au grand nombre de ses soldats, qui ont vainement tenté d'en frauchir la brèche.

Mais, Sire, malgré ces circonstances favorables, et quoique les armées d'Arragon et de Catalogne, qui n'ont pas cèssé d'être vittorieuses, puissent attendre de nouveaux succès de la concen tration de leurs forces, il est impossible de se dissimuler la né cessité d'envoyer aux armées d'Espague des renforts qui puissent les mettre en état de déjouer entièrement les desseins de l'ens nemi, qui peut recevoir chaque jour de nouvelles recrues. L'exaltation factice que les Anglais sont parvenus à exciter dans la Peninsule, présentera à nos troupes de nouveaux obstacles a vaincre, et on ne peut différer de mettre les armées impériales

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