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jusqu'à Maximien'. La condition des individus. fut seule changée; celle des terres resta la

même.

On continua donc à distinguer la propriété quiritaire de la propriété provinciale. Cette distinction ne fut plus qu'un souvenir politique; mais elle se soutint longtemps encore dans le droit civil, qui garde d'ordinaire le sillon du passé plus longtemps que le droit politique.

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CHAPITRE XIV.

Des changemens de Justinien.

Quand Justinien abrogea ces distinctions qui le gênaient et qu'il ne comprenait plus, il fit comme l'Arabe qui brise sans pitié la pierre des tombes égyptiennes sur lesquelles il a planté sa chétive masure, et qui se rit dédaigneusement de ces signes bizarres, langue sainte dont le Barbare a perdu le secret.

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Savigny, Ueber die Ræm. Steuerverfassung, Zeits., t. VI. 'Il n'y eut plus désormais de Latins que les affranchis (Latini juniani) et leurs enfans (et cette latinité était plus une infériorité politique qu'une incapacité civile), comme il n'y eut plus de peregrini parmi les sujets de l'Empire, sinon les affranchis deditices. Savigny, Ueber die Latinitæt, Zeits., V, 240.

25.

* L. un. de nudo jure Quiritium tollendo, C. Just., VIII,

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CHAPITRE XV.

Organisation municipale sous l'Empire'.

Cette communication du droit de cité romaine à toutes les villes de l'Empire effaça pour jamais les antiques distinctions de municipes, de préfectures, de colonies. Dans tout l'Empire l'administration municipale tomba aux mains d'une classe héréditaire de propriétaires, curia, senatus, ordo, decuriones. Cette fonction, utile et honorable tant qu'il resta quelque liberté, devint, par les progrès et l'avidité du despotisme, la condition la plus misérable et la plus intolérable oppression.

Par un phénomène remarquable, cette oppression s'attacha comme une lèpre à cette classe moyenne qui fait la vie des États; on eût dit que la loi avait pris à tàche de l'anéantir. Les sénateurs, les magistrats, les officiers du palais par leur dignité, leurs descendans par privilége, les militaires par la nature de leur service 2, le

Savigny.

'Godefroy, Paratitla ad C. Th. XII, 1. Geschichte des Rom. Rechts., ch. 2. Guizot, Essais sur Ilistoire de France. Premier essai.

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clergé par l'honneur du sacerdoce, les cohortales et la plèbe par leur misère, échappaient aux fonctions curiales. Il résulta de ces exceptions opposées que la curie fut uniquement composée des petits propriétaires, qu'aucun privilége ne distinguait dans l'État et que cependant leur pauvreté n'exemptait pas des charges municipales.

Leur misérable état dans les derniers temps de l'Empire passe toute croyance. Captifs dans la cité qu'ils administraient', - soumis directement aux avanies des préfets, dont ils n'étaient que les agens passifs; - responsables des faits de leurs collègues et de leurs successeurs, qu'ils étaient forcés de désigner et de cautionner 2;

obligés solidairement de payer au fisc l'entière somme des tributs, encore bien que l'excès de l'impôt en rendit la rentrée impossible; - torturés avec des onglets de fer quand ils ne pouvaient payer, ces malheureux essayaient de se

'C. Th., XII, 1. L. 9.

On alla jusqu'à rendre responsables des faits de leurs prédécesseurs les décurions nommés à une époque où les incriminés avaient cessé loute fonction. Julien fut obligé de défendre cet abus. L. 54, C. Th., XII, 1. L. 2, L. 8. C. Just., de Suscept.

'C. Th., de Quæst., IX, 35; L. 2. Decuriones, sive ob alienum, sive ob suum debitum, exortes omnino earum volumus esse pœnarum quas fiduculæ et tormenta constituunt. Quod quidem capitale judici erit, si in contumeliam ordinis exitumque

soustraire à ces charges intolérables, quelque fût le moyen: par l'abandon de ces biens que la loi immobilisait dans leurs mains'; - par l'état religieux 2; par le service militaire "; par l'esclavage même, moins dur que le servage de la curie. Tout était vain: la loi les emprisonnait à tout jamais eux et leurs enfans dans leur déplorable condition.

« Neque curialis, neque curialis filius conditione » deserta, aliam audeat adspirare fortunam, cui majorum suorum exempla præjudicant 3.

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templetur. Majestatis tantummodo reos, et quæ nefanda dicto sunt conscios aut molientes, ex ordine municipali, maneat tam cruenta conditio: debitores vero et quos allectos aut susceptores memorant, a summo usque ad infimum ordinem curiales exortes talium volumus esse pœnarum. Habet severitas multa quæ sumat ad sanciendam publici officii disciplinam, ut abstineant tam cruentis.

Plumbatarum vero ictus, quos in ingenuis corporibus non probamus non ab omni ordine submovemus, sed decem primos tantum ordinis curiales ab immunitate hujusmodi verberum segregamus: ita ut in ceteris animadversionis istius habeatur moderatio commonentis (Gratien, an. 376). L. 115, C. Th., XIII, 1. 'C. J. X, 33. De prædiis decurionum sine decreto nɔn alienandis. L. 1. - Nov. XXXVIII, præf.

2 Saint Ambroise, Ep. 40 ad Theodos. Presbyteri quidem gradu functi et ministri ecclesiæ retrahuntur a munere et curiæ deputantur. C. Th., XII, 1 ; L. 59, 63, 104, 115; XVI, 7, L.3. C. Th., XII, 1 ; L. 13 ; L. 22, L. 168, ibid.

* Salvien, de Gubern. Dei. Novell. 1. Majoriani.

* C. Th., VIII. 4, L. 28. Houorius an. 423.—L. 14, C. Th., VI, 35.-L. 10, 11, D., L. 5.-Cassiod., Varior., II, 18; IX, 2,4.

En vain les empereurs accumulèrent les priviléges pour maintenir la classe des décurions, le nombre en diminuait tous les jours'. On en vint à condamner les malfaiteurs à entrer dans la curie, et par une révolution inouïe dans les idées, le privilége le plus glorieux chez un peuple libre, celui d'administrer ses concitoyens, fut sous le despotisme un supplice 2.

Ne quis officialium, dit Valentinien, pœnæ specie atque æstimatione curiæ dedatur, nisi si quis forte curiam defugiens, ob hoc cœperit militare, ne ingenitis fungatur officiis. Omnes itaque omnino judices tuæ censuræ subditos admonebis, ne quis existimet curiæ loco supplicii quemquam deputandum: cum utique unumquemque criminosum non dignitas debeat sed pœna comitari (ann. 364).

' C. Th., XII, 1, L. 186. Nov. 38, præf. V. Néanmoins Lydus, I, 28; III, 46, 49.

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Cassiod., Varior., II, 18. — Gudila episcopo Theodoricus rex: Priscarum legum reverenda dictat auctoritas ut nascendo curialis nullo modo possit ab originis suæ muniis discrepare nec in aliud reipublicæ officium trahi, qui tali preventus fuerit sorte nascendi; quod si eos vel ad honores transire jura vetuerunt, quam videtur esse contrarium, curialem reipublicæ amissa turpiter libertate servire, et usque ad conditionem pervenisse postremam, quem vocavit antiquitas minorem senatum. Novell. 1. Majoriani de Curialib.

* L. 38, C. Just. X, 31. L. 16, L. 29, L. 66, C. Th., XII,1.

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