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Pour repeupler nos cours d'eau, deux poissons sont spécialement recommandés à notre sollicitude : le barbeau du Nil et le gourami. Le barbeau du Nil, remarquable entre tous les poissons de ce fleuve par la beauté de sa robe, par l'éclat argentin de ses écailles et surtout par l'excellence de sa chair, deviendrait bientôt l'ornement de nos tables. Il ne Lardera certainement pas à nous être envoyé par la Société d'acclimatation qui fonctionne en Egypte. Le plus délicieux et le plus savoureux des poissons chinois, le gourami a déjà été importé à l'ile Maurice, à l'île Bourbon, à Pondichéry, à Cayenne et à la Martinique; nous espérons qu'il le sera bientôt en France.

Avant de terminer, qu'il nous soit permis de dire quelques mots sur l'état actuel de notre sériciculture. Le ver à soie chinois de l'aylanthe est définitivement naturalisé chez nous. L'été dernier, au bois de Boulogne, Mme Guérin-Méneville l'a élevé en plein air sur un taillis d'aylanthe et a eu un succès complet. Le ver à soie indien du ricin s'acclimate aussi à merveille. Enfin le ver à soie du chêne doit nous arriver bientôt de la Chine; il semble appelé à faire une révolution dans nos vêtements, et devoir métamorphoser les feuilles de nos forêts en une soie qui donnerait le costume si confortable des Chinois à nos classes laborieuses, jusqu'à présent couvertes plutôt que vêtues de chétives étoffes de coton, si promptement à rapiécer, si promptement en guenilles et en lambeaux.

D'ARBOIS DE JUBAINVILLE,

Garde général des forêts.

RÉPONSE A M. A. MATHIEU

A L'OCCASION DE SON ARTICLE BIBLIOGRAPHIQUE INTITULÉ :

L'ARBRE: Etudes sur la structure et la vie des végétaux supérieurs, paz M. HERMANN SCHACHT, professeur ordinaire de botanique à l'université de Bonn; traduit en français par M. E. MORREN, professeur à l'Université et chargé de la direction du Jardin botanique de Liége, etc. (1).

M. Ed. Morren, professeur à l'Université, chargé de la direction du Jardin botanique de Liége, publie en ce moment la traduction française de la deuxième édition d'un ouvrage du célèbre forestier allemand Hermann Schacht, professeur ordinaire de botanique à l'université de Bonn, ayant pour titre L'ARBRE: Etudes sur la structure et la vie des végétaux

(1) En vente chez Schulz et Thuillié, rue de Seine, 12, à Paris; 1 vol. in-8° orné de 205 gravures sur bois et de 5 planches lithographiées, représentant ensemble 550 sujets. 2e édition; Bruxelles, 1861. Prix: 12 francs. Voir Annales forestières, t. XX, année 1861, p. 218.

supérieurs, etc. Les Annales forestières ont rendu compte, dans le numéro de juillet 1861 (p. 248), de la partie de cet ouvrage qui était alors publiée. Le compte rendu publié par les Annales forestières a été fait par le savant professeur d'histoire naturelle à l'Ecole impériale forestière de Nancy, M. A. Mathieu, et il contient des critiques qui ont été relevées par M. Ed. Morren. Ce dernier nous prie de porter sa réponse à la connaissance de nos lecteurs, Notre impartialité nous fait un devoir de satisfaire ce légitime désir, et nous reproduisons la réponse, telle qu'elle nous est adressée.

« Une centaine de pages de notre traduction venaient à peine de paraître quand M. Mathieu, professeur d'histoire naturelle à l'Ecole impériale forestière de Nancy, publia dans les Annales forestières un compte rendu sur l'Arbre. M. Mathieu est un savant distingué, qui par ses connaissances spéciales et par ses publications est en France le critique le plus compétent sur l'art forestier. Nous le remercions donc, de la manière la plus cordiale, de l'appréciation bienveillante qu'il a bien voulu faire de notre travail et des qualités qu'il nous attribue. Cependant il relève avec une égale franchise un certain nombre de fautes de détail et cite des mots qu'il considère comme mal traduits. « Estimons-nous heureux, malgré <«< cela, dit M. Mathieu, que, des trois qualités qu'eût exigées la traduction « de l'Arbre, celles d'écrivain, de botaniste et de forestier, M. Morren << ait possédé les deux premières. » Ce jugement est une nouvelle preuve à l'appui de cette vérité proverbiale: que l'homme se révèle tout entier dans ses écrits. Nous sommes, en effet, un peu botaniste et depuis longtemps nous manions la plume, tandis qu'en commençant la traduction de l'ouvrage de M. Schacht, nous ne pouvions nullement prétendre à la qualité de forestier. Mais nous ne croyons cependant pas mériter le reproche que nous adresse M. Mathieu de ne pas avoir cherché à nous initier au langage forestier. On peut croire, et nous n'en doutons pas, que l'édition française de l'Arbre n'est pas à la hauteur de l'ouvrage allemand; il doit s'y être glissé des fautes, inhérentes à toute traduction, fautes auxquelles nous étions plus exposé que bien d'autres, n'étant pas habitué ni prédisposé à ce genre de travail. Cependant nous ne pouvons admettre la plupart de celles que M. Mathieu a signalées. La discussion de ces détails, quelque peu pédagogiques, pourrait être longue; nous nous efforcerons de nous défendre le plus brièvement possible.

« J'ai traduit frer bildung par formation spontanée, au lieu de dire formation libre, ce qui rend ma traduction beaucoup trop libre aux yeux de mon honorable critique. J'avoue avoir employé une expression pour l'autre, sans trop y prendre garde et bien persuadé d'avoir rendu clairement et

correctement, sinou littéralement, la pensée du savant botaniste allemand sur un point de science d'ailleurs parfaitement connu.

« J'ai employé le mot hétérogénie, alors qu'il ne se trouve pas dans le texte allemand. C'est vrai et cela vient de ce que je m'efforce d'appeler les choses par leur nom chaque fois que je le connais (1). M. Mathieu a、 tort de m'accuser (bien longuement!) de ne pas définir les termes qui me viennent sous la plume : je renvoie le lecteur à la page 19 de ma traduetion; il y trouvera le mot stétérogénie écrit entre parenthèses après génération spontanée: c'est un peu court; mais pouvait-on pousser la précaution plus loin, alors que ces deux expressions sont synonymes? Enfin, il ne pourrait venir à la pensée de personne de confondre la formation spontanée des cellules dans l'intérieur d'une cellule préexistante avec la génération spontanée proprement dite.

« Ces deux pierres n'étant pas lourdes ni lancées avec beaucoup de force, je n'ai pas de peine à les rejeter du terrain de la botanique où elles sont tombées. Mais voici venir toute une grêle de projectiles, partant cette fois de la forêt, qui est le domaine de M. Mathieu. Celui-ci n'a pas, il est vrai, l'intention de me blesser; mais partout où il me touche il reste une tache voyons s'il n'est pas possible de les effacer.

« J'aurais confondu sous-bois avec taillis. Ce serait une faute grave, en effet, mais je ne crois pas l'avoir commise. Voici la phrase incriminée ; elle fait partie de l'introduction (p. 6), et elle est lue par conséquent parun lecteur qu'il faut familiariser avec le langage des forêts : « Un taillis ep.3. << atteignant jusqu'à 30 pieds de hauteur et formé par la bruyère arbo- A <rescente et par un myrtillier en arbre, mêlés à plusieurs espèces d'ilex et « d'où s'élèvent çà et là les hautes tiges des lauriers, couvre à Madère de « grands espaces montagneux. » Il y a dans le texte allemand unterholz, mais il y a aussi nur hier und da: qu'est-ce done qu'un sous-bois sur lequel des futaies ne s'élèvent que çà et là? En outre, la méprise n'est pas bien grande, puisque M. d'Arbois de Jubainville a érit un Traité sur la culture du taillis sous-futaie. Enfin la connaissance et la signification du mot sous-bois ne m'étaient certes pas inconnues. Dans le corps de l'ouvrage je l'ai employé chaque fois qu'il était nécessaire.

« Hochwald. Même observation; je sais que cela veut dire futaie, mais comme pour le lecteur français

L'ennui náquit un jour de l'uniforinité,

il m'est arrivé quelquefois de varier les formules et de dire: haute futaie ou même bois de haute futaie. Il n'y a pas là de quoi agacer les nerfs du forestier le plus chatouilleux.

(1) Voir F.-A. Pouchet, Slétérogénie ou Traité de la génération spontanée, 1 vol. in-8°. To Losarburadow Sous-christranxen

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« La jeune plante, au lieu du jeune plant. J'affirme avoir toujours dit la jeune plante lorsque je parlais en français ou en botaniste, et le jeune plant quand je devenais pépiniériste sylviculteur; et ce, malgré la conspiration ourdie par mes protes. Il m'est même arrivé de parler de plantule.

« Lanbholz. Voyez dans les annotations et éclaircissements à la fin de l'ouvrage.

« Bestand. Voyez au même endroit.

« M. Mathieu nous demande de voir dans ses critiques l'intérêt et le soin qu'il a mis à lire notre travail : nous le prions d'accueillir nos réponses comme étant dictées par l'estime réelle que nous éprouvons pour sa science forestière; si ces critiques étaient venues de moins haut, nous n'en eussions eu nul souci. EDOUARD MORREN. »

ÉCORCES.

La question des écorces est une question considérable au point de vue des intérêts forestiers combinés avec les avantages que l'industrie du tannage peut tirer de ce produit préparé dans des conditions qui lui donuent plus de richesse. On ne doit pas perdre de vue que le revenu du sol des forêts privées est grevé de lourdes charges, et que la sylviculture pour lui consiste à faire produire le plus possible par un rendement plus avantageux, sans compromettre l'avenir par des gains anticipés. Nous trouvons, dans un journal spécial à l'industrie des tanneurs, des renseignements fort utiles à l'occasion de la production des écorces, que nous nous empressons de porter à la connaissance de nos lecteurs :

<< Il résulte d'un travail comparatif fait en Allemagne entre l'écorce de chêne et divers autres végétaux, que le chêne n'a pu trouver encore de rival pour le tannage des peaux.

<< Toutes les études faites ont prouvé qu'il était impossible de trouver en Allemagne des plantes propres à remplacer l'écorce de chêne.

<«< Il en est résulté cependant les faits suivants :

«Que les écorces des chênes croissant dans un sol composé de sable contiennent, en général, 6 à 8 pour 100 en moins de tanin que celles venues en bonne terre, c'est-à-dire en terre contenant beaucoup d'humus et de glaise, et dont le terrain est peu élevé, car plus la température est douce et plus le chêne produit une écorce contenant du tanin.

« Les chênes poussant dans un sol marécageux et âgés de vingt-deux ans, ont une écorce contenant environ 21 pour 100 de tanin.

« Les chênes venus dans un sol glaiseux voisin de grandes rivières donnent, à vingt ans, une écorce produisant également 21 pour 100 environ de tanin.

« Les troncs de chênes âgés de treize à vingt-trois ans donnent des écorces supérieures à celles provenant des branches et rameaux.

<«< La partie du milieu des forts troncs de chênes contient, lorsque le chêne a de dix-huit à vingt-deux ans, plus de tanin que les autres parties. Pour les troncs de chênes âgés de dix années seulement, la partie supérieure du tronc l'emporte sur les autres parties.

<«< Une réunion de chênes de tous les âges, poussant sur le même terrain, favorise le développement du tanin.

<«< En général, les écorces de chênes de dix à seize ans contiennent de 11 à 11 1/2 pour 100 de tanin; celles de vingt à vingt-cinq ans, 12 pour 100, et les écorces de trente à quarante ans, 11 1/2 pour 100.

« Les écorces récoltées au printemps renferment beaucoup plus de tanin que les écorces faites en été et en automne.

« Il résulte encore de ces expériences, et cela les tanneurs de tous les pays doivent en faire leur profit, c'est qu'une écorce contenant 8 pour 100 de tanin, comparée à une écorce dont le contenu est de 12 pour 100, ne doit pas être considérée comme n'ayant qu'une valeur de 1/3 en moins, mais, au contraire, de plus de moitié. En effet, les frais de récolte et de manipulations de tannage rendent ce produit très-cher, et ce qui est une économie sérieuse pour le tanneur, c'est d'employer sous le volume le moins grand possible des écorces contenant la plus grande quantité de tanin.

L'opération du tannage sera plus facile, plus prompte et d'un bon résultat plus assuré avec des écorces riches en tanin qu'avec des écorces inférieures.

<< Et c'est en écorce surtout que l'on peut dire Le bon marché est toujours le plus cher.

« Ce qu'il n'est pas moins nécessaire de constater, c'est que l'écorçage est en Allemagne comme en France un fait tellement productif que l'on n'a pas à craindre le non-écorçage dont certains marchands de bois menacent les tanneurs, quand ils ne veulent pas souscrire à leurs exigences.

« Nous avons, dans un de nos derniers numéros, donné les chiffres qui parlaient en faveur de l'écorçage (1). Ceux constatés par M. Brügl, forestier allemand, peuvent se résumer ainsi :

(1) Ces chiffres ont été empruntés aux Annales forestières, qui ont traité la question des écorces sous toutes ses faces; voir spécialement ce recueil aux années 1854, p. 236; 1855, p. 141; 1857, p. 178; 1858, p. 197; 1859, p. 147 et 193; 1860, p. 164, 189, 286; 1861, p. 24.

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