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dans le procès-verbal fait connaître d'une manière précise la contenance, la nature et le revenu des immeubles saisis. Aussi regarde-t-on cette formalité comme une des plus importantes et des plus salutaires de l'exploit de saisie (1).

3o D'après l'article 675 du code de procé lure civile, le procès-verbal de saisie doit contenir l'extrait de la matrice du rôle de contribution foncière pour tous les articles saisis. Ce mot extrait a donné lieu à une controverse. On a demandé s'il fallait une copie littérale de tous les articles de la matrice cadastrale où les immeubles sont désignés ou s'il suffisait d'en donner en masse les revenus, ou même de faire simplement mention de la contribution, puisque la loi ne prescrit qu'un extrait?

La jurisprudence s'est divisée sur cette question. Des cours d'appel ont décidé que le procès-verbal n'est pas nul, par cela seul qu'il ne contient pas l'extrait littéral de la matrice cadastrale, que le vœu de l'article 675 du code de procédure civile était suffisamment rempli par une énonciation circonstanciée du contenu de cette matrice; que la mention de la somme à laquelle l'héritage saisi est évalué ou imposé dans la matrice du rôle peut même être suffisante (2).

Des arrêtistes ont approuvé cette décision. Le mot extrait, disent-ils, exclut l'idée d'une copie littérale; un simple extrait répond au but de la loi, qui a voulu procurer une désignation exacte des objets, et donner aux proprié

(1) Lachaize, t. I, no 224.

(2) Toulouse, 25 juillet 1825 (S.-V., 1826, 2, 225); Besançon, 18 mars 1808 (S.-V., 1815, 2, 173); Turin, 6 décembre 1809 (S.-V., 1810, 2, 240). Berriat, no 28.

taires voisins un moyen d'empêcher que leurs biens ne se trouvent compris dans la saisie.

D'autres cours ont consacré l'opinion contraire et ont jugé qu'un procès-verbal de saisie qui contient l'énonciation et non la transcription littérale de l'extrait de la matrice foncière, pour tous les articles saisis, est nul (1).

La loi française du 2 juin 1841 a tranché cette controverse, en exigeant formellement la copie littérale de la matrice du rôle de la contribution pour les articles saisis. >>

Le projet de notre gouvernement, tel qu'il a été adopté par la chambre, en faisait autant; il portait également La copie de la matrice cadastrale pour : les immeubles saisis. » Chose étrange, la commission du sénat a remanié ce texte; elle a remplacé le mot copie par le mot extrait, sans donner aucune explication au sujet de ce changement; elle a fait revivre ainsi le doute que le texte déjà adopté par la chambre dissipait complétement.

Faut-il conclure de cette substitution du mot extrait au mot copie, que la loi de 1854 a voulu sanctionner cette jurisprudence qui, sous le code de procédure, considérait comme suffisante une analyse du contenu de la matrice?

Je ne le pense pas. Si tel eût été le but de la commission du sénat, elle n'aurait pas manqué de le signaler dans son rapport; je crois plutôt qu'elle ne se rappelait pas l'ancienne controverse, lorsqu'elle a opéré ce

(1) Rouen, 9 mai 1808 (S.-V., 1808, 2, 219); Agen, 21 juin 1810. Carré, q. 2242; Lachaize, t. I, no 228. Voir Dalloz, no 560.

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changement de rédaction et qu'en disant, l'exploit de saisie contient l'extrait de la matrice cadastrale, elle a voulu dire que l'exploit devait contenir la pièce qu'on nomme habituellement : l'extrait de la matrice. cadastrale. Cette dénomination est consacrée non-seulement par le langage usuel, mais encore par le langage administratif. Ainsi, par exemple, l'arrêté du 21 décembre 1867 parle des rétributions à payer du chef de la délivrance des extraits du cadastre. >>

Une analyse de cet extrait ne serait plus qu'un extrait de l'extrait et non la pièce, dite extrait, elle-même. Lors donc que l'article 18, 3°, porte que l'exploit contient l'extrait de la matrice cadastrale, il entend dire par là que l'exploit doit renfermer la copie littérale de la pièce appelée « extrait du cadastre. »

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11. En vertu de la loi du 10 octobre 1860, il a été procédé à la révision des évaluations du cadastre, et de nouvelles évaluations ont été établies sur le revenu net moyen des propriétés foncières pendant la période décennale de 1849 à 1858 inclus. Les nouveaux chiffres du revenu imposable admis par le ministre des finances, à la suite de ces opérations, sont devenus la base d'une nouvelle péréquation cadastrale, établie par la loi du 7 juin 1867.

C'est, évidemment, l'extrait de la nouvelle matrice cadastrale, tenue au courant d'année en année, que l'exploit de saisie doit contenir. C'est elle seule qui donne des renseignements exacts sur le revenu des biens (1).

(1) Lachaize, t. I, no 227; Carré et Chauveau, q. 2243; Thomine, n° 751.

12. L'exploit de saisie doit contenir une copie fidèle de l'extrait délivré. Toute erreur de nature à tromper sur la contenance, la nature ou le revenu des biens saisis entraînerait la nullité de l'acte ; car il ne contiendrait plus l'extrait, mais une pièce fictive, différente du véritable extrait.

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13. Lorsque l'immeuble saisi se compose de plusieurs parties et a plusieurs articles sur la matrice, ou lorsque plusieurs immeubles sont saisis, l'exploit doit contenir l'extrait relatif à toutes les parties de l'immeuble ou à tous les immeubles saisis. Le poursuivant ne satisfait pas au vou de la loi par la transcription de la copie de quelques articles de la matrice cadastrale, lorsqu'il omet complétement les autres. Il devait demander au cadastre et insérer dans son exploit un extrait de tous les articles et non pas de quelques articles seulement. En ne le faisant point, il est en faute; l'omission qui provient de son fait entraîne la nullité de la saisie. Car la disposition de la loi, dit la cour de cassation de France, est générale et absolue et son inobservation ne peut être excusée sous aucun prétexte (1).

Mais, dans ce cas, la saisie est-elle nulle pour le tout ou seulement pour les parties d'immeuble ou les immeubles dont l'exploit ne contient pas l'extrait de la matrice? (Voir no 26.)

14. Si l'extrait délivré au saisissant n'est pas conforme à la matrice, l'inexactitude, si grave qu'elle puisse être, n'entraîne pas la nullité de la saisie. Ce

(1) Cass. Fr., 11 novembre 1853 (S.-V., 1853, 1, 689); 30 janvier 1855 (S.-V., 1855, 1, 784).

n'est pas la partie poursuivante qui est alors en faute, car elle n'avait pas qualité pour rectifier ou compléter l'extrait, c'est le fonctionnaire qui a délivré la pièce (1).

15. Quid, si l'extrait délivré est incomplet, s'il ne renseigne point, par exemple, la contenance, la classe, la nature ou le revenu des parcelles?

L'huissier ne satisferait point au vou de la loi en insérant dans son exploit l'extrait tel qu'il lui a été délivré. En l'examinant, il a dû s'apercevoir que la pièce était incomplète, qu'elle ne contenait point les renseignements que la loi a jugés nécessaires dans l'intérêt du saisi; son devoir était de réclamer un autre extrait ou de faire compléter celui qui lui avait été délivré. La cour d'appel de Toulouse a consacré cette opinion et décidé qu'un procès-verbal de saisie où l'extrait de la matrice n'indiquait pas le revenu net des biens saisis, est entaché de nullité. En exigeant la mention de cet. extrait, observe-t-elle, la loi a voulu mettre les parties intéressées à même de connaître le revenu net des articles; l'omission de ce revenu laisse les parties intéressées et le public dans l'ignorance d'un point essentiel; par conséquent, il y a contravention à l'article 675 du Code de procédure civile, bien que l'huissier ait joint à son procès-verbal un extrait de la matrice du rôle parfaitement conforme à celui qui lui a été délivré par le maire d'Alby (2).

La cour d'appel de Paris a jugé cependant qu'un procès-verbal de saisie immobilière n'est pas nul par

(1) Bordeaux, 25 mars 1829 (S.-V., 1829, 2, 344); Paignon, t. I, p. 73, n° 11: Chauveau sur Carré, q. 2242.

(2) Toulouse, 10 mai 1822 (S.-V., 1822, 2, 264). Contra, Dalloz, 568.

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