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On a cependant enseigné et jugé que cette mention pouvait être souvent nécessaire, en matière d'ajournement, pour assurer le renvoi de l'acte à la personne assignée, dont la demeure réelle peut n'être pas connue de celui chez qui l'élection de domicile a été faite (1). Mais il est à remarquer que l'élection de domicile confère mandat à la personne résidant au lieu du domicile élu, de recevoir, au nom du débiteur, les significations et sommations qui devraient lui être faites à son domicile réel ou à personne (2). C'est donc au débiteur mandant, et non à son créancier, de mettre le mandataire à même d'accomplir le mandat dont il l'a chargé, en le tenant au courant de ses changements de résidence.

17. 8° Mention de la personne à qui la copie du commandement est laissée.

La formalité du parlant à a toujours eté considérée comme essentielle dans tous les exploits.

18. 9° Aux termes de l'article 14, le commandement énoncera que, faute de payement, il sera procédé à la saisie des immeubles du débiteur.

Cette mention est requise pour avertir le débiteur de la gravité des poursuites qui seront entamées contre lui, s'il ne se libère pas, pour qu'il sache que c'est sa propriété immobilière qui est menacée.

Au cas où cette mention ferait défaut, le commandement serait nul, en tant que commandement aux fins de saisie immobilière. Mais il réunirait toutes les conditions requises pour les commandements aux fins d'exécution mobilière, de saisie-brandon ou de saisie de

(1) Carré, q. 308 bis. (2) Zachariæ, § 146.

rentes constituées sur particuliers, et il serait valable comme tel (1).

Cette énonciation peut être faite de deux manières.

Le commandement peut se borner à dire que, faute de payement, il sera procédé à la saisie des immeubles du débiteur, sans désigner ceux-ci d'une manière spéciale.

Il peut aussi, sortant des généralités, donner l'indication des immeubles que le poursuivant est dans l'intention de saisir, en se conformant à l'article 18, 2°, c'est-à-dire, en désignant, lorsque c'est une maison, l'arrondissement, la commune, la rue où elle est située et deux au moins des tenants et aboutissants et, lorsque ce sont des biens ruraux, les bâtiments, la nature et la contenance approximative de chaque pièce, deux au moins des tenants et aboutissants, l'arrondissement et la commune où les biens sont situés.

L'énonciation qu'il sera procédé à la saisie des immeubles du débiteur est seule obligatoire; l'indication spéciale des immeubles, dans les termes de l'article 18,2o, est facultative; elle peut être donnée, dit l'article 14. Déjà, avant la loi du 15 août 1854, la doctrine et la jurisprudence étaient unanimes pour décider que le commandement ne doit pas contenir la désignation des immeubles dont le créancier entend provoquer la vente (2).

19. 10° L'original du commandement doit être visé dans les vingt-quatre heures par le bourgmestre du lieu où le commandement a été signifié. Nous ne pensons pas que ce fait doit se trouver mentionné dans le

(1) Jacob, t. I, p. 330.

(2) Tarrible, vo Saisie immobilière, p. 647; Pigeau, Commentaire, t. II, p. 277; Carré, q. 2210; Cass. Fr., 6 fructidor an XI (S.-V., 1804, 2, 22); 6 frimaire an XIII (Collect. nouv., 2. 1, 31).

corps de l'exploit; il se constate suffisamment par le visa lui-même, qui est toujours daté.

Mais le visa doit-il être mentionné sur la copie du commandement ?

Les auteurs et la jurisprudence se sont prononcés pour la négative. L'huissier a, pour faire viser le commandement, vingt-quatre heures, à partir de la signification; il est donc dessaisi de la copie, celle-ci est déjà remise au moment où il fait viser l'original; la mention est impossible (1).

ARTICLE 2.

De la copie du titre en tête du commandement.

20. Le § 2 de l'article 14 porte: «En tête du com mandement, il sera donné copie du titre, s'il n'a été signifié au débiteur dans les trois années qui précèdent le commandement. "

Cette formalité a pour but de rappeler au débiteur la nature et la valeur du titre qu'on lui oppose et de le mettre à même de l'attaquer, s'il y a lieu. D'après l'article 673 du Code de procédure civile, cette copie du titre devait toujours être donnée, lors même qu'il aurait été notifié la veille du commandement (2). L'article 14 en dispense, si le titre a été signifié trois années avant le commandement.

« L'article en discussion, dit le premier rapport de M. Lelièvre, introduit une modification que nous de

(1) Chauveau sur Carré, q. 2213. 3°; Rennes, 29 février 1820 (Collect. nouv., 6. 2, 216); Bourges, 3 juillet 1822: Cass. Fr., 2 février 1830, 3 février 1832 (S.-V., 1833, 2, 48).

(2) Pigeau, t. II, p. 193; Carré, q. 2204.

vons approuver, elle est relative à la signification du titre qui sert de base à la poursuite. Si ce titre a été signifié au débiteur dans les trois années qui précèdent le commandement, il n'est plus nécessaire d'en notifier une nouvelle copie. Cela est rationnel, parce que la signification antérieure a été pour le débiteur une information suffisante. »

Le § 2 de l'article 14 prescrit d'une manière formelle que la copie du titre sera donnée, en tête du commandement. Si précise que soit la disposition, je ne saurais admettre que le commandement où la copie se trouverait à la suite de l'acte serait entaché de nullité. Comme l'a très-bien remarqué Persil, le législateur a voulu rappeler au débiteur les termes mêmes de son obligation, lui mettre sous les yeux la lettre du contrat qu'il a signé, pour lui faire bien comprendre la position qu'il a acceptée et le mettre à même de satisfaire à des engagements volontairement contractés. Pour atteindre ce but, il est parfaitement indifférent que le titre soit mis en tête ou à la suite de l'exploit (1).

21. Que faut-il entendre par copie entière?

A prendre cette expression à la lettre, l'omission du mot le plus insignifiant suffirait pour que la copie ne soit pas entière; elle ne le serait pas non plus lorsque, par erreur, un mot aurait été substitué à un autre, car la copie serait incomplète, faute du mot véritable. Mais si l'on considère le but de la loi, l'on reconnaît qu'elle n'a pas voulu aller aussi loin et frapper de nullité toute copie entachée d'une omission quelconque. La loi a voulu mettre le débiteur à même de se défendre en faisant placer sous ses yeux le titre en vertu duquel

(1) Persil, Ventes judiciaires, no 68; Thomine-Desmazures, no 744.

il est poursuivi. Dès lors, la copie du titre peut omettre certains mots, sans que le commandement soit entaché de nullité. C'est à la jurisprudence à décider, selon les espèces, si l'omission ou la fausse mention est de nature à paralyser le droit de défense du débiteur.

La jurisprudence a consacré cette opinion; quelquefois même eile est allée trop loin dans cette voie et s'est montrée trop indulgente. J'admets avec la cour de Bordeaux qu'il est dérisoire de prétendre que copie entière du titre n'aurait pas été donnée, par cela seul qu'on aurait omis, dans la formule d'exécution, un mot qu'il est très-facile de suppléer à la lecture et sans lequel la phrase n'aurait pas de sens (1).

J'admets avec la cour de cassation de France que l'erreur ou l'inexactitude commise dans la copie d'un titre n'emporte pas nullité, lorsque le débiteur n'a pu être trompé par cette inexactitude et qu'elle n'a d'ailleurs pour lui aucune conséquence dommageable (2).

Mais je ne saurais me rallier à un autre arrêt de la même cour décidant que la formule exécutoire des actes est suffisamment indiquée dans les copies signifiées. d'actes, par les mots mandons et ordonnons, etc. (3).

"

En effet, la formule exécutoire est une partie essentielle du titre, puisque sans elle le titre ne serait pas une grosse exécutoire par voie parée, mais une simple expédition; le signifié doit pouvoir constater par l'inspection de la copie si le notaire ou le greffier qui a délivré la grosse de l'acte ou du jugement l'a revêtue d'une formule exécutoire régulière; lors donc qu'une

(1) Bordeaux, 20 mai 1828 (S.-V., 1828, 2, 276). (2) Cass. Fr., 8 février 1832 (S.-V., 1832, 1, 596).

(3) Cass. Fr., req., 10 oct. 1809. Voy. Dalloz, Vente publ. d'imm., no 390.

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