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la responsabilité des notaires, résultant des termes de l'article 68 de la loi de ventôse. D'après quelques auteurs, les mots s'il y a lieu ne s'appliqueraient qu'au dol et à la fraude (1). D'après d'autres, les mots s'il y a lieu indiqueraient uniquement que le notaire ne peut être déclaré responsable que s'il a occasionné un dommage et la responsabilité des notaires serait la responsabilité générale édictée par les articles 1382, 1383 du Code civil. Enfin, d'après une troisième opinion, le législateur a voulu faire entendre, par ces mots s'il y a lieu, que le tribunal a une latitude d'application; qu'il ne doit prononcer une condamnation à des dommages-intérêts contre le notaire que s'il trouve sa faute assez grave pour mériter une pareille condamnation et que même il a le pouvoir de ne le condamner qu'à réparer une partie du dommage et de l'exonérer entièrement, si sa faute lui paraît excusable (2).

C'est cette dernière opinion que notre cour de cassation a sanctionnée par un arrêt célèbre du 20 mai 1853 rendu sur les conclusions conformes de M. le procureur général Leclercq. Cet arrêt décide que ces expressions, s'il y a lieu, de l'article 68 de la loi de ventôse << ne signifient pas s'il y a préjudice occasionné par une faute quelconque, puisque alors cet article ne serait qu'une répétition inutile et surabondante des principes du droit commun en matière de responsabilité et renouvelés par les articles 1382, 1383 du Code civil; mais qu'ils signifient, si le notaire doit, à raison de la gravité de sa faute, être déclaré responsable; qu'il suit de ce

(1) Rolland de Villargues, vo Responsabilité; Pagès, de la Respon sabilité des notaires, p. 101 et suiv.

(2) Rutgeerts, Commentaire, no 1313, a.

qui précède que lorsque les tribunaux sont appelés à statuer sur une poursuite en responsabilité dirigée contre un notaire à raison de la nullité d'un de ses actes, la loi leur fait un devoir d'apprécier l'étendue et la gravité de la faute imputée au notaire, et qu'ils ne sont pas tenus, par application des articles 1382 et 1383, de prononcer cette responsabilité même pour la faute la plus légère (1).

Cet arrêt, qui fixe ainsi le sens des mots s'il y a lieu dans l'article 68 de la loi de ventôse, est du 20 mai 1853, et notre loi est du 15 août 1854. C'est donc au moment où la cour de cassation venait d'attacher aux mots s'il y a lieu cette signification d'une responsabilité civile restreinte, moins étendue que celle établie par les articles 1382, 1383, que les rédacteurs de notre article 52, ayant à déterminer la responsabilité des officiers ministériels du chef de nullité ou de péremption en matière d'expropriation forcée, ont répété dans la finale de cet article les mêmes mots s'il y a lieu. Il n'y a pas de doute, selon moi, que les rédacteurs de notre loi ont eu présent à l'esprit l'arrêt de la cour de cassation qui venait d'interpréter ces derniers mots, lorsque, à leur tour, ils les ont inscrits dans l'article 52, qu'ainsi dans l'intention du législateur de 1854, ces mots ont la signification que leur attribue cet arrêt Cela résulte du rapprochement de la date de cet arrêt de celle de notre loi. Ceux-là mêmes qui pensent que la cour de cassation s'est trompée sur ce point doivent donc admettre que, en matière de saisie immobilière, son opinion se trouve législativement consacrée par la finale de notre arti

(1) Pasicrisie, 1853, 1, 299. Conf. cass. Fr., 14 mai 1822; 25 août 1831; 27 novembre 1837; Bastiné, Notariat, no 327.

cle 52 et que, si les mots s'il y a lieu n'ont point dans l'article 68 de la loi de ventôse la portée que leur attribue la cour de cassation, tel est incontestablement leur sens dans l'article 52 de la loi de 1854.

18. On a vu, sous l'article 20 (n° 6, 8°), que le conservateur est civilement responsable des dommagesintérêts résultant de l'inobservation de sa disposition. La responsabilité de ce fonctionnaire est spécialement établie par l'article 20, lequel ne fait pas la réserve « s'il y a lieu; l'atténuation à la responsabilité ordinaire résultant de la disposition finale de l'article 52 ne lui est donc pas applicable. La responsabilité du conservateur dans le cas de l'article 20 doit se régler d'après les principes généraux de la responsabilité de ces fonctionnaires.

ARTICLE 53.

L'adjudication ne sera signifiée qu'à la partie saisie cette signification sera faite à personne ou domicile et par extrait seulement.

L'extrait contiendra les noms, prénoms, professions et domiciles du saisissant, de la partie saisie et de l'adjudicataire, le jour de l'adjudication, le prix pour lequel elle a été faite et le nom du notaire qui l'a reçue.

Les demandes en nullité de l'adjudication seront formées, à peine de déchéance, dans les quinze jours de la signification dont il vient d'être parlé. Elles ne suspendent point l'exécution du jugement énoncé au dernier paragraphe de l'article 32.

L'adjudicataire sera tenu de faire transcrire au

bureau des hypothèques le titre dont il s'agit à l'article 49, et le conservateur devra faire mention sommaire de l'adjudication en marge de la transcription de la saisie.

Rédactions comparées.

Projet du gouvernement.

Art. 62. L'adjudication ne sera signifiée qu'à la partie saisic; cette signification lui sera faite à personne ou domicile et par extrait seulement.

L'extrait contiendra les noms, prénoms, professions et domiciles du saisissant, de la partie saisie et de l'adjudicataire, le jour de l'adjudication, le prix moyennant lequel elle a été faite, et le nom du notaire qui l'a prononcée.

Les demandes en nullité de l'adjudication ne seront recevables que dans le mois de la signification dont il vient d'être parlé.

L'adjudicataire sera tenu de faire transcrire au bureau des hypothèques le titre dont il s'agit à l'article 58, et le conservateur devra faire mention sommaire de l'adjudication en marge de la transcription de la saisie.

Projet de la commission de la Chambre.

Art. 62. L'adjudication ne sera signifiée qu'à la partie saisie; cette signification sera faite à personne ou domicile et par extrait seulement.

L'extrait contiendra les noms, prénoms, professions et domiciles du saisissant de la partie saisie et de l'adjudicataire, le jour de l'adjudication, le prix pour lequel elle a été faite et le nom du notaire qui l'a reçue.

Les demandes en nullité de l'adjudication seront formées, à peine de déchéance, dans les quinze jours de la signification dont il vient d'être parlé. Elles ne suspendent point l'exécution du jugement énoncé au § 3 de l'article 36.

(Le surplus comme au projet du gouvernement.)

Amendement du Sénat.

Art. 56. L'adjudication ne sera signifiée qu'à la partie saisie: cette signification sera faite à personne ou domicile et par extrait seulement.

L'extrait contiendra les noms, prénoms, professions et domiciles du saisissant, de la partie saisie et de l'adjudicataire, le jour de l'adjudication, le prix pour lequel elle a été faite et le nom du notaire qui l'a reçue.

Les demandes en nullité de l'adjudication seront formées, à peine de déchéance, dans les quinze jours de la signification dont il vient d'être parlé. Elles ne suspendent point l'exécution du jugement énoncé au § 3 de l'article 35.

L'adjudicataire sera tenu de faire transcrire au bureau des hypothèques le titre dont il s'agit à l'article 52, et le conservateur devra faire mention sommaire de l'adjudication en marge la transcription de la saisie.

Sommaire.

1. A qui l'adjudication doit être signifiée.

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notre article. Elle ne doit pas l'être à l'avoué du saisi. 2. Elle peut être faite par le poursuivant et par l'adjudicataire.

notaire commis ne doit pas soigner cette formalité.

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3. Les mentions que l'extrait signifié doit contenir sont substantielles. 4. Les frais de l'extrait et de sa signification sont des frais ordinaires. 5. Effets de la signification.

1o Elle fait courir les délais pour intenter l'action en nullité sous peine de déchéance.

Le délai ne court pas contre les incapables, la déchéance n'étant pas une prescription;

2o Elle fait courir le délai accordé aux parties pour se régler sur la distribution du prix;

3o Elle n'est pas requise pour opérer la transmission de propriété du saisi à l'adjudicataire.

6. La demande en nullité ne suspend pas l'exécution du jugement qui ordonne le déguerpissement du saisi.

7. De la transcription du titre et de la mention en marge de la transcription de la saisie. Leur but.

8.

1o Inutilité de la disposition de l'article prescrivant la transcription.

2° Elle doit être requise par l'adjudicataire et non par le notaire; 3o Dans quel délai. Sanction.

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9. La mention en marge ne doit pas être requise; le conservateur doit la faire d'office. Point de délai ni de sanction.

COMMENTAIRE.

1. Sous le Code de procédure, la question de savoir à qui l'adjudication doit être signifiée faisait l'objet d'une vive controverse. Des arrêts décidaient que le jugement d'adjudication devait être signifié individuellement à tous les créanciers inscrits sur les biens expropriés (1).

D'après d'autres, au contraire, le jugement d'adjudication ne devait être signifié par l'adjudicataire qu'au

(1) Paris, 12 janvier 1813; 20 juillet 1825; Orléans, 26 novembre 1827.

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