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surtout par les peintures qui le décoraient, et qui étaient de la main de Nicias. On voyait assise sur un trône d'ivoire une jeune femme d'une grande beauté; une esclave qui était auprès d'elle tenant un parasol; un jeune homme, encore sans barbe, était debout, vêtu d'une tunique que recouvrait une chlamyde de pourpre à côté de lui, une esclave tenait des javelots, et conduisait des chiens de chasse. On ignore si c'est ce Nicias ou un autre peintre du même nom qui vivait dans la CXIIe olympiade: on prétend que Nicias, contemporain d'Attale, enduisait d'un vernis les statues de marbre de Praxitèle; mais comment aurait-il pu être à la fois contemporain de Praxitèle et d'Attale? Un peintre comme Nicias, qui refusait soixante talens d'un de ses tableaux, aurait été d'une bien rare complaisance s'il s'était fait le vernisseur des statues de Praxitèle. Il faut donc convenir qu'il y eut au moins deux peintres nommés Nicias; l'un distingué par le talent, et l'autre inférieur, mais qui excellait à vernir les statues, en sorte que Praxitèle disait que ceux de ses ouvrages en marbre qui lui plaisaient le plus, étaient ceux qui avaient été vernis par Nicias. Nicias avait sa sépulture à Athènes entre les monumens de ceux que la république avait jugés dignes de cet honneur. Ce peintre, dit Pausanias, l'emportait sur tous ceux de son temps par son habileté à peindre des animaux. Aussi voyons-nous qu'il avait peint Némée assise sur un lion; que, sur le monument qu'il avait décoré de peintures près de Tritia, il avait représenté des chiens de chasse; et un passage de Démétrius de Phalère nous apprend qu'il aimait à représenter des combats de cavalerie ; il peignait à l'encaustique, et ce fut dans ce genre de peinture qu'il fit le tableau de Némée. Suivant Plutarque, ce ne fut pas Attale, mais Ptolémée qui voulut acheter soixante talens le tableau représentant Ulysse évoquant les ombres des morts. Alors ce peintre pouvait être le même que Pline trouvait sous la CXII olympiade. Mais Euphranor aurait donc été plus ancien qu'Apelles, ce que le passage de Quintilien que nous avons rapporté, ne permet pas d'admettre; Pline dit lui-même qu'Euphanor n'a paru qu'après Pausias. Au rapport de Pline, Nicias

fut le premier qui fit usage dans les tableaux de céruse brûlée. C'est ce que nous nommons aujourd'hui minium ou mine de plomb, dénominations trop souvent équivoques. L'invention de cette substance colorante est due à l'évènement fortuit de l'incendie du Pirée, après lequel on trouva de la céruse qui avait été brûlée dans des boîtes., Celle qu'on tirait d'Asie, et que les Romains appelaient cerussa purpurea, était préférée, On en composait à Rome avec du silis marbré; mais celle-ci était moins recherchée.

NICOMAQUE, fils et élève d'un peintre nommé Aristodême, est mis sur la même ligne qu'Apelles, Protogènes et Asclépiodore. Plutarque compare sa manière facile de peindre à celle dont Homère faisait des vers. Nicomaque se distinguait de tous ses contemporains par cette facilité qui ne semble pas avoir nui à son talent. Aristrate, tyran de Sycion, le manda pour peindre un monument qu'il voulait consacrer à la mémoire du poète Télestus. Le jour où l'ouvrage devait être fini était fixé. Nicomaque ne vint que quelques jours plus tôt. Le tyran irrité voulait le faire punir; mais le peintre eut fini son travail au temps marqué, et avec autant d'art que de finesse. Cet artiste était l'opposé de Protogènes pour l'exécution. Quelqu'un critiquait devant lui l'Hélène de Zeuxis, et ne la trouvait pas belle. « Prends mes yeux, lui dit Nicomaque, et elle te paraîtra une déesse.» On pourrait souvent répondre à ceux qui critiquent les chefs-d'oeuvre de l'art : « Prends les yeux d'un artiste, et et tu en reconnaîtras les beautés. » Pline dit, comme une chose remarquable, que Nicomaque et Parrhasius faisaient usage de la terre érétrienne dans la composition de leurs couleurs. Cette terre était ainsi nommée d'Erétrie, ville de l'Eubée. Nicomaque avait peint l'enlèvement de Proserpine, tableau qui était, du temps de Pline, au Capitole, dans le temple de Minerve, au-dessus de la chapelle de la Jeunesse ; une Victoire s'élevant dans les airs sur un char attelé de quatre chevaux, tableau qui avait été placé au Capitole par Lucius Munacius Plancus. Nicomaque était le premier qui s'était avisé de

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coiffer Ulysse d'un pileum. On admirait encore de lui, au temps où Pline écrivait, un Apollon, une Diane, une Mère des dieux, assise sur un lion, et un tableau plus célèbre encore, représentant des Bacchantes suivies de satyres enivrés qui, dans cet état, se traînaient sur leurs pas. Nicomaque eut pour élèves Aristide, son frère, Aristoclès, son propre fils, et Philoxènes d'Erétrie. Il mourut sans avoir eu le temps d'achever son tableau des Tyndarides. Pline n'hésite pas à mettre cet ouvrage au nombre des chefs-d'œuvre de la peinture antique, quoiqu'il ne fût pas terminé.

NICON ne peignait que des chevaux, et cependant OElien lui reproche de ne pas avoir bien connu la structure de cet animal. Nicon avait représenté sur le Poecile le chien qu'un Athénien avait avec lui à la bataille de Marathon. On voyait ce courageux animal au milieu des combattans qui étaient aux côtés de Cynogire, d'Epizèle et de Callimaque.

NICOPHANES était mis au nombre des meilleurs artistes de son temps: on aimait surtout l'élégance et l'agrément de ses ouvrages. Il avait une grande vivacité d'exécution et de conception. On lui reprochait, comme à Aristide, de peindre de préférence des courtisannes. Il est du nombre des artistes que les anciens appelaient pornographes.

NICOSTRATES, dit ŒElien, fut tellement saisi d'admiration à la vue de la Vénus que Zeuxis avait peinte pour les Héracléens, qu'il resta immobile devant ce tableau. Quelqu'un, s'approchant de lui, lui demanda ce qui pouvait tant exciter son admiration: Tu ne me ferais pas cette question, lui répondit Nicostrates, si tu avais mes yeux. Plutarque met la même réponse dans la bouche de Nicomaque. Il y a deux espèces d'illusion dans la peinture, dit Diogène Laërce; les unes sont artificielles, les autres ne le sont pas. Un artiste et un homme qui ne l'est pas ne voient pas un tableau des mêmes yeux.

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NOTKERUS fut, comme Lucas, médecin et peintre. Il devint aveugle

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dans sa vieillesse ; l'empereur Othon Ier, voulant rendre hommage à son mérite, alla le visiter.

CENIAS peignit une parenté, ou assemblée de femmes.

OLYMPIAS. Tout ce qu'on sait d'elle, c'est qu'elle eut un élève nommé Autobule : la maîtresse et l'élève nous sont connus seulement par leurs noms que Pline a conservés.

ONASIAS OU ONATAS peignit pour les Platœeens Euryganée dont l'air égaré exprimait la douleur que lui causait la défaite de ses enfans. ONATAS peignit pour les Platoens, sur un côté du vestibule du temple de Minerve Area, la première expédition des Grécs contre Thèbes. Pausanias parle de cette peinture.

OMPHALION avait été esclave de Nicias. Voilà, contre l'assertion trop générale de Pline, un esclave qui exerça la peinture, et qui s'y distingua. Cet exemple prouve que le talent faisait taire la loi. On voyait à Messine un grand nombre d'ouvrages d'Omphalion la plupart représentaient des souverains qui avaient régné dans la Messénie.

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OPHÉLION est nommé dans deux épigrammes qui font partie de l'anthologie grecque.

PACUVIUS. L'exemple de Fabius Pictor n'avait point engagé ses concitoyens à l'imiter. Un siècle et demi s'écoula sans qu'on vît aucun romain s'occuper de la peinture. Enfin le poète tragique Pacuvius, neveu d'Ennius par sa mère, peignit le temple d'Hercule dans le forum Boarium. La gloire qu'il avait acquise par ses ouvrages dramatiques répandit quelque lustre sur l'art qu'il n'avait pas dédaigné d'exercer, mais ne lui donna pas cependant assez de considération, pour qué des mains honnêtes (c'est l'expression de Pline) voulussent s'y livrer. Ce qui donnerait à penser que, s'il y eut de temps en temps quelques peintres romains, ce furent ou des esclaves ou des hommes de basse condition. Les peintures de Pacuvius étaient les amusemens de sa vieillesse : la peinture est un art difficile qui demande l'homme tout entier. Elle peut procurer des instans agréables; mais non de

grands succès à l'amateur qui s'en occupe en passant. Il est probable que Pacuvius connaissait mieux l'art dramatique. Il s'acquit dans cette autre carrière une très-grande réputation, et la mérita en partie. Toutefois les anciens lui préfèrent Accius pour la force du style, l'élévation des sentimens et la variété des caractères. Pacuvius était né à Brindes, et il mourut à Tarente, âgé de plus de quatre vingt-dix ans, l'an 54 avant J.-C.

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PAMPHYLE fut le premier des peintres de l'antiquité qui cultiva toutes les parties des belles lettres, et surtout les mathématiques et la géométrie, sans lesquelles il soutenait que l'art ne pouvait se perfectionner ce qui prouve que les peintres de ce temps n'étaient pas aussi ignorans en perspective que le supposent les modernes. Pamphyle était d'Amphipolis en Macédoine: peintre très-célèbre par son talent, il eut encore la gloire d'avoir Apelles pour disciple. Il prenait des élèves pour dix ans, et en exigeait un talent qui faisait 5400 francs de notre monnaie. Il donna tant de lustre à la peinture, que, d'abord à Sicyone, et ensuite dans toute la Grèce, elle fut mise au premier rang, entre les arts libéraux, et que tous les jeunes gens bien nés apprirent à dessiner. On se servait, pour ces dessins élémentaires, de tablettes de buis; après avoir tracé un dessin sur la tablette, on la nétoyait pour y faire un dessin nouveau, car les élèves n'avaient pas la facilité de garder leurs études, comme ils peuvent le faire depuis l'invention du papier. L'art de la peinture conserva la gloire que Pamphyle lui avait acquise; il n'y eut que des ingénus qui pussent l'exercer, et ensuite et ensuite que des gens de la condition la plus honnête; il fut toujours interdit aux esclaves: il était réservé aux Romains de le dégrader en le faisant exercer par des mains serviles. Cet usage fit perdre, sans doute, quelques bons artistes, qu'auraient pu fournir les dernières classes de la société; mais il en résulta un avantage, c'est que la peinture n'étant une profession honorable et lucrative que pour ceux qui l'exercent avec distinction, cet art ne fut pas dégradé chez les Grecs par la misère d'une foule de peintres sans talens. Ceux qui avaient fait sans succès les

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