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On peut diviser toutes ces couleurs ou nuances de couleurs en

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Les peintres n'employèrent d'abord qu'une seule teinte dans leurs ouvrages, et ils ne tracèrent leurs figures qu'avec des lignes d'une seule couleur : c'était ordinairement le rouge et le cinabre. Quelquefois, au lieu de rouge, on employait le blanc. Les tombeaux antiques de Tarquinia offrent encore aujourd'hui des figures circonscrites par des couleurs blanches couchées sur un fond obscur. Cette sorte de peinture s'appelait monochrôme. L'art de la peinture ayant fait des progrès, on découvrit la lumière et les ombres. C'est notre peinture en camaïeu, exécutée avec une seule couleur **. On alla encore plus

Il nous eût été facile de citer les passages des auteurs anciens dans lesquels toutes les couleurs dont nous venons de donner l'énumération sont mentionnées; la crainte d'être trop long est le seul motif qui nous a déterminé à les supprimer.

** Lorsque la peinture fut arrivée au dernier terme de la perfection, les plus grands maîtres ne laissèrent pas de s'exercer dans cette manière de peindre, dont l'un des grands avantages est de résister plus long-temps aux injures de l'air, et où, en changeant un peu plus et tantôt un peu moins la même couleur, on parvient, au moyen des lumières et des ombres, à donner aux corps de la rondeur et du relief. Horace (liv. II, sat. 7, v. 97) parle de combats peints avec du

loin, on plaça entre les chairs et les bruns la couleur analogue à chaque objet; et c'est ce procédé que les Grecs nommaient le ton de la couleur. Dans la plupart des peintures antiques, exécutées sur les murailles, les lumières et les ombres sont marquées par des traits parallèles, et souvent par des coups de pinceau croisés. D'autres peintures, comme on l'observe au palais Barberini, sont contrastées avec des masses entières de couleurs fuyantes. On voit au cabinet d'Herculanum plusieurs tableaux qui offrent à-la-fois ces deux manières de nuancer. Tel est celui qui représente Chiron et Achille (pl. XXVII de ce recueil.) Le Centaure est peint avec des hachures; et le jeune héros, son élève, est traité avec des masses entières. Il paraît, par ce qui nous reste des anciennes peintures exécutées sur des murailles, que les anciens ne peignaient pas sur la chaux humide, mais sur un champ sec. On découvre ce procédé sur plusieurs tableaux d'Herculanum, dont quelques figures enlevées par écailles laissent apercevoir distinctement le fond sur lequel elles ont été exécutées. Le tableau qui désigne le mieux ce procédé, est celui de Chiron et d'Achille. On s'aperçoit au premier coup d'oeil que les ornemens de l'ordre dorique ont été peints avant les figures, de manière que l'on a suivi un tout autre ordre que celui qui s'observe aujourd'hui dans nos peintures à fresque.

Les anciens distinguaient les couleurs en austères et en florides. Les unes et les autres, dit Pline, étaient ou naturelles, ou composées

simple cinabre, où les gladiateurs semblaient se mouvoir, s'éviter, se poursuivre, se joindre, se frapper. Quintilien (liv. XI, ch. 3) exhorte les orateurs à varier leurs tons à propos, et à moduler leur voix d'une manière insensible et agréable, à l'exemple de ces peintres, dit-il, qui, ne se servant que d'une seule couleur, donnaient à leurs ouvrages du relief et de la profondeur. Ut qui singulis pinxerunt coloribus, alia tamen eminentiora, alia reductiora fuerunt. Il ne faut pas croire que, dans les commencemens, les camaïeux ou monochrômes eussent ce degré de séduction; ils se réduisaient à la simple délinéation des contours de la figure, c'est-à-dire à des lignes, à des traits colorés sans lumières et sans ombres. Ces traits et ces lignes étaient, comme nous l'avons dit, d'une scule couleur, et cette couleur était ordinairement le rouge, le cinabre ou le minium. Zeuxis et quelques autres employèrent aussi le blanc, et les figures étaient alors appli quées à un fond obscur.

par l'art. Les florides étaient celles que le particulier était obligé de fournir à l'artiste, savoir : le minium, l'armenium, la chrysocolle, le purpurissum et l'indicum purpurissum. Les couleurs austères étaient également des productions natives, ou des compositions artificielles. Les natives étaient la sinopis, la rubrique, le paratonium, le mélin, l'érétrie, l'orpiment : les autres étaient des compositions. On mettait au rang des couleurs communes, l'ocre, la céruse brûlée, la sandaraque, la sandyx, le séricum et l'atrament.

Les anciens tirèrent d'abord la sinopis du royaume de Pont, mais ils donnèrent ensuite la préférence à celle qu'on trouve attachée en gerbes aux rochers, dans l'Egypte, aux îles Baléares et en Afrique; ils en employaient de trois sortes, la rouge, la moins rouge et la moyenne. Ils donnaient à celle qui venait d'Afrique le nom de cicerculum, gros brun.

La terre de Lemnos leur fournissait la meilleure rubrique : elle avait presque l'éclat du minium, dit Pline. On ne la vendait que sigillée, c'est-à-dire marquée d'une empreinte ; c'est pourquoi on la nommait sphragis. C'était avec cette terre qu'on sophistiquait le minium. L'arcane d'Egypte s'attachait facilement aux enduits et était employée pour les bois qu'on voulait peindre de cette couleur. Brûlée dans des pots de terre, elle produisait l'ocre; elle s'améliorait de la violence du feu. Ils employaient, pour faire tenir l'or sur le bois, un mordant qu'ils appelaient leucophoron. C'était un composé de sinopis pontique, de silis ou ocre lucide, et de melinum; le tout mêlé, et broyé ensemble pendant trente jours, dans une proportion indiquée par Pline. Le parætonium tirait son nom d'un lieu ainsi nommé en Egypte. C'était, selon Pline, une combinaison de l'écume de la mer, consolidée avec du limon. Les anciens le tiraient de l'ile de Crète et de Cyrène. C'était la plus grasse de toutes les couleurs blanches, et le plus tenace de tous les enduits. Le melinum était aussi une couleur blanche. Le meilleur était celui de l'ile de Melos. Samos en fournissait aussi, mais celui-ci était si gras que les peintres n'en faisaient point usage. La céruse tenait le troisième rang parmi les

couleurs blanches. Au temps de Pline, elle se tirait du plomb; mais il dit qu'il y avait autrefois, à Smyrne, une céruse native que les anciens employaient à peindre les navires. Ils tiraient d'Asie la céruse brûlée; ils regardaient comme la meilleure celle qu'ils appelaient céruse pourprée. On faisait à Rome de la céruse brûlée avec l'espèce d'ocre que Pline désigne sous le nom de silis marbré. Les anciens ne pouvaient se passer de Céruse brûlée pour faire les ombres. Nicomaque et Parrhasius, dit Pline, se servaient de terre érétrienne : cette terre était ainsi nommée d'Erétrie, ville de l'Eubée. Pline, qui en indique les vertus médicinales, ne dit pas l'usage que les peintres en faisaient. L'ocre et la sandaraque entraient aussi dans la composition de leurs couleurs : ils tiraient ces deux substances de l'île de Topasos; ils faisaient une sandaraque artificielle avec de la céruse cuite au four.

En faisant torréfier la sandaraque native avec une égale portion de terre rubrique, on obtenait une composition nommée sandyx. C'était, selon Pline, la couleur la plus pesante. Le syricum était encore une couleur artificielle, composée de la sinopis et de la sandyx. Pline range aussi, parmi les couleurs factices, l'atrament ou noir des peintres; et cependant il y en avait de deux sortes, le noir de terre qui était natif, et l'atrament fait avec du noir de fumée. Pline indique différentes manières de préparer celui-ci. On obtenait le plus recherché par la fumée du tæda, sorte de pin qu'on employait pour faire les torches. Du temps de Pline, les peintres allaient fouiller dans les sépulcres pour en retirer des charbons chargés d'un beau noir. Polygnote et Micon faisaient leur noir avec du marc de raisin : cette sorte de noir s'appelait Tryginon. Apelles avait imaginé de faire du noir avec de l'ivoire brûlé. Pline parle encore d'une autre espèce d'atrament dont il avoue qu'il ne connaît pas la composition.

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Le purpurissum était la plus précieuse de toutes les couleurs florides il se faisait avec de la craie à brunir l'argent, craie que l'on mettait dans les chaudières des teintures en pourpre, et qui buvait cette teinture plus promptement encore que la laine. Le premier,

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