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d'intérêts, et qui serait réparti parmi les Portugais en proportion de leurs richesses. Cette nouvelle exaction rendit les vœux encore plus ardents] en faveur de don Pedro, dont on eût pu dès lors regarder le triomphe comme assuré, si ce prince, pour réussir, n'avait eu besoin que des vœux et non de la coopération des habitants.

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GRANDE Bretagne.

CHAPITRE IX.

Question de la réforme parleArrestation et procès de M. O'ConMesures de finances. Liste civile.

- État du pays.mentaire.- Troubles en Irlande.. nell. Rentrée du parlement.

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- Présentation à la Chambre des communes d'un bill pour la réforme parlementaire de l'Angleterre. Questions incidentes. État des partis. Seconde lecture du bill. Défaite du ministère dans la discussion en comité. - Dissolution du parlement.

S'il suffisait qu'un pays parvînt à un haut degré de gloire et de puissance pour que sa constitution fût à l'abri de tout reproche, celle d'Angleterre mériterait tous les éloges qu'elle a reçus des publicistes. Mais lorsque, recherchant jusqu'à quel point les faits répondent aux théories, et ce que cette constitution a produit pour le bonheur de la communauté en général, on arrive à des résultats tels que ceux-ci : une détresse commerciale et manufacturière sans exemple; une dette qui effraie l'imagination; un clergé dévorant une immense part du revenu national; le sol de la Grande-Bretagne possédé tout entier par quelques centaines de familles privilégiées; des millions de prolétaires affamés et nus, dont il faut étouffer périodiquement les cris de révolte à coups de fusil, alors on doute sérieusement de la perfection de ces institu tions si vantées; alors on conçoit que des hommes sages aient proclamé la nécessité de les réformer, en faisant une part plus large à la démocratie dans un gouvernement qui n'a été, après tout, qu'une aristocratie représentative.

Le besoin et la justice d'une réforme dans la Chambre des communes étaient sentis depuis long-temps en Angleterre. Cependant, sans la révolution de juillet, qui imprima une si remarquable impulsion à l'opinion publique dans ce pays sur cette grave question politique, combien d'années encore ce besoin serait-il resté sans satisfaction? combien d'années encore eût-on attendu un ministère capable d'accomplir cette

tâche ? C'est ce que personne ne peut dire. Aussi, est-ce à bon droit que ceux qui ont pris la réforme en baine, et ceux qui l'ont saluée comme un bienfait inappréciable, maudissent la révolution de juillet, ou lui gardent une éternelle reconnaissance.

A peine prononcé par lord Grey, en arrivant au pouvoir après le duc de Wellington, ce mot magique, la Réforme, avait excité l'enthousiasme de la nation, et maintenant elle était dans l'attente du grand changement que le ministère préparait avec un secret qui fut rigoureusement observé par tous ses membres. Sur ces entrefaites, l'opinion publique se déclarait chaque jour avec une nouvelle ardeur. Partout, dans les comtés, dans les villes, dans les paroisses, des assemblées se tenaient pour signer des pétitions à l'appui des intentions du gouvernement; des souscriptions s'ouvraient dans le même but; la presse défendait cette cause avec toute la puissance qu'on lui connaît aux époques où elle répond aux sympathies populaires; des associations permanentes, sous le nom d'unions politiques, commençaient à se former sur différents points du pays, se constituaient les organes de l'opinion, et promettaient de déployer, dans la lutte difficile que tout faisait prévoir, une énergie qui ne permettrait pas, même aux ministres, de fléchir devant les obstacles: de là un mouvement prodigieux des esprits en Angleterre au commencement de 1831, dont le signe le plus caractéristique fut d'abord l'élection à Preston du fameux radical Hunt; mouvement qui devait toujours aller eroissant, et disait assez que la réforme parlementaire s'accomplirait, ou par des moyens légaux, ou par la force du peuple, en amenant une révolution plus terrible peut-être que celle de 1792 en France.

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En même temps, l'Irlande, remuée par d'autres besoins d'autres intérêts, d'autres passions, était à la veille de tomber dans une complète anarchie. Vainement le lord lieutenant avait fait publier une proclamation pour interdire tous les rassemblements contraires à la loi, la loi était sans pouvoir contre des

bandes innombrables de paysans armés qui parcouraient les comtés, demandant l'abolition des dimes, la réduction des fermages, l'augmentation des salaires, et menaçant le clergé protestant, les magistrats, les propriétaires, d'une prompte et terrible vengeance, s'ils osaient résister à leurs exigences. Dans quelques endroits, les propriétaires furent forcés de se rendre à des assemblées, où ils durent accepter des conditions conformes à ces demandes. Dans d'autres, on empêchait les tenanciers du propriétaire réfractaire de se livrer aux travaux de l'agriculture. Ailleurs les insurgés insistaient pour qu'aucun procédé de labourage ne fût employé que ceux qui occupaient le plus grand nombre de bras.

Aux alarmes que ces désordres et les conflits sanglants qui les accompagnèrent quelquefois répandirent parmi les classes aisées de l'Irlande, il faut ajouter l'effroyable misère qui affligeait les classes inférieures. Dans les campagnes, comme dans les grandes villes, le peuple était dénué de subsistance, et de vêtements pour se protéger contre la rigueur de l'hiver. Il fut constaté que, dans deux seules baronies du comté de Mayo, il y avait, en février, plus de vingt mille individus hors d'état de se procurer des vivres. La récolte des pommes de terre ayant manqué sur les côtes occidentales de l'Irlande, on calculait que, dans cette partie du royaume, il se trouverait au moins 200,000 individus n'ayant ni nourriture ni moyen d'en obtenir. Et cette détresse n'était pas bornée au seul comté de Mayo, où elle s'était d'abord manifestée; elle se faisait également sentir dans les comtés de Galway, de Sligo, et s'étendit par degrés dans d'autres parties de cette île infortunée.

Aucune circonstance ne pouvait être plus favorable aux agitateurs. Après avoir conquis l'émancipation des catholiques, cet objet de toutes leurs réclamations, ils demandaient maintenant le rappel de l'union de la Grande-Bretagne et de l'Irlande, c'est-à-dire leur émancipation politique; ils élevaient une voix aussi haute pour proclamer une législature séparée essentielle à la prospérité du pays, qu'ils avaient fait auparavant pour

arracher au gouvernement anglais la révocation de leur incapacité civile.

Le rappel de l'union, voilà donc quel était le but des mécontents; l'agitation, tel était leur moyen d'y parvenir. M. O'Connell, le grand agitateur par excellence, marchait encore une fois à leur tête: il voulut d'abord faire parade aux yeux du gouvernement de la force physique dont il pouvait disposer. On annonça que les corps de métiers de Dublin parcourraient la ville processionnellement en l'honneur du libérateur, M. O'Connell; mais le lord lieutenant défendit cette procession, sur ce motif qu'elle était préparée pour troubler la paix publique, et qu'elle avait excité de sérieuses appréhensions dans l'esprit des citoyens paisibles.

Ne pouvant se mettre en révolte ouverte contre la loi, M. O'Connell conseilla au peuple d'obéir à la proclamation, en l'assurant d'ailleurs que le rappel de l'union était inévitable. « Long-temps, dit-il, la cause de l'émancipation des catholiques eut moins de chances de succès que le rappel. La force et l'union d'une classe achevèrent cette mesure; la force et l'union du peuple enleveront l'autre. Par force, j'entends celle de l'opinion, de la raison, de la justice : nous abhorrons et abjurons la force physique. Par l'agitation, l'Irlande a conquis la liberté civile et religieuse; par l'agitation, nous avons échappé à une augmentation de taxes; par l'agitation, nous avons empêché la suppression de la vice-royauté, et c'est encore par l'agitation que nous obtiendrons le rappel de l'union. Mon objet, en poursuivant ce rappel, est de faire que tout homme qui a des propriétés en Irlande, qui reçoit des salaires ou des pensions sur nos impôts, dépense ses revenus dans le pays. » Il faut dire, en effet, que l'habitude où sont les riches propriétaires, les hauts fonctionnaires et les évêques protestants de vivre à Londres ou sur le continent, que l'absentéisme, mot consacré pour exprimer cette funeste habitude, est une des causes les plus puissantes de la détresse de l'Irlande.

Fidèle à sa tactique, ici franchement avouée, d'agiter le

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