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de Gand, qui, grâce à son initiative, échange libéralement ses manuscrits et ses livres depuis plus d'un quart de siècle avec une soixantaine de bibliothèques belges et étrangères, - que ce rapport, dis-je, qui prouve le mouvement en montrant comment on marche depuis longtemps déjà en Belgique, a eu une influence utile sur la solution de cette question si grosse en résultats féconds pour l'avenir des relations scientifiques de l'Europe entière.

En somme, l'Association internationale des Académies a tenu à Paris une première session, où l'on a travaillé sérieusement et où des résultats pratiques ont été atteints ou préparés dans les domaines scientifiques les plus divers. Elle a prouvé ainsi que le rêve de Leibniz n'est pas une chimère et que sa réalisation est appelée à rendre des services signalés à la science et au rapprochement international sur le terrain des choses de l'esprit.

Que vous dirai-je maintenant des fêtes qui ont été si gracieusement offertes aux délégués des Académies?

Visite aux richesses incomparables en livres, manuscrits et objets d'art du château de Chantilly, légué à l'Institut de France par notre ancien confrère le duc d'Aumale, et dont les honneurs nous étaient faits par des membres de l'Institut; visite à la Bibliothèque nationale de Paris sous la direction du cicerone unique qu'est M. Léopold Delisle, assisté de son état-major de conservateurs; réception de M. Émile Faguet à l'Académie française, où le nouvel académicien a fait l'éloge de Victor Cherbuliez et où le président, M. Émile Ollivier, a prononcé un merveilleux discours d'une heure, sans consulter ses notes (il faut ajouter qu'il avait pris pour

1901.

LETTRES, ETC.

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souffleur aussi discret qu'habile le directeur de la Comédie française en personne, M. Claretie); représentation gala offerte aux délégués par la Comédie française, où des artistes incomparables (1) jouaient Bérénice de Racine, la Nuit d'octobre de Musset et une comédie de Meilhac et Halévy (L'Été de la Saint-Martin); soirées musicales charmantes organisées en notre honneur par M. le comte de Franqueville, président de l'Institut pour 1901, dans son château historique de la Muette, à Passy (2), et par M. et Mme Senart (3) dans leur hôtel de la rue François Jer; banquet offert par l'Institut de France dans les salons neufs de l'Hôtel du Palais d'Orsay; banquet offert par la Municipalité de Paris à l'Hôtel de ville, suivi d'une réception avec concert et ballet dans les salles splendides, où s'entassaient plusieurs milliers d'invités réunis en notre honneur; enfin, M. le Président de la République française, rentrant exprès à Paris malgré les fatigues de son voyage officiel sur les côtes de la Méditerranée et nous recevant à déjeuner au Palais de l'Élysée; telle est l'énumération rapide de ce que l'hospitalité française a accumulé d'attentions et d'honneurs pendant cette

(1) Les principaux rôles étaient tenus par Mmes Bartet, Baretta et Lebreton, et par MM. Mounet-Sully, Paul Mounet, Lambert et de Féraudy.

(2) M. de Franqueville avait eu la délicate attention de porter au programme de son excellent orchestre un morceau de musique de chaque pays représenté. La Belgique y figurait avec les Tableaux symphoniques d'Edgard Tinel.

(3) Chez Mme Senart, nous avons entendu les chanteurs de SaintGervais et l'orchestre de la Scala qui ont exécuté à la perfection de la musique des XVI, XVIIe et XVIIIe siècles.

semaine inoubliable, pour accueillir avec éclat ses hôtes des Académies étrangères, parmi lesquels Mommsen a été le héros du jour en sa qualité de patriarche illustre de la science européenne.

Créée en principe à Berlin il y a deux ans, organisée définitivement à Paris en juillet 1900 et réunie pour la première fois dans la même ville en avril dernier, où elle s'est vue entourée de respects et de sympathies aussi illustres, l'Association des Académies est née viable. Sa prochaine session aura lieu à Londres dans trois ans. La science peut placer en elle de vastes espérances.

La bénédiction de tous les hommes de paix, de progrès et de bonne volonté scientifique l'accompagne dans la carrière si bien commencée. Grâces en soient rendues à la France pour nous avoir si généreusement prodigué son hospitalité et établi ainsi un noble précédent auquel, sans aucun doute, les autres gouvernements d'Europe tiendront à honneur de se conformer tour à tour.

La Classe vote des remerciements à M. Paul Fredericq pour la manière dont il a rempli sa mission à la première Assemblée générale de la Fédération des Académies.

Sur les conclusions d'un rapport de MM. Kurth, Vanderkindere et Prins, les remerciements de l'Académie seront exprimés à Mme Ve Thonissen pour la communication d'un manuscrit de feu son mari sur L'organisation judiciaire à l'époque mérovingienne et carolingienne.

COMMUNICATION ET LECTURE.

Charles-Quint à Haguenau en 1552; par Ern. Gossart, correspondant de l'Académie.

Dans mes Notes pour servir à l'histoire du règne de Charles-Quint (1), j'ai mentionné, page 94, un codicille de l'empereur, dont un extrait se trouve aux archives de Simancas, sous ce titre Copia de la minuta del codicillo que el emperador Carlos V otorgo en Auguene á 7 (lire 20 ou 21) de setiembre de 1552, et qui débute ainsi : « En el lugar de Auguene, cerca de la cibdad de Argentina......., en presencia de mi, Francisco d'Erasso », etc. (A Auguene, près de Strasbourg, en présence de moi, Francisco d'Erasso). Je faisais remarquer que Auguene paraît être Haguenau, quoique cette ville, au lieu d'être proche (cerca) de Strasbourg, en soit éloignée de vingt-quatre kilomètres; j'ajoutais : « et quoique l'empereur n'y entra pas quand il se dirigeait vers Metz au mois de septembre 1552 ». Une phrase de l'Histoire de De Thou et une autre de Laguille, mal interprétées, je dois le reconnaître, me semblaient indiquer qu'il s'était arrêté, non pas dans cette ville, mais dans un village voisin. De

(1) Bruxelles, 1897. Extrait du tome LV des Mémoires couronnés et autres mémoires publiés par l'Académie royale de Belgique, in-8".

Thou écrit: Inde (c'est-à-dire de Strasbourg) sub vesperam per Haganoa viam in proximum vicum divertit (1). Laguille dit que l'empereur, s'étant contenté de voir la cathédrale de Strasbourg, prit la route de Haguenau <«< et vint coucher dans un village voisin (2). » Il faut entendre: voisin de Strasbourg.

En réalité, Charles-Quint s'est arrêté à Haguenau et y a passé une nuit, comme le constatent des documents conservés dans les archives communales de cette ville. Ainsi, dans un cahier qui renferme les perceptions de la dime pour les années 1545-1564, le receveur de l'OEuvre Saint-George - la fabrique de l'église de ce nom a inscrit à l'intérieur de la couverture la mention suivante : « L'an 1552, le mardi (20), veille de la SaintMathieu (21 septembre), Sa Majesté Impériale entra vers sept heures du soir à Haguenau. Le lendemain, on lui prêta serment. Elle repartit au sortir de l'hôtel de ville (5). »

Cette visite est mentionnée encore dans une avance, faite par la même OEuvre, de quatre cents florins d'or, dont on fit cadeau à l'empereur (4). La fabrique, n'ayant

(1) Historiarum Tomus primus. Londres, 1733, p. 388. (2) Histoire de la province d'Alsace. Strasbourg, 1727, 2e partie, p. 39.

(3) Anno Domini 1552, uff Zinstag, vigilia Mathei, reite Kay. M. ungeverlichenn umb 7 urenn nach mittag zu Hagenaw ine. Am andern tage swure man Ime. Er reit gleichs vom Rothuse widerumb hienweg.

(4) Item 300 lb. geben inne 400 gl. goldgulden so der K. Maj. verehrt anno LII, als ir Maj. alhie gewesen unnd fürther für Metz gezogen unnd wider erkhoberen wollen.

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