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J'ai appelé l'amour le plus efficace, le plus fécond de nos devoirs à l'égard des parents; car c'est bien ici que l'on peut dire : C'est un précepte du Seigneur qui suffit, s'il est accompli; toute la loi est renfermée dans ce commandement. Qu'on aime, qu'on chérisse ses parents, et on se fera un bonheur de leur cbéir, de les respecter, de venir à leur secours, de les consoler ; on excusera, on supportera leurs défauts avec patience et douceur; ce seront des soins empressés, des paroles affectueuses un seul cœur, une âme, comme une même vie. Ce devoir filial est aussi le plus précieux pour les parents, dont le cœur a besoin de l'amour de leurs enfants. Ils le réclament, peut-on dire, par ces mêmes paroles du plus tendre des pères : Mon fils, donnez-moi votre cœur (Prov. 23).

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Mais que ce sentiment soit éteint, qu'un père infortuné, qu'une malheureuse mère en aient acquis la triste certitude, quel prix pourront-ils mettre à l'accomplissement des autres devoirs de la piété filiale ? On les environnera quelquefois d'un respect extérieur, ils recevront une assistance suffisante ; mais que seront pour eux ces procédés froids, secs, observés par la rigueur du devoir ? Oui, pourront-ils se dire trop souvent, le cœur navré de douleur, et les larmes aux yeux: Ce fils, cette fille ont pour nous certains égards imposés par la nature et les convenances; mais ils ne nous aiment point; ils nous donnent, ou nous font porter le pain de chaque jour; mais

nous sommes exclus de leurs affections. Qu'elle est triste une telle vie ! Qu'elle doit être longue à ces malheureux parents par la douloureuse pensée qu'elle le paraît à d'autres..... peutêtre !

QUARANTE-UNIÈME ENTRETIEN.

LES DEVOIRS DES PARENTS.

LE D. Ah! monsieur, quel contraste affligeant entre ce devoir de la piété filiale, et ce qui se voit aujourd'hui dans nos familles! C'est là une plaie humiliante et douloureuse de notre société moderne. Que de larmes, que de chagrins provoqués par la violation criminelle des obligations que vous venez de retracer! Mais ne peut on pas attribuer la cause de ce désordre à ceux-là mêmes qui en sont les tristes victimes? aux parents qui négligent ou qui faussent l'éducation de leurs enfants? Je vous prie de me faire connaître en quelques mots ce que les principes du christianisme imposent pour l'accomplissement de ce devoir.

LE TH. Pour être juste envers la société moderne, il faut convenir que les parents sont remplis de sollicitude, animés d'un zèle infatigable, pour procurer à leurs enfants les avantages physi

ques, de même que l'instruction propre à leur

obtenir dans le monde des positions honorables et lucratives. Cet attachement est porté de nos

jours jusqu'à l'excès. Car il arrive souvent que cette ambition paternelle devient très-nuisible et à la famille et à l'enfant qui en est l'objet, parce qu'on le place au-dessus de sa condition, et qu'il se trouve dans l'impossibilité de parvenir à celle qu'on lui a destinée. Que de jeunes gens vivent dans l'oisiveté, le dégoût, le malheur, par suite de cette affection que la sagesse et la prudence n'ont point réglée! Combien de pères de famille ont trop souvent à regretter d'avoir fait sortir leurs enfants de l'état modeste, honorable où euxmêmes ont passé une vie occupée et heureuse? Il y aura néanmoins des circonstances qui commanderont à un père de ne reculer devant aucun sacrifice pour faciliter en ses enfants le dévelop→ pement de facultés peu communes, de dispositions distinguées. Mais au lieu de ces exceptions, que je crois cependant nombreuses, on érige en principe social qu'il faut procurer à l'enfant une position au-dessus de la condition modeste de sa famille; or, c'est là un défaut de nos mœurs, d'où résultent de cruels mécomptes pour les enfants, d'amers regrets pour leurs parents, aveuglés par l'affection, et quelquefois par la vanité et l'orgueil.

Plût à Dieu qu'on fût aussi zélé pour procurer aux enfants le bienfait d'une éducation religieuse! Oui, il faut bien le reconnaître, là est le principe de ces désordres, de ces insubordinations que vous déploriez tout-à-l'heure avec tant de raison. Ces parents insensés ne voient pas qu'en violant

ce précepte sacré de la nature et du christianisme, ils sont eux-mêmes les auteurs de leurs chagrins et du malheur de leurs enfants. Et vous, pères, dit saint Paul, ayez soin de bien élever vos enfants.... en les instruisant selon le Seigneur (1), recommandation si souvent réitérée dans les livres saints de l'Ancien-Testament, et où sont prescrits des châtiments, des rigueurs utiles qu'un attachement mal entendu fait trouver trop sévères aujourd'hui. Voyez encore saint Paul comparant à un infidèle l'homme qui n'a pas soin de ceux qui composent sa famille (2), et, personne ne peut le contester, l'éducation religieuse est le premier, le plus saint de ces devoirs. Un père viole donc à la fois la loi naturelle et la loi divine, en négligeant d'élever ses enfants dans la crainte de Dieu et la pratique de la vertu. Qu'on ne se fasse pas illusion sur la nécessité des principes religieux, ils sont la base indispensable d'une bonne éducation. Ce qu'on appelle moralité, n'exerce pas d'empire sur l'âme des enfants; ils ont besoin, pour la respecter et la conserver, de l'influence de la religion. C'est à cette condition seule que ces jeunes cœurs pourront être formés à la vertu qui doit plus tard les protéger contre la violence des passions. Aussi, que d'existences sociales détruites à jamais pour un si grand nombre de jeunes gens que la religion eût efficacement défendus

(1) Eph. 6.

(2) Tim. 1a. 5.

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