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tion de l'âme se fissent en eux par des moyens sensibles, appliqués par l'action libre de l'homme. Telle était, dit-on, avant Jésus-Christ, ou la profession de foi des parents, ou la circoncision; et depuis la venue du Messie, c'est dans le baptême que nous trouvons ce signe extérieur. Dieu a donc établi que les hommes coopéreraient à la sanctification de leurs enfants.

En imposant cette obligation religieuse, il veut aussi que l'on prenne des précautions afin de ne point occasionner d'accident capable de compromettre la vie de l'enfant, et d'empêcher l'application de ce moyen de salut. Ecoutez maintenant les inductions qui découlent de ces principes, et vous verrez à qui doit ordinairement être attribuée la privation de ce remède sanctificateur. Supposons d'abord que l'enfant venu au monde appartienne à des parents chrétiens qui lui donnent la mort, ou qui s'opposent à ce qu'il reçoive le baptême, pour l'attacher au judaïsme ou à la religion de Mahomet. Ne direz-vous pas aussitôt que Dieu avait préparé les moyens du salut à la petite créature; que de plus il avait fait un devoir à son père et à sa mère de les lui appliquer ? Et vous serez juste en attribuant à ces parents cruels ou impies le malheur de leur enfant, s'il est mort sans avoir reçu la grâce du baptême. S'il a été privé de ce sacrement par la négligence des parents, ou par quelque autre motif blamable, vous devez encore en rejeter la faute sur les personnes qui ont participé à cette omission. Car Dieu fai

sait à tous un devoir rigoureux de n'apporter ni imprudence, ni légèreté, ni négligence à l'administration du baptême. Si l'on ôte la vie aux enfants des infidèles, c'est les mettre par un crime dans l'impossibilité d'être sauvés ; et s'ils meurent naturellement, privés de la régénération spiri– tuelle, que leurs parents ignorent, on peut dire que si les infidèles faisaient un bon usage pour eux-mêmes des moyens de salut accordés à tous, ils arriveraient par la miséricorde divine à la connaissance de la vraie religion, et du remède spirituel nécessaire à leurs enfants. Pour les temps qui ont précédé l'obligation du baptême, il existait chez les Gentils un moyen de sanctification pour les enfants; et s'il a été perdu, négligé par la faute des parents, vous trouverez encore ici une volonté humaine qui n'accomplit pas ce que Dieu avait établi en faveur de ces enfants.

LE D. Mais s'ils meurent dans le sein de leurs mères, vous ne placerez plus de volonté humaine entre Dieu et ces enfants comme un obstacle au baptême, qu'il est physiquement impossible de conférer.

LE TH. Pardonnez-moi, nous y trouverons très-souvent encore une volonté humaine, ou criminelle, ou imprudente. Combien de fois n'a-t-on pas recours à des moyens homicides en opposition avec la loi naturelle, et par conséquent contre la volonté de Dieu? N'y a-t-il pas un grand nombre de mères qui, par des imprudences coupables, nuisent au fruit de leurs en

trailles, et lui occasionnent la mort? Ce que vous ne jugerez pas apparemment conforme à la volonté du Créateur. Convenez donc que dans ces circonstances, les desseins miséricordieux du Seigneur ne s'accomplissent pas sur ces enfants, par l'obstacle volontaire des parents.

LE D. Vous conviendrez à votre tour, que Dieu pourrait facilement tourner la volonté des parents vers la conservation de ces petites créatures, et les mettre dans l'impossibilité de s'opposer à leur sanctification.

LE TH. Nul doute que Dieu n'ait cette puissance; mais s'il ne l'exerce pas, aurez-vous le droit d'affirmer qu'il n'a point pourvu à la sanctification de ces enfants, qu'il les a exclus de tout moyen de salut par un acte de sa volonté ? Vous devez voir combien votre conséquence serait forcée. C'est comme si vous affirmiez qu'un médecin ne s'est point occupé de son malade, alors qu'il a laissé à d'autres personnes le soin d'administrer les médicaments prescrits. Est-ce à lui que vous imputerez la mort du malade, si par malice, oubli ou négligence, on n'a pas suivi ses prescriptions. Mais, direz-vous peut-être, Dieu connaissait d'avance ces obstacles volontaires de la part de l'homme, et il lui était si facile de les détruire, d'empêcher même qu'ils ne se formassent, tant il a d'empire sur les volontés? Je ne conteste pas ce pouvoir de Dieu sur l'homme et je conviens avec vous qu'il serait plus rassurant pour les enfants qu'il voulût l'exercer en

imposant à leurs parents ou à d'autres une nécessité absolue de leur appliquer les moyens extérieurs du salut.

Oserez-vous dire qu'il le doit, sous peine d'avoir à subir l'imputation de n'avoir préparé pour ces enfants aucun remède salutaire?

Ecoutez ces paroles que la justesse de votre esprit appréciera facilement: Ce moyen de sanctification n'était dû à personne, et Dieu a pu l'établir selon sa volonté. Eh bien! il a confié aux parents ou à d'autres le soin et le devoir de l'appliquer. Où trouvez-vous jusqu'ici la sollicitude du Seigneur en défaut? Ne se montre-t-elle pas manifeste en faveur de ces enfants? Deux moyens étaient en sa puissance pour porter les hommes à remplir ses desseins : l'un c'était de leur ôter la liberté, l'autre de les laisser selon l'état naturel, libres dans leurs actes, sauf à en rendre compte plus tard devant son tribunal. S'il lui a plu de s'arrêter à ce dernier moyen, direz-vous qu'il y a de sa part indifférence pour le salut de ces enfants, ou défaut de sagesse dans le choix de l'instrument de ses volontés? Ces imputations ne peuvent avoir accès dans un esprit raisonnable; car Dieu a établi un remède sensible, efficace et il l'a manifesté, en imposant l'obligation rigoureuse de l'appliquer.

D'un autre côté, en nous laissant la liberté, il agit conséquemment à l'ordre de sa volonté créatrice, à l'état naturel de l'homme qui, en opérant une œuvre de charité à l'égard de l'enfant, rem

plira un devoir d'obéissance méritoire envers son Dieu. Avec un peu de réflexion, il vous sera facile de voir que la sagesse du Créateur se montre dans cette liberté laissée à l'homme bien autrement que dans la nécessité qu'il devrait, selon vous, lui imposer en se servant de lui comme d'un instrument matériel.

LE D. Vos explications s'appliquent à l'hypothèse où une volonté humaine se rencontre entre Dieu et l'enfant, et je conviens que c'est à l'homme que doit être alors imputée la privation des moyens extérieurs établis par le Seigneur ; mais il arrive souvent que les enfants meurent dans le sein maternel, ou après leur naissance, sans qu'il y ait faute de la part de personne, par accident naturel. Direz-vous aussi que Dieu a voulu le salut de ces petits enfants?

LE TH. Entendons-nous sur ce mot a voulu ; il ne peut pas signifier que Dieu ait voulu d'une manière spéciale, efficace, le salut de ces enfants, puisque de fait ils n'y parviennent point. On doit donc le prendre en ce sens, que Dieu a la volonté de sauver tous les hommes, que dans les moyens préparés, personne n'est exclu d'une manière particulière, positive; qu'il ne fait pas naître des obstacles tout exprès pour rendre ces moyens impossibles; mais il pourra arriver que des lois naturelles, générales, antérieures, pouvons-nous dire, à l'établissement de ce moyen sanctificateur, en empêchent l'application. Je vous entends dire que Dieu devrait au moins les suspendre, les mo

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