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exercer des professions, arts ou commerces, ou pour des actes qui, par le droit naturel et commun, sont libres à tout le monde.

» Il n'y a donc nul doute que, si le droit d'Arage dont il est question, n'était véritablement que la reconnaissance du droit d'ouvrir la terre, la cour de Nancy n'ait pu et dû le déclarer aboli sans indemnité, même en supposant la coutume de Bassigny allodiale.

>>Et il serait, dans cette hypothèse, fort indifférent que ce droit eût été transporté, par le seigneur de Lifflot-le-Grand, à des tiers non seigneurs. Les tiers non seigneurs ne pourraient pas plus échapper que le seigneur luimême, à la loi qui en a prononcé l'abolition. » Car il n'en est pas, à cet égard, d'un droit de justice comme d'une rente foncière mélangée de féodalité.

>> Si une rente foncière, originairement mélangée de droits féodaux, a été aliénée sans ces droits avant les lois du 4 août 1789, par le seigneur à qui elle appartenait, elle a été, dès lors, purifiée de tout mélange de féodalité; elle est, dès lors, devenue purement foncière; et par conséquent elle subsiste au profit de celui en faveur duquel l'aliénation en a été faite.

» Mais un droit de justice a eu beau passer en mains tierces : il y est nécessairement resté ce qu'il était entre les mains du seigneur qui l'avait originairement usurpé; il y a nécessairement conservé son caractère primitif, et il est impossible qu'il y ait pris celui de droit représentatif d'une concession de fonds, dont sa nature repousse toute présomption et toute idée.

» Il ne s'agit donc plus que de savoir si la cour de Nancy a violé quelque loi, en assimilant le droit d'Arage de la commune de Lifflotle-Grand, au droit de charrue qui pesait, antérieurement au 4 août 1789, sur plusieurs communes de la ci-devant Lorraine; en disant que ce droit n'était payé au seigneur de Lifflot-le-Grand qu'en reconnaissance de la permission qu'il accordait à ses justiciables de labourer leurs propres terres.

» Or, il est évident que, par cette manière de juger, la cour de Nancy n'a prononcé que sur un point de fait, et qu'elle n'a ni contrevenu ni pu contrevenir à aucune loi.

» Nous estimons en conséquence que, soit que la coutume de Bassigny fût allodiale, soit qu'elle ne le fût pas, il y a lieu de rejeter la requête du préfet du département des Vosges ». Par arrêt du 22 août 1810, au rapport de M. Bailly,

«Attendu que rien ne justific que la cour d'appel de Nancy se soit trompée, ou ait

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» violé quelque texte, soit de la coutume de Bassigny, soit d'une loi quelconque, en ju» geant, par son arrêt du 28 décembre 1809, » que cette coutume, qui régissait Lifflot-le» Grand, n'était point allodiale, et que le » droit d'Arage transmis aux religieux de Mu>> reaux, leur ayant été transmis avec la di» recte, il était dans leurs mains, comme auparavant dans celles de Geoffroy et du comte » de Bar, un droit féodal;

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» Et attendu qu'en décidant que la rente de » 160 francs barrois, moyennant laquelle ce » droit d'Arage a été abandonné par les reli»gieux de Mureaux à la commune de Lifflot» le-Grand, était de la même nature féodale » que le droit dont elle formait l'équivalent, » l'arrêt attaqué n'a également contrevenu à >> aucune loi;

» D'où il suit que la disposition par laquelle » il a déclaré cette rente abolie, est conforme » aux lois suppressives de la féodalité;

» La cour rejette le pourvoi du préfet des » Vosges ». ]]

ARAISNER. Terme employé dans la coutume de Liége; il est synonyme de citer, poursuivre, attaquer.

L'art. 8 du chap. 1 de cette coutume porte que « le père peut être araisné civilement par la partie offensée, pour délit commis par son enfant non émancipé, même pour cas d'homicide, et est tenu d'en payer l'amende profitatable ». V. Puissance paternelle.

* ARAISONNER. Suivant le glossaire que la Thomassière a mis à la suite de Beaumanoir, Araisonner c'est proposer ses raisons. Tel est sans doute le sens primitif de ce mot; mais de Laurière dit qu'Araisonner c'est sommer, et quelquefois assigner. En lisant le titre du chap. 62 de Beaumanoir, en le comparant avec le texte de ce chapitre, et surtout avec la fin, on voit qu'Araisonner y signifioit faire au seigneur une espèce de sommation respectueuse pour en obtenir justice.

Le titre de ce chapitre porte: «<< Comment » on doit Araisonner son seigneur, avant que >> l'on ait bon appel contre la défaute de droit ». Le texte du chapitre n'emploie point le mot Araisonner; mais on y trouve que le vassal qui veut obtenir justice de son seigneur, doit le requérir de lui assigner un jour dans sa cour; et que, si le seigneur propose un trop long délai, le vassal peut en demander un plus court, en exposant que, par le grand délai, il pourrait étre endommagé. Ce même chapitre appelle cela sommer, et il finit dans les termes suivans : « Ichi finit le chapitre des apiaux qui » sont faits par faute de droit, et que enseigne » comment on doit sommer son seigneur, avant

» que l'on le puisse appeler de défaute de droit ». (M. GARRAN de Coulon.)*

* ARBITRAGE, ARBITRES. On nomme Arbitres ceux qui sont choisis par des parties pour décider une contestation, un différend.

I. En général, on peut choisir pour arbitre qui l'on veut, même le fils dans la cause de son père.

Il faut néanmoins excepter de cette disposition les furieux, les sourds et muets, les infâmes, les esclaves et les religieux.

Les femmes ne peuvent pas non plus être arbitres, cela leur ayant été interdit par l'empereur Justinien : mais le droit canon n'a pas voulu que cette disposition s'étendît aux femmes d'une dignité eminente. C'est pourquoi le pape Alexandre III confirma une sentence arbitrale qu'une reine de France avait rendue; il s'agissait même, dans ce cas, du temporel de l'église.

Jeanne de Bourbon, femme de Charles V, siégea à côté de lui, lorsqu'en 1369 il tint son lit de justice au palais, contre le prince de Galles.

Mathilde, comtesse d'Artois, créée pair de France, assista en personne au parlement en 1314; et y eut séance et voix délibérative comme les autres pairs de France, dans le procès criminel fait à Robert, comte de Flandre.

Jeanne, fille de Beaudoin, fit le serment de fidélité pour la pairie de France; et Marguerite sa sœur en ayant hérité, assista comme pair, au célèbre jugement des pairs de France, donné pour le comté de Clermont en Beauvoisis.

Au parlement tenu le 9 décembre 1378 pour le duc de Bretagne, la duchesse d'Orléans s'excusa par lettres de ce qu'elle ne s'y trou

vait pas.

Ces exemples, et d'autres semblables, ont déterminé plusieurs auteurs à établir pour principe, que les reines, les princesses, les duchesses et les autres dames d'un rang distingué pouvaient être choisies et prononcer légitimement comme arbitres.

Cependant un arrêt du 29 août 1602, cité par Brillon, rejeta une sentence arbitrale rendue par la maréchale de Lavardin, assistée d'une autre dame et d'un gentilhomme, quoi. que cette sentence fût juste et raisonnable, puisque la cour rendit un jugement semblable.

Un autre arrêt du 14 janvier 1603 déclara nulle une sentence arbitrale rendue par la marquise de Nesle et deux autres dames prises pour arbitres avec elle; mais ce fut sans donte parcequ'il s'agissait des droits du greffier de la justice de la marquise de Nesle, et qu'elle avait intérêt dans la cause.

[ Quant aux autres femmes, on ne doute pas plus parmi nous que chez les Romains, de leur incapacité d'être arbitres. Devolant, lettre A, chap. 9, rapporte un arrêt du parlement de Bretagne, du 6 septembre 1610, qui l'a ainsi jugé. ]

Mornac croit qu'un mineur de vingt-cinq ans ne peut être pris pour arbitre ; et il se fonde sur ce que les Arbitrages ont été établis à l'instar des jugemens qui se rendent par les juges ordinaires. Mais d'autres auteurs pensent, avec raison, que, si un mineur d'une capacité reconnue avait été choisi pour arbitre, et qu'il eût, en cette qualité, rendu une sentence, les juges d'appel ne la déclareraient pas nulle, à cause de la minorité de l'arbitre. En effet, on voit partout des avocats qui n'ont pas encore atteint l'âge de vingt-cinq ans, et qui ont acquis toutes les connaissances nécessaires pour terminer judicieusement un différend. Or, de tels arbitres sont préférables à la plupart de ceux qu'on pourrait choisir parmi les majeurs d'un autre état ou profession.

L'art. 17 de la coutume de Bretagne porte en termes exprès, que le juge des parties ne peut être arbitre de leurs différens. Le parlement de Rennes a rendu, le 20 mars 1576, un arrêt conforme à cette loi.

L'ordonnance du mois d'octobre 1535 a défendu aux présidens et aux conseillers du parlement de Provence, de se charger de l'Arbitrage des causes soumises à la décision de la cour ou des justices du ressort.

L'ordonnance d'Abbeville, du 23 février 1539, défend la même chose à tous les juges en général; mais ces lois n'ont jamais été reçues au parlement de Grenoble. La raison qu'en donne Gui-Pape, est que, quand le dauphin Humbert II établit le conseil delphinal, il permit aux officiers de ce tribunal d'être arbitres entre les parties; et que Louis XI ayant dans la suite converti ce conseil en parlement, il lui conserva tous ses droits et priviléges.

On trouve quelques réglemens du parlement de Toulouse, qui portent que les présidens, conseillers et gens du roi qui y servent, ne pourront accepter aucun Arbitrage sans permission de la cour.

Et le parlement de Dijon a jugé, par arrêt du 29 novembre 1571, qu'un conseiller de cette cour, qui était juge nécessaire, ne pouvait être arbitre, à moins qu'il ne fût parent ou récusé. Le parlement de Paris permet qu'un officier quelconque soit pris pour arbitre des proces dont il doit être juge: cette pratique est fondée sur un motif de bien public, que la faveur due aux accommodemens autorise.

Observez toutefois que, s'il s'agissait de com

promettre sur un procés déjà porté en justice, celui qui en serait rapporteur, ne pourrait pas être du nombre des arbitres.

[Remarquez aussi que, par l'art. 17 des lettres-patentes sur un arrêt du 13 décembre 1728, il est défendu aux officiers du conseil d'Artois, d'accepter et de juger les Arbitrages

en corps.

Cette défense suppose clairement que chaque officier en particulier peut être pris pour arbitre, et elle a eu pour but d'empêcher le conseil d'Artois, en acceptant des Arbitrages en corps, de priver les tribunaux inférieurs de la province, de la connaissance des causes qui ne peuvent pas être portées devant lui en première instance.]

[[ L'art. 5 du décret du 20 prairial an 13, concernant l'administration de la justice dans les états de Parme et de Plaisance, et l'art. 5 de celui du 15 messidor suivant sur l'ad

ministration de la justice dans les départe mens de Gênes, de Montenotte, des Apennins et de Marengo, porte que « ni les juges de » paix, ni aucun magistrat, ne pourront de>> mander ni recevoir aucun salaire ni présent, » sous prétexte du temps qu'ils auraient em» ployé ou du travail qu'ils auraient fait pour » parvenir à concilier les parties, ou lorsqu'ils » seront choisis pour leurs arbitres »; ce qui suppose clairement que les juges peuvent aujourd'hui accepter des Arbitrages. ]]

II. Le pouvoir des arbitres ne peut s'étendre que sur les choses énoncées au compromis; et tout ce qu'ils feraient au delà, demeurerait sans effet. C'est pourquoi, s'il survient un nouveau differend entre les parties, aucune n'est en droit d'exiger, malgré sa partie adverse, qu'il soit jugé par les arbitres à la décision desquels elles ont soumis de concert leur première contestation. Cela a été ainsi jugé par arrêt du 19 juin 1617. Mais, pour éviter l'inconvénient de plaider en même temps devant des arbitres et devant des juges ordinaires, on a coutume d'insérer dans un compromis la clause générale que les arbitres pourront juger, non-seulement les contestations qui ont rapport au compromis, mais encore celles qui pourront survenir entre les parties pendant le cours de l'Arbitrage.

III. Si le compromis fixait un certain temps pour l'instruction du procès soumis à la décision des arbitres, ils ne pourraient rendre leur sentence avant l'expiration du délai.

IV. Les fonctions des arbitres sont les mêmes que celles qu'exercent les juges lorsque les parties plaident en justice. Ils peuvent, lorsqu'il est nécessaire, rendre des sentences interlocutoires, ordonner la preuve d'un fait

contesté, entendre les témoins produits par les parties, et même recevoir leur serment. Mais ils ne peuvent forcer les témoins à venir déposer, parcequ'ils n'ont aucune puissance publique; ni même les faire assigner à comparaître devant eux, parcequ'ils n'ont aucun droit de juridiction sur ces témoins. C'est ce qui a été jugé par arrêt duparlement de Dijon du 28 mars 1714. Ainsi, lorsqu'un témoin refuse de comparaître devant des arbitres, on doit recourir à l'autorité des juges ordinaires, pour le contraindre à déposer. L'art. 10 du tit. 26 de l'ordonnance civile du duc Léopold, du mois de novembre 1707, rendue pour la Lorraine, porte que, si les arbitres ont quelque enquête à faire, ils prendront un pareatis des juges pour l'exécution de leurs ordonnances.

Cependant les arbitres peuvent citer devant eux une partie qui a compromis, pour être interrogée sur faits et articles pertinens, etc.

Les arbitres peuvent juger les incidens qui se présentent dans le cours de l'instance soumise à leur décision, et qui ont rapport à la cause. Mais si l'une des parties prétend s'inscrire en faux contre une pièce produite, et que l'autre partie declare vouloir s'en servir, il faut les arbitres ordonnent que ties se pourvoiront, pour l'incident de faux, que les par. devant le juge qui en doit connaître; et la pièce doit être déposée au greffe de ce juge, après avoir été paraphée par les arbitres.

On surseoit alors au jugement de l'instance civile, et le délai du compromis ne doit courir qu'après l'instruction et le jugement du faux. [[ Code de procédure civile, art. 1015.]]

[Les arbitres peuvent-ils accorder permission d'obtenir et publier monitoire ?

Cette question s'est présentée au parlement de Dijon, en 1694. Deux plaideurs ayant passé un compromis, l'un d'eux donna requête aux arbitres, pour avoir la permission d'obtenir un monitoire. Les arbitres le permettent, et ils informent. Appel comme d'abus de l'obtention. L'intimé la reconnaissait abusive, et il offrait l'amende et les dépens; mais il soutenait que les preuves de l'information devaient subsister, suivant la jurisprudence reçue en cette matière. L'appelant répondait que cette jurisprudence était bonne quand la procédure avait été faite par un juge qui avait un caractère legal pour la faire; mais que les arbitres n'avaient pouvoir ni d'informer ni d'accorder monitoire. Par arrêt du 9 août 1694, la cour cassa toute la procédure, et fit défenses, tant aux arbitres de donner permission d'obtenir monitoire, qu'aux officiaux

ou grands vicaires d'en accorder sur cette permission.

Le motif de cet arrêt, dit Raviot sur Perrier, quest. 328, est « que les monitoires ne » doivent être publiés que pour des causes » graves, et le plus souvent en matière cri» minelle, dont les arbitres ne connaissent » pas. La punition des crimes est de droit » public; il faut donc être revêtu d'une au»torité publique, et qui vienne à jure, et » non de la convention des parties, pour » exercer cette juridiction ». ]

[[L'usage des monitoires est aboli dans toute la France. ]]

Les arbitres peuvent ordonner que des héritages ou lieux contentieux seront visités par des experts choisis par les parties ou nommés d'office. Mais s'il s'agit d'assigner ces experts à comparaître devant les arbitres, ou pour leur faire déposer leur rapport, il faut avoir recours à l'autorité du juge ordinaire, comme nous avons dit que cela devait se pratiquer à l'égard des témoins.

Les arbitres peuvent de même se transporter sur les lieux contentieux, et les examiner par eux-mêmes; mais s'il était néces saire d'ordonner une descente et vue des lieux, il faudrait prendre un parcatis du juge ordinaire pour l'exécution de leurs ordonnances. [[ Pour cela, comme pour les citations de témoins et d'experts devant les arbitres, V. le Code de procédure civile, art. 1009 et 1021. V. Les arbitres qui ont reçu des parties le pouvoir de terminer par un seul et même jugement, toutes les contestations énoncées au compromis, peuvent-ils, en jugeant définitivement quelques-uns des points litigieux, interloquer les autres ? Voici une espèce dans laquelle cette question a été agitée.

En 1730, décès de Bernard Daudebard-Ferrussac, père de 12 enfans, laissant pour héritier testamentaire Joseph Daudebard, son fils aîné.

Procès entre celui-ci et les autres enfans, pour le règlement de leurs légitimes.

Pendant que ce procés s'instruit, plusieurs enfans puinés, et notamment François Daudebard-Perville, viennent à mourir.

Le 3 mai 1762, Anne Daudebard, épouse du sieur Fialdés, obtient à la sénéchaussée de Guyenne, une sentence qui ordonne, 1o qu'il sera procédé par experts à la fixation de leur legitime en argent; 2o qu'avant de statuer sur la succession de François DaudebardPerville, son testament sera rapporté. Joseph Daudebard appelle de cette sentence; mais, par arrêt du parlement de Bordeaux, du 30 novembre 1763, elle est confirmée.

Des transactions suivent cet arrêt, et sont

elles-mêmes suivies de nouvelles contestations. Le 16 floréal an 3, Jeanne-Philippine-Eliette Daudebard - Ferrussac, fille et héritière de Joseph Daudebard, offre au sieur Fialdės, héritier d'Anne Daudebard et de plusieurs autres enfans de Bernard Daudebard-Ferrussac, une somme de 20,000 liv. en assignats pour le montant de tout ce qu'elle peut lui redevoir, avec offre d'y suppléer en cas d'insuffisance.

Sur le refus du sieur Fialdés d'accepter ces offres, elle le fait citer devant le tribunal du district de Valence, pour voir dire qu'elle sera autorisée à consigner la somme offerte.

Le sieur Fialdes comparaît et élève des prétentions qui tendent à faire rejeter les offres comme insuffisantes.

Le 26 du même mois, jugement qui permet de consigner; et sur le surplus, nomme un rapporteur.

La consignation s'effectue; et le 13 thermidor de la même année, jugement par défaut qui la déclare valable et libératoire.

Le sieur Fialdes forme opposition à ce jugement; il en est débouté par un autre du 8 vendemaire an 4.

Le sicur Fialdes appelle de ces deux jugemens, et l'affaire est portée au tribunal civil du département de la Gironde.

Le 22 germinal an 4, le sieur Sevin, gendre de la dame Daudebard-Ferrussac et fondé de sa procuration pour la poursuite de l'instance d'appel, et le sieur Fialdės, passent un compromis ainsi conçu : « Entre le cit. Jean » Fialdés, d'une part; et de l'autre, le cit. Pierre» Thérèse-François-Xavier Sevin, au nom et >> comme procureur fondé de la procuration de » la cit. Jeanne-Philippine-Eliette Daudebard, » épouse divorcée de Dallos, en date du 26 fri» maire an 4, devant Delos, notaire public à » Saint-Maurin, dûment enregistrée à Beau» ville, a été dit que, pour terminer la contes»tation actuellement pendante entre eux au » tribunal civil du département de la Gironde, » sur l'appel interjeté par le cit. Fialdės, des » jugemens rendus au tribunal du district de » Valence, circonstances et dépendances des » appels, ils sont convenus de soumettre tou »tes les questions jugées par les susdits jugc» mens, ensemble toutes les demandes relati»ves à ladite contestation qu'ils pourraient » respectivement former, à la décision d'arbi» tres, arbitrateurs et amiables compositeurs; >> en conséquence, ils ont nommé pour leurs» dits arbitres, les cit. Brochon père, Linars » et Jaubert, qui ont déjà été consultes par » eux dans ladite contestation: auxquels dits » arbitres, arbitrateurs et amiables composi

»teurs, ils donnent pouvoir de régler toutes » leursdites contestations, même de procéder » au règlementde tous les droits généralement » quelconques, en capitaux et intérêts, resti»tution de fruits et intérêts réclamés par le cit. » Fialdés, faire des lots, s'il y a lieu; et géné >> ralement donnent pouvoir auxdits arbitres » de statuer sur tous leurs droits par un seul >> et même jugement, à la vue des pièces que les » parties s'engagent à leur remettre par tout » le jour, et sur les renseignemens qu'elles >> leur fourniront verbalement, auxquels ils >> promettent d'acquiescer; avec renonciation >> expresse à la faculté de l'appel, même du re» cours au tribunal de cassation ».

Ce compromis présenté aux arbitres, ceuxci refusent de l'accepter, s'il n'est ratifié par la dame Daudebard-Ferrussac.

Le 1er floréal an 4, la dame DaudebardFerrussac, confirmant les pouvoirs qu'elle a précédemment donnés au sieur Sevin, déclare «l'autoriser et lui donner pouvoir de sou>> mettre à des arbitres la contestation pen>> dante par-devant le tribunal civil du dépar >>tement de la Gironde, entre elle et le cit. » Fialdės; approuvant d'hors et déjà le com» promis souscrit par ledit cit. Sevin, le 22 » germinal dernier, et la nomination faite >> par ledit compromis, des cit. Brochon père, » Jaubert et Linars, pour arbitres nommés » par ledit compromis entre ledit cit. Sevin, » agissant pour moi, et ledit cit. Fialdės; con»sentant que lesdits arbitres jugent ladite >> contestation; promettant d'acquiescer à leur > jugement, avec renonciation à la faculté de > l'appel, même au recours en cassation ».

A la vue de cette ratification, les arbitres acceptent le compromis; et le 8 du même mois, ils rendent un jugement par lequel, entr'autres dispositions, ils ordonnent, 1o que le sieur Fialdes sera payé en corps héréditaires, conformément à la loi du 3 brumaire an 4, de tout ce qui lui est dû pour les droits lé gitimaires des enfans de François DaudebardFerrussac qu'il represente; 2o qu'il sera procédé au délaissement des fonds par des experts convenus ou nommés d'office; 3o que des experts convenus ou nommés d'office, liquideront les intérêts dus au sieur Fialdės, et estimeront les frais de culture dont il doit faire raison sur les fruits de la récolte pendante; 4o que, dans la quinzaine, la dame Daudebard Ferrussac rapportera le testament de François Daudebard-Perville, tous les droits des parties demeurant réservés, soit en cas de non représentation, soil en cas de nullité dudit testament. Ce jugement est homologué le 19 du même mois.

Le 12 brumaire an 12, après diverses procedures qu'il est inutile de rappeler, la dame Daudebard-Ferrussac forme, devant le tribunal de première instance d'Agen, une demande en nullité de ce jugement; et elle la fonde, 1o sur ce que les arbitres ont excéde leurs pouvoirs, en jugeant des points que le compromis ne leur avait pas déférés; 20 sur ce qu'au lieu de trancher, comme ils le devaient, par un seul et même jugement, toutes les contestations énoncées au compromis, ils n'ont rendu, à l'égard de trois chefs, que des décisions préparatoires.

Le 20 messidor suivant, jugement qui la deboute. Appel.

Par arrêt de la cour d'appel d'Agen, du 16 messidor an 13, ce jugement est confirmé. La dame Daudebard-Ferrussac se pourvoit en cassation.

» Les moyens qui vous sont proposés à l'appui du recours de la demanderesse (ai-je dit à l'audience de la section des requêtes), se ré duisent à dire que la cour d'appel d'Agen, par le refus qu'elle a fait d'annuller la sentence arbitrale du 8 floréal an 4, a violé de deux maniéres le compromis du 1er du même mois; qu'elle l'a violé, en jugeant que les arbitres avaient pu connaître de la demande du sieur Fialdés, tendante à ce que ses droits de légitime lui fussent payés en corps héréditaires; qu'elle l'a violé, en jugeant que les arbitres avaient pu, sur certains chefs, ne prononcer qu'interlocutoirement et même ordonner des expertises.

» Ainsi, trois questions à examiner : Y a-t-il excès de pouvoir dans la sentence arbitrale, en ce qu'elle statue sur la demande du sicur Fialdés à fin de payement en corps héréditaires? Y a-t-il, dans la même sentence, excés de pouvoir, en ce que, sur quelques points à régler entre des parties, elle renvoie à des experts ? Y a-t-il, dans la même sentence, déni de justice, en ce qu'elle ne statue pas définitivement sur toutes les contestations mises en Arbitrage?

» Sur la première question, il s'élève contre la demanderesse une foule de raisons toutes plus décisives les unes que les autres....

» La seconde question n'est pas plus difficile à résoudre que la première. Sans contredit, les arbitres ne pouvaient pas déléguer leurs pouvoirs; ils ne pouvaient pas renvoyer les parties devant d'autres arbitres :Nam et Julianus impunè non pareri, si jubeat ad alium ar bitrum ire, ne finis non sit, dit la loi 31, §. 16, D. de receptis qui arbitrium. Mais ordonner une expertise, ce n'est pas déléguer aux experts les pouvoirs que l'on tient des parties. Les experts ne sont ni juges ni arbitres, ils ne

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