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sociales, et les exigences du droit, paraissent lui assigner.

3o Cette compétence spéciale doit s'apprécier par une étude attentive de chacun des trois principaux éléments de la vie sociale, les personnes, les biens et les faits juridiques.

4o Ces éléments se rattachent et se trouvent soumis à chaque souveraineté, par deux genres de liens ceux de la patrie et ceux du territoire.

5o Notre doctrine est chargée de pourvoir au développement harmonique de ces bases diverses.

Nous dirons, pour nous résumer, que le droit international privé peut être considéré comme étant la loi des lois. Il les domine dans leur ensemble, étend ou resserre le champ d'activité qu'il assigne à chacune d'elles, pour les contraindre à combiner leur action dans le but de tendre, en commun, à la réalisation du droit. Il s'appuie sur un vif sentiment des exigences sociales combinées avec les droits de la conscience. Ce dernier élément se manifeste dans l'une des branches de l'ordre public restrictif aucun Etat ne peut être tenu de favoriser, sur son territoire, l'extension de lois étrangères qu'il réprouve.

SECTION II.

NOTICE HISTORIQUE.

13. Nécessité d'une telle notice. 14. Division du sujet.

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13. Le plan que nous avons adopté nous impose, plus que tout autre, l'obligation de débuter par quelques données historiques. C'est le seul moyen de constater les rapports qui ont existé entre le présent et le passé de notre doctrine. Il faut rechercher quels ont été les antécédents du droit actuel et quelles traces ils y ont laissées; cela nous en fera mieux connaître le véritable

sens.

14. Nous traiterons, successivement et dans autant de chapitres distincts, du droit romain, de l'invasion et du régime des lois personnelles, de la féodalité et de la vieille doctrine des statuts, des établissements extracontinentaux de la France.

CHAPITRE PREMIER.

Droit romain.

15. L'antiquité, sauf le droit romain, présente peu d'importance pour notre doctrine. 16. Division des habitants libres en trois classes.-17. Droit civil et droit des gens.- 18. Domicile et bourgeoisie 19. Influence indirecte.

15.

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L'organisation sociale et les idées qui prévalaient dans l'antiquité, différaient beaucoup de celles dont le développement semble devoir servir de base au droit international privé des temps modernes.

Nous ne devons y chercher ni des modèles à suivre avec confiance, ni des antécédents bien directs à constater. Il serait, toutefois, impossible de ne pas se préoccuper du droit romain dont l'influence se manifeste, avec tant d'évidence, dans le monde moderne. Cette influence fut telle qu'on doit s'attendre à en retrouver les traces dans notre doctrine. Bien que celle-ci soit née dans un milieu fort différent, elle ne pouvait se soustraire à la puissante action des idées et des principes qui présidèrent à son premier développement. Ces idées, qui marquèrent profondément le droit interne de leur empreinte, devaient se retrouver, plus ou moins apparentes, dans le droit international privé. La compétence internationale reçoit nécessairement l'influence des conceptions que l'on se forme quant au fond du droit.

Les Romains ne purent pas échapper complètement aux exigences du droit international tant privé que public; mais ils devaient résoudre ces problèmes à leur manière, et sous l'influence de la position spéciale que l'histoire leur avait faite.

Quant au droit international public, les rapports extérieurs des peuples considérés comme souverains, s'exerçaient par l'intermédiaire d'une magistrature sacerdotale, celle des féciaux, dont l'influence effective prête plus ou moins au doute. Une chose paraît certaine : ces fonctionnaires étaient spécialement chargés de veiller au strict accomplissement des formalités et des cérémonies, dont l'observation était jugée nécessaire pour se rendre les Dieux propices et procéder avec loyauté; mais on peut hésiter sur leur influence quant aux décisions à prendre1.

Quant au droit civil, il était naturel qu'on prît quelques mesures pour faciliter et pour hâter la solution des difficultés que les événements de la guerre et de la conquête provoquaient entre ressortissants de nations différentes. Mais on ne possède, à cet égard, que des données insuffisantes, sur l'importance et l'authenticité desquelles les savants diffèrent. Ce sont là des curiosités historiques se rapportant à des faits d'une bien faible importance sur le développement de notre doctrine2.

1 Voir Puchta, Institutionen, t. I, § 83; Rudorff, Ræmische Rechtsgeschichte, t. I, p. 3 et 102; Laurent, Droit civil international, t. I, p. 135; Marquardt, Ramische Staatsverwaltung, t. III, p. 398.

2 Voir Rudorff, R. R. G., t. I, p. 219; Puchta, Institut., t. I,

On trouve même des cas où il semble s'agir de conflits ou combinaisons intervenant entre droits locaux; mais tout cela provoque le doute et la controverse: il serait difficile d'en faire ressortir un système présentant quelque ressemblance avec notre doctrine actuelle 1.

16. Il faut en dire autant de la division des habitants libres en citoyens, latins et étrangers. Cette division se rapportait plus à des capacités individuelles qu'à des catégories dont les membres auraient été soumis à un système de droit bien lié et bien déterminé.

17. La distinction faite entre le droit civil et le droit des gens, jus civile et jus gentium, provoque des observations plus ou moins analogues : ce n'étaient pas là deux systèmes bien délimités : le droit des gens, en tant que droit naturel par son origine, bien que consacré par un édit spécial, faisait de nombreuses invasions dans le droit civil; on peut même dire que cette influence progressive du droit rationnel sur la tradition, est un des aspects les plus intéressants que présente l'histoire du droit romain. Nous nous sommes efforcé d'en retracer

l'un des épisodes les plus remarquables dans notre Étude sur la légitime et les réserves.

Ce droit rationnel eut son origine et sa cause dans la

p. 308, citant l'un et l'autre Polybe III, 22 et 24, mentionnant un traité conclu entre Rome et Carthage, traité dont l'authenticité est contestée spécialement par Schwegler, Ramische Geschichte, t. II, p. 97.

1 Gaius, liv. I, § 92, liv. 3, § 120; Ulpien, Fragments, tit. 20; Savigny, Système, t. VIII, § 356, t. II, § 66.

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