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ne sauraient suffire. On ne peut s'empêcher de se demander si, sur ce sujet spécial, la loi du domicile ne devrait pas être prise comme base de compétence plutôt que celle de la patrie, ou s'il ne faudrait pas, tout au moins, s'efforcer d'obtenir que le conseil de famille pût se réunir au lieu du domicile de ses principaux membres. Mais c'est un sujet qui est étranger à cette partie de notre travail : il appartient à la théorie purement spéculative, et c'est de droit positif qu'il s'agit dans ce moment.

110. Les divers sujets dont nous venons de nous occuper appartiennent, bien certainement, au statut personnel; mais ils peuvent, dans leurs développements, se trouver en contact avec des règles d'une autre nature; il est, en conséquence, nécessaire de rechercher comment il faut faire la part de chacun de ces éléments qui peuvent se rencontrer.

Ces complications naissent, en particulier, quand il s'agit de procéder, sur le territoire, à un acte concernant un mineur étranger. Tout ce qui tient à la capacité du mineur et à sa représentation, doit se faire en conformité de sa loi de statut personnel. La loi locale doit être suivie pour ce qui appartient à la procédure ou au statut réel. C'est ainsi, par exemple, que s'il s'agit d'un partage, les articles 815 et 883 du Code civil seront applicables à l'étranger comme au national, quant aux immeubles situés en France. Tout ce qui est procédure doit se faire en conformité de la loi territoriale.

CHAPITRE VI.

De l'interdiction, de la nomination d'un conseil judiciaire et des maisons d'aliénés.

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111. Interdiction civile ou pénale. 112. Conseil judiciaire. 113. Placement dans une maison d'aliénés.

111. L'interdiction se présente sous deux aspects différents, selon qu'elle appartient au droit civil ou au droit pénal. Le premier de ces aspects doit seul nous occuper ici, le second doit rentrer dans une autre partie de cette étude.

L'interdiction civile a pour but de replacer dans un état d'incapacité, semblable à celui dont les mineurs sont atteints, les majeurs qui, par suite de l'état anormal de leur développement intellectuel ou moral, ne peuvent être revêtus du libre exercice de leurs droits. Ils sont ainsi mis en tutelle et placés dans un état analogue à celui des mineurs (Code civil, article 509).

Ce sujet rentre, par conséquent, en grande partie, dans celui que nous venons d'étudier. Il appartient, bien certainement, au statut personnel, et les difficultés spéciales qu'il provoque se rapportent principalement à la compétence judiciaire qui appartient à une autre partie de cette étude.

112. La nomination d'un conseil judiciaire est, en quelque sorte, une interdiction d'un degré inférieur; elle

suppose un moins grave désordre des facultés intellectuelles ou morales, et portent une atteinte plus restreinte à la capacité. Elle n'en rentre pas moins dans le statut personnel, et n'en présente pas moins des questions analogues quant à la compétence législative ou judiciaire. Celle-ci vient de soulever, en France, une question sur laquelle nous devons nous arrêter un instant.

L'article 10 du traité franco-suisse du 15 juin 1869 s'énonce de la manière suivante: « La tutelle des mineurs et interdits suisses résidant en France, sera régie par la législation de leur canton d'origine, et, réciproquement, la tutelle des mineurs et interdits français résidant en Suisse, sera réglée par la loi française; en conséquence, les contestations auxquelles l'établissement de la tutelle et l'administration de leur fortune pourront donner lieu, seront portées devant l'autorité compétente de leur pays d'origine, sans préjudice toutefois des lois qui régissent les immeubles et des mesures conservatoires que les juges du lieu de la résidence pourront ordonner.» Dans un arrêt tout récent, la Cour de Nîmes a jugé que le texte doit s'étendre à la nomination d'un conseil judiciaire et que les tribunaux français doivent se déclarer incompétents, même d'office, en cette matière1.

C'est dans un sens analogue que nous nous sommes exprimé sur cette question, dans le commentaire que

1 Arrêt Im-Thurm, du 28 février 1881; Dalloz, 1882, II, p. 106.

nous avons publié en 1879 sur ce traité. Voici quelques observations que nous y avons énoncées :

« Le mot tutelle peut se prendre dans un sens large et général, ou dans un sens étroit et spécial. Il comprend, dans le premier cas, toute institution qui a pour but de suppléer à une incapacité personnelle. En droit français, par exemple, il faudrait l'entendre, non seulement de la tutelle proprement dite, telle qu'elle est définie dans le Code civil, articles 390 et suivants, mais encore de l'administration légale, article 389, de la curatelle de l'émancipé, du conseil judiciaire s'occupant du prodigue ou de l'individu frappé d'une demi-interdiction, etc. Il semble qu'on doive s'arrêter au sens large, soit parce que notre traité concerne non seulement la France, mais encore tout un ensemble de cantons, régis par des règles fort différentes, de telle sorte qu'on ne peut s'arrêter à la définition spéciale donnée par l'une ou par l'autre de ces législations, soit parce que notre article n'est, ainsi que nous l'avons dit, qu'une dépendance d'un sujet plus vaste, l'état civil, sur lequel les hautes parties contractantes professaient les mêmes principes au moment de la convention, ce qui milite en faveur d'une large interprétation. >>

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Nous ajoutions que les termes de l'article peuvent, cependant, laisser subsister quelque doute, en parlant spécialement de la tutelle des mineurs et des interdits. Le mot interdit doit s'entendre, disions-nous, de tout individu privé, par une sentence de l'autorité compétente, de tout ou partie de sa capacité personnelle ; mais que faut

il penser des femmes mariées ou non, des individus soumis à un administrateur de leurs biens, parce qu'ils sont renfermés dans une maison d'aliénés ?

113. Le placement d'une personne dans une maison d'aliénés, est un sujet tout spécial qui soulève des difficultés de divers genres. Ces difficultés semblent ne pouvoir être résolues convenablement qu'au moyen de traités diplomatiques. Voici, cependant, quelques observations provoquées par le droit interne français.

Pris en lui-même, ce fait semble rentrer dans les mesures de police et de sûreté mentionnées en tête de l'article 3 du Code civil. Mais, une telle séquestration doit conduire à d'autres mesures, dont les effets peuvent être contestés quant à leur influence sur la capacité personnelle: de telles personnes doivent être doivent être pourvues d'administrateurs ou de représentants chargés d'agir pour elles. Les circonstances qui les ont fait renfermer, sont un indice d'incapacité dont les effets semblent devoir provoquer la sollicitude. Des doutes peuvent s'élever sur la compétence des tribunaux, aussi bien que sur celle de la loi. La solution de ces doutes dépendra, fort souvent, de la nature et de l'importance des actes dont ces administrateurs ou représentants sont chargés, de la plus ou moins grande facilité que l'on peut avoir de s'adresser directement aux autorités sous la dépendance desquelles l'aliéné paraît se trouver placé plus naturelle

ment.

Les autorités locales semblent être provisoirement compétentes pour les actes qui tiennent à la procédure,

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