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avaient pris part aux conférences du Caire ', et de quatre conseillers indigènes. Les tribunaux de première instance présentent aussi une majorité d'étrangers. Le parquet se compose d'un procureur général, d'un avocat général et d'un certain nombre de substituts. Les magistrats étrangers sont nommés par le Khédive sur l'avis et avec l'acquiescement et l'autorisation de leur gouvernement. Ils ont été choisis parmi les magistrats ou les jurisconsultes des puissances qui ont adhéré au traité. Nous ne pouvons qu'indiquer très sommairement les principales règles de compétence.

Ces tribunaux connaissent seuls de toutes les contestations civiles ou commerciales, entre indigènes et étrangers, et entre étrangers de nationalités différentes, en dehors du statut personnel. Ils connaissent aussi de toutes les actions réelles immobilières, entre toutes personnes, même appartenant à la même nationalité étrangère. Ils ont également une juridiction pénale.

La loi dont ils doivent faire l'application, se trouve dans les codes qui ont été présentés par l'Egypte aux puissances intervenues dans le traité. Ces codes sont au nombre de cinq, ayant pour objet le droit civil, le droit commercial, le commerce maritime, le droit pénal et l'instruction criminelle. Ils ont beaucoup emprunté au droit français. Les questions relatives à l'état et à la ca

1 L'Allemagne, la France, l'Autriche, la Russie, l'Angleterre, l'Italie et les Etats-Unis. Plusieurs membres supplémentaires y ont été adjoints plus tard.

pacité des personnes, au mariage, à la succession, aux tutelles ou curatelles, étant restées de la compétence du juge du statut personnel, n'ont pas été réglées par le Code civil. En cas de silence, d'insuffisance ou d'obscurité de la loi, les juges doivent se conformer aux principes de la loi naturelle et de l'équité.

Une disposition finale porte que, pendant cinq années, aucun changement ne devra avoir lieu dans le système adopté.

Après cette période, si l'expérience n'a pas confirmé l'utilité pratique de la réforme judiciaire, il sera loisible aux puissances, soit de revenir à l'ancien ordre de choses, soit d'aviser, d'accord avec le gouvernement égyptien, à d'autres combinaisons.

Nous ne croyons pas nous tromper en disant que cette nouvelle organisation doit être considérée comme un fait d'une très grande importance. Elle ne résout pas seulement un des plus graves problèmes se rapportant à l'action des tribunaux, elle devra nécessairement produire l'unification de certaines parties du droit au sujet desquelles on sera naturellement conduit à s'entendre. Nous ne pouvons que faire des voeux pour qu'elle persiste et s'étende, dans les pays dont la position spéciale paraît réclamer une organisation analogue.

Nous tenons à dire que, malgré tout l'intérêt qu'une pareille expérimentation nous inspire, nous ne voudrions pas qu'on crût qu'un tel état de choses nous semble normal: il ne peut convenir que dans les pays où une grande partie de la population active se compose d'étrangers

dont les principes religieux ou sociaux different beaucoup de ceux qui prédominent sur le territoire. Nous ajouterons même qu'un tel mode de procéder n'est pas sans danger pour l'Etat sur le territoire duquel il se réalise. Un peuple qui, pour retenir les étrangers sur son territoire, est appelé à légiférer pour eux autant que pour lui-même, peut facilement perdre le sentiment de son indépendance et de son unité. Il semble, en conséquence, convenable de ne pas s'engager trop avant dans ce travail d'unification.

SECTION III.

CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES SUR LE CODE CIVIL ET SUR LES BASES QU'IL A POSÉES EN MATIÈRE DE DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ.

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41. Code civil et phases par lesquelles a passé la rédaction de l'art. 3. 42. Limites et rapports respectifs du statut réel et du statut personnel. 43. Base juridique du statut person

nel. 44. Ordre public international, suivant le Code. 45. Conclusions sur l'article 3. 46. Lacunes principales des textes. Enonciations générales à ce sujet. -47. Compétence des lois étrangères et principe de réciprocité. 48. Compétence en matière de meubles. Dans quel sens l'ancienne tradition s'est conservée. 49. Des faits juridiques, des formalités extérieures, des preuves et de la vieille règle Locus regit actum. 50. Nombre et modalité des statuts admis par le Code civil. 51. Sanction donnée à la compétence internationale. Pourvoi en cassation.

41. Nous n'avons pas à nous arrêter sur l'époque généralement qualifiée de révolutionnaire ou d'intermédiaire. Cette époque n'a exercé qu'une influence indirecte sur notre doctrine, qui a dû nécessairement recevoir l'empreinte des modifications qui s'opérèrent dans le fond du droit et spécialement dans le travail d'unification qui s'y manifesta dès le principe.

Par suite de cette unification, l'on n'eut plus à se préoccuper que des rapports extérieurs; cela conduisit à prendre la nationalité comme principe prépondérant en

ce qui a trait à l'état et à la capacité personnelle des Français. L'ancienne doctrine resta généralement à la base des dispositions nouvelles1. Ce fait ne diminue, toutefois, en rien l'importance des formules consacrées par le Code, tout spécialement en l'article 3, qui est ainsi conçu:

« Les lois de police et de sûreté obligent tous ceux qui habitent le territoire.

« Les immeubles, même ceux possédés par des étrangers, sont régis par la loi française.

« Les lois concernant l'état et la capacité des personnes régissent les Français, même résidant en pays étranger. »

La rédaction de cet article est due, tout entière, à un amendement proposé par le Tribunat et accepté par le Conseil d'Etat, dans sa séance du 29 vendémiaire an XI (21 octobre 1802), par suite d'une conférence officieuse, tenue suivant les formes, dont nous allons parler.

On sait quelles luttes s'élevèrent au sujet du Code civil. Le Tribunat ayant fait prononcer, par le Corps législatif, le rejet du titre préliminaire présenté par le gouvernement, celui-ci crut devoir suspendre l'élaboration du projet. Ce travail fut repris plus tard, après un changement opéré dans l'organisation interne et dans la composition du Tribunat. Ce changement fut complété par l'établissement de conférences officieuses entre délé

1 Voir sur ce sujet les autorités citées dans le nouveau Code Sirey, publié par M. Fuzier-Hermann, sous l'article 3 du Code civil, no 2, et Aubry et Rau, Cours de droit civil, § 31.

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