Page images
PDF
EPUB

mis à succéder aux biens que son parent, étranger ou Français, possède dans le territoire de l'Empire, que dans les cas et de la manière dont un Français succède à son parent possédant des biens dans le pays de cet étranger, conformément aux dispositions de l'article 14, au titre de la Jouissance et de la Privation des droits civils. 727. Sont indignes de succéder, et, comme tels, exclus des successions: 1° celui qui sera condamné pour avoir donné ou tenté de donner la mort au défunt; 2o celui qui a porté contre le défunt une accusation capitale jugée calomnieuse; 3° l'héritier majeur qui, instruit du meurtre du défunt, ne l'aura pas dénoncé à la justice. 728. Le défaut de dénonciation ne peut être opposé aux ascendants et descendants du meurtrier, ni à ses alliés au même degré, ni à son époux ou à son épouse, ni à ses frères ou sœurs, ni à ses oncles et tantes, ni à ses neveux et nièces.

729. L'héritier exclu de la succession pour cause d'indignité est tenu de rendre tous les fruits et les revenus dont il a eu la jouissance depuis l'ouverture de la succession.

730. Les enfants de l'indigne, venant à la succession de leur chef, et sans le secours de la représentation, ne sont pas exclus pour la faute de leur père; mais celui-ci ne peut, en aucun cas, réclamer, sur les biens de cette succession, l'usufruit que la loi accorde aux pères et mères sur les biens de leurs enfants.

De la CAPACITÉ requise pour succéder. En principe, est capable de succéder tout héritier présomptif qui a survécu au défunt. Cette règle reçoit cependant plusieurs exceptions. Ainsi l'art. 725 déclare incapables:

1° Celui qui n'est pas encore conçu. Pourquoi cette disposition? Car l'enfant qui n'est pas conçu n'a pas existé, et quiconque n'a pas existé ne peut avoir survécu au défunt.— La disposition du Code a pour but d'exclure, dans les successions ab intestat, la possibilité de succéder avant d'être conçu, que l'on admettait autrefois dans les substitutions. Ainsi nous verrons que le petit-fils, par exemple, pouvait, quoique conçu postérieurement à la mort de son aïeul, recevoir les biens par lui grevés de substitution à son profit, de la même manière que s'il avait existé à l'époque de l'ouverture de la succession de cet aïeul. Certaines substitutions sont encore permises aujourd'hui, et, comme dans l'ancien droit

français, les biens qui en sont frappés passent ou peuvent passer à des personnes non conçues au moment où décède le disposant. Mais ces transmissions de biens sont exceptionnelles, et, en général, il est vrai de dire que pour succéder, il faut être conçu lors de l'ouverture de la succession.

Comment ce fait pourra-t-il être constaté? On ne peut ici recourir aux présomptions établies par les articles 312 et 315 pour la durée de la grossesse ; car ces présomptions ont pour but unique de déterminer la qualité des enfants, et aucun texte n'en autorise l'application, quand il faut savoir non plus si l'enfant est ou non légitime, mais s'il est ou non héritier. L'enfant devra donc produire des preuves directes pour établir qu'il était conçu lors de l'ouverture de la succession à laquelle il prétend 1.

Il est cependant des cas où les présomptions établies par les art. 312 et 315 pourront être invoquées par l'enfant qui veut succéder; c'est lorsque la question de légitimité sera liée à la question de succession. Or, cette hypothèse se présentera toutes les fois que le mari de la mère étant mort, l'enfant naîtra dans les trois cents jours du décès. Cet enfant est, aux termes de l'art. 315, légitime, et les héritiers du mari ne peuvent prouver qu'il est adultérin. Il sera donc nécessairement héritier en vertu de la présomption qui protége sa lé– gitimité.

[ocr errors]

2o Est encore incapable de succéder l'enfant qui n'est pas né viable. Pourquoi? Parce que son existence a été tellement éphémère ou douteuse, que l'on ne peut en induire sérieusement sa survivance au défunt. D'ailleurs, il était raisonnable d'épargner aux héritiers définitifs les frais et les droits de mutation résultant d'une double transmission de la succession.

Ceux qui prétendent que l'enfant a recueilli la succession

doivent

prouver qu'il était conçu au moment de son ouver

1 Bugnet sur Pothier, t. I, p. 484. p. 241.

Massé et Vergé, t. I, § 354, note 2,

ture, et qu'il est né vivant. Mais cette double preuve une fois fournie, c'est aux tiers qui contesteraient la viabilité de l'enfant à l'établir; car, en général, les enfants qui naissent vi vants naissent viables.

Toute preuve est admissible pour constater, soit la viabilité, soit la non-viabilité de l'enfant; car un fait de cette nature ne peut être établi par preuve préconstituée.

3o D'après l'art. 725 du Code, le mort civilement est incapable de succéder. Une loi du 31 mai 1854 a aboli la mort civile; mais elle a laissé subsister l'incapacité de recevoir par donation ou par succession, et l'art. 725 conserve encore toute sa force prohibitive.

Enfin, était incapable de succéder, aux termes de l'article 726, l'étranger appartenant à une nation qui n'accordait pas aux Français le même avantage. Mais une loi du 14 juillet 1819 est venue renverser ce principe de réciprocité, et aujourd'hui, tout étranger sans distinction peut succéder en France de la même manière que les Français. Cette loi, rendue dans le but de rappeler en France les capitaux qu'une longue guerre et une double invasion en avaient fait sortir, a survécu aux circonstances désastreuses qui l'engendrèrent.

L'article 2 de cette loi contient une disposition dont l'équité est manifeste. Il décide que, dans le cas de partage d'une même succession entre cohéritiers étrangers et Français, ces derniers prélèveront sur les biens situés en France une valeur égale à celle des biens situés en pays étranger dont ils seraient exclus en vertu des lois et coutumes locales. Soit une succession de 100, dont 50 se trouvent en France et 50 à l'étranger, avec deux héritiers, l'un Français et l'autre étranger, appelés à la recueillir par portions égales. Si la loi étrangère exclut le Français du partage des 50 situés à l'étranger, le Français prendra seul les 50 situés en France, car autrement il ne pourrait pas avoir toute sa part héréditaire, et l'égalité cesserait d'exister.

De L'INDIGNITÉ. L'indignité empêche non de recueillir

[ocr errors]

la succession, mais de la conserver; elle atteint toujours des personnes capables, car si le successible avait déjà été exclu pour cause d'incapacité, il serait impossible de prononcer sa déchéance pour cause d'indignité. Mais elle ne frappe, selon la plupart des auteurs, que l'héritier légitime et non l'héritier testamentaire pour lequel l'art. 1046 a établi à cet égard des règles particulières 1.

Aux termes de l'article 727, sont indignes :

1o Celui qui a été condamné pour avoir donné ou tenté de donner la mort au défunt ; et, en effet, il eût été immoral de voir un criminel s'enrichir des dépouilles de sa victime. Mais faisons observer que la culpabilité du successible ne peut légalement résulter que de sa condamnation; peu importe d'ailleurs la peine dont il a été frappé. Ainsi le successible, déclaré excusable pour avoir, par exemple, donné la mort au défunt par suite de provocation (C. pén., art. 321), et comme tel condamné à une peine simplement correctionnelle, n'en devrait pas moins, selon la plupart des auteurs, être déclaré indigne. Et, en effet, la morale publique serait gravement offensée par le spectacle de cette succession tombant aux mains qui ont donné la mort au défunt. D'ailleurs, le système contraire donnerait à craindre que le successible provoqué ne tuât trop facilement le provocateur, puisque, à l'attrait de la vengeance, viendrait se joindre l'appât de la succession à

recueillir.

Ne sont cause d'indignité :

Ni le meurtre par imprudence, bien qu'il constitue un délit (C. pén., art. 319); car on ne peut frapper d'une déchéance aussi grave une personne dont l'intention était inno

cente;

Ni le meurtre commis en état de folie ou de légitime défense; car il n'y a pas alors de culpabilité, ni de peine même correctionnelle (C. pén., art. 328, 329);

Sic Demante, t. IV, n. 98 bis 11. trà, Lyon, 12 janv. 1864.

Demolombe, Succ., t. I, n. 218.- Con

Ni le meurtre commis par un mineur de seize ans, ayant agi sans discernement; car il n'est pas non plus coupable ni punissable (C. pén., art. 66).

2o Est indigne celui qui a porté contre le défunt une accusation capitale jugée calomnieuse. Ces expressions de l'art. 727 sont inexactes, puisque les particuliers n'ont plus aujourd'hui, comme à Rome, le droit de porter des accusations, et que, aux termes de l'art. 1 du Code d'inst. criminelle, le ministère public est seul investi de cet important privilége; mais le Code a voulu frapper d'indignité celui qui porte une plainte ou fait une dénonciation calomnieuse contre le de cujus, dont le résultat eût pu être une condamnation capitale. La plainte a trait au crime ou délit dont on a personnellement souffert, et la dénonciation au crime ou délit dont autrui a été la victime. L'une et l'autre peuvent avoir des conséquences également funestes, et c'est pourquoi l'une et l'autre doivent entraîner l'indignité lorsqu'elles sont calomnieuses. Parmi les peines capitales, il faut mettre nonseulement la peine de mort proprement dite, mais encore celles des travaux forcés à perpétuité et de la déportation qui, avant la loi du 31 mai 1854, emportaient mort civile, et qui entraînent encore aujourd'hui les déchéances les plus graves. Au surplus, il faut que la plainte ou la dénonciation soient jugées calomnieuses pour être valablement alléguées. Conséquemment, si le de cujus n'a pas fait condamner son successible comme calomniateur, celui-ci n'aura pas encouru l'indignité.

3o Enfin est indigne l'héritier majeur qui, instruit du meurtre du défunt, ne l'a pas dénoncé à la justice; mais le défaut de dénonciation ne peut être opposé aux ascendants et descendants du meurtrier, ni à ses alliés au même degré, ni à son époux ou à son épouse, ni à ses frères et sœurs, ni à ses oncles et tantes, ni à ses neveux et nièces. Faut-il ajouter à cette nomenclature de l'art. 728 les alliés à titre de collatéraux, comme les alliés à titre d'ascendants ou de des

« PreviousContinue »