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synallagmatique, chaque partie est donc à la fois créancière et débitrice. Ainsi, le vendeur est créancier du prix, et débiteur de la chose, tandis que l'acheteur est créancier de la chose et débiteur du prix.

Le contrat est unilatéral, lorsqu'il engendre obligation d'un côté seulement (art. 1103); tel est le prêt de consommation qui oblige l'emprunteur à restituer la chose prêtée, sans que cette obligation soit contre-balancée par une obligation réciproque de la part du prêteur.

Certains contrats tiennent à la fois des contrats synallagmatiques et des contrats unilatéraux; on les appelle contrats synallagmatiques imparfaits. Dans le principe, ils engendrent une seule obligation; mais par la suite, et en vertu de faits qui peuvent arriver ou ne pas arriver, ils font ou peuvent faire naître une obligation de la part de celui qui était d'abord seul créancier. Tel est le dépôt. A l'origine, le dépositaire seul est obligé; il doit garder la chose, et la rendre au déposant à la première réquisition. Mais, s'il fait des dépenses pour la conservation de la chose, il devient, à son tour, créancier de son créancier, qui est tenu de l'indemniser (art. 1947). On voit donc que, si ce contrat est, en principe, unilatéral, il peut, dans le cours même de son exécution, se convertir en un contrat synallagmatique, et qu'en définitive les deux parties seront liées, quoique l'une des obligations soit née à priori, et l'autre à posteriori.

La division des contrats synallagmatiques et unilatéraux présente un double intérêt. Tout contrat synallagmatique est réputé fait par chaque partie, sous la condition que l'autre exécutera son engagemeut; et, dès l'instant que l'une d'elles ne l'exécute point, l'autre peut demander la résolution du contrat (art. 1184). Cette condition résolutoire tacite n'existe évidemment pas dans les contrats unilatéraux. En second lieu, l'acte sous seing privé destiné à prouver un contrat synallagmatique doit être fait en autant d'originaux qu'il y a de parties ayant un intérêt distinct (art. 1325), tandis que

celui destiné à prouver un contrat unilatéral est dispensé de cette formalité (art. 1326).

Les contrats sont :

2o A titre onéreux ou de bienfaisance.

Le contrat est à titre onéreux lorsqu'il présente, pour les deux parties, un avantage réciproque. L'article 1106 donne, il est vrai, une autre définition. D'après lui, le contrat à titre onéreux est celui << qui assujettit chacune des parties à donner ou à faire quelque chose. » Mais cette définition est inexacte, parce qu'elle confond les contrats à titre onéreux avec les contrats bilatéraux.

Sans doute, les contrats à titre onéreux engendrent presque toujours des obligations de part et d'autre, par cela même qu'ils procurent aux parties des avantages réciproques; mais cette confusion des contrats à titre onéreux, avec les contrats synallagmatiques, n'est pas nécessaire, quoique fréquente. Ainsi, le prêt à intérêt est un contrat à titre onéreux, puisqu'il procure au créancier l'avantage d'un intérêt, et au débiteur la possession d'un capital; et cependant il n'est pas synallagmatique, puisque le prêteur ne contracte aucune obligation. C'est donc avec raison que nous avons substitué une autre définition à celle du Code.

Le contrat est de bienfaisance ou à titre gratuit, lorsqu'il ne présente un avantage que pour une seule des deux parties; telle est la donation qui enrichit le donataire, sans procurer un équivalent au donateur.

L'intérêt de la division ci-dessus consiste principalement en ce que, dans les contrats à titre onéreux, chacune des parties est tenue à plus de soins dans l'exécution de son obligation, précisément parce qu'elle a droit à un équivalent; tandis que, dans les contrats à titre gratuit, la responsabilité du débiteur qui ne reçoit pas l'équivalent de ce qu'il donne est appréciée moins sévèrement.

3° Commutatifs et aléatoires. Ces contrats sont une subdivision des contrats à titre onéreux, et c'est pourquoi

nous en parlons en seconde ligne, à la différence du Code, qui définit les contrats commutatifs et aléatoires d'abord et les contrats à titre onéreux ensuite.

Le contrat est commutatif, lorsque chacune des parties s'engage à donner ou à faire une chose qui est regardée comme l'équivalent actuel et certain de ce que la partie adverse fait ou donne elle-même (art. 1104). Ainsi, lorsque je vous loue mon cheval, nous faisons un contrat commutatif, puisque chacun de nous reçoit l'équivalent actuel et certain de ce qu'il procure à l'autre. Peu importe, d'ailleurs, que l'avantage réciproque donné et reçu par chaque partie soit exactement de même valeur ce qui fait le caractère du contrat commutatif, c'est l'existence actuelle et certaine, et non l'égalité rigoureuse des avantages respectifs.

Le contrat est aléatoire, lorsque l'équivalent consiste pour chacune des parties dans une chance de gain ou de perte. Ainsi, le jeu est un contrat aléatoire, puisque chacune des parties trouve la compensation du risque auquel elle s'expose dans le risque contraire couru par la partie adverse. Il n'y a pas là un avantage actuel et certain pour chacun des contractants. L'un doit gagner et l'autre perdre, et le résultat définitif du contrat est subordonné à un événement futur et incertain.

Le Code est en général très-hostile aux contrats aléatoires, qui déplacent les fortunes au gré du hasard et sans le travail de l'homme.

Nous venons de parcourir toutes les divisions des contrats indiquées par le Code. La doctrine complète cette énumération, en ajoutant les divisions suivantes. Les contrats sont :

4° Nommés ou innomés, suivant qu'ils ont ou n'ont pas dans notre droit des caractères, des règles et enfin un nom propre et spécial. Ces contrats sont nombreux et varient selon les besoins ou les caprices des particuliers. Ils sont soumis aux règles générales que nous allons bientôt étudier. 5° Consensuels, réels et solennels.

Le contrat est consensuel, lorsqu'il prend naissance de la seule volonté des parties, indépendamment de tout fait matériel. Ainsi la vente est un contrat consensuel; car elle existe par cela seul que les parties sont d'accord sur la chose et le prix (art. 1583).

Le contrat est réel, lorsque l'accomplissement d'un fait matériel est nécessaire à sa formation; tel est le prêt, car tout prêt suppose obligation de la part de l'emprunteur de restituer la chose qu'il a reçue, et il ne peut évidemment être tenu de la restituer que si, en fait, il l'a reçue. Ce n'est pas à dire que la convention de prêter ne soit par elle-même obligatoire; mais elle reste un contrat innomé, tant que la livraison de la chose n'est pas venue la convertir en un prêt véritable.

Le contrat est solennel lorsque le consentement des parties doit être exprimé en des formes spéciales et rigoureuses, pour produire obligation; tels sont les contrats de donation, de mariage et d'hypothèque. La volonté des parties ne devient civilement obligatoire que par la rédaction d'un acte authentique passé suivant certaines formes; on peut dire alors: Forma dat esse rei.

En droit français, tous les contrats, sauf exception, sont consensuels, à la différence du droit romain où tous les contrats, sauf exception, étaient solennels. Cette transformation du droit est la conséquence de la transformation des idées et des mœurs. Chez un peuple ignorant, la solennité des formes a le triple avantage d'exciter l'attention des contractants, de se graver aisément dans la mémoire des témoins, et de pouvoir être plus tard facilement prouvée. Mais dans une société civilisée comme la nôtre, où chacun connaît mieux la portée de ses actes, et peut presque toujours procéder à leur constatation immédiate par acte sous seing privé, la formation des contrats par le seul consentement a, d'un côté, peu d'inconvénients, et, de l'autre, elle présente l'incontestable avantage de faciliter les nombreuses transactions

qui sont l'aliment du commerce et la conséquence naturelle de la civilisation.

La division des contrats en consensuels, réels et solennels, présente un grand intérêt. Les contrats consensuels et réels peuvent être établis par tous les moyens ordinaires de preuve (art. 1316); les contrats solennels, au contraire, ne peuvent être prouvés que par la représentation de l'acte authentique nécessaire à leur formation.

CHAPITRE II

DES CONDITIONS ESSENTIELLES POUR LA VALIDITÉ

DES CONVENTIONS.

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ART. 1108. Quatre conditions sont essentielles pour la validité d'une convention : le consentement de la partie qui s'oblige; — sa capacité de contracter; un objet certain qui forme la matière

de l'engagement; une cause licite dans l'obligation.

Notions générales.

Tout contrat contient ou peut con

tenir des éléments ESSENTIELS, naturels ou ACCESSOIRES. Les éléments ESSENTIELS sont ceux en l'absence desquels le contrat ne peut exister. Ainsi, la vente contient trois éléments essentiels, qui sont : la chose, le prix et le consentement des parties sur la chose et le prix.

Les éléments NATURELS ne sont pas nécessaires à l'existence du contrat, mais ils en font partie toutes les fois qu'ils n'en ont pas été exclus par une convention expresse. Ainsi, la garantie est naturellement due par le vendeur à l'acheteur. Elle ne cesse d'exister que si elle a été exclue du contrat par une clause spéciale.

Les éléments ACCESSOIRES sont ceux qui ne peuvent appartenir au contrat qu'en vertu d'une stipulation formelle. Tels sont le terme et la condition qui n'existent dans la vente,

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