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probabilité d'une nouvelle, tantôt d'après le degré d'importance que s'attribue celui qui la rapporte, quelquefois même d'après les lieux où elle se répand. Ainsi, on dit au café, on parie à la bourse, on assure dans les bureaux. Les différens quartiers de Paris suivent cette subordination: : on dit au Marais, on parie à la Chaussée d'Antin, on assure au faubourg Saint-Germain, et même au faubourg SaintHonoré.

De toutes ces formules, la plus perfide c'est la première, parce qu'elle appartient à la fois à la sottise et à la finesse, à la bonhouiie et à la méchanceté, à la naïve crédulité et au mystère artificieux. Quand on dit, on ne laisse aucun gage; quand on parie, on laisse au moins celui de quelque argent, quand on assure, on expose un peu une réputation de sagesse ou de véracité. Eclaircissons ceci par des exemples:

On a dit que les jésuites reviendraient en France. De bonnes gens ont parié pour ou contre sur ce retour. Puis, on a assuré, et l'on sait maintenant qu'ils ne reviendront pas. Quelques sots ont dit : « On va » créer une nouvelle nobresse à laquelle on appliquera les vieuz » titres de la féodalité. » Quelques hommes plus dangereux que des sots, ont presque dit : Je le parie. Des homines d'un flegme désespérant se sont contentés de répondre: La nouvelle est absurde.

Le sénat s'est assemblé. On a dit qu'on allait ajouter aux dispositions du dernier sénatus-consulte. On a appris que le sénat avait vérifié les votes sur l'hérédité; et tout le monde convient aujourd'hui que Ja majesté des lois fondamentales d'un grand empire consiste dans leur immobilité.

Le corps législatif va s'assembler, Comme on est prompt à s'occuper de mille projets qui n'occuperont l'attention ni du corps législatif ni du conseil-d'état! Jamais les auteurs de projets ne se crurent plus dispensés d'inventer. Autrefois ils disaient: On va créer. Ils disent aujourd'hui: On va rétablir; et pourtant, quoi qu'ils en disent, on crée, et l'on ne rétablit point. Le chef de la quatrième dynastie ne s'appuie point sur les colonnes brisées de la troisième. Ce qu'a trouvé une vieille sagesse, se modifie encore par des lumières nouvelles. Les institutions essentielles à une monarchie prennent un nouveau caractère, quand elles sont appliquées à une monarchie representative.

On rappelle la magnificence, on bannit la profusion. Les récompenses accordées au mérite ne forment point d'exclusion pour le mérite qui s'annonce, et qui bientôt aura des droits à réclamer. La légion d'honneur n'a point d'analogie avec une noblesse feodale, comblée de priviléges. Les cours de judicature auxquelles ont peut encore ajouter de l'éclat, n'ont rien de commun avec les parlemens, qui achetaient le droit de juger le peuple et le roi. Les droits réunis n'ont rien de commun avec la gabelle et les corvées.

Je conelus de ces observations, que chaque fois qu'on dit : « On va » rétablir les anciens offices, de vieux titres, d'odieux privileges, » des impôts plus odieux encore, il y a mille probabilités pour parier et mille faits pour assurer que le gouvernement voit avec mépris ces chimères inventées par la mauvaise foi et répétées par la soltise.

J'ai souvent ouï dire qu'il était question de lois, de projets, d'établissemens qui pourraient faire souffrir la classe la plus active de la société de là naissaient encore de frivoles gageures, mais d'impor - ; tantes spéculations parmi une classe qui a une activité d'un goure

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moins utile. J'ai appris ensuite que ces projets étaient tombés, et j'ai entendu assurer que dans de telles discussions, l'intérêt du peuple n'était jamais mieux défendu que par le c ef de l'empire.

-Un rapport imprimé du grand procureur-général impérial, M. Regnaud, de Saint-Jean d'Angely, du 24 brumaire, apprend que deux frères, Daniel et Charles Tinum, entretenaient une correspondance criminelle avec . Taylor, plénipotentiaire anglais près l'électeur de Hesse. Il n'y était question de rien moins que de finir, par un seul coup frappé sur la personne de S. M. I., pendant son voyage dans les départemens réunis, ce que MM. Thum appelaient tous les désastres. On devait souJever tout le pays conquis. Charles Thum, trahi par son frère, a été arrêté, est convenu de tous les faits démontrés d'ailleurs par ses papiers qui ont été saisis, et les lettres originales de M. Taylor.

-

Le présent destiné par la ville de Paris à S. M. I., est, dit-on, un surtout de table en vermeil, du plusgrand prix, et en forme de navire.

-S. M. I. est partie pour Fontainebleau, jeudi re frimaire. Le pape y devait étre le lendemain. S. S. ne sera à Paris, avec l'empereur, que le 6 ou le 7.

-L'électeur archi-chancelier de l'empire Germanique, est arrivé jeudi à Paris. Plusieurs princes de l'Empire y envoient des ambassadeurs extraordinaires.

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-Les échafaudages construits dans l'église de NotreDame contiendront de vingt-cinq à trente mile personnes. La place des députations des départemens et de l'armée, est fixée de manière qu'elles verront toutes l'Empereur, dont le trône sera élevé à l'entrée de l'église.

M. de Fontanes est nommé, par S. M., président du corps législatif pour la prochaine session, qu'on croit ne devoir commencer qu'après le couronnement.

On vient de mettre en vente une nouvelle traduction des Euvres de Virgile (1), par M. Binet, Proviseur du

(1) Euvres de Virgile, traduction nouvelle; par M. René Biret, proviseur du Lycée Bonaparte, ancien Recteur de l'Université de Paris, ancien professeur de littérature et de rhétorique à l'École Militaire, au collège du Plessis-So bonne, à l'école centrale du Panthéon; de la société libre des sciences, lettres et arts de Paris; auteur de P usieurs autres traductions. Quatre vol. ia-12. Prix: 10 fr., et 14 ft. par la poste

A Paris, chez le Normant, rue des Prêtres S. Germ.-l'Aux., n. 42.

lycée Bonaparte, et ancien Recteur de l'université de Paris. Le nom du traducteur, la réputation dont son ouvrage jouissait dans l'école célèbre pour laquelle il a été composé, ne nous permettent pas de douter que nous n'ayons enfiu une traduction vraiment classique des œuvres du plus grand des poètes latins. Quelques jours ne suffisent point à l'examen, d'un pareil travail; aussi ne pouvons-nous pas encore en parler avec l'étendue qu'exige son importance; mais en attendant, pour faire juger et de son utilité et de son extrême difficulté, nous donnerons aujourd'hui un court extrait de la préface. Nous pensons qu'on retrouvera avec plaisir, dans les passages cités, ce ton de bonté à-lafois simple et noble, qui n'appartient qu'à la vertu réunie dout au talent, et qui fait le charme des écrits de Rollin, M. Binet fut un des plus dignes successeurs. On va juger si cet éloge est mérité. « L'ouvrage que je livre aujourd'hui » à l'impression est une production de bien des années,

laquelle le temps n'a pas manqué pour arriver à sa ma»turité. Puisse-t-il, par sa bonté, mériter le suffrage des » gens de goût, et servir à faire connaître plus parfaite>>ment l'auteur que j'ai osé traduire après tant d autres !

» Sa première destination ne fut point de paraître au » grand jour; il devait rester dans l'ombre des classes où » il s'était formé peu à peu de ce que pouvait suggérer à » un professeur attentif, dans des explications réitérées » par lui tant de fois, le desir naturel de faire valoir son » auteur et de se faire valoir lui-même devant une jeu» nesse intelligente, avide d'apprendre, et déjà capable » jusqu'à un certain point, d'apprécier l'un et l'autre.

« On trouve dans les commentateurs >> beaucoup d'érudition, beaucoup de recherches savantes; » mais ils discutent froidement, ils se combattent les uns » les autres, et se trompent souvent, chacun suivant leurs

divers préjugés. Il reste encore après eux à démêler ce » qu'il y a d'utile et de vrai dans leurs jugemens et leurs >> observations différentes. A qui s'adressser pour les rec»tifier ou pour les concilier, si ce n'est à l'auteur luimême, avec lequel on doit être assez bien familiarisé » pour lire en quelque sorte dans son ame, à force d'étu » dier, et ses pensées, et la manière dont il a su les » exprimer ?

» Quant aux traducteurs, Virgile entre autres n'en a

» pas eu jusqu'ici en France dont on fût pleinement satis » fait. Les ineilleurs ont cru avoir fait beaucoup, en » faisant mieux que leurs prédécesseurs; les uns une par » fidélité plus scrupuleuse, les autres par un style un peu » plus soigné. Sans les mépriser, j'ai eu mille occasions de >> reconnaître que l'on pouvait mieux faire encore, et c'est » ce qui a produit, avec le temps, ce nouvel essai. »

On se rappelle que M. Binet, dans la préface de la traduction des OEuvres d'Horace, s'étoit élevé contre les traductions en vers. Sans répéter ce qu'il en a dit il y a vingt ans, il annonce qu'aucune de celles qui ont paru depuis dans ce genre ne l'a fait changer de sentiment. Après avoir donné quelques nouveaux développemens à cette opinion, le savant professeur continue ainsi :

« Quoiqu'il en soit, c'est une traduction en prose que »je donne au public; j'ai tâché d'y mettre non-seulement » la plus grande fidélité possible, ce qui est le premier

devoir du traducteur; non-seulement la pureté du lan»gage qui en doit être inséparable, mais même toute l'har>>monie et toute la poésie de style, dont la prose est » susceptible.

» Je n'ai multiplié les notes, qu'autant qu'elles m'ont » paru nécessaires pour éclaircir les obscurités, pour faire >> sentir aux jeunes lecteurs la justesse et la liaison des pennsées, la finesse des allusions, les rapports de la fiction » avec les faits historiques, et avec les loix et les mœurs » de l'antiquité. J'y ai joint l'analyse de différens morceaux » de l'Enéide, soit récits, soit discours. Tout aurait mé»rité d'être analysé de méme ; mais il faudrait y employer

bien des volumes. Je n'ai voulu donner que des exem»ples, laissant à la jeunesse un champ vaste, pour se li» vrer d'elle-même à ce genre d'exercice, si propre à dé»velopper l'intelligence et à former le goût.

» C'est pour la jeunesse que j'ai travaillé pendant plus, » de quarante années d'enseignement public. Dans le nou» veau poste où la bienveillance de S. M. I. a daigné me » placer je m'applaudis et ne félicite de pouvoir encore » me rendre utile à cet âge intéressant, dont l'instruction » a été si long-temps l'unique but de mes travaux. Je cone »tinuerai donc de lui consacrer mes veilles; et puisque » les années, quoique déjà multipliées sur ma tête, me » laissent encore quelques forces, j'espère ne point ter-` » miner ma carrière, sans lui donner quelque nouvelle » preuve de mon dévouement. »

(No. CLXXVIII.) 10 FRIMAIRE an 13. (Samedi 1er Décembre 1804.)

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Après une lecture du Jour des Morts.

J'AI Iu..... Du Jour des Morts la pompe solennelle,
De l'éternel repos cette image si belle,

M'ont frappé de terreur et d'attendrissement.
J'arrose ce papier des pleurs du sentiment.
Reçois d'un étranger ce tribut volontaire,
O sublime Fontane, il ne peut te déplaire.
Déjà l'esprit séduit par ton style enchanteur,
Je suis de ton tableau tranquille spectateur.
Je vois ces bois jaunis, théâtre de l'automne ;
J'entends des flots lointains la chute monotone.
Le vent s'enfle, frissonne, et balance en sifflant
De ces ifs dépouillés le dôme chancelant,

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