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vais régime, il n'était responsable que de la blessure, et non de la mort [1].

Ces sages distinctions peuvent encore être invoquées; elles viennent même à l'appui de la règle que la loi a tracée en déclarant la nécessité d'un lien entre les blessures et le décès: or cette relation n'existe plus lorsque la blessure n'était pas de nature à causer la mort, lors qu'une maladie accidentelle, qui n'avait point son germe dans cette blessure, s'est développée tout-à-coup, lorsqu'enfin on peut imputer au malade une grave infraction de son régime, au médecin une faute dans ses prescriptions. L'auteur des violences peut rappeler alors cette règle de la loi romaine: Si vulneratus fuerit servus, non mortiferè, negligentia autem perierit, de vulnerato actio erit, non de occiso [2]. Comment, en effet, le rendre responsable d'un fait qui n'est pas la suite directe de son action? On ne peut lui imputer que les blessures et leurs conséquences; les accidents survenus à la suite, et par l'action d'une cause étrangère, ne lui appartiennent pas. Mais la solution devrait être différente si les violences n'avaient fait que hâter le décès d'une personne même déjà malade, ou si la maladie acci dentellement survenue a puisé son germe dans les blessures: car, bien que dans l'un et l'autre cas les violences ne soient pas la seule cause de la mort, et que la constitution physique du malade l'ait en partie déterminée, cependant elles en ont été l'occasion; leur conséquence doit peser sur leur auteur.

Au reste, toutes les présomptions que nous venons de rappeler, toutes les distinctions qui séparent les diverses classes de blessures, sont fondées sur l'étude des faits, et cette étude appartient à la science médicale. Suit-il cependant de là, comme le prétend Farinacius, que l'opinion des médecins doive nécessairement entraîner celle des juges sur la cause de la mort, attendu que cette question appartient à l'art médical? Judex debet amplecti testimonium medicorum, quia sciunt et possunt verè testificari, et præsumuntur verum dicere [3]. Nous ne pensons pas que cette maxime

doive être rigoureusement suivie; les experts
(et en ce cas les médecins sont des experts)
remplissent à la vérité une mission de la justice,
ils font l'office du juge lui-même, auquel ils
apportent les notions, les connaissances spé-
ciales qui lui manquent. Mais leur appréciation
n'est point un jugement, elle n'a que la valeur
d'un témoignage; les juges doivent l'apprécier :
« La véritable règle qu'on doit établir en cette
» matière, dit Jousse, est qu'il ne faut pas s'en
» rapporter absolument au rapport des méde-
>> cins et chirurgiens... Le plus sûr est de lais-
» ser la chose à l'arbitrage du juge qui, suivant
>> la qualité et l'endroit de la blessure comparée
» au rapport des experts et à la manière dont
» ce rapport est fait, et aussi au temps que le
» blessé a vécu depuis sa blessure, à la manière
» dont il a été gouverné dans sa maladie, au
» régime de vie qu'il a suivi, doit juger si le
» blessé est mort de la blessure ou d'une autre
» cause [4]. » L'un des vices du système de notre
Code en cette matière, nous l'avons déjà dit, est
de subordonner la nature du délit aux effets des
coups ou des blessures, et par conséquent à
l'appréciation des hommes de l'art; la pratique
doit réagir contre cette conséquence que le
législateur n'a pas aperçue, et qui aurait pour
effet de remplacer les règles légales, dans la
répression des délits de cette nature, par les
décisions quelquefois partiales et souvent er-
ronées des hommes de l'art.

Une question fort grave s'élève ici. La loi n'a point déterminé le délai dans lequel le décès de l'individu blessé doit suivre la blessure pour qu'il en soit réputé le résultat. Faut-il induire de son silence que, quelle que soit l'époque du décès, la peine des travaux forcés doit nécessairement être appliquée au coupable? Cette opinion, qui aurait pour conséquence de tenir en suspens le jugement du prévenu pendant un temps indéterminé, ne nous semble pas pouvoir être admise. Les anciens jurisconsultes avaient établi en règle que la mort ne pouvait plus être imputée à l'agent, si plus de quarante jours s'étaient écoulés depuis la blessure. Si obiit vulneratus intra quadraginta dies

rus, homicidium, num. 4; arr. parl. Paris, 18 regimine, janv. 1631.

[1] Julius Clarus, ibid., num. 42; Farinacius, ibid., no 20.

[2] L. 30, §4, Dig. ad legem Aquiliam. Damhonderizs, in Prax. criminali, p. 192, chap. 77, no 19, pose le principe en ces termes: Lethaliter vulneratus et moriens vel snå negligentiâ, malo

concubitu venereo, largà potatione, malà custodiâ, medicorum vel chirurgicorum inobedientiâ, noxio cibo, aut potu sui ipsius, homicida est et vulneratorem ab homicidii crimine liberat.

cq.

[3] Farinacius, quæst. 127, num. 50, 101 et

[4] Traité des mat. crim., t. 3, p. 496.

post illatum vulnus, præsumitur in vulnere decessisse, secùs si moriatur post quadraginta dies [1]. Cette distinction aurait été adoptée dans notre ancienne jurisprudence, ainsi que Jousse en rend témoignage: «Si le bles sé a toujours été en empirant depuis la blessure et qu'il soit mort peu de temps après, il est présumé être mort de cette blessure, et l'accusé, par conséquent, réputé coupable de la mort. Ce temps est ordinairement de quarante jours, suivant l'opinion la plus commune, parce que, suivant le jugement des médecins, une personne blessée mortellement ne peut vivre plus de quarante jours après sa blessure. Si le blessé ne meurt qu'après les quarante jours, l'accusé ne pourra être puni comme homicide, mais seulement pour raison de sa blessure [2]. »

Cette règle générale a été recueillie par le Code pénal, dans son art. 231 relatif aux violences commises envers les fonctionnaires, et qui fixe un délai de quarante jours au-delà duquel l'accusé n'est plus responsable de la mort de l'individu qu'il a frappé, alors même qu'il serait constant que sa mort a été la suite et le résultat des violences [37. Or, l'art. 231 et l'article 309 prévoient le même fait, la même espèce; la qualité de la victime ne change point la nature de l'action; ce n'est pas seulement une analogie, c'est une hypothèse identique. Il ne peut exister aucune raison de l'appliquer là pour la repousser ici. D'ailleurs cette application est réclamée par les plus graves motifs : si ce délai de quarante jours met l'accusé à l'abri de l'aggravation de la peine, c'est qu'il élève des doutes sur la cause de la mort, c'est qu'il ne permet plus de saisir la relation des blessures avec cet événement; c'est qu'il forme une présomption en faveur de l'agent. Supprimez ce délai, la loi n'en a indiqué aucun autre; il sera possible que les coups portés ne causent la mort qu'après six mois, qu'après un an. Faudrat-il donc que leur auteur reste pendant un temps indéfini avec le poids d'une responsabilité terrible et l'attente d'une peine qui serait subordonnée à un événement, incertain? Faudra-t-il le détenir pendant toute la maladie, quelque longue qu'elle soit, dans l'incertitude de la peine applicable? ou, s'il est jugé avant la fin de cette maladie, la nature de la peine devra-t-elle donc

[1] Farinacius, quæst. 127, num. 46, et ita Boerius. decis. 323, num. § 11 et seq.; Julius Clarus, § homicidium, num. 44; Mornac ad leg. 51. Dig. ad leg. Aquiliam; d'Argentré, sur l'art, 578 de la cout. de Bretagne.

dépendre du plus ou moins de célérité de la procédure, et en quelque sorte de l'activité ou de la lenteur de l'instruction? Le seul moyen d'éviter ces conséquences bizarres et contraires à l'esprit de la loi pénale est d'étendre à l'art. 309 la régle sage établie par l'art. 231.

Le crime ou le délit qui résulte des coups ou blessures s'aggrave: 1o lorsqu'ils ont été portés avec préméditation et guet-à-pens: 2o lorsqu'ils ont été portés par l'agent sur ses père et mère ou sur ses ascendants légitimes.

L'art. 311, qui prévoit et punit les coups et blessures qui n'ont pas occasionné une incapacité de travail de plus de 20 jours, ajoute: «S'il y a eu préméditation ou guet-à-pens, l'emprisonnement sera de deux ans à cinq ans, et l'amende de 50 fr. à 500 fr. » L'art. 310, qui se réfère à l'art. 309, c'est-à-dire aux deux cas où les blessures ont été suivies soit d'une incapacité de travail de plus de 20 jours, soit de la mort, est ainsi conçu: « Selon qu'il y aura eu préméditation ou guet-à-pens, la peine sera, si la mort s'en est suivie, celle des travaux forcés à perpétuité, et si la mort ne s'en est pas suivie, celle des travaux forcés à temps. » Ainsi, dans chacune de ces trois hypothèses la présence de la préméditation fait monter la peine d'un degré.

Lors de la discussion du projet du Code pénal, un membre du Conseil d'état avait proposé d'assimiler à l'assassinat le guet-à-pens avec armes, duquel seraient résultées seulement des blessures. M. Berlier répondit : « qu'il fallait se rappeler que, d'après les dispositions déjà adoptées, une canne dont on s'est servi pour frapper est réputée arme; or, si quelqu'un at-tend son ennemi au coin d'une rue ou d'un chemin, avec une canne ou un bâton, dans le dessein de le battre, cette action est criminelle sans doute, mais elle ne l'est pas au même degré que l'embuscade qui aurait pour objet de tuer, et bien qu'il y ait guet-à-pens dans l'un et l'autre cas, ils ne sauraient sans injustice être punis de la même manière. La distinction entre le meurtre et les blessures peut donc s'appliquer même au guet-à-pens [4]. »

Il suit de là qu'il importe de bien distinguer la préméditation et le dessein de tuer : la préméditation, que nous avons définie dans le chapitre précédent, aggrave la peine applicable au

[2] Traité des mat. crim., t. 3, p. 497.
[3] Voyez notre t. 2, p. 265.

[4] Procès-verbal du Conseil d'état ; séance du 8 nov. 1808.

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crime ou délit de blessures, mais ne change point la nature de ce délit ou de ce crime; le dessein de tuer, au contraire, le transforme en tentative de meurtre ou d'assassinat.

L'art. 312 est ainsi conçu : « Dans les cas prévus par les art. 309, 310 et 311, si le coupable a commis le crime envers ses père ou mère légitimes, naturels ou adoptifs, ou autres ascendants légitimes, il sera puni ainsi qu'il suit : si l'article auquel le cas se référera prononce l'emprisonnement et l'amende, le coupable subira la peine de la réclusion; si l'article prononce la peine de la réclusion, il subira celle des travaux forcés à temps; si l'article prononce la peine des travaux forcés à temps, il subira celle des travaux forcés à perpétnité [1]. »

Une première remarque sur cet article est que ses termes sont limitatifs: il ne s'applique qu'aux violences exercées par les descendants sur les ascendants. Ainsi celles qui seraient exercées soit par les pères et mères sur leurs enfants, soit par un mari sur sa femme, ne rentrent point dans ses termes.

On avait induit de ce silence que ces sortes de violences ne sont point comprises dans les termes de la loi. On pensait que la nature et la loi civile, en conférant aux maris la puissance, aux pères et mères le droit de correction, formaient obstacle à ce que les violences qu'ils exerçaient sur leurs femmes ou sur leurs enfants pussent constituer un délit. Sous l'ancien droit, la jurisprudence faisait une distinction: elle tolérait les violences légères, elle punissait les violences graves :Verberare possunt, modò non excedant castigationis terminos, alioquin de excessu puniantur [2]. En conséquence le fils ne pouvait porter plainte en justice que pour les coups les plus graves. In patre verberanti filium, filius injuriarum actione agere non potest (si injuria atrox non sit) cum non animo imperandi sed corrigendi [3]. Il nous semble que cette distinction doit être faite encore en ce qui con

cass.,

[1] Les coups portés sur la personne des père et mère ou de tout autre ascendant, ne sont pas excusables, même lorsqu'il y a eu provocation. Br., 16 mai 1815 et 28 septembre 1822; J. de Br., 1815, 1, 196. et 1822. 2, 40. Dalloz, t. 14, p. 307, n° 5, et Rauter, no 464, combattent ces décisions, tout en avouant qu'il y a lacune dans la loi

[2] Menochius, casu 384, num. 17.
[3] Farinacius, quæst. 105, num. 138.

cerne les pères et mères et les personnes qui ont autorité sur les enfants. Les parents, les maitres, les tuteurs, ne pourraient être poursuivis à raison des châtiments qu'ils infligent aux enfants, pourvu que ces châtiments n'excèdent point les bornes de la modération et ne devien nent pas de mauvais traitements [4]. Ce n'est point même là une exception aux règles que nous avons posées plus haut, car les coups portés modérément, en vue de la correction, ne feraient point supposer la volonté criminelle, qui est l'un des éléments du délit. La Cour de cassation a consacré cette distinction, en déclarant, « que si la nature et les lois civiles donnent aux pères sur leurs enfants une autorité de correction, elles ne leur confirment pas le droit d'exercer sur eux des violences ou mauvais traitements qui mettent leur vie ou leur santé en péril; que ce droit ne saurait être admis, surtout contre les enfants qui, dans la faiblesse du premier âge, ne peuvent jamais être coupables de fautes graves; que la qualité de mère ne peut donc, dans l'état des faits, affranchir la condamnée des dispositions du Code pénal [3]. »

Mais la même distinction ne peut être introduite dans les violences commises par l'un des époux sur l'autre. Ce n'est assurément qu'avec une extrême réserve que l'action publique doit porter devant les tribunaux des violences de cette nature, car une telle poursuite ne tend qu'à mettre obstacle au rapprochement des époux ; mais il est évident que les dispositions générales de la loi pénale les comprennent comme toutes les autres, et nous ne voyons aucun motif pour créer une distinction qu'elle n'a point établie. Telle est l'opinion que la Cour de cassation a consacrée par un arrêt portant: « que l'art. 311 est général dans ses dispositions; qu'il n'admet aucune exception relativement aux personnes, qui si la justice ne doit interposer son autorité entre époux qu'avec réserve et discrétion, c'est aux tribunaux qu'il appartient, d'après les faits déclarés constants, d'apprécier

[4] L'excès ou l'abus dans l'exercice du droit de correction de la part de ceux qui en sont investis peut donner lieu contre eux à l'application des dispositions du code pénal, en matière de coups et blessures volontaires. Br. 6 mars 1830. Jur. de Br., 1830, 1, 358. Merlin, Rép. 6, 458; Dalloz, 23, 258.

[3] Arr. cass. 17 déc. 1819. Dalloz, 23, 158 Sirey, 1820, t. 1, p. 145.

le plus ou moins de gravité des voies de fait qu'un mari a pu exercer sur la personne de sa femme; et que, quelle que soit la condition des époux, les blessures ou les coups portés par un mari à sa femme, surtout s'il y a eu préméditation, sont punissables par application dudit article [1]. »

L'exception portée par l'art. 312 ne concerne donc que les enfants qui porteraient la main sur leur père ou leur mère légitime, naturels ou adoptifs, ou autres ascendants légitimes. « Cette différence, disait M. Faure dans l'exposé des motifs, dérive du même principe que la disposition relative au parricide. »>

M. Monseignat ajoutait dans son rapport au Corps législatif: « Coupables envers la nature et la loi, les enfants ingrats subiront la peine immédiatement supérieure à celle qu'ils auraient encourue sans cette double offense. Malheur à celui qui ne trouverait pas dans son cœur le motif de cette pieuse disposition. »

L'art. 312 se réfère, pour la définition des violences qu'il punit, aux art. 309, 310 et 311. Il suit de là que ces violences ne peuvent être incriminées que dans le cas où, d'après les termes de ces articles, elles constituent un délit ou un crime : ainsi les voies de fait et les mauvais traitements qui ne sont accompagnés ni de coups, ni ce blessures, ne constitueraient ni crime ni délit, lors même qu'ils auraient été exercés envers le père, la mère ou les ascendants du coupable. C'est ce que la Cour de cassation a reconnu par un arrêt portant: « que, d'après leur texte clair et précis les art. 309, 310 et 311 ne s'appliquent pas indistinctement à toute espèce de mauvais traitements qui ont été commis par des coups ou des blessures envers les personnes, que l'art. 312, se référant aux cas prévus par les trois articles, ne peut donc aussi être appliqué qu'à celui qui aurait fait des blessures ou porté des coups à ses père, mère ou autres ascendants légitimes; que, dans l'espèce, l'accusé a seulement été déclaré coupable par le jury de mauvais traitements envers son père; que cette déclaration de culpabilité ne portait donc pas sur les cas prévus par les art. 311 et 312 [2]. ».

Le deuxième paragraphe de l'art. 315 se réfère aux hypothèses prévues par l'art. 311, et prononce contre les violences, au lieu de la peine

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de l'emprisonnement, celle de la réclusion. Il suit de là, en premier lieu, que les coups portés à un père, à un ascendant, quelque légers qu'ils soient, constituent un crime et deviennent, par la seule qualité de la victime, justiciables de la Cour d'assises [3]. Il en résulte encore que, dans la même hypothèse, la question de simple tentative de coups et violences peut être posée au jury, puisque la tentative légale de tous les faits qualifiés crimes par la loi est punissable comme le crime même [4].

Il faut remarquer, toutefois, que le deuxième paragraphe, en nivelant dans une même peine les deux peines portées par l'art. 311, a confondu dans une même action, dans une même criminalité, deux actes essentiellement distincts, les coups portés ou les blessures faites sans préméditation, et les mêmes faits commis avec préméditation. La distinction éta blie par les art. 310 et 311 se trouve ainsi complétement effacée dans ce cas exceptionnel On doit le regretter. Cette séparation constate l'une de nuances les plus tranchées dans la criminalité, et l'on ne voit point de raison solide pour frapper, même dans notre hypothèse, d'une peine égale l'accès d'emportement et le dessein mûri à l'avance de frapper. Cette confusion est d'autant plus étrange, que le troisième paragraphe du même article la fait disparaître dans le cas qu'il prévoit.

Cependant une nouvelle anomalie s'offre encore à nos regards. Le quatrième paragraphe de l'art. 312 prononce la peine des travaux forcés à perpétuité dans le cas où les art. 309 et 310 portent celle de travaux forcés à temps, c'est-à-dire dans le cas où les coups ou les blessures ont occasionné une incapacité de travail de plus de vingt jours, mais ont été exercés avec préméditation. Quelle sera donc la peine applicable lorsque la mort aura suivi les coup ou blessures portés avec préméditation? L'arti cle 312 n'a point prévu cette hyhothèse; il faut donc revenir à l'art. 310 qui prononce, quelle que soit la personne envers laquelle ces violences aient été commises, la peine des travaux forcés à perpétuité; et il en résulte cette conséquence que les coups et blessures suivis de mort, mais sans intention de la donner, sont punis de la même peine, quand ils ont pour objet le père ou l'ascendant de l'agent, soit qu'ils

6, 96, 28, 272; Sirey, 1814, t. 1, P. 73. [3] Grenob. 28 avril 1824. Dalloz, 6, 13. [4] Arr. cass. 3 fév. 1821.

aient été commis avec préméditation, soit qu'ils cipe dans l'art. 100 et 213, nous le verrons enaient été commis sans préméditation.

Il reste, pour terminer ce paragraphe, à examiner deux dispositions additionnelles qui complètent les dispositions que nous venons de parcourir.

La première autorise les juges à prononcer contre les condamnés pour simple délit de coups ou blessures, la surveillance de la police: <«< Outre les peines correctionnelles mentionnées dans l'article précédent, porte l'art. 315, les tribunaux pourront prononcer le renvoi sous la surveillance de la haute police depuis deux ans jusqu'à dix ans. » Il suffit de remarquer sur cet article, que cette peine accessoire est purement facultative, qu'elle ne s'applique qu'aux simples délits, attendu qu'elle forme un accessoire nécessaire des peines afflictives et infamantes, enfin qu'elle peut être limitée à deux ans, ce qui constitue une dérogation à la règle qui fixe le minimum de cette mesure à cinq

ans.

La deuxième disposition qui fait l'objet de l'art. 313 prévoit les violences de toute nature qui auraient été commises par des bandes ou réunions séditieuses. Cet article est ainsi conçu » Les crimes et les délits prévus dans la présente section et dans la section précédente, s'ils sont commis en réunion séditieuse, avec rebellion ou pillage, sont imputables aux chefs, auteurs, instigateurs et provocateurs de ces réunions, rebellions our pillages, qui seront punis comme coupables de ces crimes ou de ces délits. et condamnés aux mêmes peines que ceux qui les auront personnellement commis. »

Le but de cet article a été d'établir un lien particulier de complicité: lorsque le délit a été commis en réunion séditieuse avec rébellion ou pillage, les chefs, auteurs, instigateurs et provocateurs de la réunion sont passibles des peines encourues par les auteurs du délit, lors même qu'ils n'y auraient pas personnellement coopéré. « Cette solidarité, disait l'orateur du Corps législatif, semble au premier moment en opposition avec le grand principe qui vcut que tous les crimes et les délits soient personnels; mais lorsqu'il s'agit d'attroupements, de réunions assez nombreuses pour pouvoir y reconnaître les caractères d'une sédition, les auteurs et les provocateurs sont les plus criminels; la multitude, qui suit l'impulsion qu'elle reçoit, est l'instrument à l'aide duquel le chef a frappé médiatement les coups qui ont été portés, et dès lors il est de toute justice qu'il subisse la peine du crime ou du délit qu'il a fait commettre. »> Nous avons déjà vu l'application du même prin

core plus loin dans l'art. 441.

Il est nécessaire, pour l'application de cet article, que le fait de réunion séditieuse soit constaté, que cette réunion ait été accompagnée de rebellion ou de pillage, enfin que les prévenus soient déclarés les chefs, auteurs, instigateurs et provocateurs de ces réunions, rebellions ou pillages: le concours de ces trois conditions fait réputer ces agents complices des meurtres, actes de barbarie, coups portés ou blessures faites dans la réunion, et les peines encourues par l'auteur principal leur sont applicables.

§ II.

De l'avortement et des accidents et maladies occasionnés par l'emploi des substances nuisibles à la santé.

Cette section renfermera l'examen de trois délits qui, bien que distincts par leur gravité morale et leurs résultats, se rapprochent les uns des autres et ont été réunis par le législateur, parce qu'ils se commettent par l'emploi d'un même agent matériel, d'une substance nuisible à la santé : ces délits sont 1° l'avortement; 2° le fait volontaire d'avoir administré des substances nuisibles; 3° le débit de boissons falsifiées, contenant des mixtions prohibées.

L'avortement, lorsqu'il est commis volontairement, devient un crime: grave scelus est partús abactio; il prive de la vie un être humain; il dénote le plus souvent dans son auteur une affreuse immoralité, il suppose nécessairement la préméditation. Quelques auteurs, après avoir remarqué que le crime prend sa source dans les mêmes motifs, qu'il a les mêmes résultats que l'infanticide, ont paru disposés à confondre ces deux attentats. « Entre le crime d'une femme qui se fait avorter au septième ou huitième mois de sa grossesse, dit un publiciste, et celle qui tue son enfant au moment où il vient de naître, il n'existe pas une distance aussi grande qu'entre la réclusion et la mort [1]. » Le projet du Code pénal avait été rédigé d'après cette idée; Cambacérès combattit ce rapprochement: » Il ne faut pas, comme fait le projet, ditil, confondre l'avortement avec l'infanticide. Dans l'état de relâchement où sont les mœurs, il est possible qu'une mère, séduite par une fausse honte, croie plutôt prévenir qu'anéantir l'existence de l'enfant qu'elle porte dans son

[1] M. Destrivaux, p. 126.

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