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un privilége relativement aux acquéreurs. Il est vrai que, pour le conserver, la loi du 11 brumaire leur a imposé l'obligation de le faire inscrire; mais si ni les appelantes ni l'intimé n'ont rempli cette formalité dans un temps utile, qu'en résulte-t-il ?

Que leurs priviléges ont dégénéré en simple hypothèque, et que dès-lors c'est la date de l'inscription que l'on doit considérer.

Or, c'est l'intimé qui a la priorité; donc le premier juge a fait une juste application des principes de la matière, en colloquant Hermans en premier ordre.

Il ne s'agit pas ici de cet autre principe, privilegia non æstimantur ex tempore, sed ex causa. On vient de voir que le privilége des appelantes et de l'intimé avaient dégénéré en simple hypothèque, et que l'on ne doit pas consulter les dispositions du Code Napoléon sur des droits dont l'effet était réglé par les lois antérieures.

En admettant ces observations, Hermans avait-il pu affecter la totalité de l'immeuble par son inscription?, ne devait-elle pas se restreindre à sa quotepart dans le prix et dans la chose?

Sur cette contestation, arrêt par lequel,

« Attendu en fait que l'auteur des appelantes et l'intimé étaient co-propriétaires chacun pour une moitié de la maison par eux vendue aux époux Baart, par acte notarié du 22 avril 1795:

* Attendu que chacun des vendeurs n'a vendu que la moitié part qui lui appartenait dans ladite maison, et ne peut par conséquent exercer son privilége que sur cette moitié ou sur le prix qui en provient:

« Attendu que les premiers juges ont reconnu euxmemes, par leur dernier considérant, que l'acte de vente ci-dessus mentionné n'avait jamais été réalisé mi transcrit, et que pour cette raison les créanciers des époux Baart n'avaient pu acquérir valablement un droit d'hypothèque sur ladite maison, ce qui les a engagés à écarter la prétention de la veuve Schoenmaekers, créancière hypothécaire desdits époux :

« Attendu que les raisonnemens faits par les premiers juges, à l'égard de la veuve Schoenmaekers, devaient aussi les engager à repousser l'intimé dans la demande qu'il faisait d'être préféré aux appelantes sur le prix de la moitié de ladite maison vendue par leur auteur; en effet la ville de Maestricht était un pays de nantissement, où l'on ne pouvait acquérir la propriété des immeubles sans les œuvres de loi, autrement dit la réalisation; d'où il s'ensuivait que les époux Baart, qui n'avaient jamais fait réaliser ni transcrire le contrat de vente du 22 avril 1795, n'avaient point été propriétaires, avant la promulgation du Code Napoléon, de la moitié part de la maison provenant de l'auteur des appelantes, et n'avaient pu par conséquent l'hypothéquer au profit de l'intimé, par la règle que nemo plus juris in alium transferre potest quam ipse habet. A-la-vérité depuis la promulgation du Code Napoléon, qui n'exige plus la transcription pour acquérir la propriété des immeubles, les acquéreurs étaient devenus propriétaires

de la moitié part de la maison à eux vendue par l'auteur des appelantes; mais en acquérant cette propriété sous l'empire dudit code, ils ne l'avaient acquise que sous la réserve du privilége compétent à lui vendeur ou à ses représentans pour la part du prix qui restait due or ce privilége, que le Code Napoléon accorde au vendeur, n'a besoin que d'ètre inscrit pour pouvoir être réclamé avec succès contre les créanciers hypothécaires de l'acheteur, et les appelantes l'ont fait inscrire le 16 novembre 180g; douc elles doivent être colloquées de préférence à l'intimé sur la moitié du prix et accessoires:

« Attendu que, dans ces circonstances, il y a lieu d'ordonner que le prix de la revente du 16 novembre 1803, et les intérêts dudit prix, seront partagés par égale moitié entre les appelantes et l'intimé, et de confirmer pour le surplus le jugement dont est appel;

« Par ces motifs,

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La cour met l'appellation et ce dont est appel ́au néant, en ce que les premiers juges ont colloqué l'intimé de préférence aux appelantes; émendant, ordonne que les deux parties seront colloquées par portions égales, et chacune pour une moitié dans ce qui reste à distribuer après les prélèvemens ordonnés; quant au surplus des conclusions des parties, les en déboute, et ordonne que le jugement dont est appel sera exécuté suivant sa forme et teneur, etc. »

Du 26 juin 1812.

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Cour impériale de Liége, première chambre.

MM. Mockel et Lespérance'; Depretz.

REMARQUE

Sur l'appel incident.

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L'ARTICLE

'ARTICLE 443 du code de procédure civile règle les délais de l'appel; mais il ajoute : « l'intimé pourra néanmoins interjeter incidemment appel en tout état de cause, quand même il aurait signifié le jugement sans protestation.

Ainsi le délai n'est fixé que relativement à l'appel principal.

Il résulte aussi de la disposition de cet article que les actes, dont on pourrait inférer un acquiescement de la part de l'intimé au principal, ne forment pas de fin de non recevoir contre l'appel incident, parce que dans ce cas l'acquiescement n'est que conditionnel, et subordonné à l'acquiescement de la partie adverse; mais il ne faut pas étendre cette règle au-delà de son objet.

Si l'appel principal remet l'intimé sur ses pieds, ce n'est qu'à l'égard des actes antérieurs à cet appel; car si depuis qu'il est notifié l'intimé fait sans réserve quelques actes qui tendent à l'exécution pure et simple du jugement, il se prive de la faculté qui lui est réservée par l'article 443 d'appeler incidemment.

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Par exemple, s'il anticipe ou s'il poursuit l'audience, en prenant des conclusions tendantes à ce qu'il soit dit qu'il a été bien jugé, mal et sans griefs appelé, sans aucune protestation ni réserve de ses droits, il est censé ne se plaindre d'aucun des chefs du jugement, et l'approuver dans toutes ses dispositions.

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Cette distinction avait été admise par un arrêt de la cour d'appel de Trèves du 25 nivôse an 11.

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L'intimé avait anticipé et conclu, sans protestation, à la confirmation du jugement; il voulut appeler incidemment sur le barreau, mais lá cour le déclara non-recevable.

Elle a considéré que si la signification d'un juz gement sans réserve ni protestation, même avec commandement d'y satisfaire, n'est à regarder que comme un acquiescement conditionnel, subordonné à l'acquiescement de la partie adverse, de manière que, dans le cas où celle-ci interjète appel, ce bénéfice devient commun aux parties,

Il n'en est plus de même lorsqu'après être touché de l'appel principal l'intimé acquiesce de nouveau au jugement, soit par un fait emportant une renonciation indubitable à l'appel incident, soit par un acte exprès; que bien que l'appel incident puisse dans la règle être formé sur le barreau seulement, il faut cependant que, depuis l'appel principal, l'intimé n'ait rien fait qui s'oppose à l'exercice d'un appel incident postérieur.

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