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Aux affectations établies pour le service de la marine; A la servitude légale concernant les arbres de lisières; A la prohibition d'établissemens dans un certain rayon, I. Sont soumis au régime forestier, c'est-à-dire aux règles de gestion et d'administration déterminées par le code et l'ordonnance du 1er août 1827: 1o Les forêts de la couronne (sauf la nomination des officiers, qui ne dépend pas de l'administration forestière); 2° les forêts de l'État; 3o les bois des communes et établissemens publics; 4° les bois indivis de l'État, des communes, des établissemens publics avec les particuliers.

Les bois qui appartiennent exclusivement aux propriétaires privés sont soumis seulement à la surveillance de l'administration, et non au régime forestier [2-117]. La surveillance est toute de protection; elle ne gêne point l'exercice du droit de propriété; elle garantit la propriété des abus dont les bois auraient à souffrir.

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II. La question des défrichemens est la question vitale du sol forestier. Le législateur a prescrit des règles différentes, selon que les bois appartiennent à l'État, aux communes, aux simples citoyens. Pour autoriser le défrichement des bois de l'État, une loi est nécessaire. Défricher un bois, c'est presque l'aliéner; ce n'est plus posséder comme l'usufruitier, salva rerum substantia; le pouvoir législatif devait donc intervenir afin d'autoriser le défrichement comme pour autoriser l'aliénation elle-même d'un bien de l'État. Une autorisation spéciale du gouvernement suf

munes.

fit pour les bois des communes et des établissemens publics [91]. Le pouvoir exécutif est le tuteur des communes; il a le droit d'autoriser le défrichement parce qu'il a le droit d'autoriser par ordonnance l'aliénation des biens des comQuant aux particuliers, la liberté du défrichement est restreinte, mais seulement pendant les vingt années qui s'écouleront à partir du Code de 1827.—La restriction consiste dans l'obligation imposée au propriétaire qui veut défricher d'en faire, six mois à l'avance, la déclaration à la sous-préfecture de la situation. Ce délai est donné à l'administration des forêts, afin qu'elle puisse former son opposi

tion, si elle le juge convenable. Le préfet est tenu de statuer dans les six mois de l'opposition, sauf recours au ministre des finances. Cette restriction n'est pas applicable au défrichement des bois qui forment parc ou enclos, ou des bois ouverts d'une étendue inférieure à quatre hectares.

III. Les droits d'usage dans les bois et forêts tirent leur origine des concessions que les rois, les seigneurs féodaux et ecclésiastiques, les monastères, avaient faites à des communautés d'habitans, à des familles de tenanciers. Les concessions avaient été faites à raison de l'habitation des tenanciers sur les lieux, et en vue des terres qui relevaient du roi, des seigneurs, des abbayes; les droits d'usage qui, par leur nature, étaient des droits réels, se trouvaient assujettis au mode de jouissances appelé pro modo jugerum, c'est-à-dire que la jouissance des tenanciers indivis ou des membres de la communauté était réglée selon l'étendue des héritages que chacun possédait dans le fief ou dans la paroisse la base du droit et le mode de jouissance étaient donc toujours réels; et c'est cette double réalité que les anciens jurisconsultes exprimaient par ces mots : « Sic fit ut debeantur rei a re (1). »

Le principe est aujourd'hui changé, relativement au mode de jouissance des communaux entre habitans de la commune (par exemple, pour les droits d'affouage) et relativement à la fixation des parts de plusieurs communes dans les biens indivis entre elles; on ne prend plus pour base l'étendue des possessions territoriales; les partages matière d'affouages ou de biens communaux, se font par feux, c'est-à-dire par chefs de famille ayant domicile (2). Mais les anciens droits d'usage qui appartiennent soit aux particuliers, communes et villages dans les bois de l'État, soit aux particuliers, communes et villages dans les bois des simples propriétaires, sont soumis à l'empire des titres et des principes du passé; et, par conséquent, c'est encore la règle pro modo jugerum qui est la règle applicable,

(1) Guy-Coquille, quest. 303, t. II.

(2) D. 20 juillet 1806, avis du cons. d'Etat, 20 juillet 1807, 26 avril 1808, (code forestier, art. 105.

sauf les modifications conventionnelles. Les droits d'usage dans les bois et forêts, au surplus, constituent une perception de fruits plutôt qu'une servitude discontinue; dès lors ces droits sont régis par des lois spéciales et non par les principes des servitudes : ils peuvent être acquis par la prescription, et l'on doit suivre la règle de droit tantum prescriptum quantum possessum (1).

Le Code forestier se trouvait en présence de plusieurs classes d'usagers et de plusieurs sortes d'usages. Des déchéances nombreuses avaient été prononcées depuis la révolution, contre les usagers qui n'avaient pas rempli certaines conditions; le Code les a relevés de déchéances trop rigoureuses, et il a reconnu parmi les usagers des bois de l'État : 1o ceux qui pourraient invoquer des actes du gouvernement, des jugemens ou arrêts définitifs, sans distinction entre les actes administratifs ou judiciaires; 2° ceux dont les droits seraient avérés par suite d'instance administrative ou judiciaire alors engagée [1827]; 3° ceux qui, ayant la jouissance de fait au moment de la promulgation, feraient reconnaître leurs droits devant les tribunaux, par suite d'instance engagée dans les deux ans [61].

Mais si le Code forestier a maintenu largement les droits du passé, il a stipulé aussi en faveur de l'avenir. L'art. 62 porte : « Il ne sera plus fait à l'avenir, dans les forêts de l'État, aucune concession de droit d'usage de quelque << nature et sous quelque prétexte que ce puisse être. »

Les forêts de l'État comprennent dans leur ensemble 1473 articles de propriétés; il en est 236 qui, d'après les relevés de l'administration, sont aujourd'hui grevés de droits d'usage.

Les usages sont de deux espèces distinctes : ou ils s'exercent sur les bois mêmes, et donnent un produit en bois; ou ils s'exercent sur la superficie seulement du terrain, comme le pâturage. Il était de l'intérêt public de donner à l'État, aux communes et même aux particuliers, le moyen d'affranchir les forêts, en partie ou en totalité, de l'exercice des droits d'usage, si préjudiciables à leur (1) C. c. 636, cass. 19 août 1829, Proudhon, Usuf., t. VI, no 3087.

prospérité. De là le cantonnement et le droit de rachat. Le cantonnement est la conversion du droit d'usage en un droit de propriété sur une partie déterminée du bois généralement soumis à l'usage.

Le droit de cantonnement a son origine légale dans un arrêt du parlement de Paris de décembre 1515; il a été maintenu par le décret du 20 sept. 1790 [8-9] et par le Code forestier. L'action en affranchissement d'usage par voie de cantonnement appartient au gouvernement [3], aux communes, aux établissemens publics [114], et aux particuliers [118]: cette action n'appartient point aux usagers; c'est à ceux qui possèdent à titre de propriétaires à juger de l'intérêt qu'ils peuvent avoir à renoncer à une partie de leur domaine pour affranchir l'autre. Le cantonnement sera réglé de gré à gré, ou, en cas de contestation, par les tribunaux, quelle que soit la qualité du propriétaire [63–111-121].

Le droit de rachat s'applique spécialement aux usages dans les bois, comme pacage, panage et glandée. Il n'est pas permis de restreindre l'usager à une propriété partielle, qui ne pourrait tenir lieu de l'objet qu'on s'était proposé par la concession originaire du droit d'usage. Une indemnité en argent, de gré à gré ou fixée à dire d'experts par les tribunaux, pouvait seule représenter la valeur du droit ; et le propriétaire, quel qu'il soit, État, commune ou citoyen, a la faculté de racheter l'usage, sans que l'usager puisse en imposer l'obligation. Cependant l'intérêt des communes pauvres, dont la principale ressource est dans la possibilité d'élever des bestiaux, non pour le commerce, mais à l'usage des habitans [70], a fait établir une exception : « Le rachat ne pourra être requis par l'administra

tion, les communes, les particuliers dans les lieux où « l'exercice du droit de pâturage est devenu d'une absolue « nécessité. Si la nécessité est contestée, les parties se

pourvoiront devant le conseil de préfecture, qui, après <«< une enquête de commodo et incommodo, statuera sauf le « recours au conseil d'État [64-112-120], »

La nécessité de la conservation des bois subordonne l'exercice des droits de pâturage et de panage à la condition

que les bois auront été déclarés défensables par l'administration forestière: ce qui est commun aux bois de l'État, des communes, des particuliers [69-112–119].

L'administration a un autre droit plus important encore, c'est celui de réduire l'exercice des droits d'usage suivant l'état et la possibilité des forêts.

Dans les bois de l'État, des communes et des établissemens publics, cette réduction peut porter sur les droits d'usage, quel qu'en soit l'objet : dans les bois des particuliers, cette réduction, suivant l'état et la possibilité, n'est applicable qu'aux droits de pâturage, parcours, panage et glandée [65-112-119].

IV. L'intérêt de la marine royale a créé dans les bois et forêts des affectations spéciales à son service. Il y avait des affectations de bois établies aussi en faveur des ateliers d'artillerie (1) et de l'administration des poudres (2); mais tous les priviléges autres que celui de la marine ont été virtuellement abrogés par le Code forestier; la discussion des chambres ne laisse aucun doute à cet égard. Ce privilége consiste dans le droit qui appartient au département de la marine de faire choisir et marteler par ses agens, lorsque des coupes devront avoir lieu, les arbres propres aux constructions navales. Les arbres marqués pour le service de la marine dans une coupe ne peuvent être détournés de leur destination par l'adjudicataire; ils sont compris dans l'adjudication, mais ils doivent être livrés à la marine pour le prix qui sera déterminé à l'amiable ou par expertise à frais communs; les experts sont nommés contradictoirement, et, en cas de partage, un expert d'office est désigné par le président du tribunal civil [123-127]. L'ordonnance de 1669 consacrait le droit de choix et de martelage dans les bois des particuliers. Le Code de 1827 a vu dans ce droit une atteinte à la propriété privée, atteinte que la nécessité de l'intérêt public peut seule justifier. Cette nécessité n'a pas paru impérieuse à notre époque où le commerce donne à la marine royale les moyens de faciliter ses approvision

(1) Ord. 28 août 1816.

(2) Décret 16 floréal an XIII.

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