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nemens; le privilége de la marine dans les bois des particuliers n'avait donc été maintenu que transitoirement et pendant les dix ans postérieurs à la promulgation du Code. Aujourd'hui, il n'existe plus; la propriété privée en est affranchie. Le droit de choix et de martelage ne peut être exercé, depuis 1838, que dans les bois soumis au régime forestier, c'est-à-dire ceux de la couronne, de l'État, des communes, des établissemens publics.

V. C'est ordinairement dans les lisières des bois que se trouvent en plus grand nombre les arbres propres aux constructions navales: aussi, pour favoriser leur développement, l'ordonnance de 1669 avait-elle prohibé l'élagage des arbres de lisière, en ce sens que les propriétaires riverains n'avaient pas le droit de faire élaguer les branches qui avançaient sur leur héritage. C'était une servitude légale imposée à la propriété riveraine des bois et forêts, dans un intérêt d'utilité publique. L'art. 672 du Code civil porte que celui sur la propriété duquel avancent les branches du voisin peut contraindre ce dernier à couper ses branches. Mais les lois générales ne dérogent pas tacitement aux lois spéciales, et la prohibition de l'ordonnance de 1669 subsistait. Le Code forestier s'est placé entre la disposition absolue de l'ordonnance et l'art. 672: si les arbres de lisière ont plus de trente ans, les propriétaires riverains ne peuvent se prévaloir de l'art. 672; s'ils ont moins de trente ans, les voisins peuvent invoquer le droit commun, et par conséquent demander même que les arbres à haute tige, placés à une distance moindre de deux mètres de la ligne séparative, soient arrachés, sauf la différence des usages locaux pour la règle des distances (1). -La servitude légale et d'utilité publique en faveur des lisières de bois et forêts est applicable aux bois des particuliers comme à ceux des communes et de l'État.

VI. L'intérêt public et la sûreté des bois et forêts soumis au régime forestier ont fondé des prohibitions légales contre les établissemens qui, soit dans l'enceinte, soit en dehors de la forêt, pourraient être des causes d'incendie ou des

(1) C. for. 150; C. civ. 671.

moyens de favoriser les soustractions de bois : l'autorisation du gouvernement est indispensable pour toute construction de four à chaux, tuilerie, maison ou ferme, etc., dans un rayon tantôt d'un kilomètre, tantôt de 500 mètres [151-153].

LÉGISLATION FORESTIÈRE DANS SES RAPPORTS SPÉCIAUX AVEC LES FORÊTS DE L'ÉTAT.

I. Affectations de coupes de bois à titre particulier. - Les bois de l'État, comme on l'a vu, sont soumis à des droits d'usage que le Code a renfermés dans de justes limites, et aux priviléges de la marine. Ils restent, de plus, soumis à des affectations, à titre particulier, qui n'existent pas, comme les droits d'usage, dans les bois des citoyens et des communes. - Les ordonnances de Moulins, 1566, de Blois, 1579, et celle des eaux et forêts de 1669 avaient successivement prohibé les affectations de coupes de bois, à titre particulier, dans les forêts de l'État. Mais malgré les prohibitions, des concessions de coupes avaient été attribuées gratuitement à des paroisses, à des établissemens industriels, à des individus : elles étaient au nombre de 87 lors de la promulgation du Code forestier. Le législateur a statué, à ce sujet, et en vue du passé et en vue de l'avenir. Quant aux concessions du passé, il faut avec le code distinguer entre elles : 1° Toutes les affectations temporaires ou perpétuelles faites depuis les prohibitions, c'est-àdire depuis 1566, ont été bornées à une durée de dix ans; elles ont dû expirer au 1er septembre 1837; cette dernière période de dix ans est une concession transitoire faite à l'ancienneté d'un abus, sous la foi duquel avaient pu s'établir d'importantes usines; 2° les affectations, dont les concessionnaires prétendraient que le titre n'a pas été atteint par les anciennes prohibitions, celles, par exemple, dont l'existence serait antérieure à l'an 1566, pourront subsister, mais il faut, sous peine de déchéance, que les intéressés se soient pourvus devant les tribunaux, dans l'année de la promulgation du Code forestier, pour faire statuer sur l'irrévocabilité de leurs droits [58].

Les affectations maintenues aujourd'hui, comme irrévocables, en conséquence de ces dispositions, sont au nombre de dix-sept. L'État peut en affranchir ses forêts par un cantonnement amiable ou judiciaire; mais l'action en cantonnement ne peut être exercée contre lui. « Les affectations faites pour le service d'une usine cessent de plein droit et sans retour, si le roulement de l'usine est arrêté pendant deux années consécutives, sauf les cas d'une force majeure dûment constatée [59] ». - Mais si le Code a ainsi ménagé les intérêts du passé, il a été plus libre en face de l'avenir, et il porte qu'à l'avenir il ne sera plus fait dans les bois de l'État aucune affectation ou concession de cette nature, en faveur des communes, des particuliers, des établissemens industriels [58, 60].

II. Règles de gestion. La gestion des forêts de l'État diffère essentiellement de la gestion des autres biens qui lui appartiennent les biens du domaine doivent être affermés; les bois et forêts ne peuvent jamais l'être. Un grand intérêt social commandait cette distinction sans laquelle les forêts auraient été livrées aux irrégularités funestes des gestions particulières. Mais cette distinction fondamentale étant faite, la loi a dû déterminer les règles que l'administration forestière serait tenue d'observer dans la gestion des bois de l'État. Ces règles embrassent la délimitation et le bornage, l'aménagement, les adjudications, les exploitations de coupes et le réarpentage.

1o Délimitation et bornage.

La délimitation est la séparation établie régulièrement entre les bois de l'État et les propriétés riveraines; elle est partielle ou générale.

Lorsqu'elle est partielle, si elle est effectuée par un simple bornage, les frais de l'opération sont en commun ; si elle est effectuée par des fossés de clôture, les fossés sont exécutés aux frais de la partie requérante, et pris en entier sur son terrain. La loi moderne a rejeté bien loin cette rigueur de l'ordonnance de 1669 [tit. 27], qui voulait que les riverains se limitassent par des fossés de quatre pieds de large, à peine de réunion.

Lorsque l'administration veut opérer la délimitation générale et le bornage d'une forêt de l'État, l'opération doit être annoncée à l'avance par un arrêté du préfet : l'arrêté doit être publié et affiché dans les communes limitrophes, et de plus signifié au domicile des propriétaires riverains, ou à celui de leurs fermiers ou agens. La loi prend toutes les précautions [11] pour que le procès-verbal de limitation, déposé au secrétariat de la préfecture, soit utilement communiqué à tous les intéressés : le droit d'opposition peut être exercé pendant un an; le gouvernement, dans le même délai, doit déclarer s'il approuve ou s'il refuse d'homologuer le procès-verbal ; sa déclaration est rendue publique. S'il n'y a ni opposition ni refus, l'opération est définitive, et le bornage est effectué en présence des parties intéressées, ou elles dûment appelées par un arrêté du préfet.

La délimitation générale est dans l'intérêt de tous les riverains et de l'État; aussi les actions partielles en séparation devront-elles être suspendues, dans le cas où l'administration offrirait de procéder, dans les six mois, à la délimitation générale de la forêt.

Les actions partielles en séparation, comme les contestations nées des oppositions au procès-verbal de délimitation générale, doivent être portées devant les tribunaux.

2o Aménagement.

L'aménagement est la division d'une forêt en coupes successives; c'est l'opération la plus importante pour la reproduction et la prospérité des forêts. L'aménagement est réglé par des ordonnances royales; il sert de base aux mises en vente des coupes ordinaires. Les quarts en réserve ou les massifs réservés ne pourraient être mis en vente sans une ordonnance spéciale du roi, à peine de nullité des ventes [16].

3o Adjudications.

Les adjudications de coupes de bois doivent être publiques, à peine de nullité. La publicité légale résulte des mesures de publications qui doivent, de quinze jours au

moins, précéder l'adjudication, et du caractère de publicité qui doit s'attacher à l'opération même de la vente [17-18-19].

Le Code forestier a été modifié, à l'égard des adjudications, par la loi du 4 mai 1837. Les articles 25 et 26 sont supprimés et remplacés par les dispositions suivantes :

« Art. 25. — Toute adjudication sera définitive du moment où elle sera pro« noncée, sans que dans aucun cas il puisse y avoir lieu à surenchère.

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« Art. 26. Les divers modes d'adjudication seront déterminés par une or<< donnance royale; ces adjudications auront toujours lieu avec publicité et libre

<<< concurrence. >>

Le but de cette loi est d'autoriser à l'avance les modes d'adjudication publique que l'administration jugera le plus convenables, par enchère, par soumission cachetée, ou au rabais, ce qui n'était pas légalement possible auparavant ; le Code permettait de faire, le lendemain de l'adjudica– tion, une surenchère qui excluait tout autre mode de vente que la vente aux enchères.

La loi de 1837 a aussi modifié quelques expressions des articles 20 et 27 du Code forestier, pour les mettre en rapport avec le changement qui précède.

Toutes les contestations qui pourraient s'élever pendant les opérations d'adjudication, soit sur la validité des opérations, soit sur la solvabilité de ceux qui auraient fait les offres et de leurs cautions, sont décidées immédiatement par le fonctionnaire (préfet, sous-préfet, ou maire s'il s'agit de bois communaux) qui présidera la séance d'adjudication.

Les formalités et les règles relatives à l'adjudication des coupes sont applicables aux adjudications de glandée; mais les adjudicataires ne peuvent abattre ni emporter les glands, faînes ou autres fruits, semences ou productions des forêts, compris dans les adjudications [53-57).

4o Exploitation des coupes et réarpentage.

L'adjudicataire des coupes ne peut les exploiter qu'après avoir obtenu le permis par écrit de l'agent forestier local : il sera tenu de faire agréer à cet agent un garde-vente as

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