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vention, à celles dont le but pieux était de se dévouer au service des pauvres et des infirmes, Aussi un premier décret du 3 messidor an XII, en prohibant les congrégations d'hommes, autorisa les congrégations des sœurs de charité et des hospitalières, à la charge de soumettre leurs statuts au conseil d'État; un second décret [18 fév. 1809] rétablit les congrégations de femmes, dont l'objet était de desservir les hospices ou de porter des secours aux pauvres. Ce décret autorise les vœux pour cinq ans les vœux doivent être reçus par l'officier de l'état civil concurremment avec l'évêque. Le lien existe ainsi sous le rapport civil et religieux; la loi ne reconnaît pas de vœux perpétuels.

Les congrégations devaient être autorisées par un décret, sous l'empire, et par une ordonnance en 1814.

Une loi du 2 janvier 1817, en présence de la multiplicité des établissemens religieux, voulut soumettre les établissemens futurs à l'autorisation du législateur; mais elle ne fut pas exécutée. C'est la loi du 24 mai 1825 qui a fondé le dernier état de choses, et qui, couvrant de son indulgence les établissemens nés depuis 1817, a statué définitivement qu'à l'avenir les congrégations de femmes ne pourraient être créées qu'avec le consentement du pouvoir législatif. Les congrégations d'hommes sont de nouveau défendues; une seule exception a été faite en 1812, dans un but d'humanité et d'enseignement populaire, en faveur des frères de la doctrine chrétienne : les statuts ont été approuvés alors par le conseil de l'université, et la congrégation existe en vertu de l'autorisation royale.

II. Biens ecclésiastiques. Les bénéfices avaient été abolis, les biens du clergé avaient été mis à la disposition de la nation par le décret du 2 novembre 1789; les fondations avaient été réunies successivement au domaine national. La loi organique du Concordat maintint l'abolition des bénéfices : « Les immeubles, autres que les édifices «< destinés au logement et les jardins attenans, ne pourront « être affectés à des titres ecclésiastiques, ni possédés par <«<les ministres du culte, à raison de leurs fonctions [74]. Les fondations ecclésiastiques ne pouvaient être faites et

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acceptées par l'évêque avec l'autorisation du gouvernement, qu'en rentes sur l'État [73]. La loi de l'an X craignait de reconstituer, même en partie, la propriété des biens-fonds ecclésiastiques. L'esprit de réaction de 1816, au contraire, fut favorable au rétablissement des propriétés de main-morte; la loi du 2 janvier 1817 porte ; « 1, Tout établissement ecclé«<siastique reconnu par la loi pourra accepter, avec l'au«torisation du roi, tous les biens meubles, immeubles ou «< rentes qui lui seront donnés par actes entre vifs ou par « actes de dernière volonté (1).

« 2. Tout établissement ecclésiastique reconnu par la loi « pourra également, avec l'autorisation du roi, acquérir « des biens immeubles ou des rentes (2):

«<3, Les immeubles ou rentes appartenant à un établis«sement ecclésiastique seront possédés à perpétuité par le« dit établissement, et seront inaliénables, à moins que «<l'aliénation n'en soit autorisée par le roi, »

La loi du 24 mai 1825 a confirmé ces dispositions; mais, de plus, elle a voulu prémunir les établissemens contre les charges attachées au titre de successeur universel, et donner aussi quelques garanties aux familles contre l'esprit d'entraînement et de prodigue libéralité. Elle n'a donc permis l'acceptation des dons et legs par les établissemens ecclésiastiques et les communautés religieuses qu'à titre particulier; elle a limité au quart des biens la quotité dont une personne, faisant partie d'un établissement, pourrait disposer en faveur de cet établissement ou d'un de ses membres, à moins que le don ou legs n'excédât pas la somme de dix mille francs [art, 5] : elle porte, en outre, si la congrégation vient à s'éteindre ou à être révoquée,

que,

(1) Une ordonnance du 2 avril 1817 porte que l'acceptation des dons et legs en objets mobiliers n'excédant pas 300 fr. sera autorisée par les préfets. Mais la loi du 24 mai 1825, art. 4, exige aussi l'autorisation du roi pour l'acceptation des biens meubles, sans distinction de valeur. - L'ord. de 1817, contraire à la loi, est donc sans force.

(2) L'ordonnance du 2 août 1817, art. 6, avait illégalement dérogé à la loi en disant que les acquisitions et emplois en rentes constituées sur l'État ou les villes ne seraient point assujettis à la nécessité de l'autorisation. C'est l'aliénation de ces rentes qui devaient être immobilisées qui avait besoin de l'autorisation. - L'ord. du 14 janv. 1831 a rétabli les choses.

les biens donnés feront retour aux donateurs. Le droit civil moderne ne donne au droit de retour légal ou conventionnel que le caractère d'un droit personnel au donateur (1). La loi de 1825 déroge à cette règle du Code; elle permet le retour au profit des parens des donateurs ou testateurs, au degré successible. Enfin si la congrégation éteinte avait pendant sa durée acquis des biens, ils ne tombent pas dans le domaine de l'État, selon la règle du droit de déshérence que l'assemblée constituante appliqua aux biens des couvens et de l'ordre du clergé : la loi de 1825 répugnait à ce principe révolutionnaire; et elle ordonne que les biens acquis seront répartis par moitié entre les établissemens ecclésiastiques et les hospices des départemens dans lesquels étaient situés les établissemens éteints. Au surplus, une ordonnance du 14 janvier 1831 a réglé l'exécution des lois de 1817 et 1825; elle exige une ordonnance royale pour les inscription et transfert de rentes sur l'État, au profit des établissemens ecclésiastiques et des communautés religieuses de femmes les notaires ne peuvent passer aucun acte de vente, de cession, de constitution de rente, de transaction au nom de ces établissemens, s'il n'est justifié de l'ordonnance royale portant autorisation de l'acte [1-2].

III. Séminaires. <<< Pour avoir de bons prêtres et de «< bons évêques, dit Portalis, il est nécessaire que ceux qui «< se destinent aux fonctions ecclésiastiques reçoivent l'in«struction et contractent les habitudes convenables à leur « état de là l'établissement des séminaires, autorisé et «< souvent ordonné par les lois... L'enseignement des sémi<< naires est sous l'inspection du magistrat politique. >> La loi organique ne distingue point les grands et petits séminaires. La création des petis séminaires est postérieure à la restauration, et a été régularisée par les ordonnances des 16, 28 juin et 26 novembre 1828.

Les évêques sont chargés de l'organisation du séminaire diocésain; ils en nomment les directeurs et professeurs;

(1) Code civil, art. 747,951. - Dans le droit coutumier, le droit de retour était réel, c'est-à-dire transmissible aux héritiers: dans le droit romain, il était purement personnel.

mais ils soumettent à l'approbation du roi les règlemens d'organisation et la nomination des professeurs, qui doivent souscrire à l'obligation d'enseigner la Déclaration de 1682.

Les petits séminaires ou écoles secondaires ecclésiastiques ont été institués afin de pourvoir à l'instruction première des jeunes gens qui se destinent aux fonctions ecclésiastiques, et de les mettre en état d'entrer dans les séminaires diocésains. Les petits séminaires étaient sortis des limites naturelles de leur institution; les ordonnances de 1828 ont eu pour but de les y faire rentrer. — Les évêques peuvent avoir une école ecclésiastique dans chaque département; ils ne peuvent en établir une seconde sans l'autorisation du ministre des cultes. La nomination des directeur et professeurs doit être soumise au roi : l'État se prémunit contre l'invasion des congrégations religieuses en exigeant des professeurs l'affirmation par écrit qu'ils n'appartiennent à aucune congrégation non légalement établie en France. - Le nombre des élèves est limité dans chaque diocèse, conformément à un tableau approuvé par le roi; des externes ne peuvent être admis. Les élèves ne peuvent dépasser le total de 20000; une ordonnance du 21 octobre 1839 a fait entre les 80 diocèses une nouvelle répartition du nombre des élèves qui peuvent être admis dans les écoles ecclésiastiques. Une riche dotation de huit mille bourses sur les deniers de l'État a été supprimée en 1830 [Ordon. 30 septembre].

Les grands et petits séminaires, placés, comme établissemens religieux et d'instruction publique spéciale, sous la direction des évêques, sont soumis à la haute tutelle, à la surveillance du pouvoir exécutif. La conservation, la gestion des biens de ces établissemens, leur comptabilité, sont assujetties à des règles administratives déterminées par le décret du 6 novembre 1813.

IV. Priviléges personnels des ecclésiastiques.

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La Charte porte: « que les Français sont égaux devant la loi, quels « que soient d'ailleurs leurs titres et leurs rangs. » Mais ce principe général n'est pas absolu, comme nous l'avons déjà dit, et il souffre ici plusieurs exceptions.

Les archevêques et évêques qui seraient prévenus de quelque délit franchiraient le premier degré de la juridiction correctionnelle : ils seraient traduits directement devant la cour royale, comme les magistras auxquels s'applique l'art. 479 du Code d'instruction criminelle (1).

Les ecclésiastiques en général sont exempts des fonctions du jury (2). Les curés sont exempts de tutelle et curatelle (3). Les traitemens ecclésiastiques sont déclarés insaisissables dans leur totalité (4). Mais les prêtres ne sont point exempts de l'impôt personnel et mobilier (5).

Enfin les élèves des grands séminaires, autorisés à continuer leurs études ecclésiastiques, sont considérés comme ayant satisfait à la loi du recrutement; mais, s'ils ne sont pas entrés dans les ordres majeurs à vingt-cinq ans accomplis, ils sont tenus d'accomplir le temps de service prescrit (6).

Tels sont, dans leur ensemble, les rapports que l'Église universelle et gallicane, le pape, les évêques, les ecclésiastiques, les institutions accessoires soutiennent avec le pouvoir politique. L'Église est dans l'État, et l'État la protége; mais il protége aussi sa propre indépendance et les droits des citoyens contre les envahissemens et les abus de la puissance spirituelle. C'est l'ensemble de ces rapports entre les pouvoirs spirituel et temporel qui fonde, dans le droit public, cette branche particulière que nous appelons le droit public ecclésiastique, et à laquelle la science du droit ne pourrait refuser une place sans méconnaître elle-même toute l'étendue de son domaine.

(1) L. 8 août 1810.

(2) Arrêté 23 fruct. an X.

(3) Avis du cons. d'État, 26 nov. 1806.

(4) Arrêté 18 niv. an XI.

(5) L. 21 avril 1832, art. 15.

(6) L. 21 mars 1832, art. 14.

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