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CHAPITRE XI.

Résultats du Concordat de 1801; Concile de 1811; Concordat de 1817.

D'APRÈS le concordat de 18o1, voilà donc un clergé nouveau, formé par l'amalgame d'évêques et de prêtres tant insermentés qu'assermentés ; ceux-ci en nombre beaucoup moindre. Dans quelques diocèses, la fusion toujours désirée par les assermentés, parut complète et cimentée par la bonne foi; mais dans la plupart, ceux qui devaient cicatriser les plaies de l'Église, les rendirent plus profondes. Ailleurs, des prêtres qui depuis le concordat paraissaient en bonne intelligence avec leurs frères, s'en sont éloignés depuis l'entrée des alliés en France; cette conduite versatile n'est-elle pas l'indice certain de la duplicité? Rentrons dans ce qui fait l'objet de cet ou

vrage.

En 1802, on imprima, à Rome, un Examen des articles organiques (1). L'auteur, après avoir travesti la discipline gallicane, s'acharne à combattre tout ce qui se rattache à nos liber

(1) V. Esame degli articoli organici, etc.; in-4°. Rome, 1802. 28 pages d'impression.

tés. L'archevêque de Tours a très-bien réfuté ce pamphlet (1), publié avec l'assentiment, et peut-être par ordre de la cour romaine. On se rappelle que dans une allocution, le pape avait

manifesté son mécontentement contre ces ar ticles, et sur-tout contre celui qui enjoint d'en seigner la déclaration de 1682. L'espérance de la faire anéantir l'accompagnait dans son voyage en France; une démarche complai sante de sa part semblait lui présager le succès de sa demande, mais la déclaration de 1682 fut maintenue.

Bientôt après, des événemens nouveaux ayant changé la face de l'Italie, l'administra tion ecclésiastique fut encore subordonnée aux calculs de la politique. L'enlèvement scanda→ leux du pape à Rome et son emprisonnement arbitraire à Savone, soulevèrent d'indignation toute la chrétienté, et parurent excuser les refus d'accorder l'institution canonique aux ec clésiastiques nommés pour les siéges vacans. Une foule de lettres lui furent adressées depuis 1808 à 1811, sur cet article et sur les dispenses matrimoniales. Dix-neuf prélats, réunis à Paris, en 1810, écrivant en commun sur ce

(1) V. Fragmens relatifs à l'Histoire ecclésiastique da 19o. siècle (par M. de Barral, etc.), in-8°. Paris, 1814; p. 16 et suiv.

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double objet (1), lui disent, en parlant des dispenses: «Si la réponse de votre sainteté ne nous » parvenait point, nous serions forcés de con» clure qu'il existe dans les communications

des obstacles insurmontables, et nous nous » verrións contraints, par ce seul fait, et par la force des choses, d'accorder momentanément » ces dispenses.... » Puis, sur le refus des insti tutions canoniques, ils ajoutent que, «< dans » toutes les suppositions possibles, sa sainteté » ne saurait persister dans une résistance qui "doit avoir nécessairement un terme.... Sinon, » l'Eglise de France serait réduite à la triste » nécessité et à l'extrémité fâcheuse de discuter » les moyens de pourvoir à sa propre conserva

tion (2). » Ils avouent donc au moins que des circonstances impérieuses peuvent légitimer le retour aux règles antiques.

En 1809 et 1810, avait été formé un conseil ecclésiastique, composé de sept évêques et deux prêtres, auxquels l'autorité civile adressa diverses questions. Le gouvernement de l'Eglise est-il arbitraire? Le pape peut-il, par des motifs d'affaires temporelles, refuser son intervention dans les affaires spirituelles? Le Gouvernement français a-t-il porté atteinte au concordat, etc. ?

(1) V. Fragmens relatifs à PRistoire ecclésiastique, p. 60 et suiv.

(2) V. ibid., p. 66, 67 et 68.

Ces questions, résolues d'une manière négative, disculpaient le Gouvernement français, et rejetaient tous les torts sur celui de Rome; mais en discutant les moyens de remédier aux calamités de l'Eglise de France, le conseil tombe dans une contradiction palpable. Laissons parler, sur cet article, l'auteur respectable d'un ouvrage qui n'a pas encore vu le jour (1).

« Le conseil déclare que le Gouvernement français peut rigoureusement parlant, regarder le concordat comme abrogé, et toutefois il prétend que c'est l'Eglise qui, par son consentement au moins tacite, lui a donné la force d'une loi qui fait partie du droit public français; qu'il renferme les principes fondamentaux et les règles du gouvernement de l'Eglise gallicane. Or, si le concordat est une loi qui tire toute son autorité de l'Eglise, n'est-il pas evis dent que l'Eglise peut seule l'abroger? Le conseil ne le dit pas expressément, mais n'est-ce pas une suite nécessaire de ses principes? Selon lui, on ne peut faire revivre la pragmatique sanction que par la volonté de la puissance ecclésiastique; parce que c'est cette puissance qui l'a abrogée. Le concordat de Léon X et de François Ier, lui a succédé; c'est cette même

(1) V. Observations sur divers Fragmens de l'Histoire ecclés., recueillis, etc., par M. Debertier, ancien évêque de Rhodez.

puissance qui l'a établi, c'est encore cette même puissance qui a consenti à celui de 1801, donc il ne peut être abrogé sans son concours, donc, à la rigueur même, le Gouvernement ne pourrait pas le regarder comme abrogé. Le conseil n'aurait-il pas mieux raisonné, s'il avait dit, avec tout ce qu'il y a eu en France d'hommes éclairés dans le droit canonique : le concordat est un des plus grands abus qui se soient introduits dans l'Eglise; il a été un des ressorts que les papes ont de tout temps mis en jeu pour faire valoir leurs prétentions; il a été plusieurs fois la cause de la longue vacance des siéges épiscopaux; c'est à ce pacte entaché de simonie que la religion doit en partie sa décadence. Si le Gouvernement s'est vu forcé par les circonstances malheureuses et difficiles où se trouvait l'Eglise de France de le renouveler, quand il a pris les rênes de l'Etat, l'occasion la plus favorable se présente pour revenir sur ses pas. >>

Plus loin le conseil ecclésiastique parle des troubles excités à l'occasion de la constitution civile du clergé (1); mais qui a excité ces troubles? Sont-ce les évêques et les prêtres, qui, dans cette loi, ne voyant qu'une réforme salutaire à l'Eglise et à l'Etat, s'y soumirent, ou ceux qui, jetant les hauts cris, alarmant les

(1) V. Fragmens, p. 209.

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