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vernement et a habitué la Hongrie à la pratique de sa constitution, née du compromis de 1867, est protestant. Le ministère actuel comprend deux protestants, M. de Hegedüs, le ministre du Commerce, et Daranyi, le ministre de l'agriculture.

Les juifs comptaient 725.000 têtes et représentaient 4,18 p. 100 de la population; nul ne conteste à Budapest le rôle utile qu'ils ont joué dans le développement de la Hongrie. Ils y ont été émancipés en 1867, en même temps qu'en Autriche.

Le clergé hongrois était moins romain que national.

Cependant, à partir de 1890, la lutte éclata entre le clergé et le parti libéral. Une loi de 1868 sur les mariages mixtes prescrivait que les fils suivraient la religion du père et les filles la religion de la mère. Le clergé catholique baptisait les uns et les autres et les comptait tous à son compte sur les registres de l'état civil tenu par lui. Le gouvernement leur rappelait la loi : Rome leur disait de ne pas en tenir compte.

Leurs procédés ont abouti aux lois ecclésiastiques de 1894, malgré les efforts qu'ils firent auprès d'un certain nombre de magnats, malgré la création du parti «< populaire » clérical et ultramontain qu'ils suscitèrent sous la direction des comtes Ferdinand Zichy et Nicolas-Maurice Esterhazy, et malgré leurs sollicitations auprès de François-Joseph.

M. Wekerlé obtint, le 6 novembre 1893, du roi, l'autorisation de déposer un projet de loi rendant

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le mariage civil obligatoire. La Chambre des Seigneurs le repoussa. M. Wekerlé finit par triompher, et le roi, après de longues hésitations, consentit, le 10 décembre 1894, à donner sa 'sanction à cette loi, ainsi qu'à diverses autres, dites lois ecclésiastiques. Parmi celles-ci se trouvait la laïcisation des registres de l'état civil, une autre sur la religion des enfants issus de mariage mixte, et une loi sur le libre exercice des cultes. Après de nombreuses résistances, celle-ci ne fut adoptée qu'après la suppression des articles visant la reconnaissance de la religion juive. Le nonce du pape, M. Agliardi, était venu en Hongrie prendre la direction de la violente résistance du clergé. Les Hongrois exigèrent que le pape le rappelât.

Actuellement, les partis se divisent, comme partout, en parti libéral et en parti ultramontain. Quoique le parti populaire ne comptât que dix-neuf voix, que les Ugronistes ne fussent qu'an nombre de neuf, ils avaient réussi à renverser du pouvoir le baron Banffy, en février 1899; mais ils n'y ont rien gagné. Le parti libéral reste au pouvoir, sous la direction éclairée de M. de Szell.

J'étais à Budapest au moment des élections.

Le parti populaire a gagné un siège sur 413, non compris les 40 députés de la diète de Croatie. Quant aux Ugroniens, qui marchent souvent avec eux, ils étaient 9, ils restent 9. Ce sont des quantités négligeables.

Il y a une chose fort curieuse. Le haut clergé, qui est nationaliste, a marché aux élections avec le

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parti libéral; le bas clergé a marché contre, et il n'a tenu aucun compte de l'opinion des prélats.

Les Kossuthistes, le parti séparatiste, qui comptent maintenant 74 voix au lieu de 47, se déclarent plus anticléricaux que le ministère actuel.

Les électeurs ont montré qu'ils n'entendaient pas que la politique laïque du gouvernement hongrois subît un recul.

CHAPITRE VI

LE PAPE ET L'ITALIE

I. Catholique malgré le pape.

de la maison de Savoie.

II. L'excommunication

[III. La question romaine. IV. Le prisonnier du Vatican et les pèlerinages.

I

CATHOLIQUE MALGRÉ LE PAPE

L'article Ier de la Constitution du royaume de Sardaigne, du 4 mars 1848, qui est devenue la Constitution du royaume d'Italie, est ainsi conçu : « La religion catholique, apostolique et romaine est la seule religion de l'État. »

Seulement toute la politique du gouvernement de Sardaigne devenu le gouvernement d'Italie a été dirigée contre le chef de la religion catholique, apostolique et romaine; et le chef de ce gouvernement pour lequel « la religion catholique, apostolique et romaine est la seule religion de l'Etat » est excommunié. Le vrai défie l'invraisemblable.

Depuis que la religion catholique a été déclarée la seule religion de l'État, la législation et la politique de la Maison de Savoie n'ont pas cessé de se laïciser. La loi du 19 juin 1848 stipule que la différence de culte n'entraîne aucune distinction, quant à la jouissance des droits civils et politiques, et quant à l'admissibilité à des emplois civils et militaires. La loi du 25 août 1848 interdit la faculté d'acquérir des biens de mainmorte sans l'autorisation de l'État. En 1850, les lois Siccardi supprimèrent les tribunaux ecclésiastiques, le droit d'asile dans les couvents, établirent l'égalité des peines pour les criminels religieux et laïques. Le pape protesta. Le clergé reçut ordre de ne tenir aucun compte de ces lois. Les excommunications frappèrent les auteurs et les exécuteurs de ces lois. Ceux-ci condamnèrent des archevêques à la prison et à l'exil1.

La loi du 25 mai 1855 supprima toutes les congrégations contemplatives: 355 couvents sur 600 furent fermés. Pie IX menaça Victor-Emmanuel d'excommunication. Cavour répondit par la loi établissant le mariage civil, en 1856. La loi du 25 mai 1855 fut étendue à l'Italie au fur et à mesure des progrès de son unification. L'article 1er de la loi du 25 mai 1866 déclare que ne sont plus reconnus dans l'État les ordres, les corporations et les congrégations religieuses régulières et séculières, ainsi que les maisons d'éducation et de retraite qui

1. Voy. Bolton King. Histoire de l'Unité italienne, trad. Émile Macquart.

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