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Les journaux cléricaux et réactionnaires ont essayé de jeter la terreur dans l'esprit des propriétaires, en leur disant: - Prenez garde! aujourd'hui la confiscation des biens des congrégations, demain la confiscation des biens des riches.

Ce sont là des mots qui peuvent produire quelque impression sur les personnes qui n'examinent pas les faits. Mais est-ce que la propriété de mainmorte des congrégations n'est pas la négation même de la propriété individuelle? Est-ce que la majeure partie de cette propriété n'est pas le résultat de dons, de legs, obtenus par toutes sortes de manœuvres ayant eu pour résultat d'enlever les biens à des fils, à des filles, à des neveux, à des nièces, à des membres de la famille?

:

J'entends qu'on me dit Est-ce que chacun n'est pas libre de disposer de ses biens comme il l'entend? et s'il me plaît de doter une œuvre quelconque au lieu de laisser ma fortune aux miens, pouvez-vous me le reprocher?

Non, à coup sûr, et je range au nombre des libertés celle du gaspillage.

II

Mais si je reconnais le droit à l'individu de disposer de sa fortune comme il l'entend, faut-il encore, pour que cette fortune devienne une propriété, que celui à qui il l'a donnée ait qualité pour posséder.

Or, il est reconnu, dans tous les pays, dans ceux qui ont les institutions les plus libérales au point de vue de l'association, en Angleterre, aux EtatsUnis, en Belgique, qu'une association n'existe pas par elle-même; qu'une association n'existe qu'à la condition d'avoir été constituée conformément à la loi.

Une association ne peut pas avoir les droits d'une personne physique. Elle ne devient personne morale, ayant le droit de posséder, d'acquérir, de vendre, que par la loi, et elle ne peut conserver, défendre sa propriété devant la justice que si la loi lui a donné qualité.

Les congrégations non autorisées connaissaient bien leur incapacité. Elles ont eu recours à toutes sortes de manœuvres très connues. Elles ne possèdent qu'en violation de la loi qu'elles ont tournée à l'aide de personnes interposées et de toutes sortes d'artifices. Mais le Code civil stipule très nettement qu'il ne tient pas leurs actes pour valables. Je rappelle l'article 911:

Toute disposition au profit d'un incapable sera nulle, soit qu'on la déguise sous la forme d'un contrat onéreux, soit qu'on la fasse sous le nom de personnes interposées.

Seront réputées personnes interposées les père et mère, les enfants et descendants, et l'époux de la personne incapable.

Que sont donc les articles 17 et 18 de la loi sur les associations? Ils étendent cette disposition du Code à des associations, qui ne sont même pas des

personnes, qui n'ont aucune existence ni physique ni morale.

Ils ramènent tout simplement les congrégations au droit commun.

L'association n'existe qu'en vertu de la loi, elle ne peut être propriétaire. Les biens qu'elle prétend avoir, à l'aide de personnes interposées, sont des biens vacants et sans maître.

Il s'agit tout simplement de leur appliquer l'article 539 du Code civil:

Art. 539.

Tous les biens vacants et sans maître, et ceux des personnes qui décèdent sans héritiers, ou dont les successions sont abandonnées, appartiennent au domaine public.

Si on invoque l'existence de personnes interposées, le Code civil répond encore :.

Art. 1131.

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L'obligation sans cause ou pour une

cause illicite ne peut avoir aucun effet.

Art. 1133. La cause est illicite quand elle est prohibée par la loi, quand elle est contraire aux bonnes mœurs ou à l'ordre public.

Les articles 17 et 18 de la loi n'innovent pas. Ils interprètent, pourrait-on dire, les articles ci-dessus mentionnés du Code civil, de manière que, lorsqu'il s'agira de congrégations, des magistrats ne puissent pas mettre la jurisprudence en désaccord avec

eux.

L'article 18, en stipulant que « l'actif qui résul

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tera de la liquidation après l'acquittement des charges sera versé à la Caisse des Dépôts et Consignations », leur applique tout simplement l'article 539 du Code civil.

CHAPITRE VII

LE DROIT COMMUN

I. Les associations illicites. - II. L'association corporative et l'association contractuelle.

I

LES ASSOCIATIONS ILLICITES

Toutefois, la loi du 1er juillet 1901 est revenue en deçà de la Constitution des 3 et 13 septembre 1791, qui était précédée de ce préambule :

L'Assemblée nationale, voulant établir la Constitution sur les principes qu'elle vient de reconnaître et de déclarer, abolit irrévocablement les institutions qui blessaient la liberté et l'égalité.

Il n'y a plus de noblesse;

Il n'y a plus aucun privilège;

Il n'y a plus ni jurandes ni corporations de professions, arts et métiers.

La loi ne reconnaît plus ni vœux religieux ni aucun

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