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I I I.

Conféquences de cette Distinction.

Il eft néanmoins toujours effentiel de connoître cette diftinction des Héritages introduite par le Droit Romain pour l'intelligence des Loix qui en parlent, d'autant plus qu'il y a encore bien d'autres cas où les Héritages de Ville font reglés différemment des Héritages des Champs.

Par exemple, fuivant le Droit Romain, dans les baux à loyer des Héritages de Villes le Propriétaire a un privilége fur les meubles de fon Locataire, au lieu que dans les baux à ferme des Héritages des Champs il n'a de privilége que fur les fruits, ce qui eft ainfi obfervé dans les pays de Droit Ecrit.

Le Droit Romain diftingue auffi les fervitudes urbaines des fervitudes ruftiques, relativement à la diftinction des Héritages de Ville, & des Héritages des Champs, & ces deux fortes de fervitudes y font reglées différemment en plufieurs points, notamment pour la maniere de les acquérir on de s'en liberer. La plupart de ces Loix au fujet des fervitudes, font encore obfervées non-feulement dans les pays de Droit Ecrit, mais leurs difpofitions ont été adoptées parmi nous, particuliérement dans certaines Coutumes lef

quelles ad inftar du Droit Romain, diftinguent les Héritages de Ville de ceux des Champs & reglent différemment & les fervitudes urbaines des fervitudes rurales ou ruftiques.

Telles font entr'autres les Coutumes d'Anjou & du Maine, celles de Bourbonnois, Nivernois & plufieurs autres qui diftinguent à certains égards les Héritages & les Servitudes de Ville des Héritages & Servitudes des Champs.

Les exemples que l'on vient de rapporter fuffifent pour donner une idée de l'objet & de l'application de cette diftinction des Héritages.

Mais il faut encore obferver que les Loix qui font particulieres aux Héritages des Champs & qui fe trouvent différentes de celles qui concernent les Héritages des Villes, font de deux fortes.

Les unes qui font communes à tous les Héritages des Champs en général, telles que la Loi qui défendoit de vendre ceux qui appartenoient aux Mineurs, & celle qui concerne le privilége du Propriétaire fur les fruits.

Les autres font pror.es à chaque espéce d'Héritage rural en particulier, telles que celles qui concernent l'exploitation des terres

labourables, bois, vignes & prés; celles qui concernent les troupeaux de Beftiaux & autres femblables.

Pour rendre cet ouvrage plus utile à ceux qui ont des Biens de Campagne, on y raffemblera non-feulement ce qui concerne les Héritages des Champs, proprement dits, & que le Droit Romain appelle Pradia Ruftica, mais auffi ce qui concerne certains Héritages fitués à la Campagne, tels que les Châteaux & Maifons Seigneuriales, quoique le Droit Romain mette ces fortes d'Héritages dans la claffe de ceux qu'il appelle Pradia Urbana.On · a crû devoir auffi comprendre ici ce qui concerne ces fortes d'Héritages, parce que quoique felon le Droit ils ne foient pas confiderés comme Héritages des Champs, il eft constant qu'ils font de fait fitués à la Campagne..

Ainfi, pout traiter des Héritages de la Campagne dans ce point de vûc, on obfervera d'abord, que tous Héritages fitués de fait à la Campagne, tant ceux appellés radia Ruftica, que ceux appellés Pradia Urbana, font tenus ou à titre d'aumône, ou en franc-aleu, ou en fief, ou en cenfive: on va expliquer dans les Chapitres fuivans ce qui concerne chacune de ces différentes fortes d'Héritages.

CHAPITRE II.
DesBiens tenus à titre d'Aumone.

1. Des Biens aumônés en général.

2. De la Franche Aumône.

3. De la pure Aumône.

I..

Des Biens aumônés en général.

N appelle Biens tenus à titre d'Aumône les Fondations & Donations faites à l'Eglife, ou à des Colléges, Sémi naires, Hôpitaux & autres gens de Mainmorte, à la charge du fervice Divin, ou de quelques autres Prieres.

On diftingue deux fortes de tenues à titre d'Aumône fçavoir, la franche Aumône & la pure Aumône.

:

II.

De la Franche Aumône.

La franche Aumône eft, quand on donne un fonds pour conftruire une Eglife, Cimetiere, ou autre Lieu facré, & que le Seigneur ne fe réserve aucun droit, ni devoir fur le Bien ainfi donné, ( a ) auquel cas il ne reste

(a) Le Let & Thevenau fur Poitou, art. 108.

plus ni foi, ni Jurifdiction fur le fond, c'eft-dire, quant à la chofe, mais non pas quant aux Perfonnes, qui font toujours jufticiables du Juge du lieu le Seigneur conferve auffi fur le Fond aumôné, le droit de Patronage.

:

II I.

De la pure Aumône.

La pure Aumône. eft, quand on donne à l'Eglfe des Biens temporels, produifans un Revenu, fur lefquels le Fief & la Jurifdiction demeurent, foit au Donateur s'il a Fief & Jurifdiction fur le lieu; foit au Seigneur, fi le Donateur ne l'eft pas, & néanmoins les Héritages ainfi tenus par Aumône, par des gens d'Eglife, font tenus franchemeut fans en payer aucune redevance ni autre devoir, fi ce n'eft ad obfequium precum. (a)

(a) Maichin fur la Coût. de S. Jean d'Angely, tit. 48 art. 1. chap. 8. & Dupineau sur Anjou, 112,

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