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L'officier de police constate l'existence des infractions que les mesures administratives n'ont pu prévenir.

Le juge est chargé de les réprimer avec promptitude et impartialité.

dirigés contre le prince ou l'État, on a remarqué, en général, que les crimes religieux ne peuvent être du domaine de la justice répressive qu'autant qu'ils troublent l'ordre public, parce que la société doit punir les actions coupables, et non les pensées, et que personne ne auto-peut être puni pour une volonté secrète (6); et on en a conclu qu'il n'y avait pas lieu de faire de ces crimes une classe distincte.

La force armée s'associe à ce grand œuvre, en procurant l'obéissance aux ordres des rités constituées, aux mandements de justice, aux actes émanés des tribunaux (1).

SII.

D'autres ont divisé leurs classes en crimes contre la religion, contre les mœurs, contre la tranquillité, contre la sûreté des citoyens (7);

Définition des crimes, délits et contraven- mais cette division, outre le reproche qui lui

tions.

2. Des peines sont décernées contre ceux qui enfreignent les lois (2); les poursuites sont exercees, au nom du gouvernement, par les agents qu'il a préposés à cet effet.

Un crime, un délit, une contravention, est une action commise que la loi défend, ou l'omission d'une action qu'elle commande (3).

Faire ce que défendent, ne pas faire ce qu'ordonnent les lois qui ont pour objet le maintien de l'ordre social et la tranquillité publique, c'est un délit, disait notre Code des délits et des peines de brumaire an IV. Cette définition | n'a point été répétée dans le Code d'instruction criminelle; mais c'est une vérité de fait qui n'a pas besoin d'être exprimée.

La classification des crimes a toujours beaucoup occupé les jurisconsultes et les publicistes; et cette classification, comme le remarque fort bien un auteur distingué, ne peut paraître indifférente qu'à des esprits légers et superficiels, puisqu'elle est le fondement de la gravité du délit, et par conséquent de la peine (4), et qu'au moyen d'une classification exacte, il devient facile d'établir une échelle de peine sur des proportions sagement combinées, dont la justice est évidente, et dont les nuances sont, en quelque sorte, à la portée de tout le monde. Beaucoup d'auteurs ont divisé les crimes en quatre classes (5); mais ils diffèrent sur la détermination et les rapports de chacune de ces classes.

Les uns ont considéré les crimes par rapport à la religion, au prince ou à l'État, aux particuliers, à l'ordre public: mais, outre qu'il semble que les attentats contre l'ordre public ne doivent pas être séparés de ceux qui sont

est commun avec la précédente, à raison des crimes religieux, semble encore présenter plus d'équivoque, plus d'incertitude pour distinguer ce qui appartient aux mœurs de ce qui touche la tranquillité et la sûreté des citoyens, et paraît, sous ce rapport, avoir quelque chose de plus vague et de moins précis.

Quelques-uns, en réduisant à trois classes la division des crimes, ont distingué ceux qui tendent à la destruction de la société ou du prince, ceux qui attaquent les citoyens dans leur personne, leurs biens ou leur honneur, enfin ceux qui sont contraires au bien public (8); mais cette dernière classe n'est évidemment encore qu'une dépendance des deux autres, et ne peut en conséquence former un genre particulier. Quelques autres, multipliant les divisions, ont cru pouvoir porter jusqu'à dix le nombre des classes sous lesquelles les crimes seraient rangés, et ils ont distingué, 1o les délits contre la Divinité; 2o les délits contre le souverain; 3o les délits contre l'ordre public; 4° les délits contre la confiance publique; 3o les délits contre le droit des gens; 6o les délits contre l'ordre de la famille; 7° les délits contre les personnes; 8° les délits contre la dignité naturelle et civile de l'homme; 9° les délits contre son honneur; 10° les délits contre les propriétés (9). Mais ce que nous avons dit précédemment de quelques autres divisions, s'applique plus particulièrement à celle-ci : la plupart des classes rentrent évidemment les unes dans les autres, et ne peuvent être considérées que comme des espèces d'un même genre; et pour n'exprimer qu'une objection, en laissant au lecteur le soin de faire lui-même toutes les autres, comment concevoir que les délits contre l'ordre de la famille n'appartiennent pas aux délits contre la

(1) V. le paragraphe de la force armée considérée dans ses rapports avec les tribunaux et les officiers du ministère public.

(2) Il s'agit des lois criminelles et de police; les infractions aux lois civiles sont du ressort des tribunaux civils.

(5) V. Blackstone, Comm., liv. IV, chap. 1er, de la Nature des crimes.

(4) V. Pastoret, 1re p., ch. 7, des Crimes.

(5) Muyart de Vouglans, divise les crimes, quant à leur nature, à la peine encourue, à la compétence du juge, à l'instruction et à la preuve. (V. Montesquieu liv. XII, chap. 6. V. Instructions de Catherine de Russie, sur la rédaction d'un nouveau code.)

(6) Filangieri, 2e p., t. IV, ch. 1er, p. 5, no 12. (7) Montesquieu, loc. cit.

(8) Beccaria.

(9) Filangieri, t. IV, 2o p., ch. 19.

société, dont chaque famille est une fraction? comment imaginer que les délits contre la dignité naturelle et civile de l'homme, délits assez difficiles au reste à bien définir, ne se confondent pas dans une autre classe, et, par exemple, dans celle des délits contre l'honneur?

On voit donc que ces nombreuses divisions sont plutôt la preuve d'une grande abondance d'idées que d'une grande justesse dans la manière d'envisager les actions de l'homme dans leur rapport avec l'ordre social, et qu'elles ne sauraient être accueillies ni employées avec succès dans la législation, parce que la métaphysique doit surtout être bannie des lois pénales.

Des criminalistes français, sans établir positivement des classes parmi les crimes, ont indiqué dans leurs ouvrages les diverses manières dont les crimes pouvaient et devaient être considérés (1) mais on sent tout ce que ces rapports offraient d'arbitraire, puisqu'ils n'avaient pour règle que l'opinion de celui qui les présentait; opinion éclairée, à la vérité, du flambeau de l'étude et de l'expérience, mais toujours variable de sa nature, et surtout exposée à toutes les attaques dirigées par une opinion contraire.

Des divisions plus simples que celles que nous avons rappelées, ont aussi été proposées : telle est celle qui tend à considérer les crimes dans leurs rapports avec la nature, avec la société, avec la loi positive (2); mais peut-être cette dernière classe même se confond-elle encore avec la seconde ; car les délits contre la loi positive ne sont et ne peuvent être en effet que les délits contre la société, puisque l'existence de la société ne repose et ne peut reposer que sur les lois.

Telle est aussi celle de n'admettre que deux grandes classes, savoir les crimes publics et les crimes privés, et de subdiviser la première en crimes moraux, crimes civils et politiques, crimes religieux, et la seconde en crimes contre l'honneur, crimes contre la propriété, crimes contre la sûreté (3).

Cette classification, quoiqu'elle fasse une subdivision des crimes religieux, subdivision qu'il serait facile de faire disparaître si elle est dangereuse, mais qui me paraît susceptible d'être maintenue comme une espèce de crimes publics, pourvu qu'on n'y comprenne que des actions, cette classification, dis-je, me semble préférable à toutes les autres, et je crois que, bien méditée, elle est propre à atteindre le but que la législation doit se proposer.

Elle se rapproche, au reste, davantage de la division adoptée par les Romains, qui distin

(1) V. Jousse, p. 2 et suiv., qui indique huit manières. principales d'envisager les délits.

(2) Pastoret, t. ler, 1re p., ch. 6, des Crimes. (3) De Warville, t. Ier, ch. 2.

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guaient, comme on sait, deux espèces de crimes, les uns publics et les autres privés (4), et qui subdivisaient les crimes publics en crimes ordinaires et extraordinaires, et en crimes ou délits capitaux et non capitaux.

Il y a lieu de croire que les rédacteurs du Code pénal de 1791 l'avaient prise pour base principale de leur travail, puisqu'ils divisèrent ce code en deux parties, dont la première comprenait les crimes et attentats contre la chose publique, qu'elle subdivisait en six espèces, et dont la seconde embrassait les crimes contre les particuliers, distingués eux-mêmes, de la manière la plus simple et la plus naturelle, en attentats contre les personnes et en attentats contre les propriétés. Il est vrai que, dans une loi précédente, le législateur avait paru se rapprocher davantage de la classification adoptée par Montesquieu, en rangeant dans cinq classes les délits susceptibles d'ètre punis correctionnellement, savoir: 1° les délits contre les bonnes mœurs; 2o les troubles apportés publiquement à l'exercice d'un culte religieux; 5o les insultes et les violences graves envers les personnes; 4° les troubles apportés à l'ordre social et à la tranquillité publique par la mendicité, les tumultes, les attroupements, etc.; 5 les atteintes portées à la propriété des citoyens par dégâts, larcins, simples vols, escroqueries, ouvertures de maisons de jeux : mais la difference, en observant bien les deux classifications, est réellement peu importante, et la nomenclature de la loi du mois de juillet se réduit évidemment, comme celle du Code pénal, à deux classes principales, dont les classes accessoires ne peuvent être regardées que comme des subdivisions.

Le nouveau Code pénal a admis la même division principale, en multipliant ces subdivisions; ce qui a sans doute été rendu nécessaire par la confusion des délits et des crimes. J'ai dit, dans l'introduction, ce que je pense de cette innovation; j'ai parlé aussi de la théorie des peines ou du moins j'ai dit un mot de cet objet, qui, non moins que la classification des crimes, a été et a dû être le sujet des méditations des auteurs les plus célèbres : il n'entre point dans le plan de cet ouvrage de traiter ici de cet objet ; on verra seulement, dans la suite de cet ouvrage, comment et par quels tribunaux les peines sont appliquées aux coupables reconnus tels. Examinons comment on arrive à ce résultat.

L'instruction au grand ou au petit criminel était, dans notre ancien droit criminel, la véritable et même la seule ligne de démarcation tracée entre les crimes graves et les délits lé

(4) V. le Digeste et les Institutes, et le ch. de l'Accusation dans cet ouvrage.

Les lois anglaises admettent aussi cette division. (V.Blackstone, liv. IV, ch. 1er, de la Nature des crimes.)

gers (1) que l'on distinguait aussi en crimes publics et crimes privés (2).

Aujourd'hui la nature et la gravité du fait qu'il s'agit de réprimer, servent d'abord à établir trois grandes divisions dans la nomenclature des actions.

Les infractions aux lois sont divisées en trois classes.

Sous la dénomination de crimes, on comprend tous les faits susceptibles d'emporter une peine afflictive ou infamante: ceux-là sont portés aux cours d'assises.

Ils peuvent l'être aussi devant la Cour des pairs, lorsque cette cour se trouve compétente, à raison de la nature du crime, ou à raison du privilége inhérent à la dignité de pair, et, en certains cas, aux fonctions de ministre (3); et devant les tribunaux de l'armée de terre ou de mer, lorsque les prévenus, en raison de leur qualité, sont justiciables de ces tribunaux d'exception (4).

On donne la qualification de délits aux faits qui sont de la compétence des tribunaux correctionnels.

Enfin, on désigne sous le nom de contraventions les fautes légères dont la connaissance est réservée aux tribunaux de simple police.

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Les crimes, les délits, les contraventions, peuvent, en général, donner lieu à deux espèces d'actions (6).

L'action publique n'appartient qu'au gouvernement; elle est exercée par ses officiers; elle tend à provoquer la punition des coupables, et à effrayer, par de salutaires exemples, ceux qui seraient tentés de les imiter; elle intéresse la société tout entière (7).

L'action civile n'a pour but que la réparation particulière du dommage causé par le délit; elle peut être exercée par tous ceux qui ont été lésés, et ne concerne que des intérêts privés (8).

SECTION II.

DE L'ACTION PUBLIQUE.

3. Un article du Code du 5 brumaire an iv portait que tout délit donnait lieu à une action publique (9). Le nouveau Code d'instruction criminelle n'a point renouvelé cette disposition; On ne se sert plus de la dénomination de il s'est borné à dire que l'action pour l'applicagrand et de petit criminel: mais tout ce qui est tion des peines n'appartient qu'aux fonctionrenvoyé aux cours d'assises est réellement le naires auxquels elle est confiée par la loi, (C. Cr., grand criminel (3); les attributions des tribu- art. 1er). Cette indication exacte de l'objet de naux correctionnels comprennent le petit cri- l'action publique n'emporte plus avec elle l'esminel, et les tribunaux de police connaissent de pèce d'obligation que le Code des délits et des ces fautes légères, de ces infractions dont le juge-peines semblait imposer aux officiers chargés ment était autrefois confié aux juges de police. de la vindicte publique, de poursuivre indis

(1) V. l'ord. de 1670. V. Muyart de Vouglans, pag. 4 et 5.

(2) Muyart de Vouglans, loc. cit.; Rousseau de la Combe, pag. 2 et suiv.

(3) Art. 35 et 34, 54, 55 et 56 de la Charte, et le chapitre de la Cour des pairs.

(4) V. le chap. des Trib. milit. et des Trib. marit., S de la Compétence.

(5) Cette classification admettait une exception sous l'empire bienfaisant de la loi du 26 mai 1819, qui soumettait au jury les délits commis par tous moyens de provocation, quoique les peines applicables, en cas de condamnation, fussent correctionnelles.

(6) Art. 64 du C. pén.

V., quant à la démence, le chapitre qui traite de la manière de procéder à l'égard des insensés et des furieux. - V. Chauveau, Théorie du C. pén., p. 212.

Quant à la force majeure, il est impossible de la déterminer et de la définir d'une manière précise : les anciens auteurs offrent à cet égard quelques exemples qu'il peut être utile de consulter; mais comme la force majeure peut résulter d'une foule de circonstances diverses relatives à des espèces particulières, il ne faut considérer ces autorités que comme des analogies.

Je crois, au reste, devoir faire remarquer que, d'après les termes de la loi, la criminalité d'un fait ne peut être effacée que lorsque celui qui l'a commis a cédé à une force irrésistible. V. Dalloz, vo Excuse.

(7) Le droit de venger une offense par les armes, qu'a

vaient tous les gentilshommes fieffés, du temps de saint Louis, n'était pas au seigneur du coupable le pouvoir de le traduire à sa justice. Ce pouvoir subsistait même après la paix faite entre les parties belligérantes, à moins qu'elle n'eût été faite par la médiation du seigneur suzerain de celui qui avait commis le crime.

Cette contume, rapportée par Beaumanoir, chap. 59, pag. 301, de la coutume de Beauvais, n'est-elle pas une preuve que l'on reconnaissait dès lors ce droit, si bien établi de nos jours, qui appartient à la société, de venger le crime commis dans son sein, abstraction faite des intérêts de l'individu lésé : Ceux qui font les vilains mefaits, dit Beaumanoir, ne mefont pas seulement à leur adverse partie, ni à leur lignage, mais aux seigneurs qui les ont en garde et à justice. (Vély, t. V, p. 234.)

(8) Pour connaitre les anciens principes sur les actions qui naissent des crimes, voyez Jousse, tom. Jer, pag. 561 et suiv. Muyart de Vouglans, pag. 578 à 588, et le ch. 1er des Mat. crim.. par Rousseaud de la Combe. Parmi les principes rappelés par ces criminalistes, les uns n'ont éprouvé aucune modification, d'autres ont cessé d'être en harmonie avec nos lois criminelles. Les chapitres de ce volume, et notamment ceux qui concernent les dénonciations et les plaintes, et qui traitent du système de l'accusation en France, indiquent les règles qui sont actuellement en vigueur.

(9) V. art. 4 du C. du 3 brum. an IV,

distinctement tous les délits; et c'est d'après cette, différence remarquable entre le nouveau code et l'ancien, que nous disons que les crimes, les délits et les contraventions, peuvent donner lieu à deux espèces d'actions.

dire, personnelles au délinquant et à celui contre lequel le fait a eu lieu, il serait, en général, contraire aux intentions du législateur d'instruire d'office, en pareil cas, des procédures qui seraient sans objet, et qui n'auraient habituellement d'autre résultat que de grever le trésor public.

5. L'évasion des détenus donne lieu, en gé

tionnelles contre les individus préposés à leur garde (art. 247, C. p.): cependant, lorsqu'il n'y a eu que de la négligence de la part des conducteurs ou des gardiens des prisonniers et des détenus évadés, les peines d'emprisonnement qui sont établies par la loi doivent cesser, si les évadés sont repris ou représentés dans les quatre mois de l'évasion, et ne sont pas arrêtés pour d'autres crimes ou délits commis postérieurement (art. 247, C. p.).

Déjà, longtemps avant la publication du Code d'instruction criminelle, le législateur, frappé de l'énormité des frais frustratoires qu'entraînait la poursuite obligée de tous les délits quel-néral, à des poursuites criminelles ou correcconques (qu'il y eût ou non une partie civile en cause), avait essayé de remédier à cet abus, et la loi du 5 pluviose an XIII avait été rédigée dans cet esprit (1) mais le principe absolu consacré par le Code existait toujours; on s'était habitué à le regarder comme impératif, et les dispositions un peu vagues de la nouvelle loi n'empêchaient pas que l'on n'occupât, chaque jour, les tribunaux de faits très-légers, qui n'avaient apporté aucun trouble réel dans la société, qui n'avaient pas même excité les réclamations de ceux qui auraient pu s'en plaindre, qui, le plus souvent, ne pouvaient être réprimés faute de preuves, et dont la punition, lorsque par hasard les auteurs en étaient atteints, était presque toujours beaucoup plus onéreuse au trésor public que profitable à la morale.

4. Aujourd'hui, si toutes les infractions aux lois criminelles et de police peuvent donner lieu à l'action publique (2), les officiers du prince ne sont pas essentiellement et indistinctement astreints à exercer cette action, lorsqu'il n'y a pas de plainte, ou que le plaignant refuse de se constituer partie civile.

Cependant, l'exercice de cette action n'est point abandonné à l'arbitraire des magistrats; il ne peut pas dépendre d'eux de laisser sans poursuite un fait quelconque qui présente ou peut présenter les caractères du crime; ils manqueraient à leurs devoirs en négligeant de poursuivre les auteurs des délits, et même des contraventions, lorsque ces délits ou ces contraventions blessent les intérêts de l'État, lorsque la tranquillité ou la morale publique peut en souffrir, lorsque des exemples sont nécessaires pour contenir et réprimer des habitudes dangereuses mais, lorsque les délits sont légers, lorsque les contraventions résultent de circonstances peu importantes, et, pour ainsi

(1). les art. 3 et 4 de la loi du 5 pluv. an XIII.

(2) La Cour de cassation a rappelé ce principe à l'égard même des contraventions, par arrêt du 11 juin 1813. (D., 1., 249; S., 16., 1., 169.)

* Du principe consacré par cet arrêt, il résulte que lorsque le ministère public a requis l'application d'une peine prononcée par la loi, les tribunaux de police ne peuvent se dispenser de la prononcer contre l'auteur de la contravention. (Cass., 9 sept. 1825. — S., 26, 4, 51. - Duvergier.

(3). plus bas dans ce chapitre, et aussi le chapitre des Trib. correct. et Liége, Cass., 7 juillet 1828. J. du 19es., 1829, p. 57.

Les délits d'injure ou de calomnie, commis par la

LEGRAVEREND. — TOME 1.

Faut-il conclure de ces dispositions du Code pénal, que pendant quatre mois il doit être sursis aux poursuites contre les conducteurs ou gardiens prévenus de négligence à l'occasion de l'évasion des prisonniers, sauf à agir contre eux après ce terme, si, dans l'intervalle, les évadés n'ont pas été repris ou représentés, ou si, l'ayant été, ils ont commis quelque crime ou délit depuis leur évasion?

Ce n'est certainement pas ainsi que la loi doit être entendue : les poursuites doivent être faites dans ce cas comme dans tout autre; seulement, lorsque les tribunaux ont condamné les conducteurs ou les gardiens à l'emprisonnement, cette peine doit cesser de suite, quand même le jugement ou l'arrêt aurait acquis la force de chose jugée, quand même il aurait commencé à recevoir son exécution, si les deux conditions exigées par la loi pour produire cet effet se trouvent réunies.

6. La calomnie étant un délit, suivant le Code pénal, pouvait donner lieu à l'action publique, lors même que la personne calomniée eût gardé le silence (5); divers articles du Code pénal relatifs à la calomnie ont été abrogés, en France, par l'art. 26 de la loi du 17 mai 1819, laquelle a subi elle-même de graves modifications par l'effet de la loi du 25 mars 1822 (4). Les délits d'outrage, diffamation, offense et injures, com

voie de la presse, ne pourront être poursuivis que sur la plainte de la partie calomniée ou injuriée; toutefois les délits d'injure ou de calomnie envers le roi, les membres de sa famille, envers les corps ou individus dépositaires ou agents de l'autorité politique, en leur qualité ou à raison de leurs fonctions, pourront être poursuivis d'office. (Décret du congrès sur la presse en date du 20 juillet 1831, remis en vigueur par la loi du 6 juillet 1833.)

(1) Les articles 367 et suivants, sont demeurés en pleine vigueur en Belgique, sauf quelques légères modifications introduites dans la loi sur la presse, du 20 juillet 1831.

mis par voie de publication envers les chambres, les souverains ou gouvernements étrangers (1), les agents diplomatiques étrangers accrédités près du roi, et les simples particuliers, ne peuvent être poursuivis que sur la réclamation d'un des membres de la chambre offensée, et après l'autorisation de la chambre, ou sur la plainte ou à la requête, soit du souverain ou du chef du gouvernement qui se croira offensé, soit de l'agent diplomatique ou du particulier qui se croira diffamé ou injurié (2). Cependant, l'article 373, relatif aux dénonciations calomnieuses, a été maintenu, Mais faut-il conclure de la conservation de cet article, et du principe vrai concernant l'exercice de l'action publique, que, si une personne lésée par un delit dument constaté a dénoncé mal-à-propos et par erreur une personne comme en étant l'auteur, le ministère public puisse diriger des poursuites contre le dénonciateur pour dénonciation calomnieuse? Je ne le crois pas; parce que la dénonciation, quoique mal fondée à l'égard de la personne dénoncée, ne peut pas, à mon avis, être considérée, à proprement parler, comme une dénonciation calomnieuse, attendu que la lésion a réellement existé. (3).

La Cour de cassation a cependant jugé qu'en pareil cas l'action du ministère public est autorisée (4) mais je ne pense pas que l'on doive voir dans cette décision une jurisprudence certaine; et, quand la cour persisterait à juger dans le même sens, je ne puis partager l'opinion qu'elle a consacrée (5).

7. Quoique l'usure puisse donner lieu à des poursuites devant les tribunaux de répression, et qu'elle offre les caractères d'un délit lorsqu'elle est habituelle, la perception isolée d'un intérêt excessif ne caractérise pas un délit aux yeux de la loi, et ne peut ni motiver des poursuites, ni servir de base à une condamnation pénale. La loi du 3 septembre 1807 (6) ne soumet en effet aux peines correctionnelles que les individus convaincus de se livrer habituellement à l'usure, et il n'y a point d'habitude d'usure dans le fait particulier d'une perception d'intérêts plus forts que ceux que la loi autorise. La Cour de cassation a redressé, en différentes circonstances, les écarts dans lesquels certaines cours et certains tribunaux étaient tombés sur ce point, et sa jurisprudence est attestée par plusieurs arrêts (7).

Il est vrai que l'habitude de l'usure, qui peut seule constituer un délit, offre quelque incertitude dans la manière dont elle doit être constatée, et que cette disposition de la loi prête aux définitions arbitraires.

On peut, par exemple, demander si deux per ceptions d'un intérêt excessif, faites au préjudice de deux particuliers différents, constituent l'habitude de l'usure; si cette habitude peut résulter de deux perceptions de ce genre faites successivement au même individu à l'occasion de deux prêts différents, ou de la perception répétée d'intérêts excessifs sur la même somme (8); et quoique l'affirmative ne me paraisse pas douteuse dans les deux espèces, la question pourra être controversée (9): mais,

(1) Ceux qui, dans leurs écrits, auront offensé ou outragé le caractère personnel des souverains et princes étrangers, auront contesté ou révoqué en doute la légitimité de leur dynastie et de leur gouvernement, ou auront critiqué leurs actes en termes offensants ou injurieux, seront, pour la première fois, punis d'une amende de 500 fl., ou s'ils se trouvent hors d'état de l'acquitter, d'un emprisonnement de six mois; la récidive sera punie d'un emprisonnement d'un à trois ans. (Loi belge du 28 septembre 1816.)

(2) Lois des 17 et 26 mai 1819, art. 2, 3, 4, 5 et suiv., et le tit. 2 de la loi du 25 mars 1822.

(3) F. Rauter, Traité de droit criminel, édit. de la Société Typographique Belge, no 502.

(4) Cass., 22 juin 1813.

(5) * Il semblerait résulter des arrêts cités dans la note précédente, qu'il suffit qu'une dénonciation soit fausse pour qu'elle soit réputée calomnieuse; mais il est au contraire incontestable que la fausseté de la dénonciation n'emporte pas nécessairement le caractère de calomnie la Cour de cassation a formellement jugé, le 30 déc. 1813, qu'une dénonciation juridique ne doit être regardée comme calomnieuse que lorsqu'elle a été faite de mauvaise foi, à dessein de nuire, ou du moins, lorsqu'elle a été téméraire et indiscrète. (D. 9, 23; S., 14, 129; Br. cass., 15 nov. 1822, J. de B. 1822, 2, 48; Br., 1er juin 1833, J. de B., 1854, 461. Il peut y avoir dénonciation calomnieuse, lors même qu'aucun fait précis n'est imputé à la personne dénoncée, Br. cass., 26 novembre 1821, J. de B. 1821, 2, 72.)

Au surplus, le délit de dénonciation calomnieuse prévu et puni par l'art. 375 C. p., est essentiellement différent du délit de calomnie prévu et puni par les art. 367 et suiv. du même code, et du délit de diffamation prévu et puni par les art. 1, 15 et 15 de la loi du 17 mai 1819. (Br. cass., 9 avril 1829, J. de B., 1829, 1, 272.) L'art. 373 C. p. suppose qu'il a été fait devant les officiers de police administrative ou judiciaire une dénonciation de faits passibles de répression, et ne permet pas que la dénonciation soit recherchée avant que le mérite de la dénonciation ait été apprécié par la justice répressive elle-même. Rejet, 25 fév. 1826, (S. 26, 367.) - Duvergier. Liége, Cass., 30 juill, 1852, J. du 19e s., 1832, 3, 285. Mais voyez Rauter, no 502, in fine.

(6) Art. 4 de la loi du 3 sept. 1807.

(7) Cass., 22 nov. 1811. D. 28, 24; S. 17, 1, 24.

(8) * Il a été décidé que l'habitude d'usure ne résulte pas seulement de stipulations d'intérêts usuraires, elle résulte aussi de perceptions d'intérêts usuraires déjà stipulés.-Cass., 25 fév. 1826. (S., 26, 158.) Cependant on peut induire d'un arrêt du 4 mars 1826 (S., 26, 361), que les perceptions successives d'intérêts usuraires d'un seul et même prêt ne constituent pas l'habitude d'usure. -Duvergier. Mais voy. S., 27, 2, 189.

(9) Chardon, Traité du Dol et de la Fraude, édit.Tarlier, no 499, pense que deux faits ne suffiraient pas; car l'habitude, dit-il, est plus que la récidive; l'habitude peut exister lors même qu'un seul individu a été victime de l'usure. Rauter, no 433,

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