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comte d'Huntingdon, négocier avec Lancastre, et décida de se retirer dans le château de Conway, sur le bord de la mer, et à la dernière extrémité de s'embarquer pour Bordeaux.

que

le

Le duc reçut Huntingdon un genou en terre, et se servit habilement de cet otage. Il lui fit écrire une lettre à Richard, afin que celui-ci eût confiance dans le comte de Northumberland duc lui envoyait. Northumberland se rendit, lui huitième, auprès de Richard, demandant, pour seules conditions du traité qu'il proposait que, les biens de Lancastre lui fussent rendus, et qu'il fut fait grand juge d'Angleterre. Le roi accorda, et on fit jurer Northumberland sur l'évangile et sur l'eucharistie. On fixa le lieu de l'entrevue avec Lancastre dans le château de Flint, et, se disposant à s'y rendre, il dit à Northumberland : « C'est sur votre foi que je m'y engage: son» gez à vos sermens et au Dieu qui les a reçus. >> Le comte dit Très-cher seigneur, s'il est autre>>ment, faites de moi comme on doit faire d'ung » traître. » Il demanda ensuite la permission de prendre les devans pour faire apprêter à souper au roi et au duc dans le château de Flint, et ajouta : « Monsieur, hâtez-vous, car ils sont jà deux heures » ou près. >>

Richard monta à cheval, lui vingt-deuxième, et, arrivé au revers d'une montagne, il dit au comte de Sallisbury : « N'apercevez-vous point sur la val»lée des bannières et pennons?- Mon sicur, oui, » dit Sallisbury, et le cueur me dit mal. »>

Et au même instant ils virent venir à eux Northumberland suivi de onze des siens. « Sire, dit»>il, je viens au-devant de vous. — Et quels sont >> ces gens là-bas? dit le roi.-Je n'ai rien vu, ré– » pond le comte. » Sallisbury et l'évêque de Carlisle s'avancent alors pour lui montrer sa propre bannière, et le roi lui dit qu'il veut retourner à Conway. « Vous n'y retournerez point, dit le traî» tre Northumberland en saisissant la bride du » cheval du roi, et je vous conduirai au duc de >> Lancastre..... » Au même instant par un son de trompe parurent cent lances, et deux cents archers qui étaient embusqués ; ils entourèrent le roi et le conduisirent au château de Flint, où il fut retenu prisonnier avec sa suite (21 août 1399): de là il fut conduit à la tour de Londres, après avoir éprouvé les plus mauvais traitemens.

On publia bientôt qu'il n'était point fils du prince Noir (le prince de Galles), mais bien d'un des chanoines de Bordeaux, dont le palais de sa mère était toujours rempli. Richard fut abreuvé d'amertume dans sa prison. Le duc d'York, le comte de Rutland, Lancastre lui-même vinrent y insulter à son malheur. Vainement Richard demanda à voir un moment Isabelle : Lancastre lui dit que le conseil l'avait défendu. Enfin, poussé à bout par tous les ennuis dont on l'abreuvait, Richard réclama les lois de la chevalerie, et offrit de se battre seul contre quatre de ses accusateurs ou oppresseurs. Lancastre ne fit aucune réponse, et répandit le bruit que le roi venait d'abdiquer. Le parlement s'as

sembla (30 septembre 1399), et, sans être entendu, Richard fut condamné et déposé en ces termes : «< Richard de Bordeaux, qui fut nommé roi d'An» gleterre, est condamné à être en une prison royale, qu'il aura le meilleur pain et la meilleure >> viande qu'on pourra trouver pour or ne pour ar» gent, et s'il venait une noise de gens d'armes » pour lui secourir, il sera le premier qui mour>> rait. >>

C'était son arrêt de mort, car on conspira sans sa participation; on fut jusqu'à revêtir des ornemens royaux un de ses écuyers nommé Magdelain, qui avait quelque ressemblance avec son maître, pour entraîner le peuple. Mais le comte de Rutland, qui avait tour à tour servi et trahi Glocester, Richard et Lancastre, fut révéler au nouveau roi, Henri IV, la conspiration dont il était lui-même le chef. Les conjurés surpris furent défaits à Cirencester; le comte de Sallisbury et presque tous les partisans de Richard furent tués dans ce combat. On remarqua avec horreur le comte de Rutland portant au bout d'une lance et présentant à Henri la tête de lord Spencer son beau-frère et son complice dans la conspiration.

Richard, étroitement resserré alors dans le château de Ponte-Fract (Pontis Fracti), ne survécut pas long-temps à cette conjuration qu'il ignorait. Un chevalier, nommé Pierre Exton, suivi de sept assassins, entra dans la salle où le roi dînait. Il défend à l'écuyer qui servait le roi de goûter ses mets; car, dit-il, il ne mangera plus guères. Richard

gronde l'écuyer qui manque à ce cérémonial; celuici allègue la défense qu'Exton vient de lui faire de la part de Henri. Le roi perdant patience saisit un couteau de table qu'il avait sous la main, en frappe l'écuyer en lui disant avec fureur: « Va>>t-en au diable, toi et ton Lancastre. » Exton et ses sept soldats arrivent. Le roi repousse la table, s'élance sur les huit assaillans, arrache à l'un d'eux sa hache d'armes, en frappe rapidement plusieurs, et en un instant étend à ses pieds quatre de ces misérables. Exton, voyant les autres intimidės, se jette derrière le roi et lui assène sur la tête un coup violent qui le renverse: A donc, cria le roi, merci à Dieu! Exton lui porte un second coup.... Ainsi mourut le noble roi Richard!

(Extrait d'un ouvrage inédit intitulé: Esquisses, Souvenirs et Traditions, par le baron de MORTEMART-BOISSE.)

NOTICE

SUR

LES NOUVEAUX TROUBLES RELIGIEUX

DE

L'AFRIQUE OCCIDENTALE.

(Inédit.)

A M. le directeur de la Revue des deux
Mondes.

Monsieur

L'esprit de prosélytisme et de réforme religieuse qui fermente dans l'Afrique occidentale s'est récemment manifesté par de turbulens paroxismes.

Il y a deux ans déjà un prétendu mahdy s'est montré parmi les Félâns de la province de Toro : Mohhammed-ben-A'mar, consacrant sa mission par le meurtre de son propre fils, au jour de la fête des victimes, bouleversa le pays, et tour à tour

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