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signation était insuffisante, attendu que ses cliens se trouvaient dispersés dans une foule de villages. On en donna donc une seconde qui fut lue sur la place publique de chaque commune, à l'issue de la messe. A l'expiration du délai, l'avocat fit valoir la difficulté que les rats avaient à se rassembler, par suite de l'alerte donnée par le bruit de ce procès, aux chats, leurs ennemis, qui les attendaient sur tous les passages. Lorsque enfin, il eut épuisé toutes ses ressources, il s'en remit à l'humanité et à la justice du tribunal.

En 1266, un cochon fut brûlé vif à Fontenay-aux-Roses, par ordre des officiers de justice, pour avoir dévoré un enfant. En, 1386, un arrêté du juge de Falaise condamna une truie à avoir la patte droite et la tête tranchées, comme convaincue d'avoir causé la mort d'un enfant en lui déchirant la figure et le bras. L'exécution eut lieu sur la place de l'Hôtel-de-Ville, et coûta 10 sous 6 deniers. L'animal avait été préalablement couvert d'habits d'homme. En 1389, un cheval fut également condamné à mort à Dijon, pour avoir tué son maître. Du reste il n'est pas nécessaire de remonter à une époque aussi reculée, pour trouver quelque chose qui ait rapport à ce singulier usage. Gaspard Bailly, avocat à Chambéry, publia en 1668 un traité ex professo, sur les procès de ce genre, où il donne les formules d'assignation, de défense, de jugement, etc.

Parmi les manuscrits de la bibliothèque royale, il existe une condamnation portée par le juge de Savigny, en Bourgogne, contre une truie convaincue d'avoir, de complicité avec ses six marcassins, commis un homicide sur la personne d'un enfant de cinq ans, appelé Jean Martin. Voici quelques passages de cette pièce : « Après avoir con» sidéré le cas et entendu les témoins, avoir consulté les » usages et coutumes de Bourgogne, ayant Dieu devant »> nous, nous condamnons la truie de Jean Bailli à être » confisquée et livrée à l'exécuteur pour être pendue jusqu'à

» ce que mort s'ensuive. Quant aux jeunes gorets, comme il n'est pas prouvé suffisamment qu'ils aient participé au crime »> nous ajournons leur jugement, et consentons à ce qu'ils » soient remis audit Jean Bailli, à la charge par lui de les » livrer si leur culpabilité est prouvée. » Vient ensuite le procès-verbal de l'exécution, faite par le bourreau de Châlons-sur-Saône. Quant aux petits cochons, un jugement postérieur les renvoya entièrement des fins de la plainte.

Le parlement de Paris ne se montra pas plus sage à cet égard, que les juridictions provinciales. Un de ses arrêts, en 1604, condamna un âne à être pendu et brûlé, et antérieurement, en 1466, il avait confirmé une sentence du juge de Corbeil, prononçant peine de mort contre un homme et un cochon qui furent exécutés ensemble. On pourrait multiplier à l'infini de pareils exemples. Il est à remarquer, d'ailleurs, que lorsque les tribunaux s'occupaient de ces causes étranges, des législateurs rédigeaient sérieusement les ordonnances et les lois qui devaient leur servir de bases. Ainsi le code promulgué et observé en Sardaigne pendant le douzième siècle, ordonnait que tous les ânes surpris en maraude seraient mutilés. L.....

Album.

Vie de plusieurs personnages célèbres des temps anciens et modernes'. Plus généralement répandu à toutes les époques que le goût de l'histoire, celui des biographies particulières qui nous rapprochent des hommes célèbres, et nous dévoilent leur intérieur, semble avoir pris de nos jours une nouvelle extension, et cette circonstance est facile à expliquer. Aucune période n'avait vu, avant les trente dernières années qui viennent de s'écouler, un aussi grand nombre d'individus parvenir, par toutes sortes de voies, à une célébrité spontanée. Il était naturel de chercher à connaître et leurs titres et leur point de départ; et de là cette vogue des biographies qui, après avoir exploré notre époque, se sont généralisées. Quoi qu'il en soit, c'est à ce goût général partagé par M. Walckenaër, membre de l'Institut, qu'est dû l'ouvrage que nous avons sous les yeux. Il est le résultat de la réunion d'articles composés pour accompagner diverses éditions d'auteurs, ou pour la Biographie universelle, et auxquels le savant académicien donne plus d'extension. Le second volume, consacré aux modernes, nous a paru devoir plus particulièrement mériter l'intérêt des lecteurs. L.........

par

Mémoires curieux, anecdotes secrètes, histoires inédites; A. Châteauneuf 2. Il y a des scènes piquantes dans

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ces mémoires, des documens sur des noms illustres ignorés jusqu'à ce jour, et des renseignemens précieux qui dévoilent l'insolence de petits êtres qui se sont crus de grands personnages, parce que la faveur et leur bassesse les avaient élevés. L'auteur les a remis à leur place; c'est aux familles des grands hommes, des artistes de distinction dont M. Chateauneuf est l'historien, à savoir dignement l'apprécier. Il y a de tout dans cet ouvragé historique, des pages sérieuses et d'autres plaisantes : nous allons en citer une de ces der

nières.

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« Ludovic de Piles, rejeton de la famille de Fortia, était aimé de Louis XIII; il tua un jour en duel le fils de Malherbe; ce poète se vengea par une satire. Voyageant avec son frère, il entra, à Valence, dans une hôtellerie. On leur dit qu'il ne restait que du pain et des œufs. Cependant ils remarquent une broche bien garnie, souper réservé à quatre officiers. <«< Mais il y a des viandes pour huit; ne pouvez-vous prier ces messieurs de partager ce repas avec deux voyageurs mourant de fatigue et de faim? » L'hôte va, et revient avec un refus. Ludovic n'en dormit pas, et put entendre de son lit les railleries des quatre convives. Cependant il part. A un quart de lieue il dit à son frère: « J'ai oublié ma bourse; je te rejoindrai à la dînée. » Il éveille les quatre officiers: « Je suis, leur dit-il, un des voyageurs à qui vous avez refusé peu poliment de céder le superflu d'un grand souper. Je n'ai rien à dire. Il n'en est pas de même des propos que j'ai entendus: j'en demande raison à tous les quatre. » Ils descendent, et Ludovic met l'épée à la main tour à tour avec les quatre officiers, qu'il tue sur la place; il rejoint son frère, et ne lui parle de rien. Celui-ci, dès son arrivée à Paris, fait une visite au cardinal Mazarin, qui lui dit d'un air de mystère : « Ludovic est-il ici? Oui, monseigneur. Est-ce qu'il a perdu la tête, après ce qui lui est arrivé à Valence? - Quoi donc ?

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-

Vous n'en savez rien?

Non, en vérité.

Vous ne

savez pas qu'il a tué quatre officiers? - Je ne l'ai pas quitté de tout le voyage. Je vous le dis, moi, et j'en suis sûr. -Ah! mon Dieu, je me rappelle,..... il m'a quitté pour aller chercher sa bourse. Eh bien! c'était pour ce duel: dites-lui de ne pas se montrer avant d'être assuré que cette affaire n'aura pas de suite.

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M. Châteauneuf est auteur de plusieurs autres ouvrages intéressans, entre autres de l'Ilistoire des grands capitaines, qui ont commandé en chef les armées de la république et de l'empire, dont on fait le plus grand éloge. Nous avons lu des articles de louanges bien méritées, adressées à l'auteur par MM. de Boufflers, Esménard l'aîné, Palissot, Fontanes, Salgues, Jondot, Malte-Brun, etc. Après des noms comme ceux-ci, de quel poids seraient les nôtres ! Dans le petit nombre des ouvrages de cet auteur que nous avons lus, nous avons remarqué une énergie de pensées remarquable, une plume exercée et surtout une grande franchise de critique..... C'est tout naturel!..... M. Châteauneuf, après trente-cinq années de travaux, a été négligé des ministres; il s'est plaint d'eux, et ne les a jamais importunés. Il a donc, pour écrire, toute l'indépendance que les faveurs ministérielles ravissent aux écrivains qui les reçoivent.

E.

Françoise de Rimini, drame en cinq actes et en vers; par M. Gustave Drouineau Deux auteurs, avant M. Drouineau, s'étaient essayés sur ce sujet. Silvio Pellico, poète italien, et M. Constant Bérier, dont la pièce obtint quelque succès, il y a trois ou quatre ans, à l'Odéon. M. Drouincau a emprunté quelque chose au premier; mais

1

Timothée Dehay, libraire, rue Vivienne, no 2 (bis). Paris,

1830.

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