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Anciennes Chambres des comptes.

En 1386, Philippe le Hardi, voulant organiser le contrôle de la comptabilité de ses finances dans les Flandres, institua, à Lille, une Chambre des comptes.

Cette Chambre eut pour mission de constater l'état des domaines, des moulins, des étangs, bois, rentes, amendes, exploits de justice, accises des villes, monnaies et autres droits.

Elle devait améliorer les domaines, faire rentrer les créances arriérées sans procéder « trop rigoureusement contre les pauvres sujets ».

Les lettres patentes lui faisaient surtout un devoir d'exiger que tous les baillis, receveurs généraux et particuliers qui n'avaient pas produit la justification de l'emploi des deniers qu'ils avaient reçus, lui rendissent compte de leur gestion.

L'habitude de ne pas rendre compte était sans doute invétérée, les abus nombreux, et la Chambre dut rencontrer de grandes difficultés dans l'accomplissement de sa mission, puisque le souverain, par ordonnance du 23 juin 1402, commina des peines contre les comptables de ses finances.

Ainsi, les receveurs et baillis, qui avaient porté en compte deux fois la même dépense, étaient frappés d'une amende égale au double de la somme qu'ils avaient voulu « s'efforcer de prendre ».

La même amende frappait les receveurs qui inscrivaient, dans leurs comptes, des sommes qui en avaient été rayées antérieurement.

Toute omission de recette était punie d'une amende égale au double de la somme omise.

Par ordonnance, sans date, Philippe le Hardi confirma les instructions précédentes, les compléta en traçant longuement les devoirs des membres de la Chambre et les obligations des comptables.

En 1414, Jean sans Peur accorda, aux membres de la Cour, exemption « de guet et de garde ». La Chambre jouissait encore d'autres privilèges et avait probablement droit à une indemnité d'habillement en 1419 elle

expose que, depuis son installation, ses membres avaient reçu chaque année « robe en don pour eulx vêtir et plus honorablement estre en leur » service ». Le souverain fit droit à cette requête, « vu leurs bons services » et les petits gages dont ils jouissaient ». Il accorda 50 francs d'or à chacun des maîtres et 30 francs au clerc.

Philippe le Bon accorda deux « bonniers » de bois pris en la forêt de Nieppe, pour le chauffage des membres de la Chambre et exempta ces derniers de toutes maltôtes, tonlieux et autres redevances sur les denrées et provisions.

Philippe le Bon étendit la juridiction de la Chambre de Lille aux comtés de Namur, de Hainaut, de Ponthière et aux villes sur la Somme.

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En 1404, Antoine de Bourgogne institua la Chambre des comptes du Brabant et, en 1412, ordonna que « chacun en quelque estat ou condition qu'il soit, devait, en rendant compte, affirmer sous serment qu'il n'avait rien » célé et que toutes les dépenses renseignées avaient été réellement faites ». Philippe le Bon réunit la Chambre des comptes de La Haye à celle de Bruxelles et plaça le Luxembourg sous sa juridiction.

Charles le Téméraire apporta de notables changements à l'organisation des Chambres, réunit les Chambres de Lille et de Bruxelles et désigna Malines comme siège des Chambres fusionnées.

La duchesse Marie confirma les pouvoirs de la Chambre de Malines, mais bientôt, sous la pression des États de toutes les provinces, elle décréta le rétablissement des Chambres de La Haye, Lille et Bruxelles.

Philippe le Beau voulut aussi centraliser le contrôle des finances. Il ordonna aux trois Chambres de se réunir à Malines. Les États de Brabant opposèrent la plus vive résistance à l'exécution de cet ordre. Mais c'est en vain qu'ils invoquèrent leurs privilèges de Joyeuse Entrée, c'est en vain qu'ils firent défense à la Chambre de Bruxelles d'obéir au souverain.

L'archiduc maintint son ordre et écrivit à ses maîtres de comptes : « Vous » n'êtes pas à eux, mais à nous, ils n'ont aucun pouvoir sur vous. »

Les Chambres obéirent et Malines devint de nouveau le centre du contrôle des finances pour peu de temps, il est vrai. Un an après, un édit rétablit l'ancien état de choses.

Charles-Quint étendit la juridiction de la Chambre de Bruxelles au Luxembourg, à Anvers et au pays d'Outre-Meuse.

En 1545 il rendit deux ordonnances précisant la forme et les délais endéans lesquels les comptes devaient être rendus; les amendes et les peines à prononcer contre les comptables en retard ou fautifs. Elles défendirent notamment, aux membres des Chambres, d'assister aux délibérations sur les comptes des parents et amis, de recevoir des dons, d'exploiter des biens du domaine, d'être receveurs pour compte de particuliers. Elles interdirent aussi de louer un bien à main ferme, lorsque le revenu de ce bien s'élevait à plus de 30 florins par année.

En 1577, lors de la révolte des États généraux, Don Juan transféra à Namur la Chambre des comptes de Bruxelles.

Les États généraux établirent une Chambre dont la juridiction s'étendit au Brabant, au Luxembourg et au pays d'Outre-Meuse.

La Flandre, de son côté, ne voulant plus reconnaitre l'autorité de la Chambre de Lille, établit une Chambre des comptes à Gand.

A la suite de la pacification de 1585, les Chambres de Bruxelles et de Lille furent reconstituées et reprirent leur ancienne juridiction.

Les instructions de 1614, à la Chambre de Lille, sont précises. Elles déterminent la forme des comptes, l'ordre et la nature des travaux de la Chambre. Elles chargent le président de tenir deux registres : le premier renfermant les ordres donnés tant par les archiducs que par le Conseil des finances, le second indiquant la distribution du travail.

Elles enjoignent aussi au président de veiller à ce que les membres de la Chambre s'absentent rarement et lui laissent le soin de faire délivrer aux comptables, après la prestation de serment, les instructions contenant les points qu'ils doivent observer.

Le dernier maître ordinaire devait enregistrer les cautions données par les officiers comptables en garantie de leur gestion.

Les instructions rappellent aussi que les dépenses extraordinaires ne peuvent être admises en compte sans le visa du prince ou du Conseil des finances.

L'Infante Isabelle dut prendre certaines mesures disciplinaires contre la

Chambre de Lille, qui n'apportait pas toute la célérité désirable à l'expédition des affaires.

Elle décréta des retenues sur les gages des membres qui ne seraient présents aux heures fixées pour les séances.

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Elle frappa d'une amende de 100 florins les comptables qui ne rendaient pas compte dans le délai de six mois; d'une amende de 200 florins, les retardataires d'un an; et si malgré ces peines, le retard se prolongeait encore de trois mois, le comptable devait être appréhendé et retenu en prison à ses frais, jusqu'à ce qu'il eût dressé et rendu son compte.

Après la prise de Lille par les Français, la Chambre des comptes de cette ville fut transférée à Bruges.

En 1681, Charles Il réunit, à Bruxelles, les Chambres de Bruges et de Ruremonde. Les deux corps siégèrent dans la même maison mais eurent cependant un président distinct.

Quelques années après, la Chambre de Gueldre fut détachée de la Chambre de Flandre et réunie à celle du Brabant. Cette dernière protesta contre cette décision. Pour toute réponse, le gouverneur général enjoignit d'exécuter les ordres qu'il avait donnés et ce « sans plus de réplique ».

En 1702, sous Philippe V, nouveau changement. Fusion des Chambres de Brabant et de Flandre.

Quatre ans après, reconstitution des Chambres de Brabant et de Flandre. Les souverains avaient toujours tenté de centraliser le contrôle et la comptabilité. Ils se heurtèrent constamment au pouvoir local qui, lui, voulait conserver ses franchises et ses privilèges.

Aussi, lorsque le pouvoir devint plus fort, lorsqu'il eut moins à compter avec les états des provinces, s'empressa-t-il de réaliser son projet.

En 1735, quelques années après la réunion des Pays-Bas à la maison d'Autriche, les Chambres furent définitivement fusionnées en une seule qui eut son siège à Bruxelles.

Cependant, pour atténuer un peu la gravité de la décision, la Chambre unique fut divisée en deux bureaux ayant pour attribution: l'un, les affaires de l'ancienne Chambre de Flandre; l'autre, les affaires de l'ancienne Chambre de Brabant.

En 1746, après la prise de Bruxelles, la Chambre se retira d'abord à Anvers, puis à Aix-la-Chapelle, et ce fut seulement en janvier 1749 qu'elle reprit ses séances à Bruxelles.

En 1787, Joseph II décréta une réorganisation complète de la Chambre des comptes.

Les bases de cette réorganisation méritent un sérieux examen, car, si nous ne sommes pas encore arrivés au contrôle absolu, à l'indépendance complète de la Chambre des comptes, nous devons cependant reconnaître que c'est à partir de cette date que la théorie d'un contrôle sérieux fut établie et considérer les décrets de Joseph II comme un pas décisif fait en avant dans la voie du progrès.

Aux termes de ces décrets, les attributions de la Chambre des comptes embrassèrent le contrôle et la comptabilité des revenus royaux, des revenus des administrations communales, provinciales, des fonds de religion, des recettes et des dépenses du chef des fondations.

La vérification des rôles de douane, des comptes des fonds de religion et de ceux des administrations, fut enlevée au bureau des régies et aux commissaires du Gouvernement et confiée à la Chambre des comptes.

La Chambre fut aussi chargée « de déterrer dans les actes des dernières >> vingt ou trente années, de quoi éclaircir les parties obscurcies des revenus >> domaniaux ».

Par contre, les décrets enlevèrent à la Chambre la garde des cautions des comptables, lui réservant toutefois le pouvoir d'attester leur validité ou suffisance.

La Chambre fut divisée en sept départements.

On peut se rendre un compte exact de la sphère d'action de la Chambre, en relevant les attributions de chacun de ces départements.

Le premier avait pour tâche la comptabilité et le contrôle du revenu de l'Empereur, la surveillance des biens de la Société jésuitique, de l'Hôtel des monnaies et des deux loteries.

Le second département était chargé de la comptabilité des domaines et des biens-fonds provenant des couvents supprimés et des fondations.

Le contrôle des douanes incombait au troisième. Il devait vérifier non seu

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